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La France, l’Allemagne, l’Europe

Mélanges en l’honneur de Chantal Metzger

de Jean El Gammal (Éditeur de volume)
©2017 Autres 366 Pages
Série: Convergences, Volume 89

Résumé

Ce recueil rassemble des études d’historiens, géographes et germanistes d’origines diverses. Elles sont réunies en hommage à Chantal Metzger, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Lorraine, spécialiste d’histoire de l’Allemagne et des relations internationales, notamment franco-allemandes, et rédactrice en chef de la revue Guerres mondiales et conflits contemporains. Ce volume aborde des sujets relatifs à l’histoire des guerres mondiales, aux relations entre la France et l’Allemagne depuis 1945 et aux enjeux internationaux, coloniaux et européens depuis le début du XXe siècle. À travers vingt-et-une contributions, il est question de l’emprise et de la portée des conflits, ainsi que des modalités de la construction européenne, des réticences et des relations qu’elle a suscitées. Plusieurs thèmes sont mis en évidence, tels la mémoire, le renseignement, l’industrie, l’aéronautique, la presse et la gastronomie. Des regards croisés sont rendus possibles par des études concernant l’URSS, la Poznanie, l’Italie, le Portugal, voire, en contrepoint, le Japon.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Introduction (Jean El Gammal)
  • I Autour des guerres mondiales
  • Le pigeon voyageur, auxiliaire de l’Armée française pendant la Grande Guerre (Murielle Avice-Hanoun / Françoise Bouron)
  • La Grande Guerre dans la mémoire des habitants de la Poznanie (Tomasz Schramm)
  • Les changements de ton de la presse parisienne pendant et après la débâcle de 1940. Défi, résignation, acquiescement, collaboration (David Winegate Pike)
  • Schwert über dem Meer (L’Épée au-dessus de la mer). Une exposition à la gloire de la marine allemande en Alsace annexée (1943) (Jean-Noël Grandhomme)
  • Aristides de Sousa Mendes, le devoir de désobéir (Audrey Roncigli)
  • La question allemande. Une version soviétique à l’approche de la victoire sur le Reich (Evguenia Obitchkina)
  • Hannah Arendt (1906-1975) et Manès Sperber (1905-1984). Deux visions bien contrastées de la Shoah (Anne-Marie Corbin)
  • II L’Allemagne et la France après 1945
  • De l’« hostilité héréditaire » à l’« européanisation ». À propos d’un changement de paradigme dans les relations franco-allemandes après 1945 (Reiner Marcowitz)
  • Les débuts de la coopération aéronautique franco-allemande. Le « Groupe O » et le réacteur ATAR (1945-1960) (Claude Carlier)
  • Les derniers émigrés français dans les régions rhénanes (Jean-Paul Cahn)
  • La renaissance de l’industrie dans l’ex-RDA. Conséquences sur la géographie du territoire est-allemand (Michel Deshaies)
  • L’Allemagne, puissance gastronomique ? De la fin du XXe siècle à nos jours (Jean El Gammal)
  • III Enjeux européens et coloniaux, questions internationales
  • L’Alsace-Lorraine, pivot de l’équilibre international. La pensée de Paul d’Estournelles de Constant, prix Nobel de la Paix 1909 (Stéphane Tison)
  • La Première Guerre mondiale : mythe national ou composante de la culture mémorielle européenne ? Le Centenaire de 1914-1918 en France (Dorothee Röseberg)
  • Réflexions historiques sur le renseignement dans le processus de prise de décision politique en Grande-Bretagne et en France (J.F.V. Keiger)
  • Juger l’empereur ? Le triomphe de la Realpolitik au Japon (1945-1948) (Ann-Sophie Schöpfel)
  • Colonialisme, anticolonialisme et un plat de lentilles. Ambitions et limites de la politique italienne dans la Méditerranée après la perte des colonies (1949) (Bruna Bagnato)
  • Les garanties des accords d’Évian du 18 mars 1962 (Jacques Valette)
  • Les acteurs européens et le Proche-Orient. Une approche historique en renouvellement (Élisabeth du Réau)
  • À la recherche d’une autre Europe ? Jalons pour une histoire des intellectuels et des compagnons de route du gaullisme (Jérôme Pozzi)
  • Un moment souverainiste autour du traité de Maastricht ? Philippe Séguin au cœur des débats (Christine Manigand)
  • Travaux et publications de Chantal Metzger
  • Les auteurs

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Introduction

Jean EL GAMMAL

Historiens, géographes et germanistes, les collègues et amis de Chantal Metzger qui ont apporté leurs contributions à ce volume relèvent de spécialités et de champs de recherche assez divers, mais font écho, chacune et chacun à leur manière et selon leurs perspectives, aux principales orientations de ses travaux.

Née à Strasbourg et très attachée à ses origines alsaciennes, agrégée d’histoire en 1975 après des études menées à l’université de Strasbourg, Chantal Metzger a été professeur à l’École militaire de Strasbourg de 1981 à 1985, puis chargée de mission à l’Institut d’histoire des conflits contemporains de 1985 à 1991. Sa carrière universitaire s’est déroulée à l’université du Maine, où elle a été maître de conférences de 1991 à 2001, puis à l’université de Nancy 2 et à l’université de Lorraine, en tant que professeur d’histoire contemporaine, de 2001 à 2014, atteignant la classe exceptionnelle de ce corps. Présentement professeur émérite, elle a exercé de nombreuses responsabilités, notamment en tant que directrice adjointe de l’UFR de sciences historiques et géographiques et de musicologie, à la tête du master histoire-arts et archéologie, à Nancy et dans le cadre de l’université de Lorraine, ainsi que dans le domaine des échanges Erasmus. Ses enseignements ont porté sur les guerres, l’histoire de l’Europe, des relations internationales et des intellectuels, et surtout sur l’histoire de l’Allemagne. Elle a organisé ou coorganisé plusieurs colloques importants à Nancy, Pont-à-Mousson, Bonn, Halle et à l’Institut historique allemand de Paris.

À l’échelle nationale, elle a été experte auprès de l’AERES et membre de la Commission « Histoire de la Shoah et de l’antisémitisme » de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah de 2007 à 2012. Elle a présidé de 2002 à 2004 le Comité franco-allemand de recherche sur l’histoire des XIXe et XXe siècles de 2002 à 2004 et a siégé dans le bureau de ce comité de 200 à 2006. Elle est trésorière depuis 2011 de l’Association internationale d’histoire contemporaine de l’Europe. Elle appartient depuis 2005 à la Commission des archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères.

L’histoire des relations internationales, dans la tradition de Jean-Baptiste Duroselle, Raymond Poidevin, et Jacques Bariéty, et en relation avec les ← 11 | 12 → travaux de bien des auteurs qui ont contribué à ce volume, est au cœur de nombre de ses activités. Elle fait partie du bureau de l’Institut d’histoire des relations internationales contemporaines (IHRICE). Membre associée du Centre de recherche universitaire lorrain d’histoire, auquel elle a appartenu en tant que membre titulaire de 2005 à 2014, elle est de plus associée à l’UMR SIRICE de Paris-Sorbonne. Elle est rédactrice en chef et présidente du comité directeur de la revue Guerres mondiales et conflits contemporains. Elle préside l’Institut d’histoire des conflits contemporains dont dépend cette revue. Toutes ces responsabilités sont à mettre en relation avec une activité multiforme et soutenue d’enseignement et de recherche, en France et à l’étranger, où elle a effectué plusieurs séjours de recherche, notamment à Berlin, participé à de nombreux colloques a été professeur invitée, en particulier dans les universités de Halle et de Trento.

On trouvera à la fin de ce volume la liste de ses ouvrages, articles et travaux, qui, dans leur diversité, s’inscrivent principalement dans le cadre de l’histoire de l’Allemagne, de l’Europe et des relations internationales. Sa thèse de troisième cycle, dirigée par Raymond Poidevin et soutenue à Metz en 1980, a pour titre « L’Alsace entre la France et l’Allemagne de 1919 à 1932 – La défense des intérêts alsaciens ». Préparée sous la direction de Jacques Bariéty, sa thèse d’État sur L’Empire colonial français dans la stratégie du Troisième Reich 1936-1945, couronnée par le prix Jean-Baptiste Duroselle et publiée en 2002 par P.I.E. Peter Lang, relève de plus de l’histoire de la colonisation. Chantal Metzger a consacré une part importante de ses travaux récents à l’histoire de la RDA, notamment à travers les actes d’un colloque international qu’elle a dirigé, La République démocratique allemande : la vitrine du socialisme et l’envers du miroir (1949-1989-2009) et son livre, La République démocratique allemande. Histoire d’un État rayé de la carte du monde, publiés par le même éditeur en 2010 et 2012. Elle poursuit à l’heure actuelle des recherches sur l’Afrique du Nord pendant la Seconde Guerre mondiale.

Les vingt et une contributions réunies dans ce volume ont été réunies en trois ensembles. Le premier se rapporte aux guerres mondiales, le deuxième à la France et à l’Allemagne depuis 1945 et le troisième aux enjeux internationaux, coloniaux et européens depuis le début du XXe siècle.

Si le domaine « franco-allemand » connaît depuis plusieurs décennies, en termes de recherche, bien des renouvellements et si l’histoire des conflits du XXe siècle et de la construction européenne a fait l’objet de très nombreux travaux, les éclairages apportés par Chantal Metzger, forte d’une excellente connaissance des sources et des méthodes et qui a toujours cherché à multiplier les points de vue et à entretenir un dialogue avec des universitaires ← 12 | 13 → de plusieurs nationalités, retiennent particulièrement l’attention. Il n’est pas de contribution ici réunie qui n’ait pas de rapport avec certaines des périodes qu’elle a étudiées et des perspectives qu’elle a tracées. Pour autant, il s’agit, de la part des auteurs des contributions ici réunies, de bilans relatifs à des recherches entreprises de longue date, de thèmes en cours d’exploration et de travaux susceptibles d’aboutir prochainement, concernant des conflits mondiaux ou coloniaux, des thèmes géopolitiques, l’histoire de la construction européenne et des courants de pensée qui s’expriment à ce sujet, les relations bilatérales, le devenir de l’Allemagne, en tant que puissance et première économie européenne, ou encore la part des mémoires.

Cette publication a été rendue possible par de nombreux concours. Il convient de remercier particulièrement ici, outre M. Thierry Waser, des Éditions Peter Lang, M. Michel Grunewald, directeur de la collection dans laquelle paraît ce volume, le CRULH, et notamment sa directrice, Mme Frédérique Lachaud, son directeur adjoint, M. Stefano Simiz, les responsables de l’axe 2 « Politique, pouvoirs, guerres et conflits », MM. François Audigier et Jean-Noël Grandhomme, ainsi que la Commission des Archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères. ← 13 | 14 →

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I

AUTOUR DES GUERRES MONDIALES

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Le pigeon voyageur, auxiliaire de l’Armée
française pendant la Grande Guerre

Murielle AVICE-HANOUN, Françoise BOURON*

Mars 1916. Un mois après le début de l’offensive allemande sur le front de Verdun, une note du général de division de Villaret, commandant la VIIe armée, fait état de l’efficacité des pigeons voyageurs pour assurer la liaison entre la ligne de front et l’arrière :

Les derniers combats de Verdun ont prouvé une fois de plus qu’à la suite de quelques heures de bombardement toutes les communications étaient coupées […]. Il en résulte que certains états-majors sont restés une journée entière sans nouvelles des positions avancées […]. La liaison par pigeon voyageur reste donc pour les centres de résistance de la première ligne un des rares moyens de faire connaître leur situation1.

Si à la veille de la Première Guerre mondiale, le pigeon voyageur a sa place au sein de l’Armée française, il est en concurrence avec d’autres moyens de communication en plein essor comme les liaisons téléphonique ou optique. Les quatre années de guerre vont donner au pigeon voyageur ses lettres de noblesse.

La naissance de la colombophilie militaire

Les pigeons voyageurs avant 1914

L’intérêt porté par l’Armée française aux pigeons voyageurs remonte à la guerre de 1870. Lors du siège de Paris, toute communication étant coupée avec l’extérieur, le seul contact possible entre les assiégés parisiens et le gouvernement réfugié à Tours est celui d’une correspondance par pigeons voyageurs. Placés dans les nacelles des ballons, près de 400 pigeons sortent ainsi de la capitale entre octobre 1870 et janvier 1871. Et c’est chargés de colombogrammes qu’une partie d’entre eux reviennent à leurs colombiers ← 17 | 18 → d’origine2. Près de 100 000 dépêches sont ainsi transportées par pigeons voyageurs.

Dans le cadre de l’alliance militaire conclue entre la France et la Russie en 1892, l’article IV de la convention prévoit que les états-majors élaborent conjointement un moyen de correspondance en temps de guerre. Deux lignes de liaisons par pigeons voyageurs sont retenues, l’une au nord de l’Europe, entre Dunkerque et Libau, et l’autre méditerranéenne, entre Odessa et la Tunisie. Ce projet est finalement abandonné en raison de la trop grande distance entre les sites3.

L’organisation du service colombophile au lendemain de la guerre de 1870

Les colombiers militaires

Cette expérience très positive amène les responsables militaires français à intégrer dans la réforme de l’armée qui suit la défaite de 1871 la création de colombiers militaires. Le nouveau service est rattaché à l’arme du Génie, section « télégraphie militaire ». Les places fortes de l’est de la France sont dotées de colombiers qui, en cas d’investissement, sont chargés d’assurer la liaison entre les forts assiégés et l’intérieur. Il est aussi décidé de doter les divisions de cavalerie de voitures-volières4.

L’organisation des colombiers militaires est précisée par le décret du 13 octobre 1888. Sont définis comme militaires les colombiers de Paris où se font les études et les expériences sur l’emploi des pigeons voyageurs, l’instruction du personnel colombophile, et ceux qui sont installés dans les places diverses désignées par le ministre de la Guerre.

La colombophilie militaire n’est pas une spécificité exclusivement française. En Allemagne, au Royaume-Uni et surtout en Belgique, où la colombophilie va devenir un sport national, l’élevage et l’éducation des pigeons prennent un véritable essor. L’état-major allemand, par exemple, ← 18 | 19 → utilise le pigeon pour assurer la liaison entre la cavalerie chargée de la couverture et le commandement à l’arrière5.

Les colombiers civils

La législation sur les colombiers civils complète la mainmise de l’armée sur ce moyen de communication. La loi du 3 juillet 1877 et le décret du 15 septembre 1888 soumettent les colombiers civils à l’autorité militaire. Dorénavant, en période de guerre, les pigeons voyageurs appartenant à des particuliers sont réquisitionnés par l’armée. La loi du 22 juillet 1896 oblige toute personne désireuse d’ouvrir un colombier à obtenir préalablement l’autorisation du préfet de son département. Le décret de décembre 1897 indique comment le Génie doit procéder pour identifier les colombiers civils. Les maires sont mis à contribution : chaque année, ils doivent fournir au ministère de la Guerre des listes nominatives des propriétaires de pigeons voyageurs6.

Pour repérer dès le temps de paix les meilleurs colombiers, c’est-à-dire ceux qui disposent d’oiseaux performants, l’armée organise des « concours d’État » qui jouissent d’un certain succès auprès des colombophiles civils. Les récompenses prévues et le retour gratuit des paniers vides encouragent ces derniers à développer une coopération avec l’armée7.

Le pigeon voyageur est un messager vulnérable. C’est pourquoi la loi de 1898 prévoit une amende et une peine d’emprisonnement, en cas de récidive, pour toute personne qui « aura capturé, détruit ou même tenté de capturer ou de détruire des pigeons voyageurs qui ne lui appartiennent pas »8. ← 19 | 20 →

1914-1916. Les pigeons voyageurs montrent leur efficacité

L’utilisation des pigeons voyageurs en 1914

L’entrée en guerre de la France, en août 1914, entraîne une mobilisation sans précédent des hommes mais également des animaux. Chevaux, chiens et pigeons voyageurs sont appelés à jouer un véritable rôle d’auxiliaire.

En 1914, le service colombophile militaire français relève de l’autorité du Génie à qui il incombe d’élaborer les règlements et les instructions concernant l’organisation et le fonctionnement des colombiers de l’armée ainsi que l’utilisation de leurs ressources pour les besoins militaires. Sa mission est partagée avec l’état-major général à qui revient toute initiative.

La première réglementation suit l’ordre de mobilisation. Le décret présidentiel du 2 août 1914 précise que dorénavant tout transport de pigeons vivants sur le territoire français est interdit9. L’armée a ainsi la mainmise exclusive sur ces messagers ailés. Dans la foulée, le gouverneur de Paris réquisitionne des pigeons voyageurs à la Fédération de la Seine, une association colombophile civile.

L’utilisation du pigeon voyageur par l’armée pendant les combats de l’été et de l’automne 1914 répond aux besoins militaires du moment. Dans un premier temps, les colombiers fixes des places fortes assurent la correspondance entre la ligne de fortification et l’intérieur du territoire. Mais le déroulement de la guerre rend obsolète cette liaison. Très vite, les pigeons voyageurs sont mis à la disposition du service de Renseignement et apportent avec succès des éléments d’information sur la marche de l’avance allemande10.

1915, une année charnière dans l’emploi des pigeons voyageurs

Le lieutenant Leroy-Beague réorganise le service colombophile

1915 est une année charnière dans l’emploi des pigeons voyageurs. Sous l’impulsion du lieutenant Albert Leroy-Beague11, leur emploi se perfectionne. Ancien président de la Fédération colombophile de Lille, et nouvellement affecté au 2e bureau au service de Renseignement du G.Q.G., il a toutes ← 20 | 21 → les compétences requises pour faire du Service colombophile un service très performant.

C’est au sein de la Xe armée, qui fait partie du groupe des armées du Nord, qu’un programme d’utilisation des ressources colombophiles est d’abord élaboré.

Dès le mois de mars 1915, quatre centres principaux fonctionnent. Il s’agit de ceux de Nœux-les-Mines, de Savy-Berlette, de Bruay et de Saint-Pol. Les deux premiers sont respectivement mis à la disposition des 2e et 33e corps d’armée, et les deux autres sont réservés au commandant de la Xe armée12.

Des colombophiles de profession sont recrutés. Ils apportent leur concours aux entraînements des pigeons voyageurs. Des primes sont même versées à ceux qui remplissent le mieux leurs fonctions et à ceux qui reçoivent des messages.

Au printemps 1915, un important réseau colombophile a été mis en place sur tout le territoire couvert par la Xe armée. Ainsi le colombier militaire de Bruay, qui compte 150 volatiles, est relié directement à Armentières, Poperinghe, Cassel et Saint-Omer, sur la ligne de front, et au-delà, sur les lignes allemandes, par l’intermédiaire d’agents basés notamment à Lille, Menin ou Courtrai à la frontière belge.

En juillet 1915, l’organisation s’est étendue aux IIe, IIIe, IVe, Ve et VIe armées, selon les principes appliqués par la Xe armée. 48 colombiers sont recensés sur les fronts du nord et de l’est. Le centre le plus important, celui de la Ve armée, comprend 24 colombiers, dont 6 à Reims et 7 à La Ferté-sous-Jouarre, soit au total 1 000 pigeons. L’organisation retenue est celle d’une dotation pour chacune des armées de colombiers dits de « l’arrière » et de colombiers dits de « l’avant ». L’ensemble est placé sous le contrôle du 2e bureau (service du renseignement) des états-majors de corps d’armée. L’objectif est de familiariser ces services à la question colombophile et de leur montrer les avantages que l’armée peut tirer des pigeons. Sans nul doute, se crée au sein de l’armée un groupe de pression pour faire du pigeon un maillon majeur de la communication.

Les résultats encourageants du service colombophile

Les premiers résultats très positifs ne tardent pas. Le général Mazel, commandant le 38e corps d’armée, rend ainsi compte des expériences faites dans son secteur en août 1915 : ← 21 | 22 →

« 128 pigeons ont été lâchés par des agents de liaison des commandants de points d’appui pendant la période du 15 au 30 août, aucun pigeon ne s’est perdu et la durée des trajets a été en moyenne de cinq à six minutes »13.

Est également relevée la performance de quatre pigeons lâchés pendant un bombardement assez violent de Reims et qui ont accompli le trajet Bétheny-Reims en huit minutes !

Les premiers colombiers mobiles

Pendant cette période, l’organisation de la colombophilie militaire se perfectionne avec la création des premiers colombiers mobiles, réalisés par la transformation des autobus à impériale de marque Berliet. Ils permettent une utilisation plus aisée des pigeons voyageurs car ils se déplacent avec les G.Q.G. des armées, et avancent ou reculent en fonction des modifications de la ligne de feu. Les colombiers fixes, trop près du front, subissent en effet des pertes très importantes. Certains ont même été totalement détruits.

L’Annexe de l’établissement central du matériel de la Télégraphie élabore des modèles très divers comme les grands paniers pliants, les petits paniers de transport, les pochettes pour messages et les tubes en aluminium. Ce service est également chargé des commandes de graines pour nourrir les pigeons et de la gestion des stocks.

1916. Les batailles de Verdun et de la Somme

Résumé des informations

Pages
366
Année
2017
ISBN (PDF)
9782807601970
ISBN (ePUB)
9782807601987
ISBN (MOBI)
9782807601994
ISBN (Broché)
9782807601963
DOI
10.3726/b11253
Langue
français
Date de parution
2017 (Juin)
Published
Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2017. 366 p., 6 tabl., 2 fig. n/b

Notes biographiques

Jean El Gammal (Éditeur de volume)

Ancien élève de l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, Jean El Gammal est agrégé d’histoire, docteur d’Etat et professeur d’histoire contemporaine à l’université de Lorraine. Il est spécialiste de l’histoire politique et culturelle de la France contemporaine.

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Titre: La France, l’Allemagne, l’Europe