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« C’est la crise »

Contribution à une sociologie politique de l’action publique européenne

de Lola Avril (Éditeur de volume) Samuel B. H. Faure (Éditeur de volume) Vincent Lebrou (Éditeur de volume)
©2023 Collections 284 Pages
Série: La Fabrique du politique, Volume 7

Résumé

Cet ouvrage, qui rassemble onze contributions, analyse la « polycrise » qui traverse l’Union européenne au XXIe siècle. Fruit du travail réalisé au sein du Groupe de recherche sur l’Union européenne (GrUE), il déploie une approche de sociologie politique reposant sur des enquêtes de terrain de Bruxelles aÌ Paris en passant par Berlin et Londres.
Au fil des chapitres, les contributions analysent différentes crises (Grande Récession, attaques terroristes, Brexit, Covid-19) afin d’initier une réflexion transversale sur l’élaboration, la mise en œuvre et la légitimation de l’action publique européenne et ses transformations.
Plutôt que d’interroger ce que les crises font aÌ l’Europe, cet ouvrage questionne ce que les acteurs font et défont « au nom de la crise ». Par ce déplacement du regard, la crise n’est plus perçue comme une succession de chocs exogènes qui produiraient « plus ou moins d’Europe » mais comme un registre d’action, une ressource politique et un objet de mobilisation démocratique.
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« Selon Jean Monnet, "l’Europe se fera dans les crises". Cet ouvrage met cet adage à l’épreuve en analysant avec rigueur comment les acteurs de l’Union européenne, avec des moyens inégaux, se saisissent de situations concrètes pour obtenir de nouveaux moyens et instruments de politique publique. Une démonstration efficace de l’apport de la sociologie politique pour comprendre les enjeux européens. » Virginie Guiraudon, CNRS / Sciences Po Paris
« On dit qu’il ne faut jamais gaspiller une bonne crise. En explorant les groupes d’acteurs et les usages qu’ils font du registre de la crise dans différents domaines de l’Union européenne, cet ouvrage éclaire un angle mort de la science politique. Il illustre aussi la vitalité et l'originalité des études européennes dans l’espace francophone. » Frédéric Mérand, Université de Montréal

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Pour Léonie Pour Isabella et Leonard Pour Jeanne Sommaire
  • Notices biographiques
  • Introduction. Un certain cadrage de l’action publique européenne
  • Partie 1. Ce que les acteurs de l’Union européenne font de la crise
  • Chapitre 1. Sociologie politique de la crise européenne
  • Chapitre 2. Crises, crisologie et critique. Une étude quantitative de la littérature scientifique sur la « crise » dans l’Union européenne
  • Partie 2. La crise comme registre d’action Distinguer des problèmes publics européens
  • Chapitre 3. Une ambition politique détournée. Les acteurs locaux de la politique de cohésion et leurs usages des fonds européens face aux « crises » européennes
  • Chapitre 4. Prospérer sur la crise. Les avocats dans l’environnement règlementaire post-2008
  • Chapitre 5. Les crises, matrice des politiques européennes de la culture
  • Partie 3. La crise comme ressource politique Se repositionner par des usages stratégiques
  • Chapitre 6. Des relations intergouvernementales en crise ? Discours public et dépolitisation au Conseil de l’Union européenne
  • Chapitre 7. Crises et réputation. Les effets différenciés des attentats sur l’action européenne de lutte contre le terrorisme
  • Chapitre 8. L’usage d’une crise pour légitimer un État en crise. Ce que les acteurs britanniques de l’armement ont fait du Brexit
  • Partie 4. La crise comme enjeu de mobilisation Légitimer l’action publique européenne
  • Chapitre 9. La Chambre des communes et l’Europe. La crise « à bas bruit »
  • Chapitre 10. Des journalistes-citoyens « unis dans l’adversité ». Les médias participatifs paneuropéens face aux crises
  • Chapitre 11. Opinions publiques et les crises européennes. Une montée de l’euroscepticisme, mais pas que !
  • Conclusion. Des crises à l’agenda politique aux crises éclipsées de l’Europe

Introduction. Un certain cadrage de l’action publique européenne

Lola Avril, Samuel B. H. Faure, Vincent Lebrou

Il ne se passe pas une semaine sans qu’une crise européenne ne capte l’attention des acteurs politiques et médiatiques. Depuis février 2022, le conflit en Ukraine a largement accaparé le travail des représentants des institutions de l’Union européenne (UE) et des États membres qui n’avaient pas anticipé le retour de la guerre aux frontières du continent. En décembre de la même année, c’est le Parlement européen qui était secoué par une affaire de corruption impliquant sa vice-présidente, Éva Kaïlí, remettant en cause l’ensemble des politiques de transparence des institutions de l’UE. Durant les deux années précédentes, la gestion de la pandémie liée au Covid-19 avait fait disparaître des unes des journaux le Brexit qui avait, pourtant, saturé l’agenda politique et l’espace médiatique entre 2016 et 2019. Chaque fois, ces évènements ont été présentés comme des crises, qu’elles soient politique, sanitaire ou encore institutionnelle.

Nous pourrions ainsi remonter le temps jusqu’au début du XXIème siècle : crise sécuritaire à la suite des attentats terroristes, notamment à Paris en 2015 ; crise migratoire résultant de la guerre en Syrie ; crise géopolitique constitutive de l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014 ; crise financière induite par la « Grande Récession » des années 2007–2009 ; crise démocratique incarnée, entre autres, par le rejet du traité établissant une constitution pour l’Europe (TCE) lors de referenda organisés en France et aux Pays-Bas en 2005. Cette liste non exhaustive incarne l’idée d’une « polycrise » correspondant à un état qui serait non seulement protéiforme mais aussi permanent. En effet, rien ne laisse penser que cette dernière va d’ailleurs se résorber à l’avenir : les experts notent des taux d’inflation records en 2023 et prédisent une crise alimentaire mondiale lors des années suivantes, soit autant d’effets en chaîne de la guerre en Ukraine.

Désireux d’apporter une contribution au développement des études européennes dans une perspective de sociologie politique, le Groupe de recherche sur l’UE (GrUE) propose un éclairage nouveau sur cette « polycrise », dans la lignée de ses productions des dernières années. Créé en 2017 avec le soutien de l’Association française de science politique (AFSP), il rassemble des chercheuses et des chercheurs étudiant les mécanismes plus ou moins visibles de l’intégration européenne. Les activités scientifiques du GrUE ont déjà donné lieu à plusieurs publications (Avril, Lebrou et Morival 2019 ; Faure et Lebrou, 2020) et ce livre prolonge ces réflexions initiales en essayant d’apporter un regard renouvelé sur certaines thématiques constitutives des études européennes. Avant d’entrer dans le cœur de notre analyse collective décryptant ladite « polycrise », cette introduction entend préciser les principales caractéristiques de notre approche et le contenu des différentes contributions.

Les lieux communs de la crise

Cet ouvrage entend d’abord dépasser quelques explications classiques des crises européennes. En effet, la riche littérature – discutée plus en avant dans le chapitre suivant –, comme le récit politique qui leur sont dédiés, partagent deux présupposés. Le premier repose sur la conception de ces épisodes comme autant de « chocs exogènes » exceptionnels et inattendus, s’imposant aux acteurs du champ politico-administratif, dont le rôle individuel est déterminant dans la résolution de la crise. Le second est celui d’un cadrage de l’analyse dans les débats classiques de la science politique de l’UE entre paradigmes intergouvernementaliste et néofonctionnaliste. Il s’agit alors de savoir si la succession de crises favorise ou met en danger l’intégration européenne et avec elle les institutions supranationales qui l’alimentent.

Le récit politique porté par les acteurs européens tend à faire de la crise un choc exogène, phénomène naturel aux effets mécaniques, marqué par une forme d’apolitisme dans la mesure où il apparaîtrait depuis l’extérieur d’un champ politique. La guerre civile en Syrie serait ainsi à l’origine d’une crise des politiques européennes de migration, la crise économique et financière européenne aurait ses origines dans celle des subprimes survenue aux États-Unis. Même quand un scandale semble faire apparaître les dysfonctionnements internes de la démocratie européenne, comme dans le cas déjà mentionné de corruption de parlementaires européens, le déclencheur est l’action d’un pays tiers, le Qatar.

Résumé des informations

Pages
284
Année
2023
ISBN (PDF)
9782875749208
ISBN (ePUB)
9782875749215
ISBN (Broché)
9782875749192
DOI
10.3726/b21158
Langue
français
Date de parution
2024 (Janvier)
Mots clés
Crise Démocratie Gouvernance Politiques publiques Union européenne
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2023. 284 p.

Notes biographiques

Lola Avril (Éditeur de volume) Samuel B. H. Faure (Éditeur de volume) Vincent Lebrou (Éditeur de volume)

Lola Avril est chercheuse post-doctorante à la University of Eastern Finland après avoir passé trois ans à l’Institut universitaire européen (Florence). Elle a soutenu sa thèse de science politique à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne en 2019. Samuel B. H. Faure est maître de conférences en science politique à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye et chercheur au laboratoire de recherche CNRS Printemps à l’Université Paris-Saclay. Vincent Lebrou est maître de conférences en science politique à l’Université de Franche-Comté et membre du Centre de recherches juridiques de l’Université de Franche-Comté.

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Titre: « C’est la crise »