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Noûs

Prendre une décision Préface de Marcel Voisin

de Nicole Decostre (Éditeur de volume) Matthew Lipman (Auteur)
©2021 Manuels 312 Pages

Résumé

Jouir d’un jugement adéquat au long de la vie grâce à une véritable éducation de la pensée, si possible dès l’enfance et, par conséquent, pouvoir décider de façon efficace, représente le but essentiel de l’auteur. Cela est particulièrement important pour préserver la démocratie par la compétence d’une citoyenneté lucide et responsable.
Mais c’est par une histoire à la fois réaliste et merveilleuse, suite directe de Pixie, que Lipman nous plonge dans les questions les plus actuelles : une éducation appropriée à l’action, des relations positives avec la nature et les animaux, la solidarité dans les épreuves, la reconnaissance de l’autre, le dialogue des générations, la préservation de l’imagination et de la créativité, etc. Notre avenir humain en dépend. Il faut donc s’y appliquer car « l’éducation morale bien menée est tout, sauf facile. »

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Préface
  • TABLE DES MATIÈRES
  • NOÛS
  • Chapitre 1
  • Chapitre 2
  • Chapitre 3
  • Chapitre 4
  • Chapitre 5
  • Chapitre 6
  • Chapitre 7
  • Chapitre 8
  • Chapitre 9
  • Prendre Une Décision
  • Introduction
  • I. Éducation morale dans la formation du caractère
  • II. La recherche éthique – Approche de l’éducation morale par la Philosophie pour Enfants
  • IDÉES DIRECTRICES
  • CHAPITRE I –
  • 1. Bien
  • 2. Mentir
  • 3. Composer des histoires
  • 4. Avoir des droits
  • 5. L’équité
  • 6. Du dedans et du dehors
  • 7. Inventé ou réel
  • 8. Possible
  • 9. Croissance et changement
  • 10. Les cadeaux
  • 11. Intelligent
  • 12. Apprendre
  • 13. Enseigner
  • 14. Être traité(e) comme une personne
  • 15. Pratique et réalisation
  • CHAPITRE II –
  • 1. L’amitié
  • 2. Penser
  • 3. Les humains
  • 4. Mettre d’autres en danger
  • 5. L’importance
  • 6. Questions et réponses
  • 7. Comprendre
  • 8. Se sentir rejeté
  • 9. Réfugiés politiques et demandeurs d’asile
  • 10. Innocemment
  • 11. Conséquences
  • 12. Conséquences légales
  • CHAPITRE III –
  • 1. Prendre des décisions
  • 2. Être heureux
  • 3. Le sauvetage
  • 4. Qu’est-ce que la philosophie ?
  • 5. La philosophie à l’école primaire
  • 6. Les voleurs
  • 7. Se vanter
  • CHAPITRE IV –
  • 1. Comment vivre ?
  • 2. Bien et mal
  • 3. Satisfaction
  • 4. Comment se sentir à propos de bien agir ?
  • 5. Qu’est-ce qui a de la valeur ?
  • 6. Moral
  • 7. Être fier/fière
  • 8. Se demander, s’étonner, être émerveillé
  • 9. La délibération
  • 10. Points de vue théoriques prédominants de l’éthique
  • 11. Considérations et critères
  • 12. Accident ou coïncidence
  • 13. Partager
  • 14. Les alternatives
  • 15. Honnête
  • 16. Les vertus et les vices : des dispositions
  • 17. Le caractère moral
  • 18. Les émotions
  • 19. Raisonner
  • 20. Les jugements
  • 21. Imagination et imagination morale
  • CHAPITRE V –
  • 1. Les mutants
  • 2. Être déloyal ou trahir
  • 3. Préserver
  • 4. Intégration et solidarité
  • 5. L’individualité
  • 6. Le sacrifice
  • 7. Révéler
  • 8. Beau/belle
  • 9. Humain
  • 10. Saint(e)
  • 11. La punition
  • 12. Être prêt
  • 13. Les bonnes raisons
  • 14. Vrai
  • 15. Bien
  • 16. Les standards
  • CHAPITRE VI –
  • 1. Faire du mal
  • 2. Les intentions
  • 3. Le bénéfice
  • 4. Tout a-t-il une raison ?
  • 5. Les objectifs
  • 6. Pourrait-on être trop humain ?
  • 7. Compter sur les autres
  • 8. La raisonnabilité
  • 9. Pour toujours
  • 10. Éducation morale et styles d’enseignement
  • CHAPITRE VII –
  • 1. La recherche éthique
  • 2. Méthode d’instruction morale de Melle Merle
  • 3. Première liste de vertus de Melle Merle
  • 4. Les obligations
  • 5. L’intégrité
  • 6. Chacun à son tour
  • 7. Les qualités intellectuelles
  • 8. La conversation
  • 9. Le critère de pertinence
  • CHAPITRE VIII –
  • 1. Théorie des émotions et des perceptions selon Isabel
  • 2. Se soucier de
  • 3. Les relations
  • 4. Les communautés
  • 5. La règle d’or
  • 6. Liste des vertus et des vices selon Geraldo
  • 7. Force, empressement, disposition
  • 8. Le caractère
  • 9. Les analogies
  • 10. Le jugement
  • 11. Le raisonnement moral
  • 12. L’imagination morale
  • 13. Tenir compte des circonstances
  • 14. Principes moraux ou maximes morales
  • 15. Élimination de la cruauté : un idéal moral
  • 16. L’adoption
  • 17. Les procédures
  • CHAPITRE IX –
  • 1. Kidnapper
  • 2. Être vigilant
  • 3. La modestie
  • 4. L’éducation
  • 5. Justifier ses décisions
  • 6. La cohérence
  • 7. La nature
  • 8. Se libérer et être libre
  • 9. Les idéaux
  • 10. L’amitié
  • 11. Parole et langage
  • 12. La perfection
  • 13. La réflexion
  • 14. « Connais-toi toi-même »
  • 15. La persuasion
  • 16. Les obligations
  • 17. Les enseignants
  • 18. Concessions et compromis
  • 19. “Caring”

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Chapitre 1

I.

Vrai, me revoilà, c’est moi, Pixie ! Je suis tellement heureuse de me retrouver ici !

Quoi ? Vous ne vous souvenez pas de moi ? Comment pouvez-vous m’avoir oubliée ? Ne vous rappelez-vous pas la créature mystère et l’histoire mystérieuse, l’excursion au zoo et Brian qui ne disait jamais rien et aussi ma meilleure amie Isabel et ma sœur Miranda ?

Qu’est-ce que j’ai entendu dire, que j’aurais tout inventé ? Mentirais-je ?

Inventer des histoires ou mentir, c’est très différent. Moi j’imagine simplement des histoires.

Bien sûr, que j’invente une histoire n’implique pas que vous ayez le droit de l’entendre. Tout de même, je pourrais vous la raconter.

C’est que je viens d’en imaginer une nouvelle. Ce n’est pas la même que mon ‹histoire mystère› : c’est autre chose. Et j’aimerais vous la raconter.

Son titre ? Noûs.

C’est-à-dire ? Vous allez le découvrir. Un peu de patience !

En plus, que voulez-vous que je fasse, que je vous la raconte tout de suite, comme ça ? Peut-être une peinture ←19 | 20→pourrait-elle le faire alors qu’une histoire doit se dérouler, ce qui prend du temps.

J’adore inventer des histoires et les voir se dérouler. C’est encore plus marrant que d’écouter celles qui sont inventées par d’autres. Particulièrement celles écrites par les adultes pour les enfants. Beurk ! On ne dirait pas qu’ils ont jamais eux-mêmes été enfants !

Il y a même ces adultes qui, se faisant passer pour des enfants, imaginent des histoires pour d’autres enfants ! Quelle horreur !

Bon, pour être honnête, je dois admettre que cela peut parfois se faire. Je veux dire : prenons les enfants qui ne parlent pas, quelqu’un doit bien essayer de le faire pour eux !

Voyez Brian ! Il n’a pas dit un mot pendant des années ! Quelqu’un aurait dû essayer de parler pour lui. Je sais que j’aurais aimé raconter son histoire. Mon amie Isabel m’a dit que c’était mal de mettre mes mots dans la bouche de quelqu’un d’autre. Je ne vois pas en quoi c’est mal.

Ainsi, l’histoire que je m’apprête à vous raconter, est-ce mon histoire à propos de Noûs ou est-ce l’histoire de Noûs ? En réalité, c’est une histoire à propos de Noûs et elle n’est pas exactement telle que Noûs la raconterait.

Pourquoi pas ? Chaque personne, chaque lieu, chaque chose possèdent une histoire qu’ils sont les seuls à pouvoir raconter de l’intérieur. Tous les autres ne peuvent les raconter que d’un point de vue extérieur.

Que voulez-vous dire par « Noûs existe-t-elle vraiment ? » Et moi, suis-je réelle ? Et vous, l’êtes-vous ? En êtes-vous sûrs ?

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Prouvez-le ! Prouvez-moi que vous n’êtes pas simplement un personnage dans l’histoire de quelqu’un d’autre. Pas facile, hein ?

Quoi qu’il en soit, j’avais à vous dire certaines choses en guise d’introduction à mon histoire. Mais… comment savez-vous que je ne suis pas déjà en train de vous la raconter ? Peut-être mon introduction débouche-t-elle directement dans l’histoire. C’est possible.

Comme je le disais, il ne s’agit pas de mon histoire mystère, ni de l’histoire de la manière dont est née mon histoire mystère. Comme il s’agit de choses qui se sont passées après l’excursion au zoo, c’est donc une histoire différente.

Évidemment, les personnages de cette nouvelle histoire sont les mêmes que ceux de la précédente. Peut-être un peu plus âgés. Toutefois, dans la nouvelle, Brian est toujours Brian, je suis toujours moi et notre relation n’a pas changé.

Je dois admettre qu’à partir de l’excursion au zoo, quand Brian s’est mis à parler, il est devenu plus ou moins comme nous tous. Mais en même temps, il a commencé à agir de plus en plus mystérieusement. Une fois l’école finie, il s’encourait. Où il allait et ce qu’il faisait restait toutefois pour nous un mystère. Peu après, nous avons rencontré quelqu’un d’encore plus mystérieux que lui. Nous étions ainsi face à des mystères sur des mystères ! Cela nous faisait une montagne de mystères !

II.

Tiens, je vais vous raconter ce qu’il m’est arrivé la nuit dernière. Bien que cela ne fasse pas partie de ma nouvelle ←21 | 22→histoire, je ne peux rater l’occasion de vous le raconter tant que c’est encore frais dans ma mémoire.

Hier soir, nous avons eu la visite de la sœur de ma mère, Tante Marie. Et vous savez comment sont les tantes : dès son arrivée, elle nous a offert des cadeaux. Pour moi, un foulard en soie que je ne porterai jamais, au grand jamais et, pour ma sœur, une boîte de chocolats que Miranda a refusé de partager avec qui que ce soit et qu’elle a emportée dans notre chambre.

M’étant réveillée en pleine nuit, je me suis demandé quelle heure il était. Je n’ai pas de réveil près de mon lit et l’horloge de la cuisine me semblait vraiment loin. Pourquoi alors ne pas jeter un coup d’œil au réveil de Miranda ?

Le réveil de Miranda était sur la petite table de nuit auprès de son lit, juste derrière la boîte de chocolats. J’ai marché sur la pointe des pieds jusqu’à son côté. Pour bien voir le cadran, j’ai dû bouger la boîte, ce qui, je ne sais comment, a coincé un morceau de chocolat entre mes doigts. À ce moment-là, Miranda, réveillée, s’est mise à hurler. La surprise m’a fait bousculer la boîte qui est tombée, faisant rouler sur le sol tous les chocolats.

En voulant retourner de mon côté, je n’ai réussi à ramasser que deux ou trois chocolats alors que Miranda a sauté sur toute la boîte ! Trouvant qu’elle n’avait pas besoin de hurler aussi fort, je lui ai à mon tour crié de se taire car elle allait réveiller toute la maisonnée.

J’ai sauté dans mon lit, ma couverture et ma couette sur la tête. Je me suis alors mise en boule et j’ai englouti un chocolat. Il se fait que c’était ma sorte préférée : une truffe ! Comme c’était bon !

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Pendant ce temps, Miranda essayait de me frapper. Mais l’épaisseur de ma couette l’a empêchée de me faire mal. Je suis donc restée ainsi, calmement, la truffe fondant lentement dans ma bouche tandis que ses coups me faisaient penser à une pluie qui tambourinait doucement sur le toit. Pendant quelques minutes, c’était le paradis !

III.

Ça va, maintenant je peux revenir à mon histoire. Cette partie sera vraiment la partie de l’histoire de Brian telle qu’il me l’a racontée. C’est son histoire avec la girafe.

Il m’a dit l’avoir rencontrée pour la première fois il y a un an, le jour de notre visite ensemble au zoo. Depuis lors, pratiquement chaque jour après l’école, il s’est arrêté au zoo en rentrant chez lui, passant un moment avec cet animal devenu son amie.

Tandis qu’il me racontait cela, je pensais : « Quelqu’un de sensé passerait-il tout ce temps avec un girafon ? Ce que je veux dire, c’est que les girafes, ça va si on aime les longs cous ; à part ça, je ne vois pas ce qu’elles ont de très captivant. Tout ce qu’elles font, c’est marcher et manger, comme des oies. »

Brian me disait avoir de la girafe une tout autre impression. Lors de notre excursion au zoo, la petite girafe n’était âgée que de quelques jours. (Une heure seulement après sa naissance, elle avait réussi à se mettre debout !) Au début, elle chancelait très fort, ses pattes et son cou semblaient trop longs pour sa tête et son corps. Ce qui l’avait le plus impressionné, c’étaient ses grands yeux avec leurs longs, longs cils.

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Voici ce qu’il m’a raconté : « La première fois que je m’étais trouvé devant la clôture, ma présence avait éveillé la curiosité de la petite girafe qui s’était approchée pour m’observer. Je l’avais saluée d’un : “Bonjour toi !” en lui tendant la main. Elle m’avait répondu en étendant une patte avant vers moi, comme le fait un chien. Nous avions ainsi en quelque sorte échangé une poignée de main. Elle m’avait jeté un regard intelligent avant de s’éloigner en trottinant. Un moment après, elle était revenue. Elle avait émis un joli son qui faisait un peu penser au “Bonjour toi !” que je lui avais fait. Elle m’avait à nouveau tendu sa patte avant pour que je la prenne. Elle s’en était allée en galopant pour revenir aussitôt et se frotter à mon front.

C’est alors que j’ai eu l’idée de lui apprendre quelques mots. Sortant une carotte de ma poche, je lui ai dit : “Mange !” J’ai alors coupé la carotte en deux et nous en avons mangé chacun une moitié. Le lendemain, je lui ai dit : “Cours !” en me mettant à courir. Elle a fait de même. Après quelques essais, elle courait chaque fois que je lui disais de le faire. Tout ce que je me faisais faire à moi-même, elle le faisait après moi.

Qu’elle apprenne un mot par jour ne me satisfaisait pourtant pas. Je lui ai dit : “Fais un effort ! Je n’arrêterai pas de t’aiguillonner tant que tu ne parleras pas aussi bien que moi.” Entendant cela, la petite girafe m’avait regardé tristement. Deux grosses larmes avaient coulé sur ses joues. Elle avait émis une espèce de petite toux, comme pour s’excuser. Marchant lentement vers l’autre côté de son enclos, elle s’était couchée en tournant son cou et en déposant sa tête sur son dos. Elle avait alors fermé ←24 | 25→ses grands yeux merveilleux et, même si elle paraissait endormie, la tristesse restait sur son visage.

J’ai pensé aux années que j’avais passées muré dans mon silence. Je savais que, du fond du cœur, la girafe souhaitait échapper à son sort, tout comme moi j’avais souhaité échapper au mien. J’ai donc décidé de continuer à lui apprendre à parler. »

D’accord, je sais ce que vous pensez : vous ne croyez pas que Brian ait pu apprendre à parler à une girafe. Tout de même, votre famille vous a bien appris à parler, un mot à la fois, non ? Quelle est alors la différence entre vous et une girafe intelligente ? Peut-être cette girafe est-elle une personne ! Peut-être le sont-elles toutes !

Résumé des informations

Pages
312
Année
2021
ISBN (PDF)
9782807616103
ISBN (ePUB)
9782807616110
ISBN (MOBI)
9782807616127
ISBN (Broché)
9782807616097
DOI
10.3726/b17489
Langue
français
Date de parution
2021 (Mars)
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2021. 312 p., 2 ill. n/b.

Notes biographiques

Nicole Decostre (Éditeur de volume) Matthew Lipman (Auteur)

L’auteur : Matthew Lipman (1923-2010) est un logicien, philosophe et pédagogue américain. Disciple de John Dewey, il a conçu un programme de construction et de libération d’une pensée qui assure les meilleures chances de réussite à l’école et dans la vie : « Philosophy for Children », reconnu par l’UNESCO et pratiqué avec succès dans plus de soixante pays. Malgré cette appellation, ce programme, composé de romans accompagnés de manuels, peut être utilisé aussi avec des adultes. Les manuels présentent des exercices spécifiques et progressifs utilisables selon les besoins ou le choix du groupe. Matthew Lipman est le fondateur de l’IAPC (Institute for the Advancement of Philosophy for Children) à l’Université Montclair (New Jersey). La traductrice : Nicole Decostre est licenciée en histoire (ULB) et professeur retraitée. Elle est la traductrice de Matthew Lipman (À l’École de la pensée, 1995 ; Mark, Recherche sociale, 2009 ; Lisa, 2011 ; Pixie, 2018), de Fred Jerome (Einstein, un traître pour le FBI, 2005), de Ronald Aronson (Vivre sans Dieu, 2010) et de Tim Sprod (La Science dialoguée, 2012).

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