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Les droits sociaux et le processus de constitutionnalisation de l'Union Européenne

de Ismail Hakki Musa (Auteur)
©2021 Monographies 822 Pages

Résumé

La Constitution economique est l’ensemble des principes qui gouvernent le developpement economique de l’UE. L’etude de cette Constitution met en evidence un developpement que les peres fondateurs n’avaient probablement pas prevu : pour corriger les distorsions qui sont issues de la mise en oeuvre de la constitution economique, il faut egalement formuler une politique sociale. La mise en oeuvre de celle-ci nous conduit inevitablement a l’apparition des droits fondamentaux de nature sociale. L’interrelation des droits fondamentaux dans le processus de constitutionnalisation revet un caractere politique. L’etude de ce processus est revelatrice de la place predominante qu’occupent les droits fondamentaux, a l’instar des constitutions etatiques. L’UE est caracterisee par le fait qu’elle est une ≪ communaute politique ≫ composee d’Etats et de citoyens, sans espace public au sens classique, ni sentiment d’appartenance affirme. La citoyennete sociale, comme concretisation des droits economiques et sociaux fondamentaux pour les citoyens europeens, contribue a l’evidence a l’affirmation de cet espace public europeen en devenir.

Table des matières

  • Cover
  • Title
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Dédicace
  • Remerciements
  • Préface
  • Titre Les droits sociaux et le processus de constitutionnalisation de l’Union européenne
  • Title Social rights and the process of constitutionalisation of the European Union
  • Sommaire
  • Table des matières
  • Liste des principales abréviations
  • INTRODUCTION GENERALE
  • PARTIE 1: LA CONSTITUTION ECONOMIQUE ET LES DROITS SOCIAUX
  • TITRE 1: LA CONSTITUTION ECONOMIQUE ET SON DEVELOPPEMENT SOCIAL
  • CHAPITRE 1: LE FONCTIONNEMENT DE LA CONSTITUTION ECONOMIQUE EUROPEENNE
  • Section 1: Le Traité de Rome en tant que Constitution économique de l’Union européenne
  • § 1: Principe constitutionnel de base : la notion d’intégration
  • § 2: La Constitution économique et le Traité de Rome
  • A) Des objectifs globaux ou lointains
  • B) Les instruments de la Constitution économique
  • 1. Le Marché Commun
  • a L’Union douanière comme première étape de l’intégration
  • b La politique commerciale commune
  • c La nature du Marché Commun
  • 2. Le rapprochement des politiques économiques
  • C) Les principes structurels régissant le fonctionnement de la Constitution économique
  • 1. Le Principe de légalité
  • 2. Le principe d’égalité
  • 3. Le principe de non-discrimination
  • 4. Le principe de libre concurrence
  • 5. Le principe de libre exercice des activités économiques
  • 6. Le Principe social
  • 7. Le principe de solidarité
  • D) La structure institutionnelle créée par la Constitution économique
  • Section 2: Les modifications introduites dans la Constitution économique par l’Acte Unique Européen
  • § 1: La nouvelle dimension de l’intégration par le marché : le Marché intérieur
  • § 2: Un nouveau moyen rapprochement des politiques économiques : le principe de la reconnaissance mutuelle
  • § 3: La recherche et le développement technologique
  • § 4: La cohésion économique et sociale
  • Section 3: La Constitution économique et le Traité sur l’Union européenne
  • § 1: La reformulation des objectifs économiques et des principes dans le cadre de la Constitution économique européenne
  • A) Les nouveaux objectifs de la Constitution économique européenne
  • 1. Le développement harmonieux et équilibré des activités économiques
  • 2. Le niveau d’emploi et de protection sociale élevé
  • 3. Le progrès économique et social équilibré
  • 4. Une approche plus dynamique de la cohésion économique et sociale
  • B) L’enrichissement des principes de la Constitution économique européenne avec le Traité sur l’Union européenne : le principe de subsidiarité
  • 1. Les fondements du principe de subsidiarité
  • 2. La portée du principe de subsidiarité
  • 3. Le contrôle du principe de subsidiarité
  • § 2: Les instruments de la Constitution économique d’après le Traité sur l’Union européenne : du Marché commun à l’Union économique et monétaire
  • A) Les raisons de l’Union économique et monétaire.
  • B) Le contenu de l’Union économique et monétaire
  • C) La réalisation de l’Union économique et monétaire
  • 1. Les étapes de l’Union économique et monétaire
  • 2. Les conditions de participation à l’Union monétaire
  • 3. Le rôle central du Marché unique
  • D) La discipline budgétaire dans le cadre de l’UEM
  • E) Les questions soulevées par l’UEM à la réforme du Pacte de stabilité
  • 1. Les questions soulevées par l’UEM
  • 2. La réforme du Pacte de stabilité comme nécessité d’ajustement de la Constitution économique
  • 3. La Constitutionnalisation de la politique économique et monétaire
  • Conclusion du chapitre 1
  • CHAPITRE 2: LA POLITIQUE SOCIALE COMME PROLONGEMENT INELUCTABLE DE LA CONSTITUTION ECONOMIQUE EUROPEENNE
  • Section 1: L’économie comme fondement du social : la dimension sociale du Marché Commun
  • § 1: La politique sociale dans le Traité de Rome
  • A) Les compétences sociales dans le Traité de Rome
  • 1. La politique sociale sur la base des compétences générales.
  • 2. La politique sociale sur la base des compétences sociales subsidiaires
  • B) Le libre accès à l’emploi comme un élément de définition du statut des travailleurs communautaires
  • 1. Principes fondamentaux
  • a La notion générale de « travailleur »
  • b La liberté de circulation des travailleurs salariés
  • c La libre circulation des travailleurs non-salariés
  • (i) Le droit d’établissement et la reconnaissance des diplômes
  • (ii) La libre prestation des services
  • 2. La mise en œuvre du principe de non-discrimination
  • a La suppression des restrictions entravant le libre accès à l’emploi
  • b L’égalité de traitement dans les conditions de travail, y compris les avantages annexes
  • 3. Les restrictions propres aux emplois dans l’administration publique.
  • C) L’accès au territoire des Etats membres comme une conséquence du libre accès à l’emploi
  • 1. La liberté de déplacement des travailleurs communautaires
  • 2. Le droit des travailleurs communautaires de demeurer
  • 3. L’exercice du droit à la libre circulation des membres de la famille du travailleur/citoyen
  • a Le droit d’accès pour la famille du travailleur communautaire
  • b Le séjour des membres de la famille
  • 4. Mesures nationales de restriction des droits de libre circulation
  • 5. La coordination des systèmes de sécurité sociale comme garantie de la liberté de circulation
  • a Les règles régissant la coordination
  • b L’extension du champ d’application du Règlement 1408/71
  • § 2: Les impulsions engendrées par le Programme d’action sociale
  • A) L’harmonisation de la protection des travailleurs
  • B) L ’harmonisation sociale des droits de la femme au travail: l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes
  • 1. L’égalité des rémunérations.
  • a La notion d’égalité des rémunérations
  • b L’égalité des rémunérations expliquée
  • 2. De l’égalité des rémunérations à l’égalité de traitement : établissement d’un cadre général pour lutter contre les discriminations
  • a Le cadre général
  • b L’interdiction des discriminations directes
  • c L’interdiction des discriminations indirectes
  • d Les exceptions à l’interdiction des discriminations.
  • Section 2: La dimension sociale du Marché intérieur : la politique sociale de l’Acte unique européen au Traité de Lisbonne
  • § 1: Redéfinition des compétences sociales de la Communauté
  • A) L’esprit de l’Acte unique européen.
  • B) Les compétences sociales nécessaires à la réalisation du Marché intérieur
  • C) Des compétences sociales explicites
  • 1. La santé, la sécurité et l’hygiène en milieu de travail
  • 2. Le dialogue social
  • D) La modification du système institutionnel dans le cadre du rapprochement des législations
  • § 2: Le Traité sur l’Union européenne et la politique sociale
  • A) Les apports du Traité de Maastricht à la politique sociale
  • 1. Le Protocole d’accord sur la politique sociale
  • 2. L’extension des compétences communautaires dans le domaine social
  • B) Le Traité d’Amsterdam et la politique sociale
  • 1. Les nouvelles dispositions de la Constitution économique sur la politique de l’emploi
  • 2. La révision du chapitre sur les « Dispositions sociales » de la Constitution économique, ébauche d’un espace social européen
  • C) Le Traité de Nice et la politique sociale
  • D) Le Traité constitutionnel et la politique sociale
  • E) Le Traité de Lisbonne et la politique sociale
  • Conclusion du chapitre 2
  • Conclusion du Titre 1
  • TITRE 2: DE LA POLITIQUE SOCIALE AUX DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX
  • CHAPITRE 1: LES SOURCES DES DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX EN DROIT COMMUNAUTAIRE
  • Section 1: Les droits économiques et sociaux dans la Charte communautaire des droits fondamentaux des travailleurs de l’Union européenne
  • § 1: Le contenu et la portée de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
  • A) Les principes et les droits contenus dans la Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
  • B) La portée politique et juridique de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
  • 1. La portée politique de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
  • 2. La portée juridique de la Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs
  • C) L’apport de la Charte sociale européenne et ses articulations avec la Charte communautaire des droits fondamentaux des travailleurs
  • 1. Les droits sociaux dans la Charte sociale européenne
  • 2. La Charte sociale révisée
  • 3. Comparaison de la Charte communautaire des droits fondamentaux des travailleurs avec la Charte sociale européenne
  • § 2: La mise en œuvre de la Charte communautaire des droits fondamentaux des travailleurs
  • A) Les principes qui gouvernent la mise en œuvre dans le cadre de la Constitution économique
  • B) Le Programme d’action de la Commission
  • Section 2: L’Accord sur la politique sociale dans la Constitution économique européenne
  • § 1: Deux régimes alternatifs de politiques sociales dans la Constitution économique européenne
  • § 2: Les dispositions sociales et l’harmonisation des législations à onze (quatorze) ou douze (quinze) ?
  • A) Au moyen de directives
  • B) Au moyen de décisions
  • C) Les domaines hors des compétences communautaires
  • § 3: Le rôle des partenaires sociaux comme législateur dans le cadre de la Constitution économique européenne
  • A) L’action communautaire par rapport à celle des partenaires sociaux
  • B) L ’action des Etats membres par rapport aux partenaires sociaux
  • C) Bilan du dialogue social : une contribution mitigée à la consolidation de la Constitution économique européenne
  • Section 3: Les droits sociaux dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : le point de vue économique
  • § 1: Débat sur les droits sociaux : du point de vue de la constitutionnalisation économique
  • A) Droits ou objectifs ?
  • B) L’interaction avec la Charte sociale européenne
  • C) Innovation en dépit des droits modestes
  • § 2: Les Droits sociaux contenus dans la Charte
  • A) Les droits à aspects sociaux ou la réunion du « civil » et du « social »
  • B) Les droits et principes sociaux
  • 1. Les droits sociaux
  • 2. Les principes sociaux
  • Conclusion du chapitre 1
  • CHAPITRE 2: L’ŒUVRE PRETORIENNE DE LA COUR DE JUSTICE COMME OUTIL PRINCIPAL DE RECONNAISSANCE DES DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX
  • Section 1: L’œuvre prétorienne dans le domaine de la protection de l’emploi et du travail
  • § 1: L’œuvre prétorienne dans le domaine de la protection de l’emploi
  • A) En ce qui concerne les licenciements collectifs
  • B) En ce qui concerne le maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises.
  • 1. Définition et champ d’application
  • a Opération de transfert
  • b La notion d’entreprise, entité économique conservant son identité
  • c Les solutions applicables en cas de faillite
  • 2. Maintien des droits des travailleurs
  • C) La protection des salariés contre l’insolvabilité de l’employeur
  • § 2: L’apport de la jurisprudence dans le domaine des conditions d’emploi et de travail
  • A) Le principe de l’égalité de traitement et de non discrimination
  • 1. La non-discrimination en raison de la nationalité
  • 2. L’égalité de traitement entre les hommes et les femmes
  • a Egalité de rémunération comme origine du principe de l’égalité de traitement
  • b Egalité de traitement comme droit fondamental ou droit fondamental à l’égalité des sexes
  • (i) L’égalité de traitement comme droit fondamental
  • (ii) L’apport de la Cour concernant l’étendue ratione personae del’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe.
  • (iii) La jurisprudence de la Cour concernant les discriminations positives envers les femmes
  • 3. La limitation des droits garantis
  • 4. L’organisation des voies de recours et la reconnaissance du droit de recours individuel
  • B) Dans le domaine de l’aménagement de la durée de travail et le détachement des salariés
  • 1. L’aménagement du temps de travail
  • 2. Le détachement des travailleurs
  • C) La consolidation de l’acquis constitutionnel dans le cadre de la constitution économique de l’Union européenne
  • 1. La consolidation du droit social qu’est l’égalité de traitement
  • 2. L’œuvre prétorienne et la précision du système des sanctions
  • 3. La consolidation de l’acquis de la Constitution économique.
  • Section 2: La jurisprudence de la Cour dans le processus de reconnaissance des droits fondamentaux
  • § 1: La jurisprudence dans le domaine des droits fondamentaux comme fondement de la reconnaissance des droits sociaux fondamentaux
  • A) Le temps de la réticence
  • B) Le temps de la consécration
  • C) La prise en considération des instruments internationaux
  • 1. La place prédominante de la Convention européenne des Droits de l’Homme.
  • 2. Le Droit communautaire et les conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT)
  • a Structure, compétences et instruments de l’OIT
  • b Droit communautaire et conventions de l’OIT
  • § 2: De la libre circulation des ressortissants communautaires au débat sur la notion de droit fondamental/liberté fondamentale
  • A) La libre circulation, une liberté fondamentale du ressortissant communautaire
  • 1. La nature de la libre circulation : une jurisprudence hésitante
  • 2. L’extension familiale de la libre circulation
  • B) Débat sur la notion de droit fondamental/liberté fondamentale
  • Conclusion du chapitre 2
  • Conclusion du Titre 2
  • Conclusion de la Première Partie
  • PARTIE 2: CONSTITUTION POLITIQUE ET DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX
  • TITRE 1: LES DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX COMME UN ASPECT DE LA CONSTITUTIONNALISATION DE L’UNION EUROPEENNE
  • CHAPITRE 1: LA PLACE DES DROITS FONDAMENTAUX DANS UN PROCESSUS DE CONSTITUTIONNALISATION POLITIQUE DE L’UE
  • Section 1: La constitutionnalisation politique de l’Union européenne : un processus en devenir
  • § 1: La constitutionnalisation dans le processus de l’intégration européenne
  • A) La constitutionnalisation matérielle
  • 1. La constitutionnalisation jurisprudentielle
  • 2. Les Traités européens vus dans une optique de constitutionnalisation matérielle
  • a Les moments constituants au travers des modifications des Traités.
  • b Du point de vue matériel
  • B) La constitutionnalisation formelle
  • 1. D’une manière générale
  • 2. La contribution de la Charte des droits fondamentaux à la constitutionnalisation politique de l’UE
  • a La Charte des droits fondamentaux comme première étape de la constitutionnalisation formelle de l’Union européenne
  • b La Charte des droits fondamentaux de l’UE : une démarche constituante particulièrement originale
  • c Le rapprochement vis-à-vis du Citoyen européen
  • 3. Le Traité instituant une Constitution pour l’Europe comme première Constitution formelle de l’UE
  • a D’une manière générale
  • b Des éléments de nature constitutionnelle
  • c La portée du contenu constitutionnel
  • § 2: L’originalité intrinsèque de la constitution européenne
  • A) Constitution européenne : difficulté d’encadrement par la terminologie classique
  • B) Les questions du pouvoir constituant et de souveraineté dans le débat sur l’avenir de l’Europe
  • 1. La convergence des pouvoirs constituants nationaux
  • 2. La conception normative de la constitution
  • 3. La question de la souveraineté des Etats membres
  • C) Les difficultés d’appréhension : opposition fédération et confédération
  • Section 2: Les droits fondamentaux dans le processus de constitutionnalisation de L’UE
  • § 1: D’une conception fonctionnelle des droits fondamentaux
  • A) La notion de droit fondamental
  • B) L’insuffisance initiale des Traités
  • 1. L’absence de « catalogue » de droits dans les traités fondateurs
  • 2. Des dispositions éparses
  • C) L’importance de la construction prétorienne dans la découverte des droits fondamentaux
  • 1. La mise en œuvre des principes issus des Traités
  • 2. La réception des droits issus des sources nationales et internationales
  • § 2: Une conception constitutionnelle des droits fondamentaux : l’enrichissement du droit écrit
  • A) La contribution du législateur constituant ayant le pouvoir d’adopter les actes de droit dérivé
  • B) La Contribution du pouvoir constituant en tant que tel : l’insertion de nouvelles dispositions dans des traités institutifs
  • 1. L’Acte unique et la première référence aux droits fondamentaux
  • 2. Les innovations du Traité de Maastricht
  • 3. Le traité d’Amsterdam : les Droits de l’Homme comme fondement de la construction européenne
  • 4. Le Projet de Traité instituant une Constitution pour l’Europe et la reconnaissance des droits fondamentaux
  • C) L’insertion de ces dispositions dans les accords internationaux
  • Conclusion du chapitre 1
  • CHAPITRE 2: LES DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX COMME UN ELEMENT DE CONSTITUTIONNALISATIN POLITIQUE DE L’UNION EUROPEENNE
  • Section 1: La particularité des droits sociaux fondamentaux parmi les droits fondamentaux
  • § 1: Les Droits sociaux fondamentaux dans les Constitutions nationales
  • A) Des statuts différents selon les Etats
  • B) … à l’absence de concept européen commun
  • C) L’absence d’obligation des Etats membres à protéger les droits sociaux fondamentaux
  • D) L’bsence d’une obligation de non-rétrogression (standstill) dans le domaine des droits sociaux fondamentaux.
  • § 2: L’affirmation limitée des droits sociaux au niveau européen
  • A) Limites de la lettre des textes communautaires
  • B) La jurisprudence de la Cour en matière sociale et la constitutionnalisation politique
  • 1. Les libertés fondamentales de circuler et de séjourner vue dans une optique de citoyenneté
  • 2. Le regroupement familial
  • C) L’absence d’une intégration des droits sociaux fondamentaux parmi les principes généraux du droit de l’Union européenne dont la Cour assure le respect
  • § 3: Les droits et principes sociaux dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
  • A) Le débat sur les droits sociaux du point de vue de la constitutionnalisation politique
  • 1. La Cohabitation des différentes catégories de droits
  • 2. Le compromis sur les droits sociaux
  • 3. La réalisation de l’indivisibilité
  • 4. L’universalité des droits fondamentaux
  • B) Les modalités de l’insertion des droits et principes sociaux fondamentaux dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
  • C) Droits sociaux, principes sociaux et l’effet de la reconnaissance des principes sociaux sur la répartition des compétences entre la Communauté/Union européenne et les Etats membres
  • 1. L’effectivité des droits sociaux et la question des compétences
  • 2. La reconsidération des principes sociaux et la question des compétences
  • 3. La Charte en tant que socle des droits fondamentaux par rapport à la répartition des compétences
  • a D’une manière générale
  • b De cette immuabilité des compétences
  • c La Charte des droits fondamentaux et le socle commun de droits fondamentaux pour l’Union ?
  • Section 2: Les insuffisances de la protection des droits fondamentaux dans l’ordre constitutionnel européen
  • § 1: Le caractère insuffisant des garanties juridictionnelles et de l’accès à la justice dans l’Union européenne
  • A) La limite de la protection inhérente à l’organisation de recours des particuliers
  • 1. Conditions tenant à l’organisation des recours
  • 2. L’apport du Traité constitutionnel
  • B) Les déficits éventuels de protection juridictionnelle
  • 1. La protection des droits fondamentaux d’une manière générale
  • 2. L’extension de la compétence juridictionnelle au nouveau titre IV « Visa, asile, immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes »
  • 3. La juridictionnalisation du nouveau troisième pilier
  • § 2: L’absence de contrôle du respect des droits fondamentaux par un organe externe à l’Union européenne : débat sur l’adhésion de l’Union à la Convention européenne
  • A) La nature juridique de la Charte et la Constitution politique de l’Union européenne
  • B) Du conflit des catalogues au débat sur l’adhésion de l’Union à la Convention européenne
  • 1. Deux Cours pour un même catalogue
  • 2. Deux Cours, deux catalogues
  • 3. Des fins des réticences à l’adhésion à la Convention européenne
  • C) Les implications par rapport à la protection des droits sociaux fondamentaux
  • Conclusion du chapitre 2
  • Conclusion du Titre 1
  • TITRE 2: LA CITOYENNETE SOCIALE ET LA DIFFICILE AFFIRMATION D’UN ESPACE PUBLIC EUROPEEN
  • CHAPITRE 1: LA CITOYENNETE EUROPEENNE COMME COMPOSANTE DE LA CONSTITUTIONNALISATION POLITIQUE ET LA RECONNAISSANCE DES DROITS SOCIAUX FONDAMENTAUX
  • Section 1: De la citoyenneté communautaire à la citoyenneté de l’Union
  • § 1: Sur la notion de citoyenneté
  • A) La correspondance avec la nationalité
  • B) La citoyenneté comme ensemble des droits et obligations
  • C) La citoyenneté comme participation à la vie de la société
  • D) La citoyenneté comme ensemble de qualités morales
  • E) L’Etat-nation et la « nouvelle » citoyenneté
  • § 2: La citoyenneté communautaire
  • § 3: La citoyenneté de l’Union
  • A) Signification et portée de la citoyenneté européenne
  • B) Les caractéristiques de la citoyenneté de l’Union
  • 1. Le caractère inversé de la citoyenneté européenne
  • 2. La Citoyenneté de l’Union est une citoyenneté subordonnée
  • 3. La citoyenneté de l’Union est une citoyenneté inachevée
  • C) Les effets de la citoyenneté européenne
  • 1. Effet de la citoyenneté de l’Union sur la liberté de circulation
  • 2. La citoyenneté de l’Union comme solution au problème de la base juridique
  • 3. La citoyenneté européenne, facteur d’élargissement des sujets du droit communautaire
  • a La citoyenneté européenne comme facteur d’élargissement du champ d’application matériel du droit communautaire
  • b L’exercice des libertés communautaires par des citoyens européens mineurs
  • c L’exercice des libertés communautaires par le conjoint ressortissant d’un Etat tiers
  • Section 2: La citoyenneté sociale comme élément indispensable de la citoyenneté de l’Union
  • § 1: La notion de citoyenneté sociale
  • § 2: La construction progressive de la citoyenneté sociale dans l’Union européenne
  • A) La citoyenneté sociale et la libre circulation des travailleurs
  • 1. Le droit de circulation et de séjour du travailleur citoyen
  • 2. Une citoyenneté construite sur la non discrimination, mais définie par l’exclusion des autres
  • B) La citoyenneté sociale et l’intervention des travailleurs
  • 1. La notion d’entreprise en droit communautaire : de l’intégration des critères de la concurrence à l’émergence des critères sociaux de l’entreprise
  • 2. Le principe d’une information et d’une consultation préalable des travailleurs
  • C) Le Traité constitutionnel et la citoyenneté sociale
  • 1. L’individu au sein du Traité constitutionnel
  • 2. La contribution de l’incorporation de la Charte des droits fondamentaux dans le Traité constitutionnel
  • 3. Les nouveaux éléments dans le Traité constitutionnel pouvant consolider la citoyenneté sociale
  • Conclusion du chapitre 1
  • CHAPITRE 2: LES DROITS SOCIAUX COMME ELEMENTS D’UNE CITOYENNETE SOCIALE : CONTRIBUTION D’UNE FORME DE CITOYENNETE A LA FORMATION DE L’ESPACE PUBLIC EUROPEEN
  • Section 1: La singularité de l’Union européenne comme entité politique post nationale
  • § 1: Nécessité d’émergence d’un sentiment d’appartenance à l’Union européenne
  • A) Principe national comme fondement de l’Etat-nation dans les sociétés politiques européennes
  • 1. Etat
  • 2. Nation
  • B) Les efforts de rattrapage de l’économique par le politique : le patriotisme constitutionnel comme instrument d’une identité européenne en devenir
  • 1. Le nécessaire congruence entre l’intégration économique et politique
  • 2. Pertinence du post national pour l’unité politique européenne
  • a Nécessité de recoupement entre la communauté légale et la communauté morale
  • b Signification du patriotisme constitutionnel pour l’identité européenne en devenir
  • c Quelques éléments déjà réunis pouvant contribuer au recoupement communauté légale/communauté morale dans l’Union européenne
  • § 2: L’Union européenne : difficile affirmation d’un espace public
  • A) L’espace public comme le lien entre la nation, l’Etat et la démocratie
  • 1. Les évolutions de l’espace public
  • a L’espace public bourgeois ou la genèse d’un concept controversé
  • b L’évolution de l’espace public et la transformation de l’Etat en l’Etat-social
  • 2. L’espace public européen : un concept difficile à identifier
  • B) La citoyenneté sociale comme fondement institutionnel de l’espace public européen
  • 1. D’une manière générale
  • 2. Pertinence de la citoyenneté sociale dans l’approche de l’espace public européen
  • a La libre circulation des personnes : condition sine qua non de l’existence de l’espace public européen
  • b L’égalité de traitement entre les hommes et les femmes et l’affirmation de l’espace public européen
  • c Au-delà des droits sociaux fondamentaux, un espace public à l’européenne ?
  • Section 2: Les droits sociaux fondamentaux au-delà de l’Etat ou le cosmopolitisme social à l’échelle européenne
  • § 1: Les droits sociaux fondamentaux comme éléments intégrants du cosmopolitisme européen
  • A) Les éléments constitutifs d’un cosmopolitisme opérationnel
  • 1. D’une manière générale
  • 2. L’UE comme modèle du cosmopolitisme juridique européen
  • 3. Vers la reconnaissance des droits fondamentaux des Etats
  • a Le respect de l’identité nationale
  • b Le respect des fonctions essentielles de l’Etat
  • c Le principe de solidarité
  • B) La citoyenneté sociale dans la « stratégie post nationale »
  • § 2: La citoyenneté sociale comme élément intégrant une forme de démocratie à l’Union européenne
  • A) Des Traités fondateurs au Traité de Lisbonne : une forme évolutive de démocratie
  • 1. Les différents types de démocratie dans l’intégration européenne
  • 2. Une démocratie caractérisée par le déficit démocratique ?
  • 3. Le Traité constitutionnel comme le renouveau du parlementarisme ou de la démocratie représentative dans le cadre de l’Union européenne
  • a Les degrés de proximité dans la représentation politique européenne
  • b La représentativité démocratique accrue, mais limitée
  • B) La démocratie participative comme complément d’une démocratie post nationale
  • 1. La constitutionnalisation des principes de la démocratie participative.
  • a Une Union plus ouverte à la participation civile
  • b L’initiative citoyenne comme innovation du Traité constitutionnel
  • 2. Constitutionnalisation du statut des partenaires sociaux
  • a La reconnaissance de la particularité du rôle des partenaires sociaux
  • b L’autonomie des partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social
  • 3. Les organisations religieuses2510 et non confessionnelles dans le cadre du dialogue civil.
  • a La constitutionnalisation du statut des organisations religieuses et non confessionnelles
  • b Les organisations religieuses et non confessionnelles et le dialogue civil
  • Conclusion du chapitre 2
  • Conclusion du Titre 2
  • Conclusion de la Deuxième Partie
  • CONCLUSION GENERALE
  • De la Constitution économique
  • De la politique sociale
  • De la reconnaissance des droits sociaux fondamentaux
  • Du rôle de la jurisprudence dans la reconnaissance des droits sociaux fondamentaux
  • De la constitutionnalisation politique
  • Les droits sociaux fondamentaux dans la constitutionnalisation politique
  • De la citoyenneté sociale
  • Contribution d’une forme de citoyenneté, d’identité à l’émergence de l’espace public européen
  • ANNEXES
  • Bibliographie
  • I-DOCTRINE
  • II-DOCUMENTS OFFICIELS
  • Index

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INTRODUCTION GENERALE

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Depuis la création des Communautés européennes en 19571 jusqu’à la signature du Traité de Lisbonne le 13 décembre 20072, l’Union européenne s’est transformée, peu à peu, d’une Communauté économique à une Union politique. Les principaux repères de cette histoire d’un demi-siècle sont constitués par l’Acte unique européen de 1986, la Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989, le Traité sur l’Union européenne de 1992,3 la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne4 et le projet du Traité constitutionnel adopté le 19 octobre 20045. Cette transformation que nous appellerons constitutionnalisation par la suite, est caractérisée, entre autre, par la reconnaissance des droits fondamentaux6, y compris les droits sociaux fondamentaux. En effet, au moment où les Etats-nations sont affectés par les effets de la mondialisation économique, qui, entre autres, rend vulnérables les systèmes sociaux, la reconnaissance des droits fondamentaux7 apparaît indispensable pour réintroduire la dignité de la personne au travail et la primauté des objectifs, telle que la lutte contre la pauvreté ou les inégalités sociales.

Dès lors l’adoption d’une terminologie s’impose. En effet, s’agissant des droits de l’homme, différentes formulations sont utilisées : droits fondamentaux, droits individuels, droits collectifs, droits civils et politiques, droits économiques et sociaux. Les termes « droits fondamentaux » indiquent le caractère fondamental des droits, tandis que les termes « droits de l’homme » reflètent plutôt l’aspect inaliénable des droits de l’être humain. Par ailleurs, certains considèrent que les droits civils et politiques sont des droits individuels, alors que les droits économiques et sociaux constituent la catégorie des droits collectifs. Toutefois, la différence n’est pas sensible dans la mesure où, par exemple, le droit au mariage comme droit civil est aussi un droit collectif, tout comme le droit de grève qui est un droit social. Ce qui implique que les droits de l’homme doivent être interprétés et appliqués comme un ensemble cohérent et indivisible, cohérent parce qu’indivisible. La Cour de Justice des Communautés européennes se référant aux termes « droits fondamentaux », nous retiendrons cette appellation qui englobe aussi bien les droits civils et politiques que les droits économiques et sociaux.

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Dans une perspective historique, l’égalité des droits civils et politiques a poussé à la revendication de l’égalité des conditions économiques et sociales, qui a donné naissance à une seconde catégorie de droits, qui ne sont que les droits économiques et sociaux8, dénommés aussi droits-créances par opposition à la notion de droits-libertés. Ces droits-créances définissent les droits qu’ont les individus sur l’Etat : droit au travail, à la sécurité matérielle, à l’instruction, au repos, etc. Par opposition aux droits-libertés, les droits-créances impliquent l’intervention de l’Etat en faveur des individus. La nature même des droits économiques et sociaux, et le type d’Etat qu’ils présupposent se distinguent de ce qui caractérise les droits civils et politiques : au lieu d’analyser des libertés « contre l’Etat », ils impliquent une intervention de l’Etat, un droit « à » quelque chose, à une prestation matérielle définie. Alors que les premiers droits réclament un Etat minimal, les droits économiques et sociaux supposent le passage de l’Etat minimal à l’Etat-providence : un Etat qui doit intervenir pour stabiliser l’activité économique, pour fournir des prestations matérielles afin de corriger les inégalités. Autrement dit, les droits-libertés présupposent en général une abstention de l’Etat, alors que les droits-créances nécessitent au contraire une intervention de l’Etat9. Ou encore, les droits civils sont opposables à l’Etat alors que les autres droits sont exigibles de lui. Les premiers servent à protéger contre l’arbitraire de l’Etat (et non contre l’Etat), tandis que les seconds exigent que l’Etat intervienne jusque dans la vie privée des individus pour leur garantir la sécurité sociale, l’éducation, etc.10. C’est bien cette particularité qui rend la protection de ces derniers assez problématique, dans la mesure où les Etats ne disposent pas de tous les moyens adéquats pour assurer une protection effective, car cette effectivité dépend essentiellement de la situation économique, tant au niveau national qu’international.

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Alors qu’on assiste, à l’échelle européenne du moins, à l’affirmation d’un processus qui vise à assurer l’indivisibilité des droits fondamentaux, aussi bien dans le cadre du Conseil de l’Europe que de l’Union européenne, un processus parallèle, celui de mondialisation, risque de menacer surtout la protection efficace des droits économiques et sociaux. On dira que dans le cadre d’une économie mondialisée, caractérisée par l’accélération et l’intensification de la communication et des échanges réduisants les écarts temporels et spatiaux, les Etats-nations ne peuvent améliorer la compétitivité internationale de leurs entreprises qu’en réduisant le pouvoir d’intervention de l’Etat. On justifie ainsi des politiques de démantèlement qui portent préjudice à la solidarité sociale et mettent à rude épreuve la stabilité démocratique de la société11. Un autre développement qui accompagne la mondialisation est l’accélération du processus d’institutionnalisation du fait régional12. L’Union européenne, processus en devenir, apparaît comme une « expérience unique de prise en compte de solidarités à un niveau super étatique-que l’on peut qualifier de régional -et de passage au politique à ce niveau. Même si l’on peut relever des limites et des échecs (…) la tentative d’intégration est suffisamment novatrice pour retenir l’attention »13.

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Le processus d’intégration européenne est d’autant plus novateur qu’elle est également perçue comme un instrument qui accélère le phénomène de « désintégration de l’Etat et de la nation »14. En effet, l’institution d’une nouvelle forme de puissance publique supranationale15 engageait un processus qui, sans menacer les identités nationales, supprimait les droits exclusifs des Etats à agir en leur nom. Ce processus que la Communauté a poursuivi et que l’Union a pour mission de mener plus loin, peut être systématisé à partir des deux formules suivantes : la désétatisation de la nation et la dénationalisation de l’Etat. Il faut entendre par là que les deux structures subsistent, mais que le lien entre les deux, résumé dans le nom composé « Etat-nation », s’estompe progressivement. L’Etat comme appareil est graduellement érodé par le développement du droit communautaire. C’est en ce sens que l’on peut parler d’une désétatisation de la nation : le fait national subsiste, mais l’Etat n’est plus l’expression unique et exclusive de la nation dans l’ordre juridique et politique. Ce processus a deux implications. D’un côté, avec l’application du principe de non-discrimination, l’Etat ne sera plus le domaine réservé des nationaux, d’un autre côté, la coïncidence entre une nation et un Etat perdra progressivement sa pertinence. De manière réciproque, la construction européenne induit ce que l’on peut appeler une dénationalisation de l’Etat, en ce sens que l’Etat n’est plus en charge des seuls intérêts de sa nation et ses nationaux, car l’opposition entre national et étranger perd progressivement sa signification en ce qui concerne les ressortissants communautaires.

Si la reconnaissance et la protection des droits fondamentaux nécessitent une prise de conscience autre que nationale, comment le processus d’intégration européenne répond à cette nécessité ? On sait que les origines sectorielles de la construction communautaire n’ont pas mis les droits fondamentaux au premier plan des préoccupations. On ne relève ainsi dans le Traité instituant la CEE qu’une disposition isolée, à savoir l’article 119, devenu, après modification, article 141 TCE, sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes. Cette insertion était plus inspirée par le souci d’éviter des distorsions de concurrence que par celui de promouvoir les droits de l’homme16. L’article 164 du Traité CEE, devenu, après modification, article 220 TCE, en assignant à la Cour de Justice la tâche d’assurer le respect du droit dans l’application et l’interprétation du traité, constituait cependant l’indice de la haute valeur reconnue au droit. En dépit de cette carence originelle, inscrire les droits fondamentaux dans les traités est un objectif constant du développement communautaire. Les institutions communautaires ont effectivement produit plusieurs textes concernant les droits fondamentaux. La revendication d’une consécration de ces droits par le droit primaire s’inscrit d’abord dans la perspective de transformation des Communautés en une Union européenne comprise comme une Union politique, globale, voire constitutionnelle17. Même s’ils se distinguent des constitutions étatiques par leur nature fonctionnelle et la présence en leur sein des descriptions techniques de certaine politiques qui rappellent leur origine conventionnelle, les traités méritent, selon la doctrine répétée de la Cour de justice, l’appellation constitutionnelle. En effet, ils comportent dans leur domaine d’application les grands éléments qui font les constitutions : l’énonciation des valeurs fondamentales, la description de l’organisation des pouvoirs et l’affirmation de quelques droits fondamentaux.

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Des tentatives de reconnaissance des droits fondamentaux, afin de pouvoir répondre aux besoins de la Communauté en matière économique et sociale sont multiples : Déclaration commune du Parlement européen, du Conseil et de la Commission du 5 avril 197718; Résolution du Parlement européen du 12 avril 1989 adoptant une déclaration des droits et libertés fondamentales19; l’adoption de l’Acte unique européen de 1986 qui se réfère, dans son préambule, aux droits fondamentaux reconnus dans les constitutions et les lois des Etats membres, dans la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales et dans la Charte sociale européenne, ainsi qu’au respect du droit et des droits dans les relations extérieures ; ou encore la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs adoptée lors du Conseil européen de Strasbourg qui s’est tenu en décembre 1989. La Cour de justice n’a pas attendu que les textes se précisent pour affirmer, dès 1969, que le droit dont elle doit assurer le respect comprend les droits fondamentaux. Dans une jurisprudence initiée par son arrêt « Stauder »20, elle a considéré que les droits fondamentaux de la personne étaient inclus « dans les principes généraux du droit communautaire » et elle a indiqué deux sources de références pour identifier ces droits et leur portée, à savoir les traditions constitutionnelles des Etats membres et les traités internationaux en la matière auxquels les Etats membres ont adhéré, spécialement la Convention des Droits de l’Homme précitée.

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L’objectif politique d’une Union plus proche des citoyens, la volonté de franchir une nouvelle étape dans le processus d’intégration européenne21, ont conduit à placer les aspects sociaux de la construction communautaire au centre des révisions des Traités. Le Traité d’Amsterdam, plaçant les droits de l’homme au cœur de l’intégration communautaire, a également renouvelé les références aux droits sociaux fondamentaux22. L’insertion d’un chapitre sur l’emploi dans le Traité CE est l’élément le plus visible de l’importance accordée aux questions sociales. Ces nouvelles compétences communautaires en matière d’emploi mises à part, l’innovation vient surtout de la référence aux droits sociaux fondamentaux. Expressément écrite dans le Traité sur l’Union européenne, la notion de droits sociaux fondamentaux s’accompagne d’une référence à la Charte sociale européenne signée à Turin le 18 octobre 1961 et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 198923. Par ailleurs, le droit fondamental à l’égalité de traitement s’enrichit de dispositions devant permettre d’étendre le champ des discriminations prohibées24 et de renforcer l’action en faveur de l’égalité entre hommes et femmes25.

Ces références aux droits sociaux fondamentaux sont essentielles pour deux raisons. D’abord, elles témoignent d’une évolution du droit communautaire impliquant une redéfinition des principes fondamentaux qui le gouvernent. Ensuite, elles constituent un pas substantiel dans le processus de constitutionnalisation de l’Union européenne. A coté des libertés de circulation et des règles de concurrence, la référence aux droits sociaux fondamentaux renvoie à des droits tels que l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge, le handicap ou l’orientation sexuelle, l’égalité entre hommes et femmes, mais aussi le droit au travail, à la sécurité sociale, à une rémunération équitable, au repos hebdomadaire et au congé annuel payé, à la liberté d’association et à la négociation collective, à la grève et à la protection de la santé.

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Les modifications introduites dans l’ordre juridique communautaire par les traités de Maastricht et d’Amsterdam, sont révélatrices en ce qui concerne le processus de constitutionnalisation de l’Union. A première vue, la constitutionnalisation désigne le processus par lequel une norme dépourvue de ce caractère acquiert une valeur constitutionnelle, c’est-à-dire est placée au sommet des autres normes de l’ordre juridique considéré26. Le Professeur J. Weiler donne de ce concept la définition suivante, en le particularisant dans le contexte communautaire : « le mot constitutionnalisation implique un processus combiné et circulaire par lequel les traités ont été interprétés à l’aide des techniques utilisées pour les documents constitutionnels, plutôt qu’à l’aide de celles utilisées pour les traités multilatéraux, et à travers ce processus, les traités envisagés dans leur origine et leur effet, ont revêtu les qualités d’un ‘droit supérieur’, à l’instar d’une constitution »27. Cette définition suppose qu’il est légitime et juridiquement correct d’utiliser la notion de constitution pour qualifier les traités constitutifs de l’Union européenne. Ceux-ci, tels qu’interprétés par la Cour de justice, comportent manifestement tous les éléments que l’on trouve habituellement dans une constitution. Cette constitution communautaire procède indiscutablement d’une « idée de droit », elle repose sur des principes structurels et fonctionnels, ainsi que sur une répartition des compétences guidée par les principes de subsidiarité et de proportionnalité. Elle protège les droits fondamentaux en constitutionnalisant la jurisprudence de la Cour qui leur a assigné le statut de principes généraux du droit communautaire28. De ce point de vue, les apports significatifs du Traité de Maastricht et du Traité d’Amsterdam semblent être la réception au niveau de l’Union de certains principes constitutionnels nationaux qui assurent l’inscription des valeurs constitutionnelles, telles que la citoyenneté et le respect des droits fondamentaux29. L’une des originalités de cette constitution communautaire est qu’elle ne conduit pas à la disparition des Etats membres qui constituent la Communauté, mais « qu’elle en modifie peu à peu les comportements et les relations réciproques. Une telle constitution n’est pas immobile : elle évolue au gré des impératifs qui la sollicitent par la méthode dite de ‘petits pas’, peu spectaculaire, mais efficace. »30

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La dernière manifestation en date de cette évolution qui n’a pas atteint son point final et doit continuer du même pas que l’intégration communautaire, est l’adoption de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne31. La constitution de la Convention européenne32, qui a eu pour mission de débattre et de formuler des propositions à la Conférence intergouvernementale qui s’est tenue en 2004, concernant les réformes de l’architecture communautaire, a pu porter loin ce processus. Le traité établissant une Constitution pour l’Europe issu de ce processus, signé le 29 octobre 2005 à Rome, n’a pas été préparé par un véritable pouvoir constituant ; il est le fruit d’une procédure intergouvernementale. En outre, il prévoit une procédure de révision qui, même si elle intègre l’expérience de la Convention, reste avant tout intergouvernementale33. Ces éléments plaident en faveur d’un traité international. Toutefois, la nouvelle procédure, plus transparente et plus démocratique, associant les parlements nationaux, le Parlement européen et les gouvernements nationaux, a pu devenir, dans une certaine mesure, l’expression « du pouvoir constituant communautaire »34. Aussi, le texte issu de la Convention et de la CIG 2004 ne se présente pas sous la forme d’une simple compilation du contenu des traités fondateurs de la Communauté et de l’Union, mais sous la forme d’un véritable acte fondateur, plus lisible. Par ailleurs, les travaux de la Convention ont contribué à l’affirmation de l’espace public européen en suscitant un véritable débat quasiment dans tous les Etats membres et les pays candidats. Enfin, par son contenu, le traité établissant une Constitution pour l’Europe peut être qualifié de véritable constitution matérielle : il consacre la répartition des compétences entre les institutions européennes et les Etats membres, établit un véritable statut du citoyen européen et formalise une forme d’organisation politique originale35. Ces éléments permettent légitimement de voir dans ce texte une Constitution, même si les exigences de la théorie constitutionnelle classique ne sont pas toutes réunies.

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Le Traité de Lisbonne36 qui a été préparé après une période de réflexion suivant les résultats négatifs des referendums français et hollandais en 2005, tout en abandonnant le concept constitutionnel, introduit dans les textes actuels, qui restent en vigueur, les innovations découlants des travaux de la Convention de 200437. Ainsi, le nouveau traité modifie en substance le TUE et TCE. Alors que le premier garde son intitulé, le deuxième est appelé « traité sur le fonctionnement de l’Union », l’Union étant doté de personnalité juridique38. La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne aura une valeur juridique contraignante sans être incluse dans le Traité, puisque « l’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes »39 qu’elle annonce.

Notre recherche sera divisée en deux parties. La première partie abordera la question de la constitution économique européenne et la place des droits sociaux fondamentaux (Partie 1). La deuxième partie sera consacrée à l’étude du processus de constitutionnalisation politique et la question des droits sociaux fondamentaux (Partie 2).

Conscient des difficultés que posent les tentatives d’encadrement des changements de nature constitutionnelle dans le contexte européen par la terminologie constitutionnelle classique, il sera question pour nous d’étudier la participation du social dans le processus de constitutionnalisation en cours. En effet, le role que devrait assumer le social devient d’autant plus déterminant que les politiques sectorielles de « petits pas » semblent avoir fait leurs preuves. Dans un contexte mondialisé, où les Etat-nations ont perdu une partie de leurs prérogatives traditionnelles, l’Union européenne devrait s’affirmer davantage comme une entité sociale, afin de créer chez les individus un sentiment d’appartenance. Le social d’une manière générale, et les droits sociaux fondamentaux plus particulièment, ont une place stratégique à cet égard. C’est cet aspect qui constituie le fil conducteur de notre travail. Dans cette perspective, il s’agira pour nous d’identifier les élements les plus pertinents du social ou de la politique sociale, qui, du fait de leur reconnaissance par le législateur et le juge européen, contribueront à la constitutionnalisation des traités européens. Or, l’Acte unique 1986, en dépit d’une avancée politiquement importante en ce qui concerne la place du social et les droits fondamentaux, ne modifie pas profondément la nature économique des traités fondateurs. La Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs s’inscrit également dans cette orientation économique.

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Ce processus change de nature, avec l’entré en vigueur du Traité de Maastricht. La transformation de la Communauté économique européenne en Communauté européenne, la création de l’Union européenne, l’instauration de la citoyenneté européenne et la constitutionnalisation de la jurisprudence de la Cour de justice en ce qui concerne les droits fondamentaux sont les signes les plus visibles de ce changement de cap. Ces changements ont pour vocation de munir l’Union européenne d’une identité avant tout politique. Les modifications introduites par le Traité d’Amsterdam qui confirme la place primordiale des droits fondamentaux y compris des droits sociaux fondamentaux, l’adoption de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et le projet de Traité établissant une constitution pour l’Europe qui intègre cette Charte, nous montrent, en dépit du rejet du concept constitutionnel par le Traité de Lisbonne40, que le processus de constitutionnalisation en cours dans le cadre de l’Union européenne s’est engagé dans une perspective profondément politique. Ces changements traduisent le passage de l’Union économique à l’Union politique, passage qui est également traduit dans la jurisprudence récente de la Cour de justice. Ils concrétisent également une citoyenneté sociale dont les destinataires béneficient des droits transnationaux, qui pourraient former le fondement intitutionnel d’un espace public pour cette « communauté politique post nationale » qu’est l’Union européenne. Notre recherche, a pour but de montrer que la reconnaissance des droits sociaux fondamentaux, qui sont les premiers à être reconnus dans le contexte européen, a une importance déterminante dans ce processus.


1 Traité instituant le Communautés européennes, Traités portant révision de ces traités, Acte unique européen, Luxembourg, OPCE, 1987.

2 La démarche consiste à adopter un traité « modificatif » des traités antérieurs, qui restent en vigeur. Le mandat donné à la conférence intergouvernementale de 2007 était clair : il s’agissait d’introduire dans les traités actuels les innovations découlant des travaux de la CIG de 2004 ou encore, les principaux acquis du projet du Traité constitutionnel. Voir Projet de Traité modifiant le Traité sur l’union européenne et le Traité instituant la Communauté européenne, CIG 1/1/07 REV 1, www.europa.eu.int. Aussi, DONY Marianne, Après la réforme de Lisbonne les nouveaux traités européens, Editions de l’Université de Bruxelles, 2008.

3 Les traités de Rome, Maastricht et d’Amsterdam : Textes comparés, La Documentation Française, Paris, 2002.

4 OPOCE, Luxembourg, décembre 2004.

5 Projet du Traité établissant une Constitution pour l’Europe, La Documentation française, Paris, 2004.

6 « Les droits fondamentaux expriment les valeurs d’un ordre juridique, ils donnent un sens à l’action individuelle et collective des hommes. ». BONNECHERE Michelle, « Quelle garantie des droits sociaux fondamentaux en droit européen ? » Chronique, Europe-Editions du Juris-Classeur, juillet 2000, p. 4.

7 Les bases historiques des droits fondamentaux sont aussi anciennes que l’Ancien Testament et l’Antiquité grecque. Sur la base des droits naturels, les philosophes grecs avaient commencé à accepter l’idée des droits inchangeables dans la société. L’une de leurs thèses était que tous les êtres humains sont égaux. Le concept a continué de se développer durant le Moyen-âge, tout en se focalisant sur les classes privilégiées, plutôt que sur les individus au sens général.

8 Elle accorde ainsi à chacun le droit au mariage, au divorce, à la sécurité sociale, le droit au travail avec le libre choix d’un emploi et un salaire égal pour un travail égal, le droit de former un syndicat et d’y adhérer, le droit au repos, au loisir, le droit à un niveau de vie convenable pour assurer sa santé et son bien-être, le droit à l’éducation et à une instruction primaire obligatoire et gratuite, le droit à la propriété aussi bien seul qu’en collectivité.

9 En droit positif, la génération des droits économiques et sociaux naît à partir du début de ce siècle, et surtout après la fin de Seconde Guerre Mondiale. Après la Seconde Guerre Mondiale, on voit ainsi se dessiner une conception nouvelle et commune des droits de l’homme qui renoue d’une certaine manière avec la solidarité. Fondée sur la dignité de la personne humaine, elle met l’accent à la fois sur l’individu comme fin de la société et l’individu comme membre de la société. C’est ainsi que la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 proclame, à côté des droits civils et politiques, également des droits économiques et sociaux. FRYDMAN Benoît et HAARSCHER Frydman-Guy, Philosophie du droit, Dalloz, 1998, p. 110.

10 DELMAS-MARTY Mireille, Trois défis pour un droit mondial, Editions du Seuil, 1998, p. 47–48.

11 En effet, durant la période de l’après Première Guerre Mondiale, on a vu se développer dans les démocraties prospères et pacifiques de l’Europe occidentale, des systèmes d’économie mixte qui ont permis l’extension des droits civiques, et pour la première fois, la réalisation effective des droits sociaux. La croissance explosive de l’économie mondiale et le décuplement du commerce mondial des débuts des années 1970 avait aussi favorisé une disparité accrue entre régions pauvres et régions riches de la planète. Mais les gouvernements des pays de l’OCDE qui ont fourni les trois-quarts de la production mondiale, avaient pu conduire une politique économique soucieuse de la stabilité interne et instaurer, à une époque où la croissance était relativement élevée, de vastes systèmes de sécurité sociale. C’est ainsi que, sous la forme des démocraties de masse fondées sur l’Etat social, on a réussi pour la première fois dans l’histoire à domestiquer la forme économique hautement productive du capitalisme et à la mettre plus ou moins en accord avec l’idée normative qu’ont d’eux-mêmes les Etats à constitution démocratique. HABERMAS Jürgen, Après l’Etat-nation-Une nouvelle constellation politique, Fayard, 2000, p. 25 et suivant.

12 DUTHEIL de la ROCHERE Jacqueline, « Mondialisation et régionalisation », in LOQUIN Eric et KESSEDJIAN Catherine (dir.), La mondialisation du droit, Editions Litec-CREDIMI, 2000, p. 435.

13 Ibid, p. 448.

14 SOULIER Gérard, « L’Union européenne et le dépérissement de l’Etat », in DUPRAT Gérard, L’Union européenne : droit, politique, démocratie, PUF, 1996, p. 293.

15 Le terme qui qualifiait la Haute Autorité dans le texte initial du traité CECA.

16 GARCIA de ENTERRIRA Eduardo, « Les droits fondamentaux et la révision du Traité sur l’Union européenne », CDE, 1996/32, ULB, p. 607.

17 AKANDJI-KOMBE Jean-François, « Le développement des droits fondamentaux », in LECLERC Stéphane, AKANDJI-KOMBE Jean-François et REDOR Marie-Joëlle (dir), L’Union européenne et les droits fondamentaux, Bruxelles, Bruylant, 1999, p. 32.

18 JOCE, C 103, 27 avril 1977.

19 JOCE, C 120, 10 mai 1989.

20 CJCE, arret du 12 novembre 1960, Stauder, aff. 29/69, Rec., p. 419.

21 Traité d’Amsterdam, Préambule, premier considérant.

22 SUDRE Frédéric, La Communauté européenne et les droits fondamentaux après le Traité d’Amsterdam, JCP, 1998.

23 Traité sur l’Union européenne, quatrième considérant et l’article 136 du TCE.

24 Cf. le nouvel article 13 du TCE.

25 Cf. les articles 3, 137 et 141 du TCE.

26 CONSTANTINESCO Vlad, « La Constitutionnalisation de l’Union européenne », in Joël Rideau (dir), De la Communauté de droit à l’Union de droit, LGDJ, 2000, p. 137.

27 WEILER Joseph, Supranationalism revisited-a retrospective-The European Community after 30 years, cité par CONSTANTINESCO Vlad, op.cit.

28 CONSTANTINESCO Vlad, « l’Union européenne : par le droit vers le politique ? », in DUPRAT Gérard, l’Union européenne : droit, politique, démocratie, PUF, 1996, p. 185

29 BLUMANN Claude, « Rapport introductif général », in GAUDIN Hélène (dir), Droit constitutionnel-Droit communautaire, vers un respect réciproque mutuel ?, Colloque de la Rochelle, 6–7 mai 1999, Economica, 2001, p. 21–22.

30 CONSTANTINESCO Vlad, l’Union européenne: par le droit vers le politique ?, op cit., p. 186.

31 FERNANDEZ SOLA Natividad, « A quelle nécessité juridique répond la négociation d’une Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ? », RMCUE, n°442, octobre-novembre 2000, p. 595.

32 La Convention est constituée avec la participation des représentants du Parlement européen, de la Commission européenne, des parlements nationaux des pays membres et candidats, ainsi que des représentants des Chefs d’Etat et de Gouvernement des pays membres,

33 MOUTON Jean-Denis, « Préface à la présentation du Traité constitutionnel », Presse de l’Université de Sofia, 2005, p. 1.

34 CONSTANTINESCO Vlad, op. cit., p. 186

35 MOUTON Jean-Denis,, « Préface à la présentation du Traité constitutionnel », op. cit., p. 2.

36 Le Traité de Lisbonne comprend, en réalité, deux traités. Le premier traité porte sur l’Union européenne : en fait, il modifie le Traité sur l’Union européenne (TUE). Le second traité porte sur le fonctionnement de l’Union européenne : en fait, il modifie le Traité sur la Communauté europénne.

37 Mandat de la CIG 2007, POLGEN 74, 26 juin 2007, Secretariat general de l’Union europeenne, Bruxelles.

38 FERENCZI Thomas et RICARD Philippe, « Les Vingt-Sept approuvent le traité de Lisbonne », Le Monde, 20 octobre 2007, p. 8 ; Voir aussi, GISCARD d’ESTAING Valery, « La boite à outils du traité de Lisbonne », Le Monde, 27 octobre 2007, p. 21 ; et pour un point de vue critique voir SARRE George, « Non au traité simplifié européen : Copie conforme de la Constitution rejettée en 2005, le nouveau texte doit être soumis à referendum», Le Monde, 18 octobre 2007, p. 20.

39 Mandat de la CIG 2007, POLGEN 74, 26 juin 2007, Secrétariat général de l’Union européenne, Bruxelles, Annexe I, Titre I: Dispositions communes, point 5.

40 Ibid, p. 3, point 3.

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PARTIE 1: LA CONSTITUTION ECONOMIQUE ET LES DROITS SOCIAUX

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La notion de « Constitution économique », créée par la doctrine allemande entre les deux guerres, développée par l’école libérale de Freiburg, est également utilisée en tant que concept juridico-économique pour qualifier « la Charte constitutionnelle » de la Communauté. Dans cette optique, la Constitution économique indique la structure légale qui détermine le type de système ou ordre économique qu’un Etat s’engage à mettre en œuvre, et définit l’ensemble des principes dans ce système qui gouvernent la politique économique41. Dans le cadre de cette théorie libérale, l’approche de la Constitution économique puise ses sources dans l’idée de l’Etat basé sur la règle de droit dans lequel les droits justiciables des individus limitent tant le pouvoir économique que celui politique. Dans un tel système, le recours à des procédures légales sert à résoudre les conflits entre les sphères politiques et économiques. La notion de Constitution économique fournit également un cadre légal qui a pour but de garantir le fonctionnement optimal de l’économie42. Ce cadre légal définit par ailleurs les relations entre les processus économique et politique par l’intermédiaire d’une séparation fonctionnelle stricte des pouvoirs. Un tel Etat est contraint de respecter la Constitution économique, car elle incorpore des critères justiciables. Ces contraintes peuvent prendre des formes variées telles que des objectifs clairement définis pour la politique de l’Etat, les limites imposées sur les compétences de celui-ci, les limites sur les instruments qu’utilise l’Etat dans son action, et plus particulièrement, les droits individuels qui sont directement justiciables43.

Selon Léontin-Jean Constantinesco la Constitution économique se définit au sens juridique comme :

« l’ensemble des normes juridiques qui précisent et ordonnent le cours du processus économique dans un ensemble économique donné. (..) La Constitution économique n’est pas un ensemble de normes constitutionnelles, mais un complexe de normes juridiques déterminant et régissant le déroulement du processus économique. Au sens matériel, la Constitution économique est donc l’ensemble des normes établissant les structures précisant les facteurs économiques, leurs fonctions et spécifiant les règles régissant le déroulement du processus économique qu’il soit ou non contenu dans un document constitutionnel».

Malgré les efforts doctrinaux, force est de constater que la notion de Constitution économique des Communautés européennes reste floue. Si l’on ne peut pas parler des normes constitutionnelles qui déterminent cette Constitution économique, il n’en demeure pas moins qu’il y a des principes structurels, tels que le principe de libre circulation, de non discrimination ou de libre concurrence, qui régissent le processus économique. Mais le principe structurel de base, c’est le principe d’intégration. C’est en ce sens que nous pouvons comprendre la Constitution économique des Communautés, puis de l’Union européenne. Ainsi, la Constitution économique, c’est l’intégration économique communautaire comme loi structurelle qui régit le développement économique de la Communauté. Or, le fonctionnement de cette constitution économique sur des bases prévues dans le Traité de Rome a fait apparaître la nécessité de surmonter les disparités existantes par la mise en œuvre d’une politique sociale communautaire (Titre 1). Par la suite, les éléments essentiels de cette politique sociale sont reconnus comme des droits sociaux (fondamentaux). Cette reconnaissance est le fait à la fois du juge, et du législateur (Titre 2).


41 SAUTER Wolf, “The economic constitution of the European Union”, Columbia Journal of European Law, volume 4, 1998, p. 46.

42 Ibid, p. 47.

43 HAYEK Friedrich-August, « Competition as a Discovery Procedure », in HAYEK Friedrich-August (eds), New Studies in Fhilosophy, Politics, Economics and the History of Ideas, 1978, p. 179.

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TITRE 1: LA CONSTITUTION ECONOMIQUE ET SON DEVELOPPEMENT SOCIAL

La Constitution détermine les droits fondamentaux et les devoirs des citoyens, ainsi que le contenu et les limites des pouvoirs44 de l’Etat. Cette notion est également utilisée dans un sens économique pour désigner l’ensemble des normes juridiques qui précisent et ordonnent le cours du processus économique dans un ensemble économique donné. Dans cette perspective, le Traité de Rome de 1957 constitue, sinon la constitution, « la Charte constitutionnelle » de la Communauté45. Cette constitution a des principes structurels, tels que le principe d’intégration, de libre circulation, de non discrimination ou de libre concurrence, qui régissent le processus économique. Le principe structurel de base est le principe d’intégration. Il convient d’étudier d’abord le fonctionnement de cette Constitution économique (Chapitre 1).

Les pères fondateurs des Communautés européennes, probablement pour pouvoir se réunir autour d’un plus grand dénominateur commun, s’étaient limités à la réalisation bien sûr de la paix sur le continent européen, mais aussi d’un espace économique commun où la circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, serait libre. Or, non seulement le fonctionnement de la Constitution économique sur ces bases n’arrive pas à pallier les disparités existantes, mais il ne peut non plus effacer les distorsions qui sont issues du fonctionnement des lois du marché. Ainsi, pour faire face à ces distorsions, la mise en œuvre d’une politique sociale européenne apparaît comme la conséquence inéluctable du fonctionnement de la Constitution économique (Chapitre 2).


44 PELKMANS Jacques, European Integration: methods and economic analysis, Open University of Nedherlands, Heerlan, 1997, p. 29.

45 CONSTANTINESCO Léontin-Jean, « La Constitution économique de la C.E.E. », RTDE, Vol. 3, 1977, p. 245.

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CHAPITRE 1: LE FONCTIONNEMENT DE LA CONSTITUTION ECONOMIQUE EUROPEENNE

Dans cette perspective, le Traité de Rome est idéalisé comme la Constitution économique de la Communauté : une constitution qui s’est éloignée de son essence suivant les modifications successives (Section 1). Avec l’Acte unique européen, la Constitution économique acquiert une nouvelle dimension : le Marché intérieur. Les modifications introduites dans la Constitution économique de la CEE par l’Acte unique concernent aussi la cohésion économique et sociale qui s’annonce comme un élément important de cette constitution. C’est, en quelque sorte, la prise de conscience du fait que la libéralisation de l’espace économique ne suffit pas en elle-même et qu’il faut prendre des mesures pour faire face aux distorsions induites par le mécanisme du marché (Section 2). Le Traité de Maastricht est un tournant important dans l’histoire de l’intégration européenne, en ce qu’il transforme la Communauté économique européenne en la Communauté européenne, et établit l’Union européenne. Ce faisant, il reformule les principes et les objectifs de la Constitution économique européenne tout en enrichissant les instruments de celle-ci, en introduisant l’Union économique et monétaire (Section 3).

Section 1: Le Traité de Rome en tant que Constitution économique de l’Union européenne

§ 1: Principe constitutionnel de base : la notion d’intégration

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L’intégration européenne est une expérience unique consistant dans l’intégration économique des nations différentes. Elle est unique par ses buts : établir une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens. Elle est unique par ses institutions supranationales. Elle est unique enfin par ses réalisations : jamais dans l’histoire de l’humanité, des nations aussi différentes n’ont collaboré entre elles si intensément, n’ont mis en œuvre tant de politiques communes et n’ont rapproché des modes de vie et des situations économiques si différents au départ. Au-delà de la volonté apparente des fondateurs, ce développement ne pouvait se réaliser sans une structure institutionnelle régie par des principes structurels admis.

Afin de mieux percevoir les principes structurels de la Constitution économique européenne, il conviendrait d’identifier les « lois de composition » qui assurent la cohérence interne du système entier46. En effet, d’une part, en termes fonctionnels, le système communautaire est déterminé par un principe fondateur dont les caractéristiques juridiques sont développées par le Prof. Pescatore dans « le Droit de l’intégration »47. D’autre part, en termes substantiels, la Constitution économique communautaire incarne, comme les constitutions étatiques, l’ « officialisation d’une idée de droit »48.

Même si la notion d’intégration ne peut se comprendre que par renvoi aux conséquences qu’elle entraîne49, il convient d’en chercher une définition. En effet, intégrer consiste à réaliser la combinaison des parties en un tout. Les traités de Paris et de Rome organisent toute une série d’actions communes et d’harmonisations qui devaient concourir à une véritable interpénétration des économies des pays membres. Par conséquent, l’objectif est de susciter un phénomène de fusion entre les économies nationales. De là vient probablement une sorte de pouvoir « magique » que prenait dans l’esprit des pères fondateurs des Communautés européennes, le terme d’intégration que le Professeur Alain Buzelay définit comme « la réunion des parties en un tout »50. Aussi, pour considérer un ensemble intégré du point de vu économique, il faut que les relations entre les éléments qui la composent soient stables et reflètent une certaine cohésion.

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Ce sont avant tout des raisons politiques qui sont à l’origine des Communautés européennes. Elles étaient apparues comme le moyen de garantir la paix retrouvée avec l’Allemagne, suite au second conflit mondial. Venaient ensuite les raisons économiques tenant, en particulier, « aux besoins de reconstruction des futurs membres sur la base de l’ouverture et de la coopération »51. On opposait ainsi les résultats irrévocables de l’intégration à la précarité « qui frappe les différents engagements internationaux souscrits dans d’autres formes de coopération »52. Il semblait que l’on trouvât dans les Communautés européennes les aspects essentiels de l’intégration. D’abord, les Communautés européennes étaient créées pour permettre aux Etats européens de s’affirmer de manière plus efficace et autonome à l’échelle mondiale. Puis les Communautés européennes se sont dotées des structures institutionnelles que nécessite le processus de l’intégration. Par ailleurs, l’égalité de traitement des ressortissants de tous les pays membres se traduit par l’interdiction de toute discrimination fondée sur la nationalité ou sur d’autres critères53. Enfin, l’objectif de croissance et de développement solidaire concerne les activités économiques dans l’ensemble de la Communauté et doit engendrer « un relèvement accéléré du niveau de vie »54. Cette solidarité est consolidée, entre autres, par la politique régionale qui a pour objectif la mise en valeur des régions les moins favorisées et la création des institutions de financement qui doivent combler des déficiences de l’investissement privé dans certaines régions.

Résumé des informations

Pages
822
Année
2021
ISBN (PDF)
9783631850664
ISBN (ePUB)
9783631850671
ISBN (MOBI)
9783631850688
ISBN (Relié)
9783631812280
DOI
10.3726/b18198
Langue
français
Date de parution
2021 (Mai)
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2021. 822 p.

Notes biographiques

Ismail Hakki Musa (Auteur)

Dr. I˙smail Hakkı Musa a fait ses etudes a l’Institut International d’Etudes francaises et a la Faculte de l’Economie de l’Universite de Strasbourg. Il a etudie ensuite a la Faculte de Droit –Sciences Economiques et Gestion a l’Universite de Nancy-II et y a obtenu un Master. Sa carriere debute au Ministere des Affaires Etrangeres a Ankara et se poursuit a l’Ambassade de Turquie en Algerie, au Consulat General de Turquie a Lyon-France, a la Delegation permanente de la Turquie aupres de l’Union Europeenne a Bruxelles et au Consulat General de Turquie a Kazan-Tatarstan/Federation de Russie. Apres avoir ete Consul General de Turquie a Lyon-France, Ambassadeur de Turquie aupres du Royaume de Belgique et Sous-Secretaire d’Etat adjoint aupres du Premier Ministre, il a egalement occupe le poste d’Ambassadeur de Turquie en France de novembre 2016 a mars 2021. Dr. I˙smail Hakkı Musa a fait ses etudes a l’Institut International d’Etudes francaises et a la Faculte de l’Economie de l’Universite de Strasbourg. Il a etudie ensuite a la Faculte de Droit –Sciences Economiques et Gestion a l’Universite de Nancy-II et y a obtenu un Master. Sa carriere debute au Ministere des Affaires Etrangeres a Ankara et se poursuit a l’Ambassade de Turquie en Algerie, au Consulat General de Turquie a Lyon-France, a la Delegation permanente de la Turquie aupres de l’Union Europeenne a Bruxelles et au Consulat General de Turquie a Kazan-Tatarstan/Federation de Russie. Apres avoir ete Consul General de Turquie a Lyon-France, Ambassadeur de Turquie aupres du Royaume de Belgique et Sous-Secretaire d’Etat adjoint aupres du Premier Ministre, il a egalement occupe le poste d’Ambassadeur de Turquie en France de novembre 2016 a mars 2021.

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Titre: Les droits sociaux et le processus de constitutionnalisation de l'Union Européenne
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