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Perspectives pragmatiques sur le discours littéraire

de Mihaela Chapelan (Auteur)
Monographies XIV, 185 Pages

Résumé

L’ouvrage examine la manière dont les études littéraires ont su tirer profit de l’élaboration des concepts fondamentaux de la pragmatique. Tout en envisageant le phénomène littéraire comme un dispositif communicationnel, l’auteure insiste sur ses particularités et met en évidence les remodelages successifs subis par des notions comme : le contexte littéraire, les actes de langages fictionnels, la référence etc. L’auteure accorde une attention particulière à l’identité des protagonistes fondamentaux de la communication littéraire, à savoir le couple formé par l’énonciateur et l’énonciataire.
La deuxième partie du livre se propose de mettre la théorie à l’épreuve des textes et offre des modèles d’approche pragmatique d’œuvres littéraires diverses, appartenant surtout à l’espace culturel français et francophone contemporain.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des Matières
  • Avant-propos
  • Partie I : Repères théoriques
  • Chapitre I : Qu’est-ce que la pragmatique?
  • 1. Définitions de la pragmatique
  • Chapitre II : Le contexte
  • 1. La notion de contexte
  • 2. La situation de communication
  • 3. La situation d’énonciation et les déictiques
  • 3.1 Le glissement de la IIe personne à la IIIe : procédé de mise à distance
  • 3.2 Marqueurs linguistiques de la vocation interlocutionnaire
  • 4. Évolution de la notion de « contexte de l’œuvre littéraire »
  • 4.1 La scénographie
  • 4.2 Positionnements par rapport à la « scène validée »
  • 5. La prise en compte de la lecture
  • 5.1 La spécificité de la communication littéraire
  • 5.1.1 Décontextualisation – Recontextualisation
  • 5.2 Les divers types de lecteur
  • 5.2.1 Le narrataire
  • 5.2.2 Le lecteur virtuel
  • 5.2.2.1 L’approche allemande (L’École de Constance)
  • 5.2.2.2 Le lecteur abstrait de Jaap Lintvelt
  • 5.2.2.3 Le Lecteur Modèle d’Umberto Eco
  • 5.3 L’auteur
  • 5.3.1 La notion d’auteur
  • 5.3.2 Émergence de l’auteur et de la conscience auctoriale
  • 5.3.3 Stabilisation et consécration du concept d’auteur
  • 5.3.4 Négations modernes de l’auteur
  • 5.3.5 Récupérations socio-pragmatiques de l’auteur
  • Chapitre III : Les actes de langage
  • 1. La théorie des actes de langage
  • 2. Les actes de langage non-littéraux
  • 2.1 Les actes de langages indirects
  • 2.2 Les énoncés figurés
  • 2.3 Les actes de langage fictionnels
  • 2.3.1 Le rapport entre littérature et fiction
  • 2.3.2 Le statut illocutoire des actes de fiction
  • 2.3.3 L’acte de fiction comme macro-acte de langage
  • 3. L’inévitable question de la référence
  • 3.1 Les îlots référentiels
  • Partie II : Applications
  • Inscription générique et dissonances énonciatives dans Alabama Song de Gilles Leroy
  • Valeurs pragmatiques du pronom « ils » dans les régimes totalitaires
  • La diversité référentielle du pronom « on »
  • Décalages énonciatifs et fonctions du discours auctoriel dans le roman Trois jours chez ma mère de François Weyergans
  • Modalités discursives et brouillages identitaires dans Hilda de Marie NDiaye .
  • Référence et autoréférence dans Allah n’est pas obligé d’Ahmadou Kourouma
  • Analyse pragma-génétique d’un fragment du manuscrit Précis de décomposition d’Emile Cioran
  • La collaboration traducteur – auteur est-elle une condition de bonheur de l’acte de traduire ?
  • Bibliographie

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Avant-propos

Le présent ouvrage se propose de remettre en discussion la manière dont l’analyse des textes littéraires a su tirer profit de l’élaboration des concepts fondamentaux de la pragmatique. Parmi ces derniers, nous accordons une importance particulière aux notions reliées au contexte et aux actes de langage, les deux directions primordiales de l’évolution de la pragmatique en tant que discipline.

Tout en envisageant le phénomène littéraire comme un dispositif communicationnel, nous insisterons sur une série de particularités de la communication littéraire (par exemple la décontextualisation, qui est le corrélat de l’ambiguïté fondamentale de l’œuvre littéraire, et la recontextualisation, opérée par chaque lecteur) et nous réexaminerons la notion de contexte littéraire en mettant en évidence les différences entre la position pragmatique et d’autres démarches ayant comme objet d’étude les relations de l’œuvre avec le contexte (l’histoire littéraire, la socio-critique).

En analysant quelques notions essentielles qui ont contribué au remodelage du concept de contexte de l’œuvre littéraire, nous nous arrêterons notamment sur l’identité des protagonistes fondamentaux, des acteurs de la communication, à savoir le couple formé par l’énonciateur et l’énonciataire. D’une façon qui pourrait paraître quelque peu surprenante, nous examinerons d’abord le deuxième pôle de ce couple communicationnel, celui de l’énonciataire, même si la logique imposerait de commencer avec celui qui produit l’énoncé littéraire.

Mais notre choix d’examiner d’abord l’énonciataire n’est pas gratuit, il a sa propre logique, car c’est surtout par les divers ouvrages qui visaient à mieux cerner la figure de ce dernier que s’est imposée l’approche pragmatique de la littérature et s’est opéré un renouvellement majeur dans les études littéraires.

La narratologie et la « théorie de la lecture » ont, certes, débattu en détail le problème des divers types de narrataires ou de lecteurs. Cela fait qu’on se retrouve actuellement devant une pléthore de termes servant à les désigner, ce qui peut conduire à des confusions. Nous avons donc senti le besoin de faire non seulement une systématisation de leur usage, mais aussi ← XI | XII → d’établir des similitudes et des différences entre ces systèmes du point de vue d’un pragmaticien, en tenant donc compte des divers niveaux auxquels se situent les instances de l’œuvre littéraire sans pour autant les absolutiser, car les frontières entre le dedans et le dehors d’une œuvre sont mouvantes et perméables et certains textes tirent leur substance justement de ce jeu subtil de va-et-vient entre les divers niveaux.

Cette insistance sur la figure de l’énonciataire ne nous empêchera pourtant pas d’accorder à l’énonciateur toute l’attention qu’elle mérite, une place spéciale étant réservée à la remise à l’honneur de la figure de l’auteur, dont la mort avait été déclarée un peu trop vite par la critique structuraliste.

Dans le chapitre destiné aux actes de langages, nous tenterons d’offrir une perspective d’ensemble sur le long débat concernant les actes de langage fictionnels et de leur statut illocutoire, avec un détour obligé sur le rapport entre littérature et fiction ainsi que sur la notion de référence et le problème épineux de l’existence ou de l’absence de référent dans les œuvres littéraires.

Dans la deuxième partie, notre démarche sera beaucoup plus appliquée, en offrant principalement des modèles concrets d’approche pragmatique des textes littéraires. Même si la dimension théorique n’y sera pas complètement absente, nos analyses étant implicitement un approfondissement de certaines notions abordées dans la première partie du livre, le but principal restera celui de mettre la théorie à l’épreuve des textes, envisagés, autant que possible, dans leur intégralité.

Nous ne pensons pas que le critique qui s’approche d’un texte doit d’emblée décider du type de pragmatique qu’il mobilisera, car si l’on ne se limite pas à accorder à l’œuvre littéraire la valeur d’un simple exemplum dont on se sert pour étayer une théorie linguistique quelconque, mais on veut la cerner dans toute sa complexité et son ambiguïté constitutives, on doit l’examiner dans son ensemble, en prenant en compte autant sa progression textuelle que la diversité des notions pragmatiques qui peuvent rendre compte de sa singularité. Notre position n’est décidément pas celle d’un linguiste qui ne se penche sur la littérature que pour y piocher des arguments nécessaires à ses théories, mais celle d’un amoureux de littérature qui, par le biais d’une analyse textuelle d’orientation pragmatique, veut également faire découvrir aux lecteurs intéressés des auteurs dont les œuvres continuent à nous interpeller, par leur forme comme par leur contenu. ← XII | XIII →

Loin de nous donc l’idée vaine que le modèle d’analyse que nous proposons serait le seul à pouvoir rendre compte de ces textes. Nous sommes persuadés que chaque œuvre littéraire véritable permet une multitude d’approches, dont aucune ne saurait épuiser sa richesse. Si nous avons opté cette fois-ci pour la démarche pragmatique, c’est parce qu’elle nous a semblé particulièrement pertinente pour mettre en valeur des éléments textuels négligés ou insuffisamment exploités par d’autres approches, l’une de nos préoccupations majeures restant celle d’intégrer ces découvertes dans un fonctionnement et une signification d’ensemble de l’œuvre abordée. ← XIII | XIV →

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Partie I:
Repères théoriques

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Chapitre I :  Qu’est-ce que la pragmatique?

La question Qu’est-ce que la pragmatique? peut paraître simple et conventionnelle à un prime abord, mais en réalité elle s’avère très complexe, car la réponse balaye implicitement presque tout le champ de la pragmatique. Tandis que l’approche linguistique morphosyntaxique et celle sémantique se sont constituées depuis longtemps en disciplines rigoureuses, ayant un objet d’étude bien déterminé, la pragmatique, malgré ses succès incontestables, est une discipline qui se cherche encore et dont les frontières restent parfois floues.

Des controverses théoriques multiples touchent à son statut, à sa cohérence, voire à son existence comme discipline autonome. En effet, si certains théoriciens la considèrent trop hétérogène pour constituer une discipline rigoureuse, car son objet d’étude serait, selon l’expression de Françoise Armengaud1, un « fourre tout » où l’on introduit toute sorte de problèmes linguistiques qui n’ont pu encore être traités en syntaxe ou en sémantique, d’autres (F. Jacques, F. Hallyn) la conçoivent comme une discipline forte, qui devient intégrante. Alors que la pragmatique est chronologiquement la dernière-née des disciplines sémiotiques, ses thèses ne cessent de refluer sur celles d’autres disciplines constituées plus tôt. Et il est vrai qu’aujourd’hui est devenu inconcevable qu’on traite de phénomènes langagiers traditionnellement pris en compte par la syntaxe ou la sémantique sans qu’on leur ajoute la perspective pragmatique. Dans cette lumière, c’est plutôt l’autonomie de ces branches linguistiques qui peut paraître désormais fragile.

Sans nous proposer de trancher entre ces deux conceptions ou de donner une réponse exhaustive à la question « qu’est-ce que la pragmatique ? », nous ne pouvons passer à l’objet plus spécifique de notre étude, à savoir les perspectives pragmatiques sur le discours littéraire, sans examiner brièvement l’origine du terme lui-même et ensuite quelques unes des définitions données à la pragmatique. Le terme vient du grec ancien, à savoir du nom « pragma » (c’est-à-dire « action »). L’adjectif « pragmatikê » (pragma + téchnê), a été dérivé de ce nom et signifiait l’art d’agir correctement. ← 3 | 4 → Conformément au Dictionnaire du vocabulaire technique et critique de la philosophie de A. Lalande, pragma renvoie à la praxis, conçue comme action de transformation du réel et de soi. En français, « pragmatique » a été tout d’abord employé dans le domaine juridique, au Moyen Age. On le rencontre dans l’expression « pragmatique sanction » (pragmatica sanctio en latin médiéval), qui désignait un édit visant à régler une affaire importante et qui proposait des solutions concrètes définitives. A partir du XVIIe siècle, le terme s’applique aux domaines politique, économique ou à toute recherche ou découverte scientifiques susceptibles d’avoir des applications pratiques. De cette façon, il commence déjà à être opposé à la connaissance théorique et spéculative. Au XVIIIe siècle, E. Kant, dans sa Métaphysique des mœurs, utilisait l’adjectif « pragmatique » pour qualifier les conseils qui visent à apprendre aux gens comment on peut se soucier mieux de son bien-être général : « On pourrait appeler pragmatiques les impératifs relevant du bien être […] »2. Par la suite, cet adjectif est rentré dans le langage commun et s’emploie surtout dans des syntagmes du type « esprit pragmatique » ou « personne pragmatique ». Il a donc acquis le sens laudatif de « réaliste », « efficace », «capable de trouver des solutions concrètes adéquates à la situation ». Cet adjectif peut également avoir le sens de « susceptible d’applications utiles », entrant ainsi en opposition avec ce qui est oiseux ou purement verbal.

Résumé des informations

Pages
XIV, 185
ISBN (PDF)
9783653070613
ISBN (ePUB)
9783653955958
ISBN (MOBI)
9783653955941
ISBN (Broché)
9783631678749
DOI
10.3726/978-3-653-07061-3
Langue
français
Date de parution
2016 (Juin)
Mots clés
contexte littéraire recontextualisation lecteur décontextualisation
Published
Frankfurt am Main, Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Wien, 2014. XIV, 185 p.

Notes biographiques

Mihaela Chapelan (Auteur)

Mihaela Chapelan est maître de conférences à l’Université « Spiru Haret » de Bucarest, membre de la Société Diderot, de la Société d’Études sur le XVIIIe Siècle etc. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages et articles portant sur la littérature française et francophone et a dirigé plusieurs projets internationaux de recherche interdisciplinaire sur des sujets d’actualité.

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Titre: Perspectives pragmatiques sur le discours littéraire
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