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À l'épreuve d'enseigner à l'Université

Enquête en France - Préface de Marc Romainville

de Saeed Paivandi (Éditeur de volume) Nathalie Younès (Éditeur de volume)
©2019 Monographies 346 Pages

Résumé

L’ouvrage s’intéresse à la réalité plurielle de l’homo academicus, en partant des vécus et des conceptions des professeur.e.s d'université. L’enquête menée en France par les deux auteurs, de 2013 à 2017, dans un large éventail de disciplines (lettres, sciences, sciences humaines et sociales, médecine), permet de mieux appréhender les différentes manières d’être enseignant.e-chercheur.e, la condition universitaire, les conceptions de la carrière et les approches de l’enseignement mobilisées dans la pratique pédagogique. Les enseignant.e.s-chercheur.e.s parlent de leur environnement de travail, de leurs relations avec le monde étudiant et des tensions vécues au cours de leur expérience pour articuler l’enseignement, la recherche et les tâches administratives. Se développer professionnellement sur le plan pédagogique et réellement prendre en compte les étudiants dans l’approche de l’enseignement apparaît comme un défi.
Cet ouvrage a pour ambition d’aider à mieux comprendre la condition pédagogique à l’université, devenue une question d’actualité en France comme dans nombre d’autres pays. Les données de l’enquête mises en perspective avec la littérature scientifique internationale peuvent contribuer à la réflexion sur les réformes pédagogiques introduites depuis les années 2000 et les axes les plus pertinents pour améliorer le fonctionnement pédagogique de l’université et accompagner les enseignant.e.s-chercheur.e.s dans leur développement professionnel à travers un changement culturel progressif.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Préface
  • Introduction
  • Chapitre I ‒ Le métier d’enseignant-chercheur dans la tourmente des transformations de l’université
  • L’université entre enseignement, recherche et professionnalisation
  • Transversalités contemporaines
  • Enseignants-chercheurs, quelles réalités ?
  • Chapitre II – Articuler l’enseignement, la recherche et les tâches administratives
  • Synergies et tensions dans le couplage enseignement/recherche
  • Un équilibre à établir entre les trois facettes du métier
  • Chapitre III ‒ La diversité des approches de l’enseignement
  • Comment conceptualiser les pratiques d’enseignement ?
  • Trois types d’approches de l’enseignement
  • Le contexte et l’approche pédagogique
  • Devenir un praticien réflexif ?
  • Chapitre IV ‒ Apprendre à enseigner : formations plurielles
  • Référents multiples de la pratique d’enseignement
  • Un parcours dans l’enseignement scolaire
  • Le développement professionnel entre dispositifs et engagement
  • Chapitre V – Quel collectif pédagogique ?
  • Une culture de la pédagogie individualiste
  • Quelles mises en commun de la pédagogie ?
  • Le tournant d’un environnement professionnel formateur
  • Chapitre VI ‒ Les étudiants vus par les enseignants
  • La distance entre deux mondes
  • Le système universitaire et l’échec étudiant
  • Lien entre apprendre et enseigner
  • Chapitre VII ‒ Les paradoxes de l’évaluation de l’enseignement par les étudiants
  • L’évaluation s’invite dans l’enseignement universitaire
  • Trois attitudes face à l’EEE
  • À quoi servent les résultats de l’EEE ?
  • Entre vouloir changer et pouvoir changer
  • Variation entre contextes, approches pédagogiques et trajectoires
  • Les enjeux institutionnels et formatifs
  • Chapitre VIII ‒ L’évolution de la carrière enseignante entre pression institutionnelle et trajectoires individuelles
  • Diverses régulations institutionnelles
  • Temporalités professionnelles
  • Stratégies individuelles
  • Le poids d’un contexte mal régulé
  • Une vision désenchantée
  • Subir les transformations à large échelle
  • Le plaisir du métier
  • Désorientation concurrentielle et configurations fluctuantes
  • Chapitre IX ‒ Quels leviers pour le développement de la pédagogie à l’Université ?
  • Autour de l’innovation pédagogique
  • Le développement professionnel
  • L’accompagnement pédagogique
  • Conclusion
  • Références bibliographiques
  • Annexe. Méthodologie de l’enquête
  • Index

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Préface

À l’aube des années 1960, les premiers auteurs qui ont amorcé des analyses spécifiques au palier de l’enseignement supérieur se sont prudemment cantonnés à l’étude des pratiques étudiantes ; cette littérature allait rester largement dominante durant les dernières décennies du XXe siècle. En atteste en particulier le très prolifique mouvement de recherche international lié aux approches d’apprentissage (approach to learning).

Toutefois, dès le milieu des années 1960, la communauté scientifique a timidement commencé à porter également son attention sur le métier d’enseignant-chercheur. À tout seigneur tout honneur, l’ouvrage fondateur de la sociologie de l’éducation supérieure – Les héritiers : les étudiants et la culture, de Bourdieu et Passeron (1964) – a prétendu lever le voile sur la fonction de reproduction des inégalités sociales que les enseignants-chercheurs exerçaient, « à l’insu de leur plein gré » et donc de manière particulièrement efficace, selon ces auteurs. Une série de recherches connexes ont contribué à décrire le métier d’enseignant-chercheur essentiellement en ce qu’il participe à des processus dépassant largement les individus et leur volonté propre, au sein de mécanismes de perpétuation d’inégalités sociales ou de stratégies internes de domination et de pouvoir, notamment celles de l’homo academicus.

Les années 1990 ont assisté à l’éclosion d’un nouveau genre d’écrits qui portaient, non plus sur les faces cachées du métier d’enseignant- chercheur, mais plutôt sur ce que ces professionnels devraient faire. En particulier, on s’aperçoit que les transformations de l’enseignement supérieur (sa massification et l’absence d’augmentation corrélative des moyens financiers qui lui sont octroyés) rendent inéluctables certaines évolutions pédagogiques : la pratique de l’antique cours magistral est clouée au pilori (voir, par exemple, Gibbs et Jenkins, 1992) et les enseignants sont appelés à « innover » et à changer de paradigme, en quittant leur tour d’ivoire et en se centrant sur les apprentissages étudiants (voir, par exemple, Exley et Dennick, 2004). ← 11 | 12 →

Mais au fond, comment les enseignants-chercheurs gèrent-ils en réalité leur métier ? Quelles sont leurs difficultés et les tensions qu’ils ressentent lorsqu’ils tentent de concilier les aspects de plus en plus hétérogènes de ce métier ? Comment se positionnent-ils face aux injonctions d’innovation et de reddition de compte ? Plus fondamentalement, comment conçoivent-ils leur métier et que cherchent-ils à atteindre, en tant qu’agents responsables et poursuivant des buts, via leurs pratiques effectives, au sein desquels des chercheurs n’avaient cru pouvoir déceler, de l’extérieur, que des enjeux insus et des réformateurs que des signes de « résistance au changement » ?

Raisonnablement, ce sont finalement les questions par lesquelles une approche scientifique du métier d’enseignant-chercheur aurait dû commencer, mais cela n’a malheureusement pas été le cas. C’est ce qui explique que le présent ouvrage de Saeed Paivandi et Nathalie Younès est particulièrement le bienvenu et qu’il constituera, j’en suis convaincu, une solide référence de base pour les réflexions et recherches futures. En effet, les auteurs se sont donné la peine de faire entendre, dans une démarche ethnographique, phénoménologique et compréhensive, la voix des acteurs eux-mêmes et de prendre pour objet d’étude et de compréhension leur parole, en la considérant comme légitime et comme relevant de logiques plurielles qu’il s’agit avant tout d’identifier, de comprendre et de remettre en contexte.

Comme ils le revendiquent dès l’introduction, les auteurs ont eu l’ambition de contribuer à une recherche sur les différentes facettes du métier (en se centrant sur la mission d’enseignement, mais en considérant ses relations avec les autres missions), avec et à partir des « sujets » et donc en explorant et travaillant « le point de vue des intéressés ».

Et le résultat est très largement à la hauteur des ambitions annoncées. Précisons d’abord que l’assise du tableau que les auteurs tracent du métier d’enseignant-chercheur est large. Ce tableau se fonde en effet sur les résultats d’une enquête qualitative menée par entretiens auprès d’une cinquantaine d’enseignants-chercheurs issus de six groupes de disciplines. Mais il est complété, d’une part, par des observations de dispositifs et, d’autre part, par une remise en contexte large des propos recueillis à l’aide des travaux scientifiques (y compris historiques) réalisés dans le domaine, francophones et anglophones. L’ouvrage est donc beaucoup plus que le résultat d’une enquête : les auteurs ont pris en soin de recontextualiser les résultats auxquels leur enquête a abouti, conduisant à ce que chaque ← 12 | 13 → chapitre offre au lecteur une synthèse, documentée et illustrée, sur les diverses facettes du métier d’enseignant-chercheur.

Je ne vais pas, dès cette préface, dévoiler la couronne en évoquant quelques résultats particulièrement intéressants. Je préfère laisser au lecteur le plaisir de découvrir, petit à petit, les mille et un enseignements que les auteurs ont tirés de leurs différentes sources et qui permettent de répondre de manière nuancée et croisée aux questions suivantes : comment les enseignants-chercheurs prennent-ils en compte les évolutions considérables du « core business » de leur métier, en ce compris à la suite du tournant numérique ? De quelle manière tententils de concilier leurs différentes missions, malheureusement inégalement prestigieuses, et de gérer les tensions inévitables qui émergent des arbitrages à réaliser au quotidien ? Arrivent-ils à articuler l’enseignement et la recherche, selon un idéal souvent revendiqué comme une spécificité de l’enseignement universitaire ? De quels éléments tirent-ils leurs satisfactions professionnelles ? Pourquoi enseignent-ils de la manière dont ils enseignent ? Par quelles démarches s’y sont-ils préparés ou auraient-ils souhaité s’y préparer ? Quelle est la place de l’équipe pédagogique dans leur réflexion et action pédagogique ? De quelle connaissance et de quelle vision du monde étudiant disposent-ils ? En particulier, quelle place pourraient prendre les avis des étudiants dans l’évaluation de leurs enseignements et avec quelle légitimité à leurs yeux ?

Qu’il me soit juste permis d’épingler deux observations transversales particulièrement interpellantes. La première a trait à la très importante « pluralité de configurations articulant différemment les missions d’enseignement, de recherche et d’administration » relevée par les auteurs. Le lecteur sera en effet surpris d’observer à quel point, à la suite de la complexification et du brouillage des missions, se dévoilent en réalité – derrière une étiquette commune d’« enseignant-chercheur » – des incarnations individuelles très contrastées selon les contextes, les étapes de la carrière et les projets personnels. Finalement, on a souvent affaire à ce que l’on pourrait considérer comme des métiers fondamentalement différents, par exemple entre un chercheur « publiant » ayant développé de fortes coopérations de recherche à l’international et un administrateur ayant accepté de lourdes missions de gestion interne de son établissement. La seconde observation concerne l’étrange paradoxe relevé entre, d’une part, la liberté académique dont les enseignants-chercheurs jouissent encore impliquant un faible taux de prescription de leurs tâches et, d’autre part, l’énorme pression ressentie, pour une bonne part auto-infligée donc, ← 13 | 14 → si je puis dire : c’est parce qu’ils tentent de se conformer à des normes ou à des idéaux choisis (par exemple, viser l’excellence dans au moins deux des trois missions, participer à des réseaux internationalement reconnus ou répondre à toutes les sollicitations de conférence ou de jury) que certains enseignants-chercheurs finissent épuisés, débordés et expriment un sentiment de souffrance au travail, vécue de plus dans la solitude. Cruel paradoxe, c’est donc souvent l’enseignant-chercheur qui lui-même charge sa propre barque au point de générer un sentiment de désenchantement, ce qui en dit long sur les nombreux paradoxes des conditions actuelles d’exercice de ce métier.

Marc Romainville
Professeur à l’Université de Namur
Novembre 2018

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Introduction

Comment les enseignants-chercheurs conçoivent-ils, vivent-ils et pratiquent-ils leur métier à l’université ? Comment apprennent-ils à enseigner ? Quelle place accordent-ils aux pratiques d’enseignement et à la pédagogie ? Que pensent-ils de l’apprentissage des étudiants et en quoi s’adaptent-ils à leurs besoins ? Comment font-ils évoluer leurs enseignements en fonction des mutations technologiques et sociétales ?

À l’épreuve d’enseigner à l’université se focalise sur les tensions et les décalages liés à l’acte d’enseigner dans une université sous la pression de la politique institutionnelle visant la valorisation de la pédagogie et d’un contexte social en évolution permanente. L’ouvrage s’intéresse à la réalité plurielle de l’homo academicus, à sa mission d’enseignement par rapport à la recherche et à sa carrière universitaire en partant des vécus et des conceptions des intéressés qui ont voix au chapitre dans le cadre d’une enquête menée en France, de 2013 à 2017. Nous tentons de comprendre comment la promotion institutionnelle des innovations pédagogiques est perçue et parvient à bousculer des habitudes. Les enjeux sont en effet importants à la fois sur les plans épistémologique, pédagogique et social. Une approche ethnographique est privilégiée pour appréhender les sujets dans leur univers professionnel et porter un regard de l’intérieur sur leur monde. Le choix de s’intéresser à la parole des enseignants-chercheurs s’explique avant tout par la nécessité de mieux appréhender leur culture, leur pensée et leur imaginaire collectif1. Comme dans tout corps professionnel, un ensemble de croyances et de représentations orientent leur agir et la manière de concevoir et mener leur parcours académique.

Dans les pays anglo-saxons ou dans certains pays francophones comme la Belgique ou la Suisse, surtout depuis les années 19802, on trouve maintes ← 15 | 16 → parutions à propos des enseignants-chercheurs. Par contre en France, depuis les premières publications sur la pédagogie universitaire (Bireaud, 1990a), les suivantes se sont focalisées davantage sur l’exploration de méthodes et de solutions à visée pratique, pour développer des démarches actives et centrées sur l’apprentissage étudiant. Il y en a en revanche très peu3 dans lesquelles le point de vue des intéressés se trouve exploré et travaillé. De plus, le courant promoteur ou dépréciateur de la qualité et de l’expertise laisse également trop souvent dans l’ombre la parole des universitaires4.

Cette recherche s’inscrit dans un contexte de profondes modifications bouleversant les cadres et les pratiques du monde du supérieur. La période actuelle est marquée entre autres par une pression institutionnelle sans précédent avec la mise en place progressive de dispositifs destinés à former les enseignants, à promouvoir des innovations pédagogiques et à évaluer l’enseignement. Ce mouvement se situe dans le cadre des évolutions structurelles en cours depuis plusieurs décennies, sources de fortes tensions : massification, internationalisation, exigence de résultats, concurrence accrue entre les établissements… Être au cœur de la société de la connaissance tout en répondant à un marché du travail de plus en plus exigeant constitue un défi permanent d’adaptation. L’université est plus que jamais confrontée à des politiques et des process de rationalisation de l’action publique à travers des technologies de gouvernement dont les indicateurs sont désormais les instruments privilégiés d’une orientation managériale défiant ouvertement certaines traditions et valeurs du monde académique. Dans un nombre important de publications, l’accent est mis sur les transformations en cours5. La pédagogie à l’université semble désormais vivre à l’heure du numérique devenu omniprésent ← 16 | 17 → dans le discours de l’innovation. Et l’association de l’enseignement et de l’apprentissage constitue désormais un socle d’une quête de pédagogie davantage tournée vers l’apprentissage étudiant et le savoir « utile ».

Mais on sait très peu de choses sur la réception par les intéressés de ce tourbillon de réformes et de prescriptions, souvent orientées du haut vers le bas. Les deux rapports d’études demandés par la DGESIP6 focalisés sur les questions pédagogiques, publiés en 2015 et 2016, tendent à dresser un bilan mitigé quant à la mobilisation enseignante7. Le métier d’universitaire, qui est un des plus anciens, a traversé les époques depuis l’université médiévale centrée sur la mission d’enseignement8. Les manières de faire héritées du fond des âges, faisant se rencontrer dans un espace privilégié maîtres et disciples, peu à peu apparues inadaptées, voire désertées, ont progressivement laissé place à de nouvelles formes articulant des activités variées. À l’université moderne et élitiste de recherche née en 1809 à Berlin a succédé une université de masse, qui se voit confrontée aux besoins de ses étudiants. Le temps de la soumission à l’autorité du professeur transmettant verticalement un savoir savant paraît révolu. Ainsi le cours magistral est-il généralement décrié alors même qu’il reste un pilier de l’institution, réinterprété grâce aux outils numériques pour répondre à la diversification et à l’augmentation des publics. La pédagogie, à la naissance des premières formes d’institution d’enseignement, se retrouve ainsi à la croisée de chemins divergents qui se multiplient, se contredisent, se perdent aussi.

En partant de ces constats, nous avons tenté d’ouvrir « une boîte noire » des pratiques d’enseignement à partir d’une enquête ethnographique par entretiens menée dans deux universités françaises en 2013 et 2014 ‒ Université de Lorraine et Université Clermont-Auvergne ‒ intégrant une série d’observations des dispositifs mis en place. Parallèlement, les auteurs ont, jusqu’à ce jour, participé à plusieurs investigations au niveau national9 permettant d’enrichir la connaissance de la condition ← 17 | 18 → universitaire. L’enquête a été réalisée auprès de 49 enseignants-chercheurs dans six groupes de disciplines : sciences sociales et humaines (sociologie, sciences de l’éducation, psychologie), sciences exactes et expérimentales (mathématiques, biologie, physique, sciences de la terre, chimie), sciences appliquées (génie civil, informatique, mécanique), STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives), médecine, droit et sciences économiques, lettres10. Les enseignants-chercheurs interviewés avaient fait l’expérience de l’évaluation de l’enseignement par les étudiants dans au moins un de leurs enseignements assurés durant l’année en cours ou l’année précédente. Le guide d’entretien a été conçu autour des thèmes suivants :

les approches et pratiques de l’enseignement et de la pédagogie ;

l’apprentissage étudiant, les étudiants en difficulté et la responsabilité éventuelle de la pédagogie dans l'échec des étudiants ;

les liens avec l’environnement universitaire, le travail en équipe, la place de l’équipe pédagogique et l’activité collective ;

la prise en compte du feed-back étudiant, la perception de l’évaluation de l’enseignement par les étudiants (pertinence, validité, utilité) et l’appréciation de ses résultats ;

le parcours universitaire, la carrière académique, la formation pédagogique éventuelle et le développement professionnel.

L’expérience et le vécu des universitaires, leurs rapports avec l’environnement professionnel ordinaire et la signification de la réalité de l’université ont été appréhendés dans une perspective phénoménologique, visant à saisir le point de vue contextualisé des acteurs concernés sur la mission d’enseignement, le sens accordé aux changements institutionnels en cours et leurs effets éventuels sur leurs pratiques effectives. Nous retranscrivons de longs extraits des discours recueillis que nous donnons à lire comme parole vive.

Les analyses des données mises en perspective à la fois avec la littérature scientifique et avec les spécificités de l’université française ont permis de dégager plusieurs pistes de réflexion mettant en évidence la diversité des contextes (personnels, sociaux, institutionnels, culturels). Alors que l’expression enseignant-chercheur11 est considérée comme un allant de soi, ← 18 | 19 → elle cache en fait une pluralité de configurations articulant différemment les missions d’enseignement, de recherche et d’administration. Les enseignants-chercheurs déclarent un vaste éventail de pratiques qui se situent entre méthodes directives magistrales et méthodes actives et participatives. Il s’agit d’une répartition entre deux pôles plus ou moins opposés : le premier, centré sur l’enseignant, privilégiant la transmission du savoir, le second, focalisé davantage sur les étudiants, s’appuyant sur les méthodes actives. L’enquête met également en évidence que ces approches sont tout à la fois contextualisées (disciplines) et liées à des stratégies et choix individuels, étant orientées par les conditions de milieu dans leurs différentes composantes (curriculum, équipe, dispositifs…), ainsi que par les expériences et vécus singuliers des acteurs. Les interviewés parlent aussi de leur environnement de travail, de la relation avec le monde étudiant, du défi du développement professionnel, notamment en rapport avec la pédagogie, ou encore de la prise en compte des étudiants dans leur approche de l’enseignement.

Cinq récurrences parcourent l’ouvrage :

le constat d’un déséquilibre persistant et perturbant entre la recherche et l’enseignement au détriment de ce dernier, avec l’entrée en force des tâches administratives ;

l’impensé de la pédagogie alors même que se mettent en place institutionnellement le numérique, considéré comme à même de résoudre les difficultés de l’université (flexibilité, MOOC, jeux, collaboratif, inclusion…) et l’évaluation de l’enseignement ‒ en particulier par les étudiants – qui s’impose comme un outil de management indispensable ; deux facteurs déterminants auxquels une attention particulière est portée ;

l’absence ou la faiblesse de formation pédagogique initiale et continue et le caractère limité des modalités du développement professionnel en rapport avec les questions pédagogiques durant la carrière universitaire ;

Résumé des informations

Pages
346
Année
2019
ISBN (PDF)
9782807610910
ISBN (ePUB)
9782807610927
ISBN (MOBI)
9782807610934
ISBN (Broché)
9782807610903
DOI
10.3726/b15759
Langue
français
Date de parution
2019 (Juillet)
Published
Bruxelles, Bern, Berlin, New York, Oxford, Wien, 2019, 346 p., 5 ill. n/b, 7 tab. n/b

Notes biographiques

Saeed Paivandi (Éditeur de volume) Nathalie Younès (Éditeur de volume)

Saeed Paivandi est professeur en sciences de l’éducation à l’Université de Lorraine et membre du LISEC depuis. Il est également chercheur associé à l’OVE national. Ses travaux de recherche se focalisent sur enseigner et apprendre dans l’enseignement supérieur dans une perspective sociologique. Maîtresse de conférences en sciences de l'éducation à l'Université Clermont-Auvergne et membre du laboratoire ACTé, Nathalie Younès, présidente de l'ADMEE-Europe, mène des recherches sur l’évaluation et la pédagogie à l’université.

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Titre: À l'épreuve d'enseigner à l'Université
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