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Glossaire des mobilités culturelles

de Zilá Bernd (Éditeur de volume) Norah Dei-Cas Giraldi (Éditeur de volume)
©2014 Collections 390 Pages

Résumé

Les formes de déplacements présentes dans nos sociétés sont multiples : géographiques et culturels, passages – inter-, multi- et transculturels tout autant qu’inter-, multi- et transnationaux –, transferts et autres mouvances dues aux interpénétrations ethniques et culturelles. Ce glossaire les rassemble, les expose et répond au besoin pressant d’une véritable recherche comparatiste faisant dialoguer les cultures des deux côtés de l’Atlantique.
C’est ainsi que dans les différents domaines des sciences humaines et sociales, des spécialistes venus d’Afrique, des Amériques et d’Europe, exposent et débattent des questions fondamentales relatives aux mobilités culturelles. Les concepts-clés des exils, diasporas, migrations, frontières, transferts, transculturalités, transnationalités y sont analysés à travers le prisme de l’inter- et du transdisciplinaire. Les apports théoriques et méthodologiques de cet ouvrage sont nombreux et en font un outil indispensable dans la recherche actuelle.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteurs
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Remerciements
  • Poètes, auteurs de fictions et autres artistes mentionnés
  • Introduction (Zilá Bernd et Norah Dei Cas-Giraldi)
  • Autofiction (Kelley B. Duarte)
  • Braconnages (Nubia Hanciau)
  • Circulations urbaines (Maria Bernadette Porto)
  • Corps sismographiques (Eugénia Vilela)
  • Culture et ethnicité (Johan Leman)
  • Dé-re-territorialisation (Ana Lúcia Silva Paranhos)
  • Diaspora (Aimée G. Bolaños)
  • Dislocation/Déplacement (Elena Palmero González)
  • Errance, migrance, migration (Rita Olivieri-Godet)
  • Exil (Objets) (Alexandra Galitzine-Loumpet)
  • Frontières (Maria Inácia D’Ávila et Claudio Cavas)
  • Lectures radicantes (Manuel Boïs, Oscar Brando, Norah Dei Cas-Giraldi, et Teresa Mocejko Costa)
  • Mutations identitaires (Danielle Forget)
  • Non-lieux (une atypologie) (Alexis Nuselovici)
  • Politiques migratoires (Christiane Vollaire)
  • Pratiques déplacées (Ana Zavala)
  • Territoire, frontiéralité, nouvelles cartographies (Patrick Picouet et Eric Glon)
  • Trans-action/transaction/transnational (Patrick Imbert)
  • Transhumance (Oumar Sy)
  • Transportation (Pierre Ouellet)
  • Variations (Zilá Bernd)
  • Notes sur les auteurs

← 8 | 9 → Remerciements

Ce livre a reçu le soutien :

– du Centre de recherches sur les Civilisations, les Langues et les Littératures étrangères – axe Les Amériques (CECILLE EA-4074) de l’Université Lille 3 ;

– du Groupe de recherche « Questões de hibridação cultural das Américas », coordonné par Zilá Bernd (Université fédérale du Rio Grande do Sul et Cnpq – Conseil national de développement scientifique et technologique) ;

– du Master en Mémoire Sociale et Biens Culturels du UNILASALLE ;

– du Laboratoire Territoires Villes Environnement et Sociétés (TVES EA-4477) de l’Université Lille 1 ;

– de la Chaire de Recherche du Canada : Défis sociaux et culturels des sociétés de savoir, coordonnée par Patrick Imbert (université d’Ottawa, On, Canada).

Il associe également des chercheurs du réseau NEOS-NEWS (Nords-Ests-Ouests-Suds Amériques-Institut des Amériques Paris) et du Programme scientifique Non-lieux de l’exil (NLE – Fondation Maison des Sciences de l’Homme – Paris).

Nos plus vifs remerciements au CNPq Brésil, aux laboratoires de recherche CECILLE et TVES (Lille) et à la Chaire de recherche du Canada « Défis sociaux et culturels des sociétés de savoir », pour leur soutien financier grâce auquel cette publication a été possible. Ainsi qu’à tous les collaborateurs qui ont fait confiance à ce projet collectif de publication, à Manuel Boïs, Chloé Dei Cas, Patrícia C. Ramos Reuillard et Pascal Reuillard, traducteurs et rédacteurs, qui, avec un inestimable dévouement et une grande finesse, ont relu et révisé tous les textes composant cet ouvrage.← 9 | 10 →

← 10 | 11 → Poètes, auteurs de fictions et autres artistes mentionnés

ANDRADE, Oswald – Trans-actions/Transactions

APPOLINAIRE – Non-lieux (une atypologie)

ASSIS BRASIL, L.A. – Variations

AUDET, Noël – Mutations identitaires

ARGUEDAS, J.M. – Lectures radicantes

ARTAUD, Antonin – Corps sismographiques

BAUDELAIRE – Lectures radicantes, Non-lieux (une atypologie)

BEAULIEU, Victor-Lévi – Transportations

BESSETE, Gérard – Trans-actions/Transactions

BREL, Jacques – Culture et ethnicité

BERNHARDT, Thomas – Variations

BORGES, Jorge Luis – Exil (objets) ; Lectures radicantes

BOUCHARD, Louise – Transportations

BROSSARD, Nicole – Circulations urbaines

CAUFIELD, Carlota – Diaspora

CASTRO, Mauro – Circulations urbaines

CHARRON, François – Transportations

CHEN, Ying – Trans-actions/Transactions

D’ALFONSO, Antonio – Re-déterritorialisation

DESAUTELS, Louise – Transportations

DESGENT, Jean Marc – Transportations

DICKNER, Nicolas – Mutations identitaires

EFRON, Ariadna – Exil (objets)

ELLIOT, T.S. – Non-lieux (une atypologie)

ESQUIVEL, Laura – Trans-actions/Transactions

FERNANDEZ, Macedonio – Lectures radicantes

FERRON, Jacques – Trans-actions/Transactions

FRECHETTE, Jean Marc – Transportations

FREUD, Sigmund – Non-lieux (une atypologie)

← 11 | 12 → GALIANO, Alina – Diaspora

GAUVIN, Lise – Circulations urbaines

GOMBROWICZ, Witold – Lectures radicantes

GREEN, Julien – Circulations urbaines

HÉBERT, Anne – Circulations urbaines

HERNÁNDEZ, Felisberto – Lectures radicantes

HATOUM, Milton – Errance, migrance, migration

HUSTON, Nancy – Variations, Braconnages

KAZAN, Elia – Non-lieux (une atypologie)

KENTRIDGE, William – Exil (objets)

KOHAN, Martin – Lectures radicantes

KOKIS, Sergio – Errance, migrance, migration

KUNDERA, Milan – Trans-actions/Transactions

LAFERRIERE, Dany – Circulations urbaines

LALONDE, P.-Léon – Circulations urbaines

LAMARTINE, Alphonse – Exil (objets)

LAROUI, Fouad – Braconnages

LISCANO, Carlos – Lectures radicantes

MARTEL, Yann – Transactions

MAUPASSANT, Guy – Exil (objets)

MEYER, Augusto – Mémoire, imaginaire, mouvement

MULLER, Herta – Exil (objets)

NABOKOV, Wladimir – Exil (objets), Non-Lieux (une atypologie)

OLLIVIER, Émile – Circulations urbaines

OSTER, Daniel – Transportations

PÉAN, Stanley – Circulations urbaines

PEREC, Georges – Exil (objets), Non-lieux (une atypologie)

PIÑON, Nélida – Errance, migrance, migration

PITA, Juana Rosa – Diaspora

POULIN, Jacques – Mutations identitaires

PROULX, Monique – Circulations urbaines

RIBEIRO, João Ubaldo – Circulations urbaines

RIO, Nela – Déplacement

ROBIN, Régine – Autofiction, Exil (objets), Circulations urbaines

← 12 | 13 → ROSA PITA, Juana – Diaspora

ROTH, Joseph – Exil (Objets), Non-lieux (une atypologie)

SAER, Juan José – Lectures radicantes

SARRAUTE, Nathalie – Non-lieux (une atypologie)

SCHNITZLER, Arthur – Non-lieux (une atypologie)

SEBBARD, Leila – Circulations urbaines

SCLIAR, Moacyr – Trans-actions/Transactions

TOURGENIEV, Ivan – Non-lieux (une atypologie)

TORRES, Antonio – Circulations urbaines

TSVETAEVA, Marina – Exils (Corps)← 13 | 14 →

← 14 | 15 → Introduction

Zilá BERND et Norah DEI CAS-GIRALDI

Le projet de constitution d’un Glossaire des Mobilités Culturelles est né d’une proposition conjointe de chercheurs du Groupe de recherche « Questions d’hybridation culturelle », appuyé par le CNPq (Conseil national de développement technologique et scientifique – Brésil) et du Laboratoire CECILLE (Centre sur les civilisations, les langues et les littératures étrangères) de l’Université Lille 3 auxquels se sont associé le réseau de recherche NEOS/NEWS Amériques (Nords-Ests-Ouests-Suds Amériques), labellisé en 2011 par l’Institut des Amériques, le Laboratoire Territoires Villes Environnement et Sociétés de l’Université Lille 1 et le Programme Non-Lieux de l’exil hébergé à la Fondation Maison des Sciences de l’Homme – Paris.

Le domaine ici parcouru est très vaste et le risque était grand de s’égarer. Raison pour laquelle nous avons préféré la forme du glossaire à celle du dictionnaire, en ce qu’il réunit un nombre limité de données relatives à un objet ou à un champ spécifique et forme, en quelque sorte, un système organique autour d’un thème précis.

Si ce projet s’inspire de la publication du Dicionário das Mobilidades Culturais ; percursos americanos (Bernd, Z. org. Porto Alegre : Literalis, 2010), il ne s’agit pas pour autant d’une simple traduction en langue française de l’ouvrage publié en portugais. Sur les 21 articles, élaborés par des chercheurs argentins, belges, brésiliens, canadiens, français, polonais, portugais, sénégalais, uruguayens, provenant de cultures et de formations différentes et rattachés à une quinzaine d’universités, seuls une dizaine intégrant l’édition brésilienne, dûment remaniés et actualisés, s’inscrivent dans la version française que nous offrons aux lecteurs francophones.

Pourquoi un Glossaire des Mobilités culturelles aujourd’hui ? La raison s’en impose à quiconque veut bien prendre conscience de la multiplicité de formes de déplacements – géographiques et culturels –, passages – inter, multi et transculturels tout autant qu’inter, multi et transnationaux –, transferts et autres mouvances dues aux interpénétrations ethniques et culturelles à l’œuvre dans les sociétés contemporaines. Faut-il ajouter la carence en matière de recherche comparatiste faisant ← 15 | 16 → dialoguer différentes cultures des deux côtés de l’Atlantique qui plaide d’abondance pour la parution d’un tel ouvrage ?

L’objectif de cet ouvrage, accueilli au sein de la collection Trans-Atlántico de P.E.I. Peter Lang, est de donner à connaître une réflexion, menée par des spécialistes de questions relatives aux Mobilités Culturelles actifs dans différents domaines des sciences humaines et sociales et qui enseignent dans des universités de pays africains, américains et européens. Dans l’approche inter et transdisciplinaire qui est la leur, en relation avec les notions et concepts-clefs ayant trait à la question de la mobilité (Exils, Diasporas, Migrations, Frontières, Transferts, Transculturalités, Transnationalités), les apports théoriques comme les méthodologies sont très variés. La recherche, de type qualitatif et comparatif, s’inscrit dans la double perspective des études culturelles – interaméricaines et transatlantiques – et des mémoires et langages culturels. En effet, l’ensemble des textes ici rassemblés illustre, dans l’espace global, des formes diverses de partage – de façon parfois conflictuelle – de la diversité.

Les recherches de Walter Moser, essayiste et professeur à l’Université d’Ottawa, sont d’une importance majeure en matière de Mobilités Culturelles. Les thèmes sur lesquels il a exercé son regard de théoricien vont des notions de recyclage et de transferts culturels aux différents aspects de locomotion et de mediamotion. Dans un article publié en langue française dans la revue Gragoatá par l’Université fédérale Fluminense-Niteroi, l’auteur attire notre attention sur les risques de poser la mobilité comme l’une des principales caractéristiques de la culture contemporaine. Les mobilités s’inscrivant dans la vaste problématique de la mondialisation, l’intérêt majeur de leur étude doit être d’observer leur impact dans la contemporanéité (Moser, 2004, p. 30). Pour Walter Moser, « les mutations culturelles se produisent en fait sous l’impact des flux migratoires, des restructurations politiques, des nouveaux médias et technologies, des flux des capitaux et des logiques marchandes qui marquent le monde contemporain » (2004 : 26). L’objectif du travail qu’il a coordonné jusqu’à très récemment dans le cadre de la Chaire du Canada sur les Transfert culturels visait l’accès cognitif à tout ce qui touche la mouvance – des road movies aux transferts médiatiques dans les sociétés contemporaines.

Simon Harel, autre chercheur de l’Université de Montréal qui a aussi beaucoup travaillé sur la thématique des mobilités culturelles, souligne un aspect essentiel de cette réflexion, en ce qu’elle nous permet d’analyser la production culturelle, artistique et littéraire de ceux qui ne possèdent pas d’espace propre, contraints qu’ils sont de se déplacer en permanence, dans une recherche constante, dans leur situation d’exilés ou de migrants, d’un lieu d’appartenance et de reconstruction identitaire.

← 16 | 17 → Pour une typologie des mobilités culturelles

Si les différentes études qui constituent le présent ouvrage sont organisées par ordre alphabétique, à la manière d’un Glossaire, le dialogue que les différents articles (ou entrées) établissent entre eux invite à les appréhender sous forme de constellations dont la géométrie suivrait le jeu des interfaces entre les divers articles dessinant les contours d’une vaste chambre de résonances interculturelles.

Mobilités mémorielles, intersubjectives et identitaires : Autofiction ; Pratiques déplacées : la classe hors les murs ; Mutations identitaires ; Lectures radicantes

Dans le cadre de cette constellation, où le mouvement entre mémoire et oubli est constitué non pas dans le sens d’opposition binaire, mais comme mécanisme constitutif des équations de la mémoire où l’oubli devient une activité intégrante du processus mnémonique, c’est le travail de la mémoire qui fournit son support à la construction identitaire. Les auteurs des articles font converger mémoires individuelle et collective comme pilier de la construction de la subjectivité et du roman mémoriel, concept utilisé par Régine Robin en relation aux récits dans lesquels « un individu, un groupe ou une société pense son passé en le modifiant, le déplaçant, s’inventant des souvenirs d’un passé glorieux » (Robin 1989 : 48). L’Autofiction, selon Kelley B. Duarte, s’affirme ainsi comme acte de subversion du genre autobiographique avec sa prétention de décrire les faits comme véritables. Dans l’autofiction, les écrivains laissent une place à l’imagination pour meubler les espaces vides que la mémoire n’arrive pas à couvrir. Pratiques déplacées : la classe hors les murs, de Ana Zavala, porte sur un type de déplacement d’ordre sociologique, celui de l’enseignement de l’histoire des salles de classe « communes » à des lieux en marge où vivent notamment des personnes privées de liberté (prison ou autres centres de réclusion). Il s’agit d’une didactique de l’histoire transfrontalière visant à montrer les transformations qui s’opèrent simultanément, tant sur les sujets qui apprennent que sur ceux qui enseignent l’histoire, dans ces lieux autres que constituent les classes hors les murs. Dans Mutations identitaires, Danielle Forget analyse l’œuvre de deux auteurs de la littérature québécoise, Nicolas Dickner et Noël Audet, en vue d’observer la déambulation des personnes à travers les Amériques et constater leur processus de mutation identitaire.

Quant à l’article Lectures radicantes, les auteurs nous invitent à lire la littérature – dans son corps multiple et dynamique – selon l’infinité de combinaisons rendues possibles tant par l’auteur que par l’œuvre même et ses lecteurs. Sous l’angle de la critique relationnelle, la notion de radicant, forgée par Nicolas Bourriaud (Radicant, 2009), permet de ← 17 | 18 → rendre compte des questions qui ont trait au vécu de l’auteur, à ce que ses œuvres expriment ainsi qu’à leur réception (simultanée, différente et variée). La lecture proposée des œuvres par « constellations d’auteurs » (Berti et Cozarinski) met en évidence l’émergence de sens nouveaux dans la littérature en relation avec différentes filiations. La radicantité, tout en rendant compte de la pluralité d’enracinements possibles (successifs ou simultanés) et des parcours d’errance (aussi bien de l’auteur que du sujet de l’écriture), vient aussi contrecarrer l’idéologie des classements essentialistes par langues, canons, écoles, courants littéraires ou bibliothèques nationales. L’art radicant, comme l’illustrent les exemples donnés dans cet article, évite la focalisation paralysante sur les valeurs de l’origine ou de son équivalent, l’identité, construites selon le seul point de vue de l’une-fois-pour-toutes.

Mobilités migratoires transculturelles : Déplacement ; (Re) déterritorialisation ; Diaspora ; Errances, migrances, migrations ; Frontières ; Exil (objets) ; Corps sismographiques

Ce type de mobilités concerne le déplacement, sous ses différentes formes, de communautés ethniques contraintes au transit, et les processus, souvent traumatiques, d’émigration, immigration et exil pouvant se produire à l’intérieur d’une communauté ou sur le plan international, avec ses effets, parfois brutaux, de déterritorialisation. La majorité des articles de cette constellation travaille sur la thématique des migrations entre pays et/ou continents. Ainsi Elena Palmero, dans son article Déplacement, discute de l’œuvre poétique de Nela Rio, écrivaine canadienne d’origine argentine qui, avec une grande originalité, articule sa praxis artistique avec une systématisation théorique autour de ce qu’elle désigne elle-même de Poética del Desplazamiento, plongeant sa quête au cœur des œuvres nées de l’expérience de l’exil, de la diaspora et d’autres formes de mobilités culturelles. Cet article suscite l’intérêt pour la littérature hispano-canadienne, encore trop peu connue des lecteurs francophones, dont la visibilité s’accroît dans le contexte canadien du fait, notamment, de sa configuration hybride qui enrichit la perspective transaméricaine des études culturelles et comparées.

Dans son article Diaspora – cette autre forme du déplacement –, Aimée Bolaños, quant à elle, analyse les divers aspects du Voyage, considéré comme une modalité discursive métaphorique de la modernité tardive, ainsi que « la notion de sujet cosmopolite migrant associée au monde transnational, et ses nouvelles identités transculturelles qui se projettent en communautés imaginées ». Si l’article Déplacement s’appuie sur le phénomène d’une nouvelle identité littéraire – hispano-canadienne – qui prend son origine dans le déplacement des auteurs argentins vers le ← 18 | 19 → Canada, les exemples cités dans l’article Diaspora procèdent de l’exode des poètes cubaines vers différentes parties du monde, principalement les États-Unis d’Amérique.

Dans cette même constellation des mobilités migratoires transculturelles (migrations, passages et transferts culturels), Ana Lucia Paranhos, dans son article Dé(re)territorialisation, étudie les néologismes créés par Deleuze et Guattari et repris par E. Glissant, pour évoquer les espaces géographiques et historiques, dans le sens restreint du terme, aussi bien que psychologiques ou mentaux, dans le sens figuré, en attirant l’attention sur le mouvement de passage d’un « espace » à l’autre et la transformation que ce passage induit. Le concept est appliqué à la lecture de l’œuvre de l’écrivain italo-québécois Antonio d’Alfonso.

Dans Errance/migrance/migration, Rita Olivieri-Godet souligne l’ambivalence fondamentale du concept d’errance. Positif, comme aventure assumée prenant, dans certains récits post-modernes, la dimension d’une quête de déterritorialisation et d’appartenances – voyage initiatique à la recherche de soi-même et de l’autre. Négatif, comme déracinement involontaire, focalisé sur la violence des pérégrinations forcées, illustré par les figures emblématiques de l’immigrant, du réfugié, de l’exilé, du marginal, de l’errant, de l’exclu. Selon l’auteure de l’article, « l’étymologie du mot renvoie à cette duplicité de sens : voyager, vaguer, du latin iterare, mais aussi commettre une faute, se tromper, du latin errare ». En mentionnant, dans le sillage de Simon Harel, Pierre Ouellet et Patrick Imbert, l’esprit migrateur qui caractérise l’imaginaire de l’écrivain en situation de migrance dans l’espace culturel américain, cette entrée illustre de manière exemplaire ce que nous appelons mobilités migratoires et transculturelles.

L’article Frontière s’inscrit dans le contexte particulier des études post-coloniales et culturelles (Cultural Studies). Les auteurs de l’article, Maria Inácia d’Avila et Claudio Cavas, mettent en lien la présence du concept de frontière dans le cadre de ce glossaire avec le double processus de mondialisation et le mouvement massif de traversée des frontières et de contact entre cultures différentes qu’il a mis en branle. Plutôt que d’associer uniquement la notion de Frontière à l’idée d’exclusion, les auteurs affirment que « les frontières peuvent également recréer, subvertir, traduire de nouvelles subjectivités ». Cette lecture évoque les concepts de borderlands, d’Anzaldúa (1987), et de zones de contact, de Pratt (1992).

Dans son article Les objets de l’exil Alexandra Loumpet-Galitzine, qui conduit avec Alexis Nuselovici le programme Non-lieux de l’exil (Fondation des Maison des Sciences de l’Homme – Paris), s’intéresse à l’importance des objets dans la situation d’exil. Selon son exposé, l’exil n’est pas uniquement synonyme de bannissement ou de perte, il peut aussi qualifier une expérience désignée par le terme d’exiliance, ← 19 | 20 → « à la fois condition et conscience ». Dans la même ligne de recherche, l’étude présentée par Eugenia Vilela sur Les corps sismographiques nous amène à considérer le mouvement « étouffé » de millions de personnes qui se déplacent de par le monde comme une nouvelle manière d’habiter les territoires (définis du point de vue juridique et administratif par les États). À partir du questionnement qu’est-ce qu’un corps dans la contemporanéité, l’auteure, dans la lignée de Michel Foucault, introduit la notion de corps sismographique – avec cette image saisissante d’une femme errant dans le désert entre la Mauritanie et le Maroc. Associée aux réflexions d’Alexis Nuselovici, Alexandra Loumpet-Galitzine et Christiane Vollaire sur l’exil, cette féconde réflexion sur la multitude de corps migrants qui se déplacent individuellement ou collectivement au-delà de toute frontière nous indique l’urgence d’adopter une autre politique sur les espaces d’exception contemporains – que l’on a tendance à ignorer – et nous amène à réfléchir autrement sur le sens attribué à l’Histoire et sur les transformations sociales qui devraient donner lieu à des nouvelles formes politiques.

Mobilités transactionnelles : Transportation ; Variations ; Trans-action/transaction, transnational ; Braconnages

Le préfixe Trans implique le passage, la traversée, le dépassement, forme de mobilité par excellence. Si la transaction comprend la notion de négocier et renégocier, son objectif est surtout d’arriver à un accord après une période de litige. Ce qui implique des concessions de part et d’autre, un mouvement d’échanges réciproques. À l’entrée Transaction du Dictionnaire de l’altérité et des relations interculturelles (2003), G. Férreol insiste sur le fait que le concept ne se limite pas « à l’accommodation mais conduit, dans bien des cas, à un renouvellement du sens par transit, métissage ou hybridation » (p. 339).

Dans Transportation, Pierre Ouellet joue avec les mouvements de l’inspiration et de la transcendance quand il nous dit que « La mobilité n’est plus seulement transnationale ou transculturelle – comme on l’a cru trop longtemps en fondant le phénomène des migrations sur les seuls déplacements physiques de personnes et de populations ou sur l’unique passage des valeurs culturelles d’un monde à l’autre –, elle est désormais de nature trans-subjective, dans la mesure où elle permet de s’émanciper non seulement des conditions concrètes du voyage au sens propre, qu’il soit exil, évasion ou retour, c’est-à-dire des contraintes de l’espace et du temps que sont l’histoire et le territoire de chacun, mais aussi des conditions propres à l’individuation et à l’identité égotique, considérées pourtant comme un prérequis à toute subjectivité au sens strict, désormais transcendée par le souffle qui l’anime, la dépasse et la déborde de toutes parts ».

Résumé des informations

Pages
390
Année
2014
ISBN (PDF)
9783035264371
ISBN (ePUB)
9783035299830
ISBN (MOBI)
9783035299823
ISBN (Broché)
9782875741950
DOI
10.3726/978-3-0352-6437-1
Langue
français
Date de parution
2014 (Août)
Mots clés
Déplacement Diaspora Migration Transnationalité Transculturalité
Published
Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2014. 390 p., 5 ill., 2 tabl.

Notes biographiques

Zilá Bernd (Éditeur de volume) Norah Dei-Cas Giraldi (Éditeur de volume)

Zilá Bernd est professeur titulaire du Programme de Post-graduation ès Lettres de l’Université Fédérale du Rio Grande do Sul et du Centre Universitaire La Salle, au Brésil. Elle bénéficie d’une bourse de recherche du CNPq (Brésil). Ses champs de recherche sont les littératures francophones, afro-américaines et comparées. Elle est Chevalier de l’Ordre National du Québec et a publié en 2013 Por uma estética dos vestígios memoriais. Norah Dei Cas-Giraldi, Professeure émérite de l’Université de Lille, a coordonné, au sein du laboratoire CECILLE, spécialisé dans les cultures et civilisations modernes et contemporaines, l’axe Les Amériques. Elle a fondé, avec Ada Savin, le réseau NEOS-NEWS Amériques. Membre du comité scientifique du Programme Non-lieux de l’exil, coordonné par Alexis Nuselovici et Alexandra Galitzine-Loumpet (MSH-Paris), elle a codirigé Navegaciones y regresos. Lugares y figuras del desplazamiento (P.I.E. Peter Lang, 2013).

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