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ComplexitéS

de Pascale Hadermann (Éditeur de volume) Alex Housen (Éditeur de volume) Dan Van Raemdonck (Éditeur de volume)
©2017 Collections 208 Pages
Série: GRAMM-R, Volume 35

Résumé

Au cours des dernières décennies, le concept de complexité a bénéficié d’un intérêt croissant et ce, dans un large éventail de disciplines scientifiques, dont les sciences du langage. Des linguistes, s’inscrivant dans des courants théoriques divers, ont souligné son importance pour le développement de mesures fiables et objectives de la performance, de la maîtrise ou encore de l’évolution linguistique.
En français, la notion de complexité connaît un essor important avec la naissance de la grammaire scolaire au XIXe siècle et les études des rapports logiques au sein de la phrase dite « complexe ». Dans des descriptions portant aussi bien sur le français L1 que L2, la complexité réfère donc souvent à la construction d’unités phrastiques. Elle en arrive à désigner la constitution interne de syntagmes ou de séquences de mots, et certaines approches l’appliquent même à la caractérisation de concepts descriptifs. L’objectif de cet ouvrage est précisément de montrer l’élasticité du concept de complexité.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur/l’éditeur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Présentation (Pascale Hadermann / Alex Housen / Dan Van Raemdonck)
  • Première partie. Complexité des structures
  • Une analyse conjointe des syntagmes nominaux et verbaux complexes (Jean-Marcel Léard / Sébastien Marengo)
  • Essai d’analyse de phrases complexes (Marc Wilmet)
  • Une minute de plus, et Michel était parti : une construction coordonnée ? Ça dépend vraiment du point de vue (Audrey Roig / Dan Van Raemdonck)
  • La complexité syntaxique dans les productions écrites d’étudiants de français finnophones. Comparaison avec des étudiants néerlandophones (Eva Havu)
  • Vers l’énoncé complexe en français langue étrangère : quelques voies de développement (Daniel Véronique)
  • Deuxième partie. Complexité des Marqueurs
  • Les fondements sémantico-syntaxiques de la poly-fonctionnalité discursive du marqueur illocutionnaire : j’avoue que (Olga Galatanu)
  • De la complexité de la personne ou Sur l’irréductibilité de JE et TU (Georges Kleiber)
  • Troisième partie. Complexité des conceptualisations et des concepts
  • Le chien court devant versus Le cerf avance. Der Einfluss der L1 Deutsch und der L1 Spanisch auf den Erwerb von Bewegungsereignissen im Französischen (Stefanie Goldschmitt)
  • Sur la notion de généralisation (Olga Inkova / Émilio Manzotti)
  • Titres de la collection

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Présentation

Pascale HADERMANN*, ALEX HOUSEN**,
Dan VAN RAEMDONCK***

*Universiteit Gent
**Vrije Universiteit Brussel
***Université libre de Bruxelles, Vrije Universiteit Brussel

Au cours des dernières décennies, le concept de complexité a bénéficié d’un intérêt croissant, et ce, dans un large éventail de disciplines scientifiques, dont les sciences du langage (voir Mitchell 2009). Des linguistes, s’inscrivant dans des courants théoriques divers, ont souligné son importance pour le développement de mesures fiables et objectives de la performance, de la maîtrise ou encore du développement linguistique. Certaines approches de la complexité en langue s’appuient sur des théories ayant pour objectif la description de structures linguistiques et les évolutions qu’elles subissent, de même que la comparaison de systèmes linguistiques dans des variétés ou dans des langues différentes (entre autres : Waldrop 1992, Simon 1996, Dahl 2004, Gell-Mann 2005, Hawkins 2005, Friederici et al. 2006, Risager 2006, Boogert et al. 2008, Larsen-Freeman 2008, Liu 2008, Riecker et al. 2008, Lee et al. 2009, Faraclas & Klein 2009, Givόn 2009, Mitchell 2009, Pellegrino et al. 2009, Cyran 2010, Trudgill 2011, McWhorter 2011, Gibson 1998, Changizi & Shimojo 2005, Papagno & Cecchetto 2006, Lee et al. 2007, Suh et al. 2007, Miestamo et al. 2008, Givón & Shibatani 2009, Sampson et al. 2009 et Culicover 2013). Ces dernières approches, à visée clairement théorique, remettent parfois en cause l’un des axiomes les plus établis de la linguistique contemporaine, l’hypothèse de « l’équi-complexité », selon laquelle toutes les langues sont tout aussi complexes : une complexité élevée dans un domaine linguistique particulier serait compensée par une plus grande simplicité dans un autre domaine.

Cependant, des linguistes typologues (McWhorter 2001, Dahl 2004, Shosted 2006) considèrent que les langues se caractérisent toutes par des niveaux de complexité différents, qui ne sont d’ailleurs pas immuables. Ainsi, les situations de contact linguistique et d’acquisition sont censées ← 9 | 10 → affecter la complexité des langues en question. La position la plus élaborée, qui est présentée par McWorter (2008) et par Trudgill (2011) (voir aussi Lupyan & Dale 2010 ; pour les critiques et les nuances de cette position, voir par exemple Rice 2004, Campbell & Poser 2008), s’articule autour de quatre affirmations : (i) peu de contact (par exemple l’isolement) tend à préserver la complexité ; (ii) l’acquisition (précoce) de la langue première par les enfants tend à augmenter la complexité ; (iii) des variétés linguistiques parlées dans les sociétés très soudées et fermées ont tendance à plus se complexifier ; (iv) l’acquisition d’une langue seconde par les adultes tend à réduire la complexité.

Le concept de complexité a aussi une longue histoire dans les domaines de la linguistique appliquée et de la recherche en acquisition du langage. Déjà dans les années 1970 et 1980, les notions de complexification et de simplification apparaissaient à l’avant-plan dans les premiers modèles théoriques sur l’apprentissage des langues secondes (par exemple Andersen 1983, Schumann 1978 ; voir aussi Meisel et al. 1981, Tickoo 1993, Leow 1997). Des linguistes tels que John Schuman et Roger Andersen ont comparé cet apprentissage aux processus de pidginisation et de créolisation, avec un processus de complexification progressive, qui consiste en le développement à partir d’une variété d’interlangue lexicalement et structurellement simple (le basilecte) d’une variété de de plus en plus complexe de la langue cible (l’acrolecte). De manière analogue, les recherches menées au sein du projet du ESF (Perdue 1993) se sont appuyées sur les notions de complexification et de simplification pour décrire le développement et la structure de la variété de base et les stades parcourus ultérieurement par des apprenants au-delà de cette variété de base (cf. Klein 1997).

Dans les années 1990, Skehan (1989), se fondant sur des travaux antérieurs – entre autres de Brumfit (1984) –, a proposé un modèle d’acquisition pour la L2 qui considère la complexité comme l’une des trois dimensions de base (avec la précision et la fluidité, en anglais : CAF pour complexity, accuracy, fluidity) à l’aide desquelles la performance, la maîtrise et le développement des apprenants L2 pourraient être appréhendés. La complexité en L2 est désormais définie comme référant à l’ensemble de formes (par exemple éléments, structures, schémas, règles) à la disposition de l’apprenant et au degré de sophistication de ces formes (Wolfe-Quintero et al. 1998 : 69, 101 ; Ortega 2003 : 492).

Dans le domaine du français, la notion de complexité connaît un essor important avec la naissance de la grammaire scolaire au XIXe siècle et les études des rapports logiques au sein de la phrase dite « complexe ». Dans des descriptions du français, portant aussi bien sur le français L1 que L2, la complexité réfère donc souvent à la construction d’unités ← 10 | 11 → phrastiques. Elle en arrive à désigner la constitution interne de syntagmes ou de séquences de mots, et certaines approches l’appliquent même à la caractérisation de concepts descriptifs. L’objectif de cet ouvrage est précisément de montrer l’élasticité du concept de « complexité » à travers neuf contributions qui s’articulent respectivement autour des axes suivants :

i. la complexité des structures, syntagmatiques (Jean-Marcel Léard et Sébastien Marengo, Daniel Véronique) et phrastiques (Marc Wilmet, Audrey Roig et Dan Van Raemdonck), tant en français L1 (Jean-Marcel Léard et Sébastien Marengo, Marc Wilmet, Audrey Roig et Dan Van Raemdonck) qu’en français L2 (Eva Havu, Daniel Véronique) ;

ii. la complexité des marqueurs en français L1 (Olga Galatanu, Georges Kleiber) ;

iii. la complexité des conceptualisations et des concepts en français L1 et L2 (Olga Inkova et Émilio Manzotti, Stefanie Goldschmitt).

Sous-jacente à ces axes se trouve la figure de Michel Pierrard, à qui cet ouvrage veut rendre hommage. Après ses études de Philologie Romane, Michel Pierrard s’attelle, sous la direction de Marc Wilmet, à la rédaction d’une thèse de doctorat portant sur la relative sans antécédent, qu’il soutiendra à la Vrije Universiteit Brussel en 1983 et dont il extraira un livre, publié en 19881. À partir de l’existence d’un paradoxe terminologique (relative sans antécédent), cette recherche donne lieu à un aperçu critique de la manière dont les grammaires appréhendent la notion de relativisation et, plus généralement, de subordination. Elle inaugure un ensemble impressionnant de travaux sur la complexité de la connexion propositionnelle, tant au niveau de la nature même des mécanismes de liaison que dans le domaine du marquage de cette liaison. Très vite Michel Pierrard étendra ses réflexions théoriques du français L1 au français L2, où il considère la complexité comme une des dimensions possibles du processus d’appropriation langagière. De même, dans les nombreux cours qu’il a donnés à l’université de Bruxelles, ainsi que dans d’autres universités (Aix-en-Provence, Helsinki, Nantes, Sherbrooke, etc.), son objectif a toujours été de sensibiliser les étudiants à la complexité du français, que ce soit au niveau de son analyse et de sa description, de son appropriation, de son évolution ou encore de son contact avec d’autres systèmes linguistiques. C’est avec enthousiasme et persévérance qu’il a formé plusieurs doctorants, et son goût pour le partage de connaissances a fait de lui une figure clé dans de nombreux échanges avec des collègues internes et externes à l’université de Bruxelles, échanges lors desquels il ← 11 | 12 → incite à l’esprit critique, à l’approfondissement et à la concrétisation de la réflexion théorique. Ce volume se veut en être le témoignage.

Bibliographie

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Pellegrino F. et al. (dir.) (2009), Approaches to phonological complexity, Berlin, Mouton de Gruyter.

Résumé des informations

Pages
208
Année
2017
ISBN (PDF)
9782807602069
ISBN (ePUB)
9782807602076
ISBN (MOBI)
9782807602083
ISBN (Broché)
9782807602052
Langue
français
Date de parution
2018 (Octobre)
Mots clés
complexité sciences du langage Pierrard grammaire scolaire français L1 français L2
Published
Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2016. 208 p.

Notes biographiques

Pascale Hadermann (Éditeur de volume) Alex Housen (Éditeur de volume) Dan Van Raemdonck (Éditeur de volume)

Pascale Hadermann, docteur en philosophie et lettres de la Vrije Universiteit Brussel (VUB), est professeure en linguistique française et en didactique du français langue étrangère à l’Université de Gand. Ses recherches concernent plusieurs domaines de la linguistique et de la didactique du français : connexion interprédicationnelle, expressions scalaires, cohérence discursive, emploi des modes en FLE, TICe et FLE. Alex Housen, docteur en philosophie et lettres de la VUB, est professeur en linguistique anglaise, linguistique appliquée et en multilinguisme à la VUB. Ses recherches portent sur l’acquisition de la morphologie verbale dans une langue seconde, sur la complexité en acquisition des langues étrangères et sur le multilinguisme. Dan Van Raemdonck, docteur en Philosophie et Lettres de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), est professeur de linguistique française (langue maternelle et langue étrangère) à l’ULB et à la VUB. Ses recherches portent sur la syntaxe de la phrase française et visent à développer une linguistique applicable.

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