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Marie Guyart de l’Incarnation (1599–1672)

Le singulier parcours d’une ursuline missionnaire de Tours à Québec

de Vincent Grégoire (Auteur)
©2022 Monographies 182 Pages

Résumé

Depuis la fin du 20ème siècle, un regain d’intérêt pour les écrits religieux s’affirme au Québec mais aussi plus généralement en Europe. Marie Guyart dite de l’Incarnation (1599-1672), l’auteure d’une abondante correspondance et de plusieurs relations, va refuser les limites imposes à son sexe et s’imposer comme la première femme missionnaire en Nouvelle-France. Successivement mère, veuve, puis religieuse Ursuline à Tours, elle va co-fonder avec Madame de la Peltrie, une bienfaitrice pleinement dévouée à la cause missionnaire, le couvent des ursulines de Québec en 1639. Son but est originellement d’évangéliser et de franciser les jeunes filles autochtones. Mais rapidement elle va devoir étendre son oeuvre d’instruction et d’éducation aux jeunes Françaises.
Pour devenir missionnaire en terre canadienne, elle a dû affronter nombre d’obstacles majeurs. Loin de la décourager, ceux-ci l’ont au contraire motivée et lui ont donné l’énergie de poursuivre ce rêve Presque insensé pour une religieuse à l’époque. Face à ces défis de taille, son agentivité de femme d’action lui a permis de concrétiser son rêve d’apostolat au Canada.
Depuis sa béatification par le pape Jean-Paul II en 1980, et surtout sa canonisation par le pape François le 2 avril 2014, de plus en plus de spécialistes s’intéressent à ses écrits. S’inscrivant dans ce mouvement. cette étude se veut une réflexion sur les obstacles rencontrés par Marie Guyart de l’Incarnation et la manière dont elle les a surmontés.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Sommaire
  • Remerciements
  • Introduction
  • Chapitre I Le diable : l’incontournable et nécessaire obstacle
  • Chapitre II La traversée de l’Atlantique : une traverse de taille
  • Chapitre III Le fils sacrifié, ou lorsque la fin justifie les moyens
  • Chapitre IV Les obstacles culturels
  • Chapitre V Quand l’autorité hiérarchique masculine « fait traverse »
  • Conclusion
  • Bibliographie
  • Index
  • Titres de la collection

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Remerciements

Une version courte d’une étude formant le chapitre II intitulée « Le passage de l’Atlantique : une traversée pleine de ‘traverses’ » (7–35) a été originellement publiée dans Femme, mystique et missionnaire. Marie Guyart de l’Incarnation : Tours, 1599–Québec, 1672. Actes du colloque organisé par le Centre d’études Marie-de-l’Incarnation sous les auspices du Centre universitaire d’études québécoises (Loretteville, Québec, 22 au 25 septembre 1999) (sous la direction du professeur Raymond Brodeur). Québec : Presses de l’Université Laval, 2001.

Des parties du chapitre III extraites d’un article intitulé « Du bon usage de l’autre dans la relation mère-fils : Marie Guyart dite de l’Incarnation-Claude Martin » ont paru dans Biblio 17, [a supplement to] Papers on French Seventeenth Century Literature, 166 (2006), 289–302. Finalement, l’étude « Devoir d’obéissance, obligation de résistance : lorsqu’une ursuline s’oppose à l’autorité masculine au XVIIe siècle », publiée dans Seventeenth-Century French Studies, 32(1), 2010, 102–117, a servi de version préliminaire au chapitre V.

Nous désirons remercier Taylor and Francis Group, Papers on French Seventeenth Century Literature et le professeur Brodeur (de l’Université Laval) pour nous avoir permis de reproduire les études ci-dessus mentionnées.

Nous voulons aussi remercier Mary Beth, Alaric et Rose pour leur patience et support inconditionnel, Maurice et Raymonde Grégoire pour leur encouragement indéfectible, et Berry College qui nous a accordé un semestre sabbatique pour faire avancer ce travail de Sisyphe.

Nous adressons un dernier remerciement à Madame Antoinette Sertin qui nous a fait connaître Marie Guyart dite de l’Incarnation et au professeur Robert Sauzet qui nous a servi de mentor de Tours à Québec dans les années 1980.

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Introduction

Marie Guyart dite de l’Incarnation en religion défie avec succès en 1639, à l’âge de 40 ans1, les traditions sociales et religieuses pour devenir, à la tête d’un petit groupe d’ursulines à vocation enseignante auquel se sont jointes des hospitalières à vocation soignante et quelques séculières, la « première femme missionnaire de son sexe à œuvrer en terres étrangères »2. Nombre d’obstacles, de traverses3 vont s’élever tout au long de son « chemin de croix », de son entrée au couvent de Tours, en 1631, à la fondation du couvent de Québec en 1639. Le diable cherche, dans son esprit, à la faire échouer dans son projet téméraire de mission en terre lointaine : « je voy que le Diable est enragé de notre dessein, veu les traverses qu’il nous suscite » (Corr. [Correspondance]4, Lettre à Mère Françoise de S. Bernard, 2 avril 1639, 78). Ces obstacles prennent de multiples formes. Tandis que des religieux s’efforcent en France de lui faire abandonner son projet et que certaines personnes de sa famille lui donnent mauvaise conscience pour vouloir se séparer à tout jamais de son enfant, la mauvaise réputation du Canada n’est pas un moindre problème parce qu’elle effarouche les parents et amis des religieuses volontaires qui l’accompagnent. La dernière grande traverse avant l’arrivée en Nouvelle-France est la très périlleuse traversée de l’Atlantique, une traversée qui a bien failli s’achever d’une manière dramatique.

Une fois au Canada, des obstacles culturels (œuvrer dans un cloître, ne pas comprendre pleinement la mentalité des Autochtones, maîtriser imparfaitement les langues, etc.) auxquels s’ajoutent des tensions avec la hiérarchie ecclésiastique continuent de paver son « chemin de croix ». Ce sont ces traverses surmontées par la femme audacieuse qu’elle est que nous allons analyser dans cette étude.

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Marie Guyart, la quatrième de huit enfants (quatre garçons et quatre filles), voit le jour à Tours le 29 octobre 1599, six mois après la promulgation de l’Édit de Nantes qui met un terme aux dévastatrices guerres de religion. En 1617, mariée contre son gré à Claude Martin, maître ouvrier en soie, elle devient mère en avril 1619 mais perd son mari en octobre de la même année. Désormais libre mais à la tête d’un commerce en faillite et en charge d’un enfant en bas âge, elle retourne sous le toit parental.

Adolescente, Marie Guyart contemplait l’idée d’entrer en religion mais ses parents s’y opposaient. Jeune veuve, elle va vivre d’intenses expériences mystiques. Ayant déjà reçu, lors d’un « songe » à l’âge de sept ans, la visite de Jésus-Christ dans son sommeil, ainsi qu’elle l’a rapporté (cf. Jamet, Écrits spirituels et historiques II, 160–161), elle va faire l’objet, le 24 mars 1620, d’une première grande vision (qu’elle qualifiera de « conversion » [Jamet I, 24]). Dans cette vision, elle se voit plongée dans le « précieux Sang » de Jésus-Christ (Jamet II, 183), une expérience qui va la décider à liquider les affaires de son époux décédé et à renoncer définitivement à se remarier5.

Ayant été sollicitée par son beau-frère Paul Buisson, marchand voiturier, pour travailler dans son importante entreprise de transport en 1621, elle va y assumer toutes sortes de responsabilités : femme de chambre, cuisinière, garde-malade, avant de se voir confier la direction d’un personnel composé de débardeurs, rouliers, commis, mariniers, porte-faix, charretiers, puis diriger, en 1625, l’administration des affaires. Cette expérience lui servira beaucoup lorsqu’elle sera supérieure du couvent de Québec, un poste qu’elle occupera pendant 18 ans (sur les 33 ans qu’elle passera au Canada). Pendant ces années à œuvrer pour le couple Buisson, elle expliquera avoir été eu trois visions trinitaires : en 1625, l’année où les ursulines s’installent à Tours, en 1627, et en 1631, des visions de la « Sainte Trinité » qui vont révéler à son second directeur spirituel, dom Raymond de Saint-Bernard, sa nature mystique6.

En 1631, après dix ans de bons et loyaux services chez sa sœur et son beau-frère, elle décide de renoncer aux responsabilités du siècle et abandonne son vieux père mais aussi son fils qui n’a pas encore douze ans pour entrer au couvent des ursulines de Tours. Non sans difficulté, elle y est acceptée sans dot et ←12 | 13→admise comme sœur de chœur avec la permission des autorités ecclésiastiques, l’évêque de Tours et la mère supérieure du couvent. Marie Guyart, déterminée qu’elle est, va réussir toute sa vie à franchir des obstacles apparemment insurmontables parce que Dieu, selon elle, le veut et qu’« Il » justifie tous les sacrifices.

La phrase suivante qu’elle écrit à son confesseur, dom Raymond de Saint-Bernard, dans une lettre du 6 mai 1635, est symptomatique de sa philosophie : (si je suis si pressée), « vous ne [… me… ] sçauriez condamner, sans condamner celuy qui m’apprend qu’il n’y a que les violens qui ravissent le Ciel » ([Matthieu XI, 12] Corr., 46). Phrase puissante s’il en est qui explique l’approche agressive de la Tourangelle dans la quête du salut, quête du salut à assurer pour elle-même mais aussi pour les autres, son fils le premier. Marie écrit ainsi à Claude Martin le 23 octobre 1645 :

O mon cher Fils (que je serois consolée si on me venoit dire que vous eussiez perdu la vie pour Jésus-Christ. Si je me trouvois dans l’occasion où l’on vous fit cette insigne faveur, notre divin Epoux me donne assez de courage pour vous repoussez dans le feu ou sous la hache, au cas que vous voulussiez esquiver par la foiblesse humaine, car je sçay bien que je vous obligerois infiniment de vous rendre ce bon office). (Corr., 270)

Résumé des informations

Pages
182
Année
2022
ISBN (PDF)
9782807619524
ISBN (ePUB)
9782807619531
ISBN (MOBI)
9782807619548
ISBN (Broché)
9782807619517
DOI
10.3726/b18512
Langue
français
Date de parution
2022 (Janvier)
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2022. 182 p.

Notes biographiques

Vincent Grégoire (Auteur)

Vincent Grégoire est titulaire d’une maîtrise en histoire de l’université François Rabelais de Tours ainsi que d’une maîtrise et d’un doctorat en littérature de Rutgers University (New Jersey-USA). Détenteur d’une chaire de recherche (« Nichols Professor of French ») à Berry College en Géorgie, ses recherches portent sur le 17ème siècle (théâtre du Grand Siècle, missionnaires en Nouvelle-France) mais aussi sur le 20ème siècle (en particulier sur l’oeuvre d’Albert Camus).

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