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André Pézard, Journal d’Avignon et autres textes (1919-1920)

Édition critique : transcription et notes de Sylvie Marie Dit Borel

de Sylvie Marie Dit Borel (Auteur)
©2022 Autres 344 Pages

Résumé

André Pézard (1893-1984) est reconnu pour être l’un des plus grands italianistes du vingtième siècle : il a traduit, à lui seul, les Œuvres complètes de Dante et a activement contribué au développement et à la réception de l’italianisme en France. En marge de ses activités professionnelles et universitaires, du lycée d’Avignon au Collège de France, les archives mettent en évidence qu’il était aussi un écrivain et ce, dans sa pratique personnelle quotidienne tout au long de sa vie. Rescapé de la Grande Guerre, le jeune homme va tenir, de 1919 à 1921, en arrivant à Avignon où il va occuper son premier poste d’enseignant, un journal personnel dans lequel il manifeste sa progressive réadaptation à la vie civile. Quelle trace André Pézard a-t-il voulu laisser en rédigeant le Journal d’Avignon ? Quelle fonction lui assignait-il au quotidien ? Si le jeune diariste ne fait jamais clairement état d’un projet de publication de son contenu, certaines lignes de force tendent à nous convaincre que ce journal, au même titre que l’ensemble de ses archives, assume une fonction de laboratoire dans lequel il va puiser les matériaux et l’inspiration en vue d’un ou de plusieurs projets éditoriaux envisagés. Après avoir publié un premier témoignage de l’expérience directe de la guerre, Nous autres à Vauquois en 1919, André Pézard comptait-il, à terme, écrire une deuxième autobiographie ? Envisageait-il une production littéraire qui visait à transmettre une expérience personnelle ou un patrimoine culturel donné ? Le Journal d’Avignon qui atteste d’une écriture aux multiples facettes n’a pas livré tous ses secrets. Nos recherches et nos analyses démontrent qu’André Pézard n’a finalement pas pris la voie de l’écriture officielle et n’a pas publié son journal avec les productions narratives qu’il contenait. Les activités universitaires (et sa passion pour Dante) ont probablement rendu secondaire l’envie en Pézard de devenir écrivain.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos des directeurs de la publication
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Remerciements
  • Préface
  • Sommaire
  • INTRODUCTION
  • Ratio Edendi
  • Introduction
  • 1. Transcription :
  • 2. Mise en forme du texte :
  • Plan et sommaire du Journal d’Avignon
  • Volet n° 1
  • Plan
  • Sommaire
  • Volet n° 2
  • Plan
  • Sommaire
  • Volet n° 3
  • Plan
  • Sommaire
  • Textes : transcriptions
  • Journal d’Avignon, transcription du volet n° 1 Avignon 1919–1920
  • Journal d’Avignon, transcription du volet n° 2 De janvier 1920 à Pâques (4 avril 1920)
  • Journal d’Avignon, transcription du volet n° 3 Du 14 avril 1920 au 10 février 1921
  • Bluettes 1919–1920, transcription
  • Bluettes 1919–1920
  • Le gibier de la Montagnette
  • Effet de nuit 12–13 juillet 1919
  • Bibliographie essentielle
  • Index
  • Titres de la collection

←16 | 17→

INTRODUCTION

Riche d’une trentaine de mètres linéaires, le fonds André Pézard aux Archives Nationales recouvre tous les éléments constitutifs de l’activité intellectuelle de l’homme, dès son plus jeune âge et ce, jusqu’à la fin de sa vie.

André Pézard a conservé, compilé, classé tout ce qui permet de fixer la mémoire du quotidien dans la sphère autant professionnelle que personnelle. Il a effectué un auto-archivage total de son travail, et ce dans toutes ses étapes, de ses brouillons de tentatives d’écriture à ses œuvres rédigées. L’exploration du fonds offre, donc, la possibilité de suivre, de l’intérieur, pour ainsi dire, les cheminements d’un homme de culture européen dont les activités et les œuvres couvrent nombre de domaines.

En marge de son activité professionnelle, du lycée d’Avignon au Collège de France, les archives permettent de mettre en évidence qu’il était aussi un écrivain et ce, dans sa pratique personnelle quotidienne tout au long de sa vie.

Comme le souligne Elsa Marguin-Hamon, ses archives permettent de « saisir l’œuvre en devenir », de suivre le parcours intellectuel, scientifique de l’auteur qui réfléchit, organise, corrige parfois sa pensée quand il revisite ses matériaux. Les papiers de l’écrivain constituent le « tissu conjonctif d’une œuvre-corps »8. Ils laissent entrevoir des singularités quant à la méthode de travail engagée et démontrent la formation d’un esprit à travers les influences culturelles subies.

En ce qui concerne les particularités du fonds et sa matérialité dans la disposition actuelle, Elsa Marguin-Hamon nous en offre une description ←17 | 18→bien précise9. De façon unitaire, le fonds Pézard10 est organisé selon un plan constitué de quatre parties.

Une première partie contient tous les papiers personnels et intimes de Pézard. Il s’agit des traces écrites de son enfance (1901–1911), de ses études11 (1908–1914), de comptes-rendus de ses voyages durant lesquels, déjà très jeune, il s’affirme en tant que diariste. On peut aussi trouver des écrits intimes, de la correspondance, les journaux personnels qu’il tient tout au long de sa vie, des photographies, des agendas, des dessins, des souvenirs familiaux relatifs à ses parents, son épouse et ses filles. Enfin, des brouillons relatifs au projet de rédaction des Fables Express et autres folies y figurent ainsi que les travaux préparatoires des Contes et légendes de Provence (1949) et les écrits de sa fille Fanette12.

La deuxième partie du fonds centralise tous les documents relatifs à l’élaboration de son œuvre autobiographique Nous autres à Vauquois de sa rédaction à sa réception auprès du public. Pézard conserve aussi les traces de sa vie d’ancien soldat ; il s’agit d’un ensemble varié de pièces matérielles recueillies au front qui témoignent du quotidien dans les tranchées ou de papiers administratifs et autres écrits associés à cette période.

Les deux dernières parties du fonds portent sur son activité professionnelle. La troisième partie renseigne la carrière d’André Pézard, ensemble qu’il a constitué lui-même : on y découvre les supports de ses conférences, de ses interventions diverses, de ses cours au Collège de France ou encore de ses allocutions et hommages prononcés ou publiés.

La dernière partie concentre enfin ses travaux scientifiques, majoritairement sur Dante, mais conserve aussi, entre autres, les traces de la correspondance ou de ses activités au sein de sociétés savantes ou d’institutions en France et en Italie de 1950 à 1975.

←18 | 19→Cet ensemble monumental atteste d’un archivage régulier et minutieux de la part de Pézard. L’amplitude chronologique et thématique du fonds ainsi que le volume des pièces conservées, manifestent une volonté de fixer la mémoire et de laisser une trace de sa vie, et, en même temps, sous-entendent aussi une finalité de transmission de propres intérêts humains et culturels, de ses valeurs.

D’ailleurs si l’on s’intéresse à l’histoire personnelle et familiale des Pézard, on constate qu’elle est placée sous le sceau d’une idée très marquée de transmission, intergénérationnelle.

André Pézard est le fils d’instituteurs publics qui, sous la troisième République, diffusent la laïcité, le savoir, la culture auprès de leurs élèves et investissent cette fonction telle une mission citoyenne. De plus, les Pézard sont une famille unie où les enfants (André et Hélène) nourrissent un attachement fort à leurs parents ainsi qu’un profond sentiment de respect à leur égard. Ils suivent une scolarité irréprochable et, influencés par la présence de deux parents pédagogues, s’orientent vers la voie de l’enseignement. Tous deux passent l’agrégation dans deux disciplines différentes : André Pézard sera reçu, pour sa part, à l’agrégation d’italien en 1919.

Cette idée de transmission de valeurs affectives, culturelles, d’une génération à l’autre et la force des liens familiaux sont sensibles, par exemple, dans la dédicace des Contes et Légendes de Provence en 1949 de la part d’André Pézard à ses « trois filles » : sachant que sur ces trois filles, deux étaient ses filles, Fanette et Sylvie et la troisième, Yvonne, son épouse. Pour l’anecdote, Sylvie, la cadette13, a confié la complicité, dès l’enfance, qui unissait les deux sœurs à leur père. Elles échangeaient régulièrement avec lui au sujet de leurs rêves dans un climat de confiance, de bienveillance affective et d’enrichissements culturels et artistiques où l’intérêt pour l’Italie était central. André Pézard a ainsi enseigné l’italien à sa fille Sylvie et l’a aidée à travailler le thème et la version italienne jusqu’à ce qu’elle obtienne, elle aussi, l’agrégation que sa fille aînée, Fanette, avait eue après la Seconde Guerre Mondiale14. ←19 | 20→Fanette Roche-Pézard deviendra universitaire et historienne de l’art et, entre autres, publiera, dans le sillage de son père, les Contes et Légendes de Gascogne en 1962, en montrant de façon manifeste l’attachement de la famille à la culture occitane.

On pourrait également avancer l’hypothèse que Pézard, animé comme il l’était d’esprit pédagogique, avait aussi l’intention de transmettre ses méthodes de recherche et ses trouvailles concernant ses sujets universitaires. Il suffit d’évoquer ici le travail extraordinaire de préparation de la traduction de tout Dante et l’importance de ses écrits dantesques, à partir de son essai sur le Convivio dont il est question dans la première partie de ma thèse15. André Pézard a donc entretenu un rapport actif avec ses archives tout au long de sa vie. Force est de constater qu’il utilise et recompose sans cesse ce matériau, parfois en vue d’un travail d’écriture.

En lisant son Journal d’Avignon qui recouvre les deux années passées en Provence de 1919 à 1921, période à laquelle il occupe son premier poste d’enseignant après l’expérience traumatisante des tranchées, on retrouve la même démarche. André Pézard débute la rédaction de son journal dès le premier jour de son installation à Avignon. Il a déjà publié, la même année, son œuvre autobiographique Nous autres à Vauquois16, témoignage marquant de la période passée au front. Cette première expérience auctoriale laisse place à l’écriture du quotidien. Le journal laisse entrevoir un homme observateur de son temps, pudique à ses heures, probablement influencé comme bon nombre d’hommes de sa génération par le besoin de coucher sur le papier ses impressions quotidiennes et de fixer le temps dans la dimension mémorielle.

Mais la mémoire d’André Pézard porte la trace indélébile de l’expérience de la Grande Guerre et elle fait surface au fil des pages car il en a été profondément marqué. La difficulté à se réinsérer dans la vie civile, la douloureuse résilience subie après sa blessure à la jambe ←20 | 21→irrémédiablement mutilée, le poids des amis morts au combat, la culpabilité du survivant qui en découle, la solitude de l’homme sont autant de sujets et préoccupations qui émergent du journal dont la fonction devient exutoire. Sa prose dépasse, en tout cas, le stade d’une simple prise de note documentaire journalière. Enfin, Avignon et la Provence qu’il va parcourir notamment lors de longues promenades vont endosser un rôle prépondérant dans l’apprentissage d’une nouvelle vie. Il s’approprie sa nouvelle région d’adoption qu’il parcourt inlassablement lors de tours, excursions, balades, visites dont il dresse des comptes-rendus sensoriels très riches et formellement intéressants par leurs agencements stylistiques (en rapport avec la peinture, la poésie et la photographie).

Les deux années passées dans la Cité des Papes recouvrent une période d’initiation et de mise en ordre autant dans la sphère professionnelle que dans la sphère personnelle. Ce sont les années où Pézard débute son activité d’enseignant et rencontre Yvonne Bonnard, sa future femme. Cet évènement va amorcer le tournant de sa vie et annonce la possibilité de se projeter vers une vie familiale heureuse. André Pézard manifestera un amour inconditionnel à Yvonne, et ce jusqu’à la fin de ses jours. La tragique disparition de son épouse, dans un accident de voiture, sur le trajet retour de vacances passées en Italie en 1959, marquera la deuxième grande cassure de sa vie.

La retranscription du journal vise donc, à cet égard, à faire découvrir et faire émerger une sphère plus méconnue de Pézard, à savoir sa vie privée et plus particulièrement cette délicate période de retour à la vie civile, de reconstruction personnelle qui coïncide avec le démarrage de son activité professionnelle17.

Quelle trace André Pézard a-t-il voulu laisser en rédigeant le Journal d’Avignon ? Quelle fonction assignait-il à son support au quotidien ? Si le jeune diariste ne fait jamais clairement état d’un projet de publication de son contenu, certaines lignes de force tendent à nous convaincre que ←21 | 22→ce journal, au même titre que l’ensemble des archives qu’il compilera tout au long de sa vie, assume une fonction de laboratoire dans lequel il va puiser les matériaux et l’inspiration en vue d’un ou de plusieurs projets éditoriaux envisagés.

Le Journal d’Avignon assume une réelle fonction d’écriture littéraire dans la vie quotidienne du diariste en prenant des formes variées et presque accomplies. Après avoir publié en 1919 sa première œuvre autobiographique Nous autres à Vauquois inspirée et tirée de ses carnets de guerre, André Pézard va continuer à faire de son journal quotidien un véritable laboratoire d’écriture. La restitution des évènements du quotidien donne ponctuellement lieu à des textes de prose plus ou moins achevés. On peut parler vraiment d’auteur qui va amplement puiser dans les matériaux de son journal pour s’exercer à différents procédés d’écriture. En intitulant certains de ses textes, il va donner une identité nouvelle au récit. C’est notamment le cas des Bluettes avec l’histoire du Gibier de la Montagnette ainsi que l’Effet de nuit. Ces ébauches très avancées feraient penser à des nouvelles, même si c’est toujours difficile de leur attribuer un statut précis18.

Résumé des informations

Pages
344
Année
2022
ISBN (PDF)
9782875746061
ISBN (ePUB)
9782875746078
ISBN (Broché)
9782875744036
DOI
10.3726/b19830
Langue
français
Date de parution
2023 (Février)
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2022. 344 p.

Notes biographiques

Sylvie Marie Dit Borel (Auteur)

Sylvie Marie Dit Borel est professeure d’italien en second degré en Normandie et a soutenu, le 12 décembre 2020, une thèse de doctorat sur le Journal d’Avignon d’André Pézard.

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