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Monstres et christianisme - monstres du christianisme

XVIe – XVIIIe siècles

de Etienne Couriol (Éditeur de volume) Teresa Hiergeist (Éditeur de volume)
©2018 Collections 254 Pages

Résumé

Au début de l’ère moderne, les monstres représentent pour l’Église un grand défi. Leur origine est discutée: sont-ils voulus par Dieu ou s’agit-il d’un accident ? Leur possible signification soulève des questions: leur apparition est-elle annonciatrice d’une famine ou d’une épidémie ou signe de la colère de Dieu ? Ils font douter du comportement à adopter : quels sacrements leur accorder ? Pour ces raisons, les monstres sont très présents dans les écrits religieux, philosophiques et «scientifiques», comme dans les textes littéraires de l’époque. En convoquant différentes disciplines, comme l’histoire, l’histoire de l’art, l’anthropologie et les lettres, les contributions analysent les discours religieux sur les monstres et la fonctionnalisation de ceux-ci pour des buts instructifs, didactiques et critiques, sans oublier l’affirmation et le questionnement des structures de pouvoir existantes.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos des directeurs de la publication
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Monstres et christianisme – Monstres du christianisme (XVIe – XVIIIe siècles) : Introduction (Etienne Couriol / Teresa Hiergeist)
  • Les monstres et leur interprétation dans les Wickiana (Rosmarie Zeller)
  • « Monstre(s) horrible(s) » et « effroyable(s) accouchement(s) » : tératologie et sensationnel dans les canards (fin XVIe – début XVIIIe siècles) (Kévin Cochard)
  • « La Femme Calviniste pria Dieu de vouloir permettre que celle des deux, Qui estoit dans la fausse religion, accouchait d’un Diable ». L’utilisation du surnaturel dans les écrits de conversion du XVIIe siècle (Béatrice Jakobs)
  • Monstrous Athéistes and Marvellous Demoniacs : Teratology and Apology in Sixteenth-Century France (Ismael del Olmo)
  • Monstruosité et hérésie : des lectures humanistes du miracle de Laon de 1566 (Santiago Francisco Peña)
  • Entre héritage païen et dogme chrétien : le discours sur le loup-garou dans l’Espagne des XVIe et XVIIe siècles (Christine Orobitg)
  • La bête humaine. Constructions discursives de l’homme sauvage dans la culture et la littérature chrétienne de l’Espagne du XVIe siècle (Teresa Hiergeist)
  • Des dragons dans des églises : histoires de crocodiles devenus ex-voto (XVIe – XVIIe siècles) (Valeria Motta)
  • De l’État chasseur de monstres à l’État-monstre dans le théâtre classique français : l’exemple d’Horace et de Phèdre (Lisa Zeller)
  • Dans le sillage de Protée. Esprit ondoyant à l’âge baroque (Erwan Moreau)
  • Baptême et mariage d’un hermaphrodite : le monstrueux est-il compatible avec un sacrement devant l’Église ? (Etienne Couriol)
  • Faut-il baptiser les monstres ? Processus d’une consultation casuistique (Serge Boarini)
  • Dieu souhaite-t-il les monstres humains ? La querelle des monstres à l’Académie des Sciences de Paris (1701–1743) (Patricia Georges)
  • Liste des contributeurs

Etienne Couriol et Teresa Hiergeist (éds.)

Monstres et christianisme –
monstres du christianisme

XVIe – XVIIIe siècles

À propos des directeurs de la publication

Dr. Etienne Couriol est agrégé en Histoire. Actuellement il est professeur en classes préparatoires aux grandes écoles.

Dr. Teresa Hiergeist est enseignante et chercheuse en lettres françaises et espagnoles à la FAU Erlangen-Nuremberg.

À propos du livre

Au début de l’ère moderne, les monstres représentent pour l’Église un grand défi. Leur origine est discutée : sont-ils voulus par Dieu ou s’agit-il d’un accident ? Leur possible signification soulève des questions : leur apparition est-elle annonciatrice d’une famine ou d’une épidémie ou signe de la colère de Dieu ? Ils font douter du comportement à adopter : quels sacrements leur accorder ? Pour ces raisons, les monstres sont très présents dans les écrits religieux, philosophiques et « scientifiques », comme dans les textes littéraires de l’époque. En convoquant différentes disciplines, comme l’histoire, l’histoire de l’art, l’anthropologie et les lettres, les contributions analysent les discours religieux sur les monstres et la fonctionnalisation de ceux-ci pour des buts instructifs, didactiques et critiques, sans oublier l’affirmation et le questionnement des structures de pouvoir existantes.

Pour référencer cet eBook

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Table des matières

Etienne Couriol/ Teresa Hiergeist

Monstres et christianisme – Monstres du christianisme
(XVIe – XVIIIe siècles) : Introduction

Rosmarie Zeller

Les monstres et leur interprétation dans les Wickiana

Kévin Cochard

« Monstre(s) horrible(s) » et « effroyable(s) accouchement(s) » : tératologie et sensationnel dans les canards (fin XVI– début XVIIIe siècles)

Béatrice Jakobs

« La Femme Calviniste pria Dieu de vouloir permettre que celle des deux, Qui estoit dans la fausse religion, accouchait d’un Diable ». L’utilisation du surnaturel dans les écrits de co
nversion du XVIIe siècle

Ismael del Olmo

Monstrous Athéistes and Marvellous Demoniacs : Teratology and Apology in Sixteenth-Century France

Santiago Francisco Peña

Monstruosité et hérésie : des lectures humanistes du miracle
de Laon de 1566

Christine Orobitg

Entre héritage païen et dogme chrétien : le discours sur le loup-garou dans l’Espagne des XVIe et XVIIe siècles

Teresa Hiergeist

La bête humaine. Constructions discursives de l’homme sauvage dans la culture et la littérature chrétienne de l’Espagne du XVIe siècle

Valeria Motta

Des dragons dans des églises : histoires de crocodiles devenus ex-voto (XVI– XVIIe siècles)←5 | 6→

Lisa Zeller

De l’État chasseur de monstres à l’État-monstre dans le théâtre classique français : l’exemple d’Horace et de Phèdre

Erwan Moreau

Dans le sillage de Protée. Esprit ondoyant à l’âge baroque

Etienne Couriol

Baptême et mariage d’un hermaphrodite : le monstrueux est-il compatible avec un sacrement devant l’Église ?

Serge Boarini

Faut-il baptiser les monstres ? Processus d’une consultation casuistique

Patricia Georges

Dieu souhaite-t-il les monstres humains ? La querelle des monstres à l’Académie des Sciences de Paris (1701–1743)

Liste des contributeurs←6 | 7→

Etienne Couriol/ Teresa Hiergeist

Monstres et christianisme – Monstres du christianisme (XVIe – XVIIIe siècles) : Introduction

Les monstres sont au centre des attentions depuis l’Antiquité où ils apparaissent souvent aux bords du monde connu et constituent des êtres marginaux et périphériques bizarres et menaçants1. Aussi au Moyen Age, on les rencontre fréquemment dans des traités médicaux et religieux, où leur genèse et significations sont discutées, dans des tableaux, dans des imprimés ou des livres, où ils choquent ou fascinent leurs spectateurs et lecteurs2, ou dans l’architecture ecclésiastique romane3, où ils ont vocation à faire peur et à constituer un avertissement pour les fidèles4. Toutefois c’est à l’époque moderne, du XVIe au XVIIIe siècle, que les monstres sont le plus présents en Europe5. Dans les traités, les écrits du for privé et les relations de voyage, mais aussi dans les livres de merveilles et les cabinets de curiosités, s’accumulent les témoignages de leur existence – soit sous la forme réelle d’enfants ou d’animaux mal formés, soit comme inventions de l’imagination ou reprises de récits traditionnels6.←7 | 8→ Cette meilleure visibilité est d’abord due à l’intérêt croissant de la médecine, de l’histoire naturelle, de la théologie et de l’alchimie depuis la Renaissance pour les déchiffrer et comprendre ; ensuite à l’amélioration des techniques de transmission d’informations avec l’invention de l’imprimerie, qui les rend accessibles à un plus large public7 ; et enfin à la préférence du début de l’ère moderne pour l’absurde, le curieux et le bizarre8. Les monstres attirent donc l’attention pour trois raisons : ils suscitent la curiosité des érudits, se perçoivent comme des messages transcendants et satisfont le goût sensationnaliste du peuple. Jusqu’au XVIIIe siècle, les monstres et créatures hybrides peuplent l’imaginaire de l’Occident. Mais au cours du temps ils apparaissent de moins en moins, ce qui est dû au fait que la vision du monde allégorique est remplacée peu à peu par une attitude rationnelle, causale et logique, qui délaisse partiellement les questions transcendantes et la fascination pour les phénomènes incompréhensibles9 et qui biologise, normalise et naturalise les monstres, en les insérant dans les classifications zoologiques et anthropologiques10.

Ce qui caractérise les monstres dans la période choisie est qu’ils sont – comme le décrit Michel Foucault dans Les anormaux – « mixtes entre deux règnes », c’est-à-dire un mélange entre homme et animal (par exemple, un homme à la tête de bœuf), entre deux individus (par exemple, un corps avec deux têtes) ou entre homme et femme. Selon lui, c’est la transgression des classifications existantes qui fait la monstruosité11. Cette définition peut s’appliquer par exemple à la longue description faite par le médecin et architecte Claude Perrault, membre de l’Académie royale des sciences, dans son Voyage à Bordeaux (1669) d’« un fœtus humain qu’on prétend avoir été changé en celui d’un singe, dans le ventre d’une femme par l’effort que son imagination avait fait en voyant un fagotin »12, qui retient l’attention des élites de la ville et laisse place à des débats virulents et à des polémiques. Ainsi le médecin←8 | 9→ Galatheau, qui défend cette idée de transformation, est vivement critiqué par l’un de ses confrères, ce qui donne lieu à plusieurs publications. La définition se confirme également pour l’évocation d’un garçon à deux visages tout comme celle d’un hermaphrodite avec des cornes de chèvre, une queue de renard et des pieds d’aigle, qu’on trouve par exemple dans Relacion de casos notables de Matías Escudero de Cobeña13. Par contre, elle n’englobe pas d’autre malformations, telle l’absence de bras ou de jambes ou la déformation de parties du corps particulières. Au niveau formel, le monstre se caractérise donc par une anomalie physique qui peut consister également en un mélange, une duplication ou une distorsion.

Toutefois, l’aspect extérieur seul n’est pas encore suffisant pour définir un monstre, raison pour laquelle Michel Foucault ajoute :

Pour qu’il y ait monstruosité, il faut que cette transgression de la limite naturelle […] soit telle qu’elle se réfère à, ou en tout cas mette en cause une certaine interdiction de la loi civile, religieuse ou divine ; ou qu’elle provoque une certaine impossibilité à appliquer cette loi civile, religieuse ou divine. Il n’y a de monstruosité que là où le désordre de la loi naturelle vient toucher, bousculer, inquiéter le droit, que ce soit le droit civil, le droit canonique, le droit religieux14.

Le monstre est donc toujours étroitement lié à des codes de comportement, des représentations de l’ordre établi et des structures de pouvoir qui font la société. Ce n’est pas seulement le corps difficilement classifiable, sinon aussi l’énergie sémiotique et les connotations culturelles qui y sont liées qui le constituent15. Le monstre reflète ce qu’une société essaie d’exclure et ce à quoi elle oppose résistance. Il exprime donc indirectement les valeurs et normes de celle-ci16. Il n’est dès lors pas étonnant qu’à l’époque moderne déjà, le terme ‘monstre’ puisse même être appliqué à un individu ayant un comportement très différent de celui qui est attendu, bien qu’il ne présente pas de signe physique distinctif. Ainsi le maître d’école et clerc paroissial Pierre Louis Nicolas Delahaye, qui fait la rencontre en 1783 d’un individu au comportement déroutant et inacceptable, le qualifie de ‘monstre’. Six années plus tard, en décembre 1789, il utilise le même terme à←9 | 10→ propos d’un homme coupable d’un coup de folie17. Nonobstant, le monstre n’a qu’une fonction altérisante, sinon il dispose aussi d’une composante transgressive, puisqu’il participe comme être hybride à deux ordres18. À partir du monstre et des discours qui circulent sur lui, une société peut donc cimenter son identité et s’assurer de sa constance, mais elle peut aussi faire face à ce qui lui est nouveau et par là inciter au développement et changement culturel.

Toutefois, portant son regard sur l’Europe du XVIe au XVIIIe siècle, cet ouvrage ne s’intéresse pas aux monstres en général, puisqu’ils ont déjà été bien étudiés, ni aux différentes acceptions du terme. Il traite en réalité des liens entre monstres et christianisme. Il faut entendre par là les différentes utilisations de la figure du monstre au sein de l’Eglise, ainsi que l’image chrétienne du monstre, la signification religieuse de son apparition et de sa présence. À l’époque moderne, dans un contexte où les mutations religieuses sont nombreuses et souvent conflictuelles (naissance et affirmation du protestantisme, affrontements religieux entre catholiques et protestants mais aussi au sein du catholicisme), le monstre est incontournable19. En tant qu’être concret, il interroge. Son origine est discutée : est-il voulu par Dieu ou est-ce un accident ? Sa possible signification questionne : son apparition peut être annonciatrice d’une famine ou d’une épidémie, il peut être signe de la colère de Dieu20. Il est permis de douter du comportement à adopter : quels sacrements accorder à un monstre ou à un être humain doté d’aspects monstrueux ?21 Le monstre en tant qu’allégorie est très présent dans les représentations←10 | 11→ figuratives ou dans la littérature, où il peut représenter entre autres le schisme de l’Église ou l’adversaire que l’on tente de décrédibiliser.

A cause de leur anormalité, de leur potentiel subversif, de leur étrangeté et des nombreuses questions qu’ils soulèvent, les monstres peuvent représenter un défi et une menace pour ceux qui s’y trouvent confrontés22. Chaque domaine de la société dispose de sa propre stratégie pour donner un sens aux monstres et par là réduire la contingence de leur apparition. Concernant la religion, on peut identifier deux approches dominantes. Les uns voient les monstres comme des manifestations de la diversité de la création qui leur inspire curiosité et admiration pour la toute-puissance divine23. Des traités spécialisés comme les Histoires prodigieuses de Pierre Boaistuau (1560), Des Monstres et des prodiges d’Ambroise Paré (1573), Monstrorum historia de l’italien Ulisse Aldrovandi (1642, ouvrage posthume) sont un exemple de cette attitude. Ces textes ne cherchent pas à se scandaliser des monstres, mais au contraire les traitent souvent d’une façon compatissante et respectueuse24. En effet les raisons avancées ne sont pas seulement transcendantes mais également biologiques. Ainsi Ambroise Paré écrit par exemple :

Les causes des monstres sont plusieurs. La première est la gloire de Dieu. Le seconde, son ire. La troisiéme, la trop grande quantité de semence. La quatriéme, la trop petite quantité. La cinquiéme, l’imagination. La sixiéme, l’angustie ou petitesse de la matrice. La septiéme, l’assiette indécente de la mere […]. Le huictième, par cheute, ou coups donnez contre le ventre de la mere estant grosse d’enfant. La neufiéme, par maladies hereditaires ou accidentales. La dixiéme, par pourriture ou corruption de la semence. L’onziéme, par mixtion, ou meslange de semence. La douxiéme, par l’artifice des meschans belistres de l’sotiere. La treiziéme, par les Demons ou Diables25.

Cette argumentation se caractérise par la simultanéité d’explications physiques et métaphysiques, parfois déniant, parfois affirmant la responsabilité des parents pour la malformation, de sorte qu’on puisse constater une normalisation partielle des monstres. Ceux-ci ne sont pas automatiquement désignés comme anormaux.←11 | 12→ Ils font partie de la nature et sont considérés comme un caprice de celle-ci26. Les enfants malformés sont accueillis dans les cabinets de curiosité et ils y représentent souvent les pièces les plus précieuses de la collection27, suscitant la curiosité. On les considère comme manifestation d’une diversité qui souligne la toute-puissance divine28 ou comme preuve que l’homme est incapable de saisir le plan du Créateur et n’a donc pas le droit de juger son œuvre29. C’est le cas des Essais de Michel de Montaigne, qui les réhabilitent, en attribuant leur caractère atypique au manque de flexibilité de la perception humaine :

Davantage, combien y a-t-il de choses en notre connaissance, qui combattent ces belles règles que nous avons taillées et prescrites à nature ? Et nous entreprendrons d’y attacher Dieu même ! Combien de choses appelons-nous miraculeuses et contre nature ? Cela se fait par chaque homme et par chaque nation selon la mesure de son ignorance. Combien trouvons-nous de propriétés occultes et de quintessences ? Car, aller selon nature, pour nous, ce n’est qu’aller selon notre intelligence, autant qu’elle peut suivre et autant que nous y voyons ; ce qui est au-delà est monstrueux et désordonné. Or, à ce compte, aux plus avisés et aux plus habiles tout sera donc monstrueux : car à ceux-là l’humaine raison a persuadé30.

Le deuxième groupe interprète les monstres comme l’expression du mécontentement de Dieu, prélude à sa vengeance, comme le signe du péché individuel ou d’une décadence sociale générale, ou même comme incarnation du diable, qui menace et séduit les croyants31. Ceci se reflète dans l’explication étymologique du mot ‘monstre’, dérivé du verbe latin monere (‘avertir’, ‘rappeler à l’ordre’), qui est répétée topiquement chez plusieurs auteurs comme Isidore de Séville ou Augustin d’Hippone32 et qui suggère que le monstre (dé)montre quelque chose. En ce sens, des êtres monstrueux possèdent un caractère surnaturel et apocalyptique, puisqu’ils avertissent ou prouvent un péché commis (agitation politique, excès←12 | 13→ moral, blasphème, mensonge, meurtre, vol ou adultère33) ou annoncent une punition céleste à venir34. Des péchés de toute sorte deviennent de cette manière un stigmate visible et transparent, qui permet le contrôle social des autres membres de la société. Dans ce contexte, l’interprétation de la malformation représente un défi. Parfois elle est comprise comme signe d’une décadence morale générale de la société, parfois comme indice d’une mauvaise conduite des dirigeants politiques ou cléricaux, parfois on en déduit un manque de vertu de la femme qui accouche ou de sa famille35. Quand en 1573 un monstre qui ressemble à un dragon est trouvé près de Bologne, de vives discussions se déclarent pour savoir s’il doit être compris comme mauvais présage pour l’élection imminente du Pontife romain ou comme signe du vice du peuple36. On note donc une certaine incertitude quant au schéma d’interprétation à appliquer.

Cependant entre les XVIe et XVIIIe siècles, ce n’est pas seulement Dieu qu’on croit responsable de l’aspect monstrueux des nouveau-nés mal formés, mais aussi le diable. Celui-ci est souvent représenté dans l’art et la littérature comme être laid et déformé37, étant fréquemment mis en scène comme créature hybride avec un pied de bouc ou de cheval et avec des cornes – un physique qui annonce aussi son immoralité tout comme son caractère incontrôlable38. Puisque les malformations correspondent au moins en partie à l’imagination de Satan (par le mélange et la déformation), il n’est pas étonnant qu’elles soient mises en relation et interprétées comme « porte d’entrée » du diabolique dans la vie humaine39. Ce discours angoissant sert d’abord à renforcer l’identité culturelle : ce qui ne fait pas partie des valeurs de la société de l’époque se projette sur le corps de l’être anormal,←13 | 14→ qui est par conséquent tué, anéanti par un exorcisme ou enfermé et par là rendu inoffensif40.

Résumé des informations

Pages
254
Année
2018
ISBN (PDF)
9783631769195
ISBN (ePUB)
9783631769201
ISBN (MOBI)
9783631769218
ISBN (Relié)
9783631769188
DOI
10.3726/b14722
Langue
français
Date de parution
2018 (Novembre)
Mots clés
Missgeburten Protestantismus Katholizismus Ungeheuer Wissenschaft Frühe Neuzeit
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien. 2018. 254 p., 9 col. ill, 8 b/w ill.

Notes biographiques

Etienne Couriol (Éditeur de volume) Teresa Hiergeist (Éditeur de volume)

Dr. Etienne Couriol est agrégé en Histoire. Actuellement il est professeur en classes préparatoires aux grandes écoles. Dr. Teresa Hiergeist est enseignante et chercheuse en lettres françaises et espagnoles à la FAU Erlangen-Nuremberg.

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Titre: Monstres et christianisme - monstres du christianisme
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