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Plurilinguisme dans la littérature française

de Alicia Yllera (Éditeur de volume) Julian Muela Ezquerra (Éditeur de volume)
©2016 Collections 348 Pages

Résumé

Ce volume s’intéresse à un phénomène très ancien mais qui a pris une grande ampleur de nos jours : la présence de langues ou dialectes autres que la langue de base du texte littéraire (ici le français). Les douze essais réunis dans ce volume analysent les différentes formes (alternance, assemblage, superposition de codes, etc.) et fonctions (ludique, comique, satirique, parodique, réaliste, esthétique, identitaire, revendicative, etc.) de l’hétérogénéité langagière à l’intérieur d’un même texte littéraire. Ces études s’intéressent à des textes français ou francophones appartenant à des époques différentes, qui vont des textes narratifs et dramatiques du XIIe et du XIIIe siècles jusqu’à des romans d’écrivains nés dans le dernier tiers du XXe siècle. D’autres chapitres analysent l’œuvre de Rabelais, la comédie du XVIIe siècle, un récit de voyages du XVIIIe siècle, un roman populaire du XIXe siècle, les romans policiers de Fred Vargas, une pièce inédite d’Hélène Cixous, des romans d’Albert Cohen, d’Ahmadou Kourouma et de Laura Alcoba, ainsi que deux pièces dramatiques de Jean Marc Dalpé.

Table des matières

  • Cover
  • Titre
  • Copyright
  • À propos des directeurs de la publication
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table of Contents
  • Introduction
  • Barbarismus et barbarolexis dans les textes narratifs et dramatiques du XIIe et du XIIIe siècles
  • Rabelais sur les sentiers de Babel
  • Langues, dialectes, patois, jargons et galimatias dans la comédie du XVIIe siècle. De la renaissance de la comédie à la mort de Molière (1629–1673)
  • Les inscriptions en langue espagnole dans le Nouveau voyage en Espagne de Peyron
  • Le plurilinguisme dans Les Trappeurs de l’Arkansas de Gustave Aimard ou comment brouiller les pistes entre fiction et biographie
  • Les autres langues dans les romans de Fred Vargas
  • Empreintes du plurilinguisme dans le roman français contemporain
  • Plurilinguisme dans le monolinguisme chez Hélène Cixous
  • À propos des anglicismes dans l’œuvre d’Albert Cohen
  • Phraséologie et créativité lexicale dans Les Soleils des Indépendances d’Ahmadou Kourouma
  • Les différentes langues de Jean Marc Dalpé. Les motivations de l’hétérolinguisme
  • Laura Alcoba et ses souvenirs d’enfance. Les langues de la clandestinité et de l’exil
  • Titres de la collection

← 6 | 7 → ALICIA YLLERA

Introduction

La question du plurilinguisme littéraire a été plusieurs fois abordée dans ces dernières décennies. Mais le plus souvent la réflexion versait sur des périodes ou des mouvements plus limités : les avant-gardes, certains pays francophones, etc. En 1970, Forster présentait une étude d’ensemble sur l’histoire du plurilinguisme littéraire, entendu dans un sens très vaste, mais la littérature française occupait une place assez limitée dans cette étude pionnière, et l’auteur s’intéressait essentiellement aux poètes polyglottes plutôt qu’aux œuvres multilingues. Plus récemment, Lise Gauvin (surtout en 2004) apporte d’importantes précisions sur le plurilinguisme (langues étrangères, argots, dialectes, patois, sociolectes, créoles, etc.) dans la littérature française, surtout à partir du XIXe siècle, et dans la littérature francophone (ou plutôt « francographe », comme elle précise) contemporaine. Cependant le centre d’intérêt de ses études reste la perception de la langue par les écrivains de langue française, leurs positions vis-à-vis de celle-ci, les relations conflictuelles qu’entretiennent différentes langues chez des écrivains francophones et qui donnent lieu à une surconscience linguistique, etc.

Un petit groupe de chercheurs de différentes universités espagnoles, qui travaillent sur des époques différentes de la littérature française, se sont penchés sur ce phénomène de la babélisation littéraire à différents moments de l’histoire littéraire française. Ce modeste volume n’est qu’une première ébauche d’un domaine de recherche extraordinairement vaste. De nombreuses recherches futures seraient nécessaires pour atteindre une vision plus complète de la typologie et de la fonction du plurilinguisme tout le long de l’histoire littéraire de la France et des pays francophones. Nous sommes très conscients du caractère limité et provisoire des études que nous présentons et que nous souhaitons compléter dans l’avenir. Le sujet est immense et notre équipe fort réduite. Cependant des différents travaux réunis dans ce volume se dégagent quelques idées fortes que nous pouvons résumer. Mais, il ← 7 | 8 → faudrait préalablement justifier la notion de « plurilinguisme littéraire » qui a été le point de départ de nos recherches.

La dénomination plurilinguisme littéraire a été appliquée à deux phénomènes différents. D’une part à la situation des écrivains polyglottes qui emploient deux (ou plusieurs) langues différentes dans des ouvrages différents. D’autre part à la présence de deux ou plus de deux langues différentes dans un même texte littéraire. L’existence d’écrivains qui ont recours à des langues différentes d’après les textes est une constante de la littérature française, depuis le Moyen Âge jusqu’à nos jours. À certains moments, le genre impose la langue choisie, ou tout au moins favorise l’emploi de telle ou telle langue.

La définition du plurilinguisme que nous avons retenue pour cette étude est l’emploi de deux ou plus de deux langues ou dialectes dans un même texte littéraire. Notre centre d’intérêt est l’hétérogénéité langagière à l’intérieur d’un même texte. Cette Babel « en présence » peut adopter diverses formes. Dans un texte écrit dans une langue de base (en l’occurrence le français), un auteur introduit des énoncés (plus ou moins longs ou réduits à un seul mot) écrits dans une ou plusieurs langue(s) ou dialecte(s) différent(s). Il s’agit d’une alternance de langues ou d’une alternance de codes linguistiques qui se juxtaposent.

Par ailleurs, l’auteur emploie un mélange de deux (ou plus de deux) langues. Cette mixtion (assemblage) de plusieurs codes linguistiques donne lieu à une langue hybride. Certaines de ces langues hybrides, comme le latin de cuisine, ont connu un grand succès littéraire pendant des siècles. Dans certains cas, il s’agit de réalisations involontaires, ainsi que la déformation d’une langue donnée dans la bouche d’étrangers qui la dominent très imparfaitement.

Ces deux types de plurilinguisme sont les plus fréquents et ils apparaissent également dans les utilisations non littéraires de la langue, dans le langage courant. Les deux autres types sont des jeux littéraires moins fréquents et réduits à certaines périodes littéraires.

Les langues peuvent se superposer. Le résultat est un énoncé équivoque, c’est-à-dire un texte qui peut être lu dans deux (ou plus de deux) langues, avec un même sens ou avec des sens différents dans chacune de ces langues. Ce sont des jeux qui ont connu, par exemple, un certain succès au moment de la Renaissance.

Le quatrième type de plurilinguisme détecté consiste en une désarticulation du code linguistique par un assemblage incohérent, ← 8 | 9 → du point de vue sémantique, des unités du discours. La phonétique, la morphologie et la syntaxe du texte proposé sont bien françaises, mais l’ensemble du texte est incompréhensible. La langue n’est plus la même, elle est devenue « autre », ce qui nous a permis de considérer ces jeux comme des exemples de plurilinguisme dans un sens large. D’un emploi limité aussi, ce « jeu » linguistique a connu un certain succès en France au XIIIe siècle en pays artésien et hennuyer avec les fatrasies. Ce discours du non-sens réapparaît dans les sotties, dans les coq-à-l’âne de Clément Marot et dans les premiers romans de Rabelais, etc.

Conscients de la difficulté d’établir, si ce n’est avec des critères extralinguistiques, les limites entre une langue et un dialecte (une langue n’étant, du point de vue linguistique, qu’un dialecte « qui a réussi »), nos études s’intéressent non seulement à la présence dans un texte de différentes langues, mais aussi aux variantes diatopiques (variétés régionales : langues régionales, dialectes, etc.), diastratiques (selon les groupes sociaux : jargons, argots, etc.) et diachroniques (formes d’un langage archaïque et désuet, etc.). Ainsi, lorsqu’on parlera de « langues autres que la langue de base » on entendra aussi bien les langues étrangères ou régionales que les différents dialectes ou les niveaux de langue qui sont suffisamment marqués pour être perçus par les lecteurs, auditeurs ou spectateurs. Nous n’adoptons pas, cependant, la notion de « plurilinguisme » de Bakhtine (1978 : 122–151), même si l’auteur a beaucoup contribué à renouveler l’intérêt pour ce phénomène. Elle est trop vaste pour notre propos, puisqu’elle comprend non seulement la diversité des langues ou dialectes et des niveaux de langues, mais aussi la pluralité des voix individuelles qui traversent le texte.

Le plurilinguisme littéraire a pu être considéré comme un phénomène caractéristique de certains mouvements, tels que les avant-gardes du début du XXe siècle, qui ont privilégié le phénomène de l’hétérogénéité dans tous les domaines, à un moment où l’art était un point de rencontre entre artistes de différents pays pendant que l’Europe se déchirait avec la Première Guerre Mondiale. On a pu y voir le reflet de la mondialisation actuelle et surtout du conflit produit par la rencontre de plusieurs langues dans les pays francophones dans lesquels le français a été la langue du colonisateur.

Le bien fondé de ces analyses ne peut pas nous faire oublier que le recours aux mots étrangers a existé à toutes les époques avec une ← 9 | 10 → importance très variable, selon les moments historiques et selon les genres choisis. Important pendant le Moyen Âge et le XVIe siècle, le multilinguisme prend un nouvel essor aux XIXe, XXe et XXIe siècles, sans pour autant disparaître complètement dans les autres siècles. Critiqué par les théoriciens depuis l’Antiquité (ainsi que le montre Bermejo Larrea), il est moins fréquent dans les époques dites « classiques » et, par le passé, il apparaît plus volontiers dans les genres comiques que dans les genres sérieux, jusqu’à ce qu’il devienne le témoignage d’un pays ou d’un groupe social différent ou bien la manifestation de la revendication d’une réalité linguistique complexe.

Le plurilinguisme est d’ailleurs présent dès le monde grec. Certes, dans la mythologie grecque, aucun mythe ne reflète le drame de la multitude des langues et les problèmes de communication que cette diversité entraîne. Mais cette absence d’un récit comparable à celui de la tour de Babel ne signifie pas que la littérature grecque ait ignoré complètement le multilinguisme, malgré le mépris que les Hellènes affichaient pour les langues étrangères. Il apparaît surtout dans le théâtre comique. Platon le Comique et surtout son contemporain Aristophane l’utilisent. Les spectateurs de ce dernier riaient des personnages qui parlaient des dialectes grecs ou bien qui s’exprimaient dans un grec déformé par des habitudes linguistiques étrangères. La littérature latine, née des traductions du grec de Livius Andronicus, ne pouvait pas ignorer le plurilinguisme. Ainsi il apparaît surtout dans la comédie et dans la satire.

Le plurilinguisme est présent dans les littératures romanes dès leurs origines : aube de Fleury, kharjas, etc. Les troubadours provençaux nous offrent de curieux exemples, tels que le descort en cinq langues de Raimbaut de Vaqueiras (1180–1205) ou son débat bilingue avec une dame de Gênes, ainsi que plus tard la cobla en six langues de Cerverí de Girona (composée probablement en 1269).

La présence de plusieurs langues dans les textes français du Moyen Âge n’est pas étonnante puisque l’écrivain de l’époque vivait dans une situation de diglossie tout au moins bilingue (latin/ français) et souvent plurilingue (latin/ français/ langues régionales). La situation linguistique des auteurs français du Moyen Âge et d’au-delà était beaucoup plus proche de la situation de beaucoup d’écrivains francophones de nos jours que de celle des écrivains français du XIXe ou XXe siècle, par exemple.

← 10 | 11 → Cependant, tout le long des siècles, le récit littéraire a souvent aboli Babel. Les poèmes homériques, les romans hellénistiques, les interminables romans français héroïques du XVIIe siècle, etc. ignorent les problèmes de communication entre les peuples qui possèdent des langues différentes. Le gentleman anglais Phileas Fogg et son serviteur français, Jean Passepartout, parcourent le monde en quatre-vingt jours sans besoin d’interprètes (Jules Verne, Le tour du monde en quatre-vingt jours. Rosset, 1992 : 59). Pourtant, déjà dans la littérature homérique, on peut trouver une allusion à la question des diversités linguistiques. Dans les Hymnes à Aphrodite (I, v. 113–116. Homère, 1976 : 155), la déesse de la beauté et de l’amour se présente au Troyen Anchise sous la figure d’une princesse phrygienne. Et pour bien jouer son rôle, elle déclare parler la langue des Troyens aussi bien que la sienne pour avoir été élevée par une nourrice troyenne dans le palais de son père, Otrée, roi de Phrygie.

Le plurilinguisme littéraire connaît un regain d’intérêt à différents moments de l’histoire de la littérature française. Il existe également des préférences d’après les genres et d’après les fonctions de la juxtaposition ou du mélange de langues. Lorsqu’il a une fin humoristique ou satirique, le multilinguisme est plus fréquent dans la comédie et dans la satire. Si son intention est surtout réaliste, il sera plus fréquent dans les récits de voyages et dans les romans qui prétendent faire passer leur narration pour des histoires vraies. Le plurilinguisme sérieux répond à un effort pour restituer le réel et rendre plus authentique une histoire.

Car ces deux fonctions, réaliste et comique, existent depuis l’Antiquité. Dans son emploi sérieux, le terme étranger peut évoquer un pays, il peut exprimer des réalités d’une culture différente, que la langue de base, faute de mots, est incapable d’exprimer. Il peut attribuer au texte un cachet d’authenticité, etc. Le plurilinguisme, surtout dans la littérature contemporaine, peut être la manifestation d’un conflit, une affirmation de solidarité ou d’identification avec un groupe, un renforcement du sentiment de complicité, etc.

Les très nombreux emplois ludiques et comiques du plurilinguisme peuvent prendre des connotations fort diverses. Ils peuvent exprimer une raillerie contre des groupes méprisés (étrangers, provinciaux ou paysans), une évocation de sujets jugés scabreux (Les Bijoux indiscrets de Diderot, ch. XLVII), etc.

← 11 | 12 → Le plurilinguisme peut avoir une fonction essentiellement esthétique, il permet de mettre en valeur et d’attirer l’attention sur le concept ou l’objet nommé au moyen d’un mot étranger, qui est ainsi détaché de son contexte.

Le plurilinguisme ne suppose pas nécessairement que l’auteur connaisse toutes les langues étrangères qu’il emploie et encore moins que son public soit plurilingue. Ses limites sont l’incompréhension partielle ou totale du texte, difficulté que l’écrivain peut assumer ou, par contre, chercher des moyens pour l’éviter (gloses, notes, traduction dans le texte même, etc.).

Dans une analyse extrêmement fouillée, Bermejo Larrea établit que l’emploi d’un mot non latin (barbarolexis) est envisagé comme un vice ou défaut contre la correction du latin ou latinitas dans les rhétoriques anciennes, de même que la déformation d’une langue dans la bouche d’un étranger (un des avatars littéraires du barbarismus). Elle analyse l’insertion de vocables latins ou de langues vernaculaires étrangères dans un texte français, l’apparition du français déformé par un locuteur étranger (le plus souvent anglais, avec un cas d’allemand dans Le Tournoi de Chauvency de Jacques Bretel), ainsi que la présence de langues imaginaires, ou de jargons qui mélangent le français et le latin ou même le français, l’italien et le latin. Le plurilinguisme est l’apanage des œuvres narratives comiques et du théâtre comique : il est un procédé efficace pour déclencher le rire. Par contre, il est très rare dans les textes sérieux. Bermejo Larrea observe une absence presque totale de mots latins dans les romans du XIIe et du XIIIe siècles, en vers et en prose. Après avoir dépouillé une cinquantaine de romans, comprenant même la trilogie du Graal et tous les livres qui intègrent la Vulgate, elle constate uniquement la présence d’une dizaine d’occurrences de mots latins, ce qui est étonnant vu la situation de diglossie des écrivains de l’époque. Ceci lui permet d’avancer une intéressante hypothèse : l’absence de mots latins répond à une volonté d’affermissement identitaire et linguistique de la part des auteurs qui ont choisi le vulgaire pour s’exprimer. La fréquence de mots en langues vernaculaires est aussi réduite. Dans les deux romans qui attestent leur présence, ils sont prononcés par des personnages étrangers pour souligner leur altérité, ce qui provoque un effet de réel, alors que chez Marie de France, le mot celtique ou anglais, à côté du mot français, permet de documenter la pluralité des versions connues d’une même histoire.

← 12 | 13 → Un certain nombre des études ici réunies s’intéressent à des textes dans lesquels le plurilinguisme a une fonction essentiellement ludique. C’est probablement avec Rabelais que ce procédé, en tant que jeu, atteint son sommet dans les lettres françaises. L’auteur emploie toutes les sortes de plurilinguisme : la juxtaposition des codes, leur mélange, leur superposition et jusqu’à la désarticulation totale du code. Ces bribes de langues étrangères peuvent avoir un effet de réel, rendre plus authentique une anecdote lorsque la langue employée correspond à la langue du pays ou région de celui qui parle, qu’il s’agisse d’un Italien, d’un Gascon ou d’un lansquenet. L’énoncé dans une langue étrangère peut conférer de l’autorité à une citation. Mais le plus souvent c’est le jeu et le rire qui l’emportent dans une œuvre où la parole étrangère a une importance jusqu’alors inconnue : l’hébreu biblique permet de créer un rébus, une citation latine tirée de la Bible est placée dans un contexte inattendu, ou bien elle apparaît dans une anecdote grivoise ou un énoncé équivoque ; une phrase en gascon peut avoir un « effet de jointure », séparer deux étapes de la vie du jeune Gargantua, etc. Les langues « hybrides » ont le plus souvent une fonction satirique. Elles dénoncent l’ignorance et la pédanterie des faux savants ou se moquent de la façon de parler d’un étranger. Le jeu peut arriver jusqu’à l’incohérence sémantique totale, ce qui permet de satiriser la justice de l’époque (Yllera).

Quant au théâtre comique du XVIIe siècle, le plurilinguisme apparaît, par influence de la commedia dell’arte, dans la farce du premier tiers du siècle. Avant l’époque du retour de Molière à Paris, il est pratiquement absent dans la comédie « renouvelée » qui triomphe à partir des années trente. Les langues étrangères figurent surtout dans des œuvres marginales, en dehors de La Sœur de Rotrou et Le Pédant joué de Cyrano. Cependant la comédie de Rotrou n’est qu’une adaptation d’une pièce italienne, ce qui confirme l’importance du modèle italien pour les jeux avec les langues dans le théâtre français du moment. C’est dans l’œuvre de Cyrano que le plurilinguisme occupe une plus grande place dans tout le théâtre du XVIIe siècle, parfois jusqu’à la limite de la compréhension. Mais l’œuvre n’a probablement jamais été représentée. Molière tire des effets comiques extraordinaires du plurilinguisme et renouvelle l’héritage de la farce et de la commedia dell’arte. Les langues étrangères, les patois ou les jargons, plus ou moins exotiques, ne sont plus seulement un jeu comique. Ils lui permettent d’égayer ← 13 | 14 → des scènes qui autrement risqueraient de languir, ils introduisent des intermèdes comiques dans ses histoires banales d’amours contrariées, ils font avancer l’action et définissent certains traits du caractère de ses personnages, etc. Molière n’a pourtant pas inventé les différents jeux avec les langues qu’il utilise dans ses comédies, même s’il a contribué à les remettre à la mode. Certains avaient été déjà employés par ses rivaux. Le plurilinguisme est bien présent chez certains de ses contemporains. Il a surtout une fonction comique, il caractérise certains personnages, etc., mais il peut aussi avoir une fonction politique. Ainsi on se moque du mauvais français des Flamands lors de la campagne de propagande qui visait à soutenir l’invasion des Pays-Bas par Louis XIV (Yllera).

Résumé des informations

Pages
348
Année
2016
ISBN (PDF)
9783035109047
ISBN (ePUB)
9783035197945
ISBN (MOBI)
9783035197938
ISBN (Broché)
9783034320214
DOI
10.3726/978-3-0351-0904-7
Langue
français
Date de parution
2015 (Décembre)
Mots clés
Plurilinguisme Littérature française et francophone Rabelais Peyron Cixous Cohen Kourouma Aimard Vargas
Published
Bern, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2016. 348 p.

Notes biographiques

Alicia Yllera (Éditeur de volume) Julian Muela Ezquerra (Éditeur de volume)

Alicia Yllera est professeur de littérature française à l’UNED (Madrid) et Docteur Honoris causa par l’Université de Saragosse. Elle a publié de nombreux travaux sur la littérature française du Moyen Âge, du XVIe et du XVIIe siècles, ainsi qu’une traduction annotée des cinq livres de Rabelais. Julián Muela Ezquerra est professeur de littérature française à l’Université de Saragosse. Il a traduit à l’espagnol plusieurs textes français du Moyen Âge. Il s’intéresse aux genres narratifs et dramatiques de cette période, mais aussi au roman policier du XIXe et du XXe siècles.

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