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Récits mythiques – récits modernes

La mythologie antique dans le roman contemporain de langue allemande

de Emmanuelle Terrones (Auteur)
©2016 Monographies 582 Pages
Série: Contacts, Volume 1

Résumé

Dans l’après-guerre comme dans les années 80, la recrudescence des mythes grecs et latins dans une trentaine de romans de langue allemande entraîne un jeu passionnant de narration et de réécriture. Entre création et recréation, la redécouverte d’un mythe interroge à la fois un fondement culturel essentiel et le monde contemporain. Mais le recours au mythe laisse aussi affleurer toute une interrogation sur le genre choisi. Jusqu’où peut aller le roman contemporain quand il véhicule un mythe ? Quatre textes (Der blaue Kammerherr de Wolf von Niebelschütz, Amanda de Irmtraud Morgner, L’esthétique de la résistance de Peter Weiss et Medusa de Stefan Schütz) ont poussé la réflexion jusqu’à penser le renouveau d’un genre, l’épopée, alliant ainsi de façon plus conséquente et plus audacieuse que les autres romans une réflexion sur le fond et sur la forme. Du mythe à l’épopée, c’est le caractère singulier d’une récriture contemporaine qui ressort de cette étude.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Introduction
  • Première partie : Les mythes antiques dans le roman contemporain : jeu de narration, jeu de réécriture
  • Chapitre premier : Création et/ou recréation
  • Création et actualisation
  • Redécouvrir l’essence du mythe
  • Variation de l’identique
  • Chapitre deuxième : Mise en œuvre d’une réécriture
  • Construction et reconstruction
  • Une réécriture contemporaine : fragments, perspective plurielle et expérience des limites
  • Chapitre troisième : Mythe et monde contemporain : analogies et différences
  • Mythe et réalité contemporaine
  • Mythe et Histoire
  • Mythe et individu
  • Mythe, langage et littérature
  • Deuxième partie : Du recouvrement de la tradition : du mythe à l’écriture épique
  • Chapitre premier : Der blaue Kammerherr de Wolf von Niebelschütz : une renaissance de la culture antique ?
  • Renaissance et fabulation
  • Mythologie, Histoire et monde en trompe-l’œil
  • Serpent immense, sinfonia et tulipier
  • Chapitre deuxième : Amanda de Irmtraud Morgner : Reconquête d’une tradition
  • Mythologie antique : une double quête
  • Mythologie et réécriture de l’Histoire : une « agitation productive »
  • Amanda, une « forme ouverte »
  • Troisième partie : Mythologie et épopée
  • Chapitre premier : Peter Weiss, L’esthétique de la résistance : mémoire et résistance
  • Mythe et travail de mémoire
  • Mythologie et Histoire, souvenir et langage du devenir
  • Une « épopée de la résistance » ?
  • Chapitre deuxième : Medusa de Stefan Schütz : chaos intérieur
  • Variations mythologiques complexes et contradictoires
  • Mythe et « énergie du mouvement »
  • De la « prose épique »
  • Quatrième partie : Au croisement des chemins : Mythologie, roman et épopée
  • Chapitre premier : Mythologie et épopée, des fondements communs
  • Rapport au monde et au savoir : une communauté de conceptions
  • Mythes et épopées : formes communes
  • Chapitre deuxième : Épopée et roman, un rapport dynamique
  • Penser un devenir de l’épopée et du roman
  • Épopée et roman : des enjeux distincts et complémentaires ?
  • Approches divergentes de questions identiques ?
  • Parole épique
  • Conclusion
  • Liste des abréviations
  • Liste chronologique des œuvres traitées
  • Index
  • Bibliographie
  • Titres de la collection

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Introduction

Berceau de notre culture occidentale, les mythes antiques ne cessent de fasciner les écrivains et de traverser leurs œuvres. Tantôt mise en avant, tantôt affaiblie, la tradition n’est jamais rompue à travers les siècles, comme l’indique N. Bock-Lindenbeck : « Dépasser le mythe, créer une nouvelle mythologie, s’éloigner du mythe, reproduire le mythe – le traitement littéraire et pictural du mythe se réalise apparemment au cours des siècles selon un principe d’alternance.1 » Quand les mythes paraissent dans la pensée contemporaine, il semble que la référence à l’Antiquité ne soit pas automatique. Quelques exemples en France montrent que le retour à la mythologie antique a toujours été lié à des problèmes d’actualité contemporaine : La machine infernale de Jean Cocteau datant de 1934, les pièces de Jean Giraudoux (La guerre de Troie n’aura pas lieu créée en 1935, Électre deux ans plus tard), celles de Jean Anouilh (Antigone en 1944 et Médée en 1946), mais aussi dans le domaine de la prose, le texte de Jean Giono intitulé La naissance de l’Odyssée (1938), par exemple.

Mais le phénomène le plus caractéristique s’est produit dans les pays de langue allemande. Depuis 1945, on note un retour important aux mythes antiques. La mythologie grecque et latine2 rassemble des ← 13 | 14 → récits qui s’étendent du chaos originel aux destinées individuelles, incluant des généalogies complexes de dieux, de demi-dieux et de héros dont la densité rend difficile une représentation synoptique. Quand les écrivains puisent dans le réservoir mythologique, ils s’intéressent à des personnages très divers – du chaos jusqu’aux débuts de l’Humanité, monstres mythiques, Titans, dieux olympiens, demi-dieux et héros sont redécouverts – et tirent profit de la richesse et de la profondeur des thèmes et des épisodes : métamorphoses, combat des Titans, voyage des Argonautes, travaux d’Hercule, guerre de Troie et errances d’Ulysse, la multiplicité des mythes évoqués est évidente. La notion de mythe présente d’emblée une ambiguïté, origine de confusions diverses. Au sens étymologique, « mythos » désigne tant une « suite de paroles qui ont un sens » que leur contenu, l’avis, la pensée3. À la fois paroles et objet de ces paroles, le mythe échappe à une définition normative et connaît des reflets changeants au fil des époques. Depuis les récits attribués à Homère jusqu’aux textes mythologiques du 20ème siècle, les sources littéraires explorées par les auteurs contemporains sont multiples, diversifiées, souvent contradictoires. À la littérature s’ajoutent les représentations picturales, plastiques et musicales qui ont contribué à cristalliser la conception de chacun de ces mythes au fil des siècles.

Le théâtre offre apparemment aux mythes un espace toujours fertile. En RFA, Walter Jens récrit le mythe de Philoctète, il adapte librement l’Ajax de Sophocle et imagine un dialogue entre Sophocle et Brecht : le matériau mythique circule et se transforme de différentes manières dans ses textes dramatiques4. En Suisse, Friedrich Dürrenmatt présente deux « pièces grecques » très satiriques5. Mais c’est en RDA que les auteurs dramatiques témoignent de l’intérêt le plus vif pour la mythologie ← 14 | 15 → antique : les travaux de Volker Braun, Heiner Müller et Peter Hacks illustrent dans leur diversité la créativité que peuvent engendrer ces mythes6. Leur présence est plus difficile à circonscrire dans le domaine lyrique : maints recueils de poèmes revisitent l’univers mythologique, lui empruntant ses images et ses métaphores. Stephan Hermlin, Heinz Kahlau, Louis Fürnberg ou encore Erich Arendt accordent dans leur poésie une place importante à des thèmes et des figures mythologiques7.

Cependant, la renaissance de la mythologie dans cette période de 1945 à nos jours frappe davantage dans la prose. De courts textes mythologiques paraissent à cette époque : ceux de Hans Erich Nossack (entre autres « Orpheus und… » et « Kassandra »8) et ceux de Anna Seghers (en particulier « Das Argonautenschiff »9) ou encore de Franz Fühmann (ses récits mythologiques, rédigés à partir de 1978, sont regroupés dans un recueil intitulé Marsyas10). L’intérêt pour la mythologie antique apparaît déjà dans ces textes, mais c’est dans le roman qu’il trouve l’expression la plus complète. Le roman n’a pourtant pas, comme l’épopée et la tragédie, l’avantage de s’inscrire directement dans la tradition du mythe. Or, depuis 1945, on ne recense pas moins d’une trentaine de romans inspirés de la mythologie antique et répartis en deux périodes clairement identifiables.

Dans les années cinquante, une dizaine de romans se tournent vers le mythe ; la majorité des romans mythologiques suivants se groupent ← 15 | 16 → entre 1980 et 199011. En fait, les limites des périodes données ne sont pas aussi tranchées que ne le laissent paraître les dates de publication. Wolf von Niebelschütz commence l’écriture de son roman Der blaue Kammerherr (« Le chambellan bleu »)12, une reprise du mythe de Danaé et de la Pluie d’Or, pendant la guerre. De même, la très longue durée de rédaction de certains textes témoigne d’un travail sur la mythologie dès les années 70. Les trois tomes de L’esthétique de la résistance de Peter Weiss paraissent successivement en 1975, 1978 et 1981, avant que la trilogie soit éditée en un seul volume en 1983 ; la rédaction de Meine Schwester Antigone (« Ma sœur Antigone »)13 roman de Grete Weil paru en 1980, remonte à la fin des années 70. Malgré tout, force est de constater qu’à l’inverse du théâtre, rares sont les romans qui dans les années 60 et 70 ont recours à des mythes antiques14. Il semble que le retour au mythe dans le roman n’ait pas lieu avec la même évidence que dans le domaine du théâtre.

Formuler l’hypothèse d’un phénomène littéraire, d’une réécriture contemporaine de la mythologie, implique la mise en œuvre de principes propres à cette époque qui permettraient de le distinguer des autres mouvements de reprise au cours des siècles. Autrement dit, il s’agit de savoir dans quelle mesure l’époque contemporaine réinvente ← 16 | 17 → à son tour sa propre manière d’aborder la mythologie. Produits d’une époque jusqu’à un certain point, les romans recourant à la mythologie antique signifient aussi une réaction à celle-ci, une impulsion qui se distingue par des intérêts bien particuliers.

Ni la mise en commun de réflexions et de recherches, ni un programme élaboré par un mouvement littéraire donné ne sont à l’origine de ces réécritures. Il paraît difficilement concevable que ce recours si important soit purement fortuit. C’est là aussi ce qui fait l’intérêt de ces romans : eux qui n’appartiennent pas à une école littéraire, et sont indépendants les uns des autres, représentent ensemble un fait littéraire. Comment expliquer cette nouvelle formulation du mythe à ces deux périodes bien circonscrites et dans un genre qui ne s’y prête pas d’emblée ? Mythologie antique, écriture romanesque et époque contemporaine : de quelle manière la littérature de langue allemande a-t-elle su articuler ces trois dimensions ? Une première réponse, générale encore mais fondamentale, s’impose. Dans ce phénomène tout à fait original s’entrecroisent, et c’est un des aspects qui le rend particulièrement intéressant, vision de la société et recherche esthétique : il permet d’éclairer à la fois une crise idéologique et un tournant esthétique dans la mesure où il engage le devenir d’un genre, celui du roman.

La première période est marquée par les bouleversements de la guerre : destruction, pertes humaines et évidence des horreurs du nazisme. Le chaos règne sur une Allemagne occupée et divisée. La méfiance est grande devant toute idéologie, devant toute politique ou parole qui croit posséder et dire la vérité. Les romans mythologiques de l’après-guerre mettent en avant la nécessité de porter un jugement différencié sur la réalité, les catégories fondamentales de l’être humain et de la littérature. On lit dans ces romans la même culpabilité et la même difficulté de recouvrer sens et liberté qui empreignent la littérature allemande d’après-guerre de manière générale. Comme le dit V. Riedel dans son recensement très complet des thèmes antiques dans la littérature allemande, l’actualité marque fortement les romans mythologiques parus à la fin des années 40 et dans les années 50 :

À la fin des années 40 et dans les années 50, il y eut en RFA une reprise considérable de thèmes antiques. Partant d’une position critique et antifasciste, les thèmes ← 17 | 18 → dominants étaient la guerre et la paix ainsi que la politique de réarmement et le mouvement anti-nucléaire dans l’atmosphère de la guerre froide. Le mythique ne paraissait plus comme refoulement du politique, mais comme noyau de l’humain.15

Chacun des mythes dans sa particularité signifie une source d’interrogations infinie : il est en lui-même à la fois une représentation singulière et l’incarnation de valeurs universelles (nature de l’être et des relations humaines etc.). C’est là un des aspects qui fait de lui un élément fertile : il figure simultanément universalité et singularité. Il élève les événements particuliers à leur caractère universel, il rapporte sans cesse le particulier à un tout. La dimension archétypale du mythe en fait une aide à l’interprétation du vécu, il représente un modèle au pouvoir d’association et de suggestion infini. Il doit sa fertilité et la commodité de son emploi dans une large mesure aux analogies qu’il engendre : les images et les structures qui lui sont inhérentes sont transposables et deviennent de ce fait des instruments utiles au service d’un déchiffrage de la réalité.

Le mythe, clé d’interprétation du monde, est absolument extérieur à la réalité qu’il interprète tout en lui étant étroitement lié. Le mythologue R. Ranke-Graves invoque les origines factuelles d’un mythe afin d’en justifier la parenté avec le réel : « Le mythe […] est toujours réaliste : il repose constamment sur un certain point de la tradition quelle que soit la déformation de sa signification dans la narration.16 » Déchiffrer les métaphores et les symboles mythologiques permettrait de reconstituer les racines factuelles ou historiques à l’origine du mythe. Toutefois il ← 18 | 19 → faut convenir, et les analyses du mythologue en témoignent, que si cette perspective est soutenable, elle ne vient jamais à bout du mythe. La relation ambivalente avec le réel fait de lui un élément essentiel de la connaissance de par sa double fonction : instrument de compréhension et mise à distance critique. Les modes de fonctionnement spécifiques de la mythologie renvoient le monde et le rationnel à leur identité comme à leur altérité.

Dans l’après-guerre, la mythologie peut servir de réservoir de thèmes et d’images qui permettent d’approcher la réalité dans une œuvre littéraire. Par le biais des mythes antiques, il est possible de mettre des mots sur une catastrophe sans précédent et de traduire des sentiments et des expériences d’une violence extrême. Les auteurs empruntent à cette source intarissable qu’est la mythologie gréco-latine l’image de dieux cruels, avides de domination et de destruction, de monstres redoutables, ainsi que de personnages condamnés aux tourments des Enfers. Les Érinyes, symbole de malédiction, les Titans, l’Hydre ou la Gorgone confèrent à ces romans le sentiment d’une menace et d’une fureur inéluctables. Les images des Enfers et de monstres mythologiques hantent les personnages du roman d’Elisabeth Langgässer : Märkische Argonautenfahrt (« Voyage des Argonautes brandebourgeois »)17. Ils règnent sur la trilogie de Wolfgang Koeppen18 : s’entremêlant aux destins des personnages dans Tauben im Gras (« Pigeons sur l’herbe », 1951), renforçant la peinture d’une société sans espoir dans Das Treibhaus (« La serre », 1953), constituant dans Der Tod in Rom (« La mort à Rome », 1954) un véritable pandémonium. D’autres auteurs choisissent à la même époque, également en RFA, de récrire l’histoire d’un mythe particulier. Ce sont alors pour l’essentiel des personnalités déchues telles Ulysse, Pâris ou Dédale qui se trouvent placées au centre des romans. À travers ces personnages, dont la gloire n’est plus qu’un souvenir, il est permis aux écrivains d’engager une réflexion sur un nécessaire travail de mémoire. Le destin d’Ulysse va intéresser Walter Jens dans Das ← 19 | 20 → Testament des Odysseus (« Le testament d’Ulysse »)19, ainsi que Ernst Schnabel dans Der sechste Gesang (« Le sixième chant »)20. Le deuxième roman mythologique de Schnabel, Ich und die Könige (« Moi et les rois »)21, est centré sur la figure de Dédale. Quant à Rudolf Hagel­stange, il décrit dans Spielball der Götter (« Jouet des dieux »)22 le destin mouvementé de Pâris, son ascension et son déclin. On peut emprunter à Walter Jens sa formule particulièrement appropriée ici : « Le mythique entre dans la dimension du présent et peut être traité en tant qu’Histoire. La variante, qui interprète, rend au mythe sa temporalité, au modèle sa forme concrète, à l’archétype son historicité.23 »

Les romans mythologiques suivants paraissent au cours des années 80, c’est-à-dire dans un tout autre contexte politique, social et littéraire : acheminement vers la fin de la guerre froide et tentatives de rapprochement entre les deux Républiques allemandes, engagement social pour la paix et l’écologie, considérations sur une littérature dite « postmoderne ». Notons que de nombreux romans sont écrits par des auteurs vivants en RDA ou renvoient à des expériences faites en RDA. De manière générale, les images du mythe permettent de traduire l’impression de ne plus pouvoir dire le monde, ni décrire son évolution actuelle sans recours à d’autres modèles. Cet aspect est tout à fait sensible dans le grand nombre de romans écrits par des femmes sur des figures mythiques féminines. Christa Wolf est probablement la plus souvent citée en la matière dans la littérature critique, pour ses ← 20 | 21 → deux textes mythologiques Cassandre24 et Médée25. Il faut lui ajouter des auteurs comme Ursula Haas (Freispruch für Medea,« Acquittement pour Médée »26), Grete Weil (Meine Schwester Antigone), Barbara Frischmuth (Demeter-Trilogie27) et Inge Merkel (Eine ganz gewöhnliche Ehe, « Un couple tout à fait ordinaire »28), dont les romans sont traversés par des figures telles que Médée, Antigone, Déméter ou Pénélope. Ursula Haas, par exemple, trouve dans la figure de Médée une personnalité qui la fascine et l’horrifie : « En cette femme se confrontent humanité et inhumanité, force et destruction, amour et haine de façon extrême, de sorte que je la considère comme une structure féminine possible, une parabole aujourd’hui encore.29 » Si l’orientation féministe plus ou moins marquée dans ces romans est indéniable, elle est loin d’en épuiser les questions et l’intérêt.

Le mythe intéresse également ces auteurs pour sa référence à une origine et à une société archaïque. Dimension archétypale mystérieuse, forme d’intuition commune à toutes cultures primitives et liée à un idéal de totalité, de vérité et de création première, sa conception commune fait apparaître le mythe sous un jour sacré. Cet aspect inspire à Ernst Cassirer la formule suivante : « Le mythe devient ainsi un mystère : sa signification et sa profondeur véritables ne se trouvent pas dans ce qu’il révèle par ses propres figures mais dans ce qu’il occulte.30 » Considéré de cette ← 21 | 22 → manière, il signifie une des premières manifestations, ou pour être plus exact une des premières représentations du sacré : âges ayant précédé le monde, dieux et demi-dieux, phénomènes et événements inexpliqués et apparemment impénétrables. Il s’agit ici d’une conception abstraite du mythe, autre que langagière, telle que l’on peut la reconstituer à travers les découvertes archéologiques, la connaissance des rituels, la lecture entre les lignes des œuvres antiques etc. Le mythe doit surtout son caractère exemplaire à son objet, le récit des origines, à travers lequel il est reconnu détenteur, pour citer les termes de Mircea Eliade, d’une « vérité absolue » : « C’est donc toujours le récit d’une ‹création› : on raconte […] comment quelque chose a commencé d’être.31 » Mise en forme première, récit fondateur, la vision du monde transmise par les mythes est acceptée comme telle. Récit de l’histoire précédant la civilisation humaine, mais l’accompagnant, son rapport à un idéal originaire comme sa dimension « collective » confèrent une valeur universelle à son éclairage du monde.

Au demeurant, le mythe représente un système de pensée autre dont les notions et les structures dépassent les limites d’une représentation rationnelle : identité de la partie et du tout, métamorphoses, intégration de paradoxes, expérience de l’impossible. Maurice Blanchot donne au mythe une définition à la hauteur de son évidence mystérieuse et de son pouvoir de suggestion : « Les mythes grecs ne disent, en général, rien, séducteurs par un savoir caché d’oracle qui appelle le jeu infini de deviner.32 » La mythologie ouvre la perspective sur des catégories fondamentales, sur un réseau de relations et d’associations possibles, sur des tensions et des antagonismes qui signifient une remise en cause permanente de notre mode de pensée.

C’est pourquoi aussi le mythe se prête si bien à une littérature en pleine recherche de nouvelles formes narratives. Les bouleversements historiques de la Seconde Guerre mondiale ayant radicalement changé ← 22 | 23 → la donne, les romans mythologiques témoignent des incertitudes et des désenchantements de leur époque et contribuent de manière très singulière au travail de reconstitution et de remise en question auquel se livre la littérature d’après-guerre. Le tournant esthétique de l’après-guerre est caractérisé par une méfiance à l’égard du roman, des fictions et du langage. Toute une tradition littéraire est considérée comme compromise par une idéologie néfaste ou comme inapte à dire une réalité hors de toute mesure. Walter Jens décrit ainsi l’attitude de l’écrivain dans les années cinquante : « Pour le moment, il tâtonne encore, cherche des points d’ancrage et expérimente les styles…33 » Au moment où s’effondre un système totalitaire dans un monde à reconstruire, le recours à des figures et des modèles antiques offre la possibilité aux auteurs d’approfondir une réflexion sur les racines et les valeurs fondamentales de notre civilisation, mais aussi sur un renouveau de la littérature. La prose courte (« Kurzgeschichte ») ainsi que les textes documentaires comptent parmi les réponses possibles. Le roman mythologique en est une autre. La mythologie paraît à ces auteurs ouvrir le roman vers des horizons nouveaux. Comme le remarque Wolf von Niebelschütz :

Mais le mythe […] est au-delà du temps. Il nous affranchit de tout sentiment du temps et c’est seulement ce qui est spécifiquement humain qui parle. En effet, cette dimension humaine parle avec une telle force que nous ne nous interrogeons plus en terme de vérité historique ou de vraisemblance.34

La mythologie entraîne un autre type de questionnement ; en ce sens, les romans mythologiques s’inscrivent dans le vaste mouvement d’ouverture et de créativité qui s’élance dès 1945. En outre, les mythes antiques paraissent offrir à l’écriture une variété infinie d’entrées possibles.

C’est aussi la question qui va intéresser les écrivains dans les années 80 : comment peut-on encore inventer de la fiction ? À cette période, ← 23 | 24 → la littérature fictionnelle, et surtout le roman, se trouve à nouveau au centre d’une discussion, d’une tendance littéraire dite postmoderne. Ce terme, « postmoderne », renferme un certain nombre d’interrogations propres à la fin du 20ème siècle et non sans intérêt pour l’observation des romans mythologiques : notamment l’impossibilité de concevoir l’Histoire, de saisir la réalité ou de la représenter, la conscience, plus aiguë qu’avant, de se nourrir de la littérature. Concept des plus imprécis et souvent utilisé de manière abusive, il ne peut fonctionner comme instrument d’analyse. Un aspect mérite toutefois d’être souligné : le fait que toute littérature se nourrit de littérature, que l’art de la narration est un art de reprise et de continuation. De fait, les romans de la fin du 20ème siècle mettent en avant la dimension inépuisable de la mythologie antique. Plusieurs textes en témoignent : Le dernier des mondes35 de Christoph Ransmayr qui, en 1988, récrit à sa manière les mythes rassemblés par Ovide dans les Métamorphoses, en mettant en scène un personnage parti à Tomes sur les traces du poète exilé. Les romans mythologiques participent à leur manière de ce mouvement de problématisation de la fiction et de l’invention littéraire, comme ils apportent leur réponse à la mise en question du genre romanesque, ainsi que le formule Irmtraud Morgner : « De nouvelles cultures ne peuvent naître qu’en s’appropriant, puis en digérant les anciennes.36 »

Le nombre d’analyses parues ces dernières années au sujet de la mythologie antique montre que le phénomène n’a pas échappé à la critique, mais le déséquilibre entre les différentes œuvres est très marqué et rares ont été les analyses d’ensemble. Face à la pluralité des niveaux d’interprétation possibles, la plupart des études critiques se concentrent sur une œuvre ou un auteur précis. Or, il est frappant que ce phénomène forme un tout. Certains ouvrages critiques vont dans ce sens et choisissent d’approfondir une thématique particulière : la critique de ← 24 | 25 → l’Histoire37, la question du patriarcat38, celle de la dimension politique du mythe et de ses adaptations littéraires39, etc. Une étude de R. Bernhard, parue en 1994, s’intéresse à l’aspect sociopolitique de la reprise du mythe en RDA, et cherche à démontrer l’existence d’un véritable mouvement littéraire : « Aucune autre réception ne rend l’histoire de la RDA de façon aussi claire que l’adaptation des figures antiques.40 » Ces interprétations interrogent chacun des textes abordés selon le dénominateur commun choisi ; les analyses partent ainsi d’une problématique extérieure aux textes pour les interpréter.

En fait, seuls quelques ouvrages se concentrent sur les œuvres mythologiques elles-mêmes et leurs questions internes, cherchant à les interroger en conséquent en tant que projet littéraire et réécriture d’un mythe41. Les travaux de Nicola Bock-Lindenbeck, Sabine Wilke et Sabine Georg présentent un intérêt particulier, notamment par les orientations choisies et par leurs approches synthétiques d’une renaissance de la mythologie. La première42 tente de concevoir une méthode d’analyse spécifiquement adaptée à la réécriture de mythes antiques et de distinguer trois manières d’aborder la mythologie dans la littérature : « re-mythification, appropriation du mythe au-delà du mythe et ← 25 | 26 → démythification43 ». Prenant pour point de départ les analyses d’œuvres particulières (celles de Christa Wolf et de Peter Weiss), Sabine Wilke cherche à tirer un enseignement de leurs affinités et de leurs divergences, et tente d’en dégager quelques éclairages possibles sur les stratégies narratives de notre époque44. L’analyse d’ensemble proposée par Sabine Georg exploite cette même veine, puisqu’elle soutient la thèse selon laquelle la reprise de la mythologie antique reflète une situation littéraire à une époque donnée : « L’art et la manière de traiter le mythe et la réception du mythe dans la littérature représente un paradigme essentiel pour la situation des littératures.45 » Les approches présentées par ces différents types d’analyse critique se doivent d’être poursuivies, d’une part parce qu’elles posent des questions fondamentales sur le recours contemporain à la mythologie, d’une autre parce qu’elles laissent encore un certain nombre d’interrogations en suspens.

C’est bien en effet des entrecroisements entre mythologie et littérature que sourdent les ambivalences les plus grandes et les tensions les plus génératrices de sens46. P. Brunel pose en principe que « […] le mythe, langage préexistant au texte, mais diffus dans le texte est l’un de ces textes qui fonctionnent en lui.47 » Il souligne de cette manière l’extrême imbrication des mythes et de leurs formes littéraires qui, perpétuellement en contact et en conflit, s’engendrent et se déterminent réciproquement. Comment dire, comment redire le mythe ? C’est là un des aspects qui font de la réécriture de mythes antiques une entreprise toujours aussi périlleuse et aussi passionnante par-delà les siècles. ← 26 | 27 → C’est pourquoi, pour l’ensemble des romans, le travail sur la mythologie motive une mise en question des formes narratives traditionnelles, la recherche de formes nouvelles du récit. La réflexion mène à des tentatives originales. Notons en guise d’exemple celle de Barbara Frischmuth qui appréhende, dans une trilogie consacrée à Déméter, plusieurs dimensions de ce mythe : trois facettes de Déméter sont exploitées tour à tour dans des romans autonomes et dissemblables.

Parmi ces expériences romanesques, quatre romans se distinguent par une démarche narrative plus audacieuse, par un goût plus prononcé pour l’expérimentation. Nulle part à cette époque l’entreprise de réécriture ne s’avère en effet plus dense et plus complexe que dans les œuvres de Wolf von Niebelschütz, de Irmtraud Morgner, de Peter Weiss et de Stefan Schütz. Ces quatre auteurs, aux profils très différents, proposent plusieurs manières de traiter la mythologie antique et le roman qui dépassent largement le cadre dans lequel s’expriment leurs contemporains. Cette expérimentation semble aller dans un même sens, comme si ces romans s’orientaient vers un même objectif. Il semble que ces œuvres non seulement se souviennent de la mythologie, mais qu’elles tentent dans un même mouvement de renouer avec des œuvres épiques anciennes et cherchent, en fin de compte, à créer ou à s’approcher d’une écriture épique moderne. Se présente donc l’hypothèse de la résurgence dans la littérature contemporaine du plus ancien des genres : l’épopée.

Malgré le temps qui les sépare, Der blaue Kammerherr (« Le chambellan bleu »)48, de Wolf von Niebelschütz et Amanda49 de Irmtraud Morgner présentent tous deux une narration extrêmement longue et riche, entrecroisant de multiples dimensions parmi lesquelles les mythes antiques jouent à plusieurs titres un rôle déterminant. Niebelschütz reprend le mythe de Danaé et de la Pluie d’Or dans une vaste mise en scène baroque à laquelle viennent se mêler de nombreuses figures mythiques qui forment un réseau de références important. L’auteur engage à travers ce texte un jeu narratif considérable, faisant renaître de différentes façons un grand nombre de personnages issus de la mythologie antique dans un royaume insulaire imaginaire. Morgner ← 27 | 28 → entreprend elle aussi un immense jeu de narration : elle fait renaître une « troubadoure » sous forme de sirène mythologique dans le monde contemporain. L’auteur mêle deux mythes antiques, le chant des sirènes et le retour de Pandore, afin de mener une large réflexion sur la société contemporaine.

Peter Weiss et Stefan Schütz proposent chacun une trilogie. Celle de Peter Weiss, L’esthétique de la résistance (1983)50, retrace les expériences et les évolutions d’un jeune travailleur berlinois au début du siècle dernier : les réflexions menées sur le fascisme et les formes possibles de résistance à lui opposer sont renforcées par un travail très riche sur la mythologie. Parmi les nombreuses références mythologiques, la figure d’Hercule, symbole complexe et contradictoire de résistance, occupe une place prédominante, ainsi que les représentations plastiques des mythes (l’autel de Pergame notamment). Quant à Stefan Schütz, il reprend dans Medusa (1986)51 le mythe de Méduse et de la pétrification dans un vaste règlement de compte avec l’Histoire allemande et, tout spécialement, avec le socialisme tel qu’il était pratiqué dans la République démocratique : une seconde de plongée dans l’inconscient du personnage principal donne lieu à un texte immense, chargé de références multiples à la mythologie antique, mises en œuvre et utilisées de manières très diverses.

La mythologie est certes d’abord une thématique, un ensemble d’images et de symboles qui permettent d’éclairer une vision du monde. Mais le mythe est aussi une notion ambiguë qui permet le doute et force la méfiance. L’après-guerre et les années 80 paraissent présenter un espace propre à développer une activité intense de recherches, d’expériences et d’interrogations que le recours aux mythes antiques condense de façon significative. Mais ils n’auraient sans doute pas occupé avec tant de facilité l’espace romanesque s’ils n’ouvraient pas en même temps des portes pour échapper justement de cet espace, trop exigu aux yeux des auteurs.


1 Nicola Bock-Lindenbeck. Letzte Welten, neue Mythen. Der Mythos in der deutschen Gegenwartsliteratur. Cologne : Böhlau. 1999. p. 266 : „Den Mythos überwindend, eine neue Mythologie schaffend, sich vom Mythos distanzierend, den Mythos reproduzierend – die Art der literarischen und bildnerischen Beschäftigung mit dem Mythos vollzieht sich die Jahrhunderte hindurch scheinbar nach einem alternierenden Prinzip.“

2 Si l’on réunit couramment sous le terme de mythologie antique des récits tant grecs que latins, c’est que l’on ne peut négliger ni la transmission de la mythologie par les artistes et poètes grecs, ni l’adoption par la civilisation romaine de larges pans de la mythologie grecque (fondus dans un ensemble de croyances propres et d’influences étrangères). Depuis les épopées d’Homère jusqu’aux récits de voyage de Pausanias, c’est un millénaire de mythographie qui se déploie, la période la plus fertile étant de toute évidence le VIe et le Ve siècle avant notre ère puis la charnière entre les deux millénaires.

3 Nous nous référons ici à l’article « mythe » du Dictionnaire historique de la langue française (Alain Rey).

4 Tous ces textes – Der tödliche Schlag (1974), Sophokles’Ajas (1965), Sophokles und Brecht (sans date) – sont rassemblés dans un ouvrage intitulé Zur Antike (Munich : Kindler. 1978.)

5 Dürrenmatt reprend notamment dans Herkules und der Stall des Augias (1962) le mythe du cinquième travail d’Hercule.

6 Entre autres, Iphigenie in Freiheit (1992) de Volker Braun, Zement (1974) et Verkommenes Ufer Medeamaterial (1983) de Heiner Müller, Der Frieden (1965), Amphitryon (1971) et Pandora (1979) de Peter Hacks.

7 Pour ne citer qu’un recueil représentatif de chacun d’entre eux : Starrend von Zeit und Helle. Die Geschichte der Ägäis (1980) de E. Arendt, plusieurs poèmes consacrés aux Achéens, à Icare, Athéna etc. chez S. Hermlin (Gesammelte Gedichte, 1979). Louis Fürnberg s’intéresse à Ulysse (Gedichte, 1965), Heinz Kahlau à Sisyphe (Lob des Sisyphos, 1983).

8 Ces récits sont rassemblés dans un ouvrage édité par Christof Schmid : Hans Erich Nossack Die Erzählungen. Francfort/Main : Suhrkamp. 1987.

9 Anna Seghers. Post ins gelobte Land. Erzählungen. Berlin : Aufbau-Verlag. 1990.

10 Franz Fühmann. Marsyas. Mythos und Traum. Leipzig : Reclam. 1993.

11 Nous incluons Medea, second roman mythologique de Christa Wolf, paru en 1996.

12 Ce roman n’ayant pas été traduit, nous laissons son titre en allemand pour éviter toute équivoque. Par la suite, le sens littéral des titres non traduits sera indiqué de même entre parenthèses. Wolf von Niebelschütz. Der blaue Kammerherr. Munich : dtv. [1949].1998.

13 Grete Weil. Meine Schwester Antigone. Francfort/ Main : Fischer. [1980]. 1982.

14 Quelques œuvres font ici exception. Dans le roman de Erich Fried, Le soldat et la fille, paru en 1960, les références à des figures mythologiques sont indéniables. Elles se limitent toutefois à de simples associations sporadiques qui servent ponctuellement la description des personnages et l’affinement de l’analyse, sans pour autant sous-tendre le récit ou faire l’objet de développements spécifiques. Plus visiblement encore, le seul roman directement lié par son titre à la mythologie antique, Nicht jeder ist Odysseus (« Tout le monde n’est pas Ulysse », 1967) de Geno Hartlaub, ne dépasse pas les parallèles simples et stéréotypés avec l’Odyssée homérique annoncés lors de l’ouverture. Comme l’annonce le titre, la référence à Ulysse demeure un symbole dont le récit s’émancipe très rapidement.

15 Volker Riedel. Antikerezeption in der deutschen Literatur vom Renaissance- Humanismus bis zur Gegenwart. Stuttgart : Metzler. 2000. p. 327 : „In den späten 40er und in den 50er gab es in der Literatur der BRD eine beträchtliche Aufnahme antiker Motive. Dominierend waren, von einer kritischen, antifaschistischen Position aus, die Krieg-Frieden-Thematik sowie Aufrüstungspolitik und Anti-Atom-Bewegung im Zeichen des Kalten Krieges. Das Mythische erschien nicht mehr als Verdrängung des Politischen, sondern als Kernstück des Humanen.“

16 Robert von Ranke-Graves. Griechische Mythologie. Reinbek bei Hamburg : Rowohlt. 1984. p. 18 : „Mythos ist […] immer realistisch: Er beruht stets auf einem gewissen Punkt der Tradition, wie immer auch die Bedeutung beim Erzählen verzerrt wurde.“

17 Elisabeth Langgässer. Märkische Argonautenfahrt. Hambourg : Claassen. 1959.

18 Wolfgang Koeppen. Gesammelte Werke 2. (Tauben im Gras, Das Treibhaus, Der Tod in Rom). Francfort/Main : Suhrkamp. 1986.

19 Walter Jens. Das Testament des Odysseus. (1957). In : Zur Antike. Munich : Kind­ler. 1978.

20 Ernst Schnabel. Der sechste Gesang. Francfort/Main : Fischer. 1956.

21 Ernst Schnabel. Ich und die Könige. Francfort/Main : Fischer. 1958.

22 Rudolf Hagelstange. Spielball der Götter. Hambourg : Hoffmann und Campe. [1959] 1963.

23 Walter Jens. Der tödliche Schlag. In : Zur Antike. Munich : Kindler. 1978. p. 411 : „Mythisches tritt in die Dimension der Gegenwart ein und wird zur behandelbaren Geschichte. Die interpretierende Variation gibt dem Mythos seine Zeitlichkeit, dem Modell seine Konkretheit, dem Archetypus seine Historizität zurück.“

Résumé des informations

Pages
582
Année
2016
ISBN (PDF)
9783034324052
ISBN (ePUB)
9783034324069
ISBN (MOBI)
9783034324076
ISBN (Broché)
9783034321310
Langue
français
Date de parution
2017 (Avril)
Published
Bern, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2016. 582 p.

Notes biographiques

Emmanuelle Terrones (Auteur)

Emmanuelle Terrones, née en 1976, agrégée d’allemand et docteur en littérature allemande, travaille en tant que maître de conférences à l'Université François Rabelais de Tours (F) depuis 2007, où elle fait partie de l’unité de recherche « Interactions Culturelles et Discursives ».

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Titre: Récits mythiques – récits modernes
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