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La pertinence en traduction juridique

Un regard franco-allemand

de Margarete Durr (Auteur)
©2020 Thèses 440 Pages
Série: Kontraste/Contrastes, Volume 4

Résumé

La traduction juridique représente un risque pouvant déboucher à une critique. L’auteur en identifie les causes et examine les insuffisances du paradigme linguistique de la traduction. L’étude montre l’importance du rôle attribué à la notion de pertinence dans la traduction juridique qui est un mécanisme constitutif du sens. Il en résulte une approche contextualiste de la traduction dont le pivot est la pertinence. Dans cet ouvrage, on explore également les liens entre la pertinence, l’interprétation, l’usage et la qualité. La qualité d’une traduction se mesure dans sa pertinence. On y propose alors une méthode de la traduction associant pertinence et usage, faisant écho aux récentes recherches en langues de spécialité.

Table des matières

  • Cover
  • Titel
  • Copyright
  • Autorenangaben
  • Über das Buch
  • Zitierfähigkeit des eBooks
  • Préface
  • Table des matières
  • Introduction
  • A. Objet de la recherche
  • B. Axe choisi pour appréhender l’objet de la recherche
  • La dimension sémantique du droit
  • La caractérisation du droit et de la traduction en termes de pratique sociale discursive
  • La critique de la traduction en droit
  • La pertinence – une nouvelle voie pour la traduction
  • 1. Le statut de la traduction en matière civile et pénale
  • 1.1. L’ampleur du phénomène traductif en droit
  • 1.2. Le rôle de la traduction en matière pénale
  • 1.3. Le rôle de la traduction en matière civile
  • 1.4. Le statut du traducteur expert judiciaire
  • Conclusion intermédiaire
  • 2. La critique des concepts fondateurs du paradigme linguistique de la traduction
  • 2.1. La critique de la conception logico-positiviste de la signification
  • 2.2. La critique de la conception mentaliste de l’intention
  • 2.3. La critique de la notion d’équivalence
  • Les causes de la faillite du paradigme de l’équivalence en théorie de la traduction
  • L’absence de définition de l’équivalence à validité générale
  • L’absence d’isomorphisme des univers sémantiques
  • Le caractère inadéquat du concept
  • Conclusion intermédiaire
  • 3. La notion de pertinence
  • 3.1. La définition, la nature et la caractérisation de la pertinence
  • 3.2. L’apport des sciences cognitives
  • 3.2.1. La théorie de la pertinence de Sperber et Wilson et son ancrage théorique
  • 3.2.1.1. Le computationnalisme et la métaphore de l’ordinateur
  • 3.2.1.2. Le représentationalisme
  • 3.2.1.3. Le modèle de communication de Grice
  • 3.2.1.4. Le modèle de la communication ostensive-inférentielle de Sperber et Wilson
  • 3.2.1.4.1. La notion de pertinence
  • 3.2.1.4.2. La notion de contexte
  • 3.2.1.4.2.1. La notion de contexte chez Frege et Wittgenstein
  • 3.2.1.4.2.2. Le contexte en théorie générale de la communication
  • 3.2.1.4.2.3. Le contexte en sociolinguistique
  • 3.2.1.4.2.4. Le contexte chez Sperber et Wilson
  • 3.2.1.4.3. La notion d’effets contextuels
  • 3.2.1.5. La critique de la théorie de Sperber et Wilson
  • 3.2.2. La théorie d’énaction de Varela
  • 3.3. L’apport des sciences de l’information
  • 3.3.1. Les définitions de la pertinence en sciences de l’information
  • 3.3.2. La nature et le mécanisme de la pertinence
  • 3.3.3. Les caractéristiques et la typologie de la pertinence
  • 3.3.4. Les critères de la pertinence
  • 3.3.4.1. La thématique en tant que critère majeur de la pertinence
  • 3.3.4.2. L’enracinement épistémologique en tant que critère de la pertinence
  • 3.4. L’apport des sciences sociales
  • 3.4.1. Les notions fondamentales de la théorie de la pertinence de Schütz
  • 3.4.2. La double origine de la pertinence : l’importance et la situation
  • 3.4.3. Les trois piliers de la pertinence : le monde de la vie, le sens et l’interprétation
  • 3.4.3.1. La notion de monde de la vie
  • 3.4.3.2. La notion de sens
  • 3.4.3.3. La notion d’interprétation
  • 3.4.3.3.1. La notion d’interprétation en théorie générale de la traduction
  • 3.4.3.3.2. La notion d’interprétation en théorie de la traduction juridique
  • 3.4.3.3.3. La notion d’interprétation en droit
  • 3.4.4. Les définitions et la typologie de la pertinence
  • 3.4.4.1. La pertinence thématique
  • 3.4.4.2. La pertinence interprétative
  • 3.4.4.3. La pertinence motivationnelle
  • 3.4.4.4. Le système des pertinences
  • 3.4.5. La notion de stock des connaissances
  • 3.4.5.1. La définition, la nature et la fonction du stock de connaissances
  • 3.4.5.2. Les caractéristiques et la structure du stock de connaissances
  • 3.4.5.3. Les connaissances scientifiques et les connaissances ordinaires
  • 3.4.5.4. Les types de connaissances et la typologie des détenteurs des connaissances
  • 3.4.5.5. Les degrés de pertinence : l’articulation entre les connaissances et la pertinence
  • 3.4.6. Les conditions de réussite de la communication
  • Conclusion intermédiaire
  • 4. La pertinence comme mode articulatoire du sens en traduction juridique
  • 4.1. La définition de la pertinence en traduction
  • 4.2. Les conditions de la pertinence
  • 4.3. Le statut des connaissances en traduction
  • 4.4. La notion de compétence traductologique
  • 4.5. Les connaissances et le statut épistémologique du traducteur
  • Conclusion intermédiaire
  • 5. La mise en évidence de la pertinence par les analyses sur corpus
  • 5.1. La composition, le volume et la nature du corpus d’étude
  • 5.2. Les analyses sur corpus : outils, méthodologie et visée
  • Format de sortie
  • Concordancier
  • Méthodologie retenue
  • Visée
  • Article 25 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980
  • Anglais
  • Français
  • Allemand
  • La sélection des unités sémantiques
  • Qu’en est-il du point de vue de la pertinence?
  • La rupture des pertinences thématiques et interprétatives
  • Le rôle de la grammaire au regard de la pertinence
  • 5.3. Discussion des résultats des analyses sur corpus
  • Les difficultés liées au corpus
  • Les difficultés liées à l’appareil conceptuel et la méthodologie hérités de la linguistique de tradition logico-positiviste et à l’approche mentaliste
  • Les difficultés liées à la nature de la notion de pertinence
  • Conclusion intermédiaire
  • 6. La pertinence et la qualité
  • 6.1. La conception classique de la qualité et les méthodes de son évaluation en traduction
  • 6.2. La qualité comme propriété émergente de la pertinence
  • 6.2.1. La pertinence et la notion d’effectivité
  • 6.2.2. La pertinence et la notion d’usage
  • 6.2.3. La méthode opératoire de traduction : pertinence et usage
  • 6.3. La textométrie comme méthode d’évaluation de la pertinence
  • 6.3.1. La méthode textométrique et ses outils
  • 6.3.2. Les possibilités de l’analyse textométrique
  • Conclusion intermédiaire
  • Conclusion générale : la valeur de la notion de pertinence en traduction
  • Postface
  • Annexes
  • Annexe 1 : Liste des textes composant le corpus de travail
  • Références bibliographiques
  • Index des auteurs les plus cités
  • Reihenübersicht

Introduction

Le présent ouvrage2 vise à problématiser la notion de pertinence en traduction juridique. Cette notion renvoie à la question de la méthode pratique de la traduction, l’objectif de toute traduction étant de produire des textes satisfaisants3, c’est-à-dire des textes qui ont du sens. La problématique de la méthode de la traduction n’est bien entendu pas nouvelle et la littérature sur la question est prolifique4. Les solutions classiques à la problématique méthodologique oscillent entre l’approche purement linguistique et l’approche fonctionnaliste de la traduction, cette dichotomie reflétant la dialectique intrinsèque de la traduction envisagée comme texte (ergon) entre la lettre et l’esprit, la fidélité et la liberté ou, si l’on envisage la traduction comme processus (energeia), entre l’approche sourcière et cibliste5 (Ladmiral 2016). À la lumière des évolutions plus récentes en traductologie, aucun de ces paradigmes semble être apte à proposer une méthode permettant de produire du sens en traduction. Si le paradigme de la fidélité6 est dépassé aujourd’hui (Siever 2010; Ost 2009b), le paradigme de l’équivalence commence également à être discuté de manière controversée (Tymoczko 2006; Sandrini 2017). Cette insuffisance des paradigmes classiques et la critique récurrente dont fait l’objet la traduction, notamment en droit, interrogent le traducteur professionnel que nous sommes et nous ont conduit à ←17 | 18→réfléchir à la possibilité et aux conditions de la production du sens dans le passage d’un univers sémantique à un autre. La critique de la traduction en droit pose la question de savoir si la traduction est, en définitive, inapte à produire du sens. S’il est légitime pour un traducteur professionnel de s’interroger sur la notion de sens en traduction, il va sans dire qu’il n’est pas le seul à le faire eu égard à l’importance de cette notion. Ainsi, dans la doctrine juridique, il existe des travaux qui traitent de la question du sens par le biais de la question de l’interprétation. (Frydman 2011; Ost 2012; Troper 2001; Müller 1994). En linguistique, il existe de nombreux travaux sur la notion de pertinence (Sperber et Wilson 1989; Grice, H., P. 1975; Carston 1998) mais ils se focalisent essentiellement sur l’analyse des implicatures conversationnelles et sur les aspects relevant de la pragmatique linguistique. Malgré l’intérêt théorique indéniable de ces travaux, force est de constater que dans son activité quotidienne, le traducteur ne se livre pas à ce type d’analyses pour reconstruire le sens du texte source. En effet, en ce qui concerne le traducteur, la question du substrat neurologique ou de l’architecture mentale sous-jacente aux processus inférentiels importe peu en pratique. C’est la raison pour laquelle la notion de pertinence d’extraction cognitiviste servant de fondement à la théorie linguistique de la pertinence semble peu adéquate pour répondre aux exigences posées à la traduction en tant qu’activité pratique, soumise à l’incertitude et la contingence (Dewey 2014 : 38). Pour conduire notre recherche, il était donc nécessaire de trouver une autre approche permettant d’articuler la notion de sens. Le balayage interdisciplinaire de la littérature que nous avons effectué nous a permis d’identifier la notion de pertinence théorisée en sociologie compréhensive par Max Weber et Alfred Schütz comme un concept mieux à même de rendre compte des processus à l’œuvre dans la traduction et permettant une approche originale de la question du sens. En effet, la notion de pertinence d’extraction sociologique permet d’articuler les notions de sélection, de compréhension, de sens et d’interprétation qui renvoient toutes à des problématiques clés en traduction. Une recherche traductologique sur cette notion présente donc un intérêt majeur, dans la mesure où elle peut apporter un éclairage nouveau permettant de mieux comprendre le problème méthodologique de la traduction. Pour les besoins de l’analyse, il convient de circonscrire l’objet de notre recherche (A) avant de présenter le champ de l’étude et l’axe choisi pour le saisir (B).

A. Objet de la recherche

Nous avons choisi la notion de pertinence comme objet de notre recherche. En raison de sa relativité, cette notion ouvre un champ de recherche immense. ←18 | 19→En effet, elle invite et permet une analyse quasiment infinie compte tenu de la variété des perspectives sous lesquelles elle peut être considérée. Il est donc nécessaire de circonscrire tant l’objet de l’étude que l’axe choisi pour le saisir. En ce qui concerne la pertinence, nous ne souhaitons pas l’analyser dans une perspective cognitiviste, tributaire du programme de la naturalisation du sens. Il s’agit plutôt de la considérer dans une perspective pragmatique de l’analyse du sens d’un texte, une telle analyse étant la tâche quotidienne d’un traducteur. Plusieurs critères permettent de circonscrire l’objet de notre étude : a) la nature pragmatique de la traduction juridique, b) la traduction envisagée comme un acte écrit (ergon), c) l’inscription de la traduction dans un ordre juridique national et son rôle en matière pénale et civile et enfin, d) la caractérisation de la traduction versée dans un procès comme « traduction assermentée ».

La nature pragmatique de la traduction implique d’étudier le phénomène traductif dans sa dimension pratique tel qu’il peut être appréhendé dans la pratique professionnelle d’un traducteur juridique exerçant en tant que traducteur inscrit sur une liste des experts près une d’une Cour d’appel. Tant la nature pragmatique que la dimension pratique de la traduction ainsi définie permettent d’exclure d’emblée plusieurs types de traductions du champ de la présente étude : la traduction des textes du législateur, la traduction à caractère général et la traduction littéraire. Le critère de la traduction envisagée en tant qu’acte matériel produit à l’écrit permet d’exclure l’interprétation au sens de la traduction réalisée à l’oral. Dans la mesure où cela s’avérera utile pour notre propos, celle-ci fera néanmoins l’objet de quelques développements, car dans la conception que la Cour européenne des droits de l’homme et les juridictions nationales s’en font, l’interprétation jouit d’une certaine primauté par rapport à la traduction. Le critère de l’inscription de la traduction dans un ordre juridique national permet de considérer la traduction comme un phénomène qui se déploie de langue à langue et de droit à droit et d’exclure ainsi du champ de notre étude la traduction des textes internationaux, (traités internationaux) et supranationaux (p. ex. les textes du législateur européen). En effet, les contraintes qui pèsent sur l’élaboration des textes internationaux et européens ainsi que le plurilinguisme de ces textes modifient les contraintes qui s’imposent à la traduction et transforment ainsi sa nature. Enfin, la caractérisation de la traduction comme « assermentée », c’est-à-dire comme un acte présentant les caractères de sincérité et de probité auquel s’attache la présomption (réfragable) d’exactitude et de conformité au texte source permet d’atteindre un double objectif : de restreindre l’auditoire auquel elle est destinée aux professionnels du droit et d’exclure du champ de notre étude les traductions réalisées par les profanes, c’est-à-dire les non professionnels de la traduction, à titre d’expertise d’usage.

←19 |
 20→

B. Axe choisi pour appréhender l’objet de la recherche

Pour appréhender la notion de pertinence en traduction juridique, nous avons choisi d’analyser la notion de pertinence à partir de la dimension sémantique qui est commune à la traduction et au droit. Au préalable, il nous semble utile d’observer que malgré l’évolution constante de la réflexion théorique sur la méthodologie de la traduction, celle-ci n’a de cesse de susciter les débats. La question de savoir ce qu’est une traduction de qualité passionne non seulement les spécialistes de la traductologie, de la jurilinguistique et les professionnels de la traduction, mais aussi les juristes ainsi que le public profane. Pourquoi ? L’hypothèse proposée ici est celle d’un rapport étroit entre la pertinence et le sens, d’une part, et d’autre part, entre la pertinence et la qualité. Ce rapport étroit entre le sens et la pertinence se noue dans l’opération d’interprétation, qui constitue l’outil de travail du traducteur et du juriste. Pour mieux appréhender le rapport entre le sens et la pertinence, et articuler notre axe de recherche, il est nécessaire de revenir sur les caractéristiques communes de la traduction et du droit telles que la dimension sémantique et la discursivité ainsi que la caractérisation du droit et de la traduction comme pratique sociale. Enfin, nous aborderons également la critique de la traduction en droit, car c’est à partir de cette critique que se pose la question de la pertinence des traductions juridiques.

La dimension sémantique du droit

La dimension sémantique du droit réside dans l’interdépendance entre le droit et le langage, et plus précisément les différentes langues naturelles considérées comme les seules manifestations de la faculté de langage (Cassin 2016). Cette interdépendance a été problématisée dans la littérature à de nombreuses reprises (Pommer 2006; Galdia 2017; Cao 2007b; Debono et Chabrolle-Cerretini 2012; Felder et Gardt 2015) au point de relever au demeurant du topos, voire du truisme (Felder, 2015), tant en sciences juridiques, qu’en linguistique et en traductologie. La dimension sémantique est irréductible au droit (Felder et Gardt 2015 : 359)7 et implique sa nature discursive (Cornu 2005a : 207; Galdia 2017 : 289). En effet, le droit en tant que phénomène discursif peut se constituer exclusivement dans une langue naturelle entendue au sens de médium de la réflexion et de la constitution du monde de la vie8 (Taylor 2017 : 17), et ←20 | 21→en tant que voie d’accès à la connaissance (Frydman 2011 : 543). Toutefois, les modalités d’appropriation pratique et théorique du monde de la vie, et donc les mécanismes qui président à la constitution du sens sont distinctes dans chaque langue, dans la mesure où elle forme un univers sémantique distinct, doté d’une clôture opératoire qui lui confère le caractère clos propre à un système. Dès lors, chaque langue constitue une « province finie de sens » (Schütz 2003a : 80) et produit un monde différent (Cassin 2016 : 49), caractérisé par sa Weltanschauung spécifique, socialement approuvée (Schütz 2003b : 189). Les différents systèmes de droit se constituant dans le médium de différentes langues naturelles, ils héritent de manière « quasi génétique » de leur vision du monde respective, et corrélativement des normes régissant l’usage concret des mots et définies par chaque communauté linguistique. Il en résulte que chaque langue produit ses propres conditions de possibilités du discours, et en définitive, sa discursivité au sens de Foucault (2008). De la même façon, chaque système de droit crée sa propre discursivité entendue comme les « conditions aux limites définissant la possibilité de l’émergence d’un discours » (Foucault 2008 : 102) et se constitue ainsi comme « le discours en action », pourvu de sens et inscrit dans le contexte social, culturel et historique qui tient compte de l’évolution de l’usage (Blommaert 2005 : 2–3). Sur le plan méthodologique, notre approche de la traduction est résolument cibliste, seule permettant au texte original « d’habiter la nouvelle langue dans laquelle il doit s’acclimater » (Ladmiral 2016 : 22). L’approche cibliste implique de critiquer le positivisme qualifié « d’idéologie dominante et délétère de la modernité, avec pour corollaire un objectivisme qui obnubile les sciences humaines (…) » (Ladmiral 2016 : xiv). La critique de la conception positiviste en traduction fait l’objet du chapitre 2.1 ci-après.

Sur le plan plus général de la théorie linguistique, notre approche de la traduction s’inscrit dans le courant du constructivisme linguistique (Gardt 2018 : 1), initié par Wilhelm von Humboldt, qui présente des convergences avec la recherche en sciences sociales, en particulier la sociologie compréhensive d’Alfred Schütz. Dans la triade formée par la langue, la pensée et la réalité, le constructivisme donne la priorité à la langue et considère qu’elle est constitutive de la réalité, dans la mesure où l’accès cognitif au monde n’est possible que dans le médium d’une langue naturelle. Aux antipodes du constructivisme se situe le réalisme ontologique qui, dans la triade ci-dessus, donne la priorité à la réalité qui s’impose à l’individu (Gardt 2018: 1). D’aucuns flairent dans l’approche constructiviste des relents du relativisme linguistique d’extraction déterministe (Whorf 1956) qui considère les langues comme des « prisons de l’esprit » (Trabant 2012 : 261). Du point de vue de la traduction toutefois, on ne saurait verser dans un relativisme aussi radical, car il conduit à nier la possibilité de ←21 | 22→dépasser les limites entre les langues, et donc, à nier toute possibilité de la traduction. Cependant, comme l’observe Gardt (2018 : 44), il se peut que les approches relativiste et réaliste ne soient pas si éloignées l’une de l’autre qu’il n’y paraît de prime abord. Le chaînon permettant de faire le lien entre ces deux approches a priori incompatibles est constitué par la notion de monde de la vie (Lebenswelt), conceptualisée par Husserl (Perreau 2010 : 269) et reprise par Schütz. Le monde de la vie étant un élément prédonné dont la structure ontologique s’impose à l’individu (Schütz 2003a : 363), il est en effet impossible d’ignorer la réalité, et notamment la réalité d’autrui et du groupe (Schütz 2004a : 219–220). L’espace défini par le monde de la vie et l’inscription singulière de tout individu dans ce monde définissent le cadre prédonné dans lequel s’effectue toute interprétation qui est une opération d’attribution du sens. Cette opération d’attribution du sens (Sinngebung) est subjective par nature (Schütz 2004a : 222), car c’est dans l’interprétation que tout individu confère un sens à ses actes et à la réalité qui l’entoure. Ainsi, nonobstant la préexistence ontologique de la réalité, un espace s’ouvre à l’individu pour lui permettre de construire le sens dans une approche subjective inscrite dans la perspective intrinsèque à chaque langue naturelle (Trabant 2012 : 237) de façon à accéder à la réalité. Le détour par la dimension subjective est important, car c’est dans cette dimension que les langues naturelles cessent d’être des obstacles à la connaissance (« le voile devant nos yeux » de Locke9 ou les idola fori déplorés par Bacon10) et acquièrent le statut d’univers sémantiques sui generis. La dimension subjective est également importante au regard de la question de la responsabilité de l’interprétation. Tout comme le juge n’est pas un mathématicien qui opère sur des majeures et mineures d’un syllogisme, le traducteur n’est pas non plus un opérateur jonglant mécaniquement avec les termes et la syntaxe. Alors que le juge produit une norme juridique11 en agissant de manière créative pour la concrétiser dans l’interprétation juridique (Provencher 2009 : 435), le traducteur produit la traduction dans un processus créatif d’interprétation sémantique. En droit comme en traduction, tout s’inscrit donc dans l’action et appelle à tout moment une sélection permettant une décision. Cette double dimension d’action et de sélection fait de la traduction une praxéologie (Ladmiral 2016 : 172). L’application du droit et la traduction ←22 | 23→se réalisant nécessairement dans la subjectivité du magistrat et du traducteur, ils endossent donc la responsabilité de cette réalisation. Compte tenu de ce qui précède il apparaît que la notion de pertinence ouvre la voie à une approche de la traduction qui tient compte de la part de la subjectivité dans l’appropriation du monde de la vie et des connaissances et permet ainsi d’assumer une re-subjectivation12 nécessaire de la traduction.

Par ailleurs, la dimension sémantique du droit et sa nature discursive posent la question du sens, défini comme le résultat de l’interprétation (Schütz 2003a : 183)13. La question du sens joue un rôle central en droit, puisque le sens des lois et les modes de sa détermination constituent une préoccupation majeure des sciences juridiques. En traduction aussi, la notion de sens revêt une importance capitale, car si elle opère sur des mots comme unités lexicales, c’est bien le sens d’un texte qu’elle construit en mettant en œuvre la combinatoire du lexique, de la syntaxe et du style. Dans la notion de sens se noue donc le rapport complexe entre le droit et la traduction.

La caractérisation du droit et de la traduction en termes de pratique sociale discursive

La dimension irréductiblement sémantique et la nature discursive sont deux traits saillants du droit qui participent de sa caractérisation comme « une pratique sociale, discursive et performative » (Saillant et Truchon 2013 : 9). Cette caractérisation revêt une importance cruciale en raison de ses nombreuses implications. En premier lieu, elle implique que le droit est un phénomène social14. En tant que tel, il peut s’analyser en termes de pratique sociale au double sens de ce vocable. Le droit est une pratique, dans la mesure où il suppose, par définition, une décision et dans la mesure où il s’accomplit dans l’effectuation d’une tâche concrète pouvant consister à légiférer (la tâche du législateur), à rendre une décision de justice (la tâche du magistrat) ou à analyser une notion de droit ou l’évolution de la jurisprudence sur un point concret (la tâche de la doctrine). En second lieu, la caractérisation du droit en termes de pratique ←23 | 24→sociale discursive implique son déploiement dans l’interprétation des textes, qu’il s’agisse des textes de loi, des traités internationaux ou des décisions de justice. Ainsi, le texte en droit est le siège du sens qui se constitue dans l’interprétation entendue comme « un des modes essentiels de la connaissance des choses, tant de la nature que de la culture » (Frydman 2011 : 25). Enfin, la caractérisation du droit en termes de pratique sociale discursive implique le caractère performatif du droit qui se manifeste dans l’interaction sociale (Schwarte 2006). La performativité du discours juridique renvoie15 à la notion austinienne d’actes de langage performatifs qui, par le seul fait d’être énoncés, sont constitutifs d’une action (Austin 1975). Toutefois, cette approche de la performativité étant purement linguistique, elle ne suffit pas pour rendre compte du caractère situé des actes de discours. Or le caractère situé de tout discours revêt une importance capitale, puisqu’une « expression linguistique ne transporte pas son sens avec elle » (Teichmann 2008 : 41). Dès lors, seul le discours situé hic et nunc (Schütz 2004a : 178), c’est-à-dire le discours indexé en termes de situation et de temps confère aux mots et phrases d’un texte leur sens. Cette attribution du sens aux expressions linguistiques s’effectue dans un processus dynamique de la réalisation énactive16 (Taylor 2017 : 514) du discours dans une situation concrète. La méconnaissance du caractère situé du discours dans la conception austinienne de la performativité a suscité une critique qui a abouti à sa redéfinition, notamment en droit, où elle a été conceptualisée en termes de performativité écrite (Fraenkel 2006). Dans cette approche, le droit est conçu à la fois comme un acte écrit qui tire son formalisme de l’énonciation écrite et comme un acte d’écriture qui s’incarne dans un objet écrit (2006 : 82). La performativité du droit procède de son insertion « dans un système de chaînes d’écriture des personnes habilitées et des signes de validation, tous ces éléments participant à lui conférer l’authenticité nécessaire à la performativité » (2006 : 79). La caractérisation du droit en termes de pratique sociale discursive et performative est importante, car elle permet d’articuler le lien entre le droit et la traduction et d’expliquer l’omniprésence de la traduction en droit. En effet, tout comme le droit, la traduction s’analyse en tant que pratique sociale (Kross et Ramharter 2012 : 22; ←24 | 25→Tyulenev 2014 : 5), et ce à double titre. En premier lieu, la traduction tire son caractère de pratique sociale du fait qu’elle s’exerce dans un contexte social, par des individus socialisés et qu’elle implique les interactions sociales. En second lieu, la traduction est une pratique sociale, dans la mesure où elle permet la mise en relation des univers sémantiques distincts. Elle est également une pratique discursive, dans la mesure où le discours constitue l’objet sur lequel elle opère. Enfin, la traduction est une pratique performative au sens de Fraenkel (2006) dès lors qu’elle s’accomplit dans l’énonciation écrite et qu’elle produit un écrit susceptible de s’intégrer dans une chaîne d’écriture.

La critique de la traduction en droit

La traduction en droit reste frappée d’un certain discrédit au sein de la communauté juridique. En effet, elle est perçue comme un processus déformateur (Lavoie 2003 : 122), voire comme une source d’imprécisions et d’ennuis17. La critique adressée par les juristes à la traduction juridique vise soit son caractère trop servile, soit une trop grande liberté prise par rapport à l’original. Cette critique pose la question des causes de la (prétendue) mauvaise qualité des textes traduits. Il nous semble que la cause majeure de la mauvaise qualité des traductions produites réside dans le carcan dans lequel les juristes ont enfermé le traducteur et la traduction. Ce carcan c’est le diktat de la lettre et du texte original qui bénéficie d’un statut quasi sacral. Ce diktat procède du paradigme de la fidélité à la lettre dont l’équivalence est l’avatar moderne. Le diktat de la fidélité résulte d’un traitement différent du littéralisme en droit et en traduction. En traduction, on considère, en effet, qu’il y a lieu de bannir le littéralisme, car il n’est « ni possible ni même souhaitable » (Ladmiral 2016 : 175). En droit, en revanche, le littéralisme se fonde sur le statut particulier conféré à la lettre et au texte. Ce statut résulte de la fonction de garantie que le droit attache au texte et à la lettre. Ains, le texte garantit la stabilité et la permanence de la norme. La lettre dans laquelle le législateur a déposé le sens de la norme garantit la légalité. La légalité de la lettre dicte une approche sourcière de la traduction en droit ce qui explique la prévalence du transcodage correspondant au « degré zéro de la traduction » (Ladmiral 2016 : 178).

Tant le paradigme de fidélité que celui d’équivalence se fonde sur le postulat de l’immanentisme et de la stabilité du sens hérité de la tradition positiviste. Les ←25 | 26→traces les plus anciennes de ces postulats remontent à la législation justinienne et l’interdiction édictée par Justinien d’interpréter les textes, doublée de l’interdiction de changer l’ordre des mots ou des phrases, conformément à la méthode grecque dite « kata poda » (Lavigne 2005). La méthode de traduction « pas-à-pas » qui en résulte n’est rien d’autre que le calque lexical et syntaxique. L’interdiction d’interprétation dont la traduction reste frappée de nos jours, le diktat de l’original et l’impératif de la fidélité auxquels elle demeure soumise, en particulier dans le domaine juridique, visent à évacuer le problème de la plurivocité du sens (Cassin 2016)18. C’est une échappatoire à l’ambiguïté des mots et au caractère cryptique du langage juridique déplorés déjà par Swift dans ses Voyages de Gulliver en 172619. Cette conception réductrice de la traduction procède d’un représentationalisme naïf (Sandkühler 2012 : 217) qui conçoit la traduction en termes de « reproduction » de l’original. La traduction ainsi conçue exige, comme toute reproduction, une similarité, voire une identité en tous points par rapport à l’objet qu’elle reproduit (Sandkühler 2012 : 221). Pour briser ce carcan du représentationalisme et de la fidélité, il importe, d’une part, de modifier la notion de représentation et, d’autre part, de placer la notion de sens au centre des préoccupations du traducteur. S’agissant de la notion de représentation, une définition modifiée a été proposée par Ernst Cassirer qui propose de la concevoir non pas en termes de reproduction, mais en termes de « constitution d’un contenu dans un autre et par un autre » (Sandkühler 2012 : 216)20. La définition ainsi modifiée de la représentation permet de redéfinir nos concepts en termes de signes. Ainsi, pour Cassirer, tous nos concepts, qu’il s’agisse d’objets réels ou abstraits, ne sont pas des représentations, mais des signes. Or les signes n’exigent aucune similarité par rapport à l’objet, mais seulement une correspondance fonctionnelle des structures. Cette définition modifiée de la représentation est susceptible de ←26 | 27→s’appliquer à la traduction qui, dès lors, peut se concevoir en termes de signes, dans la mesure où elle se construit dans un système de signes spécifique formé par chaque langue. Par conséquent, la traduction en tant que signe ne s’analyse plus comme une reproduction du texte original en tous points identique (copie servile), mais comme une structure dynamique qui reconstruit le sens de l’original dans un autre système de signes. La notion de sens acquiert ainsi une importance majeure et devient le point focal de toute activité traduisante dont l’objectif majeur consiste dès lors à reconstruire le sens. Cette reconstruction s’entend en termes « d’acquisition de signification dans la différence »21 (Tyulenev 2012 : 171). La question du sens renvoie immédiatement à la question de la pertinence, ces deux notions étant irréductiblement liées, puisque sens et pertinence forment une unité (Schütz 2004b). Toutefois, il ne s’agit pas de problématiser ici pour une énième fois la notion cognitiviste de pertinence conçue comme une « garantie de pertinence immanente au mécanisme de la reconnaissance des intentions d’autrui » (Sperber et Wilson 1989 : 82) ou, plus largement, au sens du principe d’économie de la communication22. Une autre manière d’appréhender la notion de pertinence consiste à adopter une posture interdisciplinaire pour la scruter à la lumière des théories développées dans d’autres disciplines scientifiques et de l’aborder selon un axe qui tient compte de sa dimension terminologique, interprétative et discursive. C’est l’approche adoptée dans cet ouvrage.

La pertinence – une nouvelle voie pour la traduction

L’analyse déployée ci-dessus permet à présent de répondre à la question posée initialement, à savoir pourquoi chercher à opérationnaliser la notion de pertinence en traduction juridique. Il nous semble que la nature pragmatique du droit (Frydman 2013) et de la traduction (Vermeer 1990) justifie le recours méthodologique à cette notion pour décrire et expliquer le mécanisme de la reconstruction du sens du texte source dans le texte cible. La caractérisation non cognitiviste de la pertinence en tant que mode articulatoire du sens (Schütz 2004b) permet de mettre en évidence l’aptitude de cette notion à:

De fait, la notion de pertinence est apte à ouvrir à la théorie de la traduction une nouvelle voie hors des sentiers battus du cognitivisme et de son approche réifiante du sens. Elle est, en effet, apte à affranchir la traduction du diktat de la fidélité et de l’équivalence et à proposer une méthode qui répond mieux aux exigences de la pratique. La valeur heuristique de la notion de pertinence réside plus précisément dans son aptitude à rendre compte des processus d’élaboration du sens dans la traduction et à permettre de produire une traduction porteuse de sens, et donc, de plus-value cognitive. Dès lors, cette approche de la traduction juridique permettra de réaliser des traductions « relevantes » (Derrida 2005), c’est-à-dire porteuses de valeur ajoutée. Cette valeur ajoutée réside dans la reconstruction du sens du texte source dans la langue cible en l’ancrant dans l’horizon de sens attendu par le destinataire de la traduction tout en permettant de faire entendre la voix singulière d’autrui (Ost 2012). En outre, l’approche de la traduction juridique fondée sur la notion de pertinence est apte à dépasser la réduction lexicale, corollaire du nominalisme positiviste, qui réduit le langage à un vaste lexique et contribue à la disqualification de la traduction (Ost 2010 : 34) et du traducteur en tant que détenteur d’une compétence sui generis

Le présent ouvrage s’inscrit dans la lignée de la critique de l’équivalence et vise à caractériser la notion de pertinence en termes de mécanisme constitutif du sens en traduction juridique, d’une part et d’autre part, à en tirer des conséquences en termes de méthode pratique de traduction. Il s’agit donc, dans une approche critique au sens de Kant,23 d’analyser les conditions de possibilité d’une traduction pertinente. L’objectif visé consiste à placer la traduction sous la rection de la pertinence en tant que mode articulatoire du sens. Notre analyse se déploiera en six volets correspondant aux six chapitres.

Le premier chapitre, intitulé « Le statut de la traduction juridique en matière civile et pénale, vise à brosser le contexte général dans lequel émerge la question de la pertinence des traductions en matière juridique. Sur un plan plus général, ←28 | 29→il s’agit d’exposer l’ampleur du phénomène traductif en droit et de décrire sommairement les facteurs extralinguistiques et linguistiques qui l’expliquent. Sur un plan plus spécifique, il s’agit d’exposer le rôle dévolu à la traduction en matière pénale et civile en tant qu’instrument de mise en œuvre des principes et droits fondamentaux tels que le principe du contradictoire, de l’égalité des armes et du droit au procès équitable. Ce chapitre sera complété par des considérations sur le statut du traducteur et interprète expert judiciaire qui, en France, est l’agent humain légalement habilité à intervenir dans le procès en tant que médiateur linguistique. À ce titre, il joue donc un rôle important ce qui justifie que l’on s’y intéresse. L’analyse des déficits qui affectent le traducteur et interprète intervenant en qualité d’expert judiciaire permet de montrer en quoi il est d’emblée fragilisé et en quoi la notion de pertinence peut pallier ces déficits, au moins en partie.

Le second chapitre de cet ouvrage est consacré à la critique des concepts fondateurs du paradigme classique de la traduction : de la conception logico-positiviste de la signification, de la conception mentaliste de l’intention et de la notion d’équivalence. Ce chapitre se subdivisera ainsi en trois sous-sections. Dans la première sous-section (2.1), il sera question de la conception logico-positiviste de la signification dont il conviendra de montrer les limites ainsi que la relation entre le flou (Delmas-Marty, 2004), le vague (Kluck, 2014) et la flexibilité de la communication en droit. La seconde sous-section (2.2) abordera la notion d’intention d’inspiration mentaliste dont il conviendra de montrer l’inadéquation à la traduction juridique et de proposer une conception fondée sur la caractérisation de l’intention en termes de langage (Aucouturier 2012). Caractérisée en termes de langage, l’intention devient accessible au traducteur juridique par le truchement de l’usage d’un appareil terminologique et conceptuel propre à un secteur de connaissances investi dans le texte à traduire et d’une phraséologie, c’est-à-dire des solidarités lexicales et syntaxiques propres à un domaine du droit.

La troisième sous-section (2.3.) traitera de la notion d’équivalence qui constitue un des piliers de la théorie fonctionnaliste de la traduction. D’un point de vue strictement terminologique, on peut avoir l’impression que la pertinence s’identifie à l’équivalence. La tentation réductrice est donc importante. Mais l’approche purement terminologique de la traduction méconnaît le fait que la pertinence opère simultanément sur tous les niveaux de l’expression linguistique : sémantique, syntaxique et pragmatique. L’approche terminologique, avatar de la conception logico-positiviste de la signification, méconnaît aussi la différence irréductible des langues et des systèmes juridiques. Or cette différence entraîne des conséquences notables pour la traduction juridique, car ←29 | 30→elle rend la notion d’équivalence (Nida 1964 : 159) inopérante. C’est pourquoi, même si l’équivalence demeure l’un des piliers de la théorie de la traduction (Siever 2010), cette notion fait à l’heure actuelle l’objet d’une remise en cause de plus en plus fréquente (Siever 2010; Abel 2016) eu égard, notamment, à sa conception naïvement holistique du signe. Or en droit, en l’absence d’univocité des mots, et donc d’identité du sens, il ne saurait être question d’une quelconque équivalence (Sandrini 2017). Dès lors, il semble que la valeur de paradigme revienne à l’absence d’équivalence. Or un élément absent ne peut servir de fondement ni à une théorie ni à une méthodologie. Il a donc vocation à être substitué par une autre approche.

Le troisième chapitre est consacré entièrement à la notion de pertinence. Dans une approche interdisciplinaire, il présente les différentes conceptions de la pertinence élaborées dans différents domaines scientifiques. Ce chapitre s’articule en plusieurs sections. Dans la première section (3.1), il s’agira de préciser les contours de la notion de pertinence sur le plan général. La seconde section (3.2) présente l’approche développée en sciences cognitives et largement adoptée en linguistique (Sperber et Wilson 1989; Varela et al. 2017; Varela 1989) alors que la section suivante (3.3) présente la conception de la pertinence élaborée en en sciences de l’information (Greisdorf 2003; Saracevic 2006). La dernière section (3.4) est consacrée aux notions fondamentales de la théorie de la pertinence développée par Alfred Schütz (2004b) et à la mise en exergue de leur intérêt pour la traduction juridique. Cette théorie constitue la pierre angulaire de notre approche de la pertinence et de la méthode de traduction proposée au chapitre 6.

Résumé des informations

Pages
440
Année
2020
ISBN (PDF)
9783631819500
ISBN (ePUB)
9783631819517
ISBN (MOBI)
9783631819524
ISBN (Relié)
9783631819289
DOI
10.3726/b17142
Langue
français
Date de parution
2020 (Juin)
Mots clés
Interprétation Sens Qualité Linguistique juridique Langues de spécialité Traduction spécialisée
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2020. 440 p., 2 ill. en couleurs.

Notes biographiques

Margarete Durr (Auteur)

Margarete Durr est traductrice juridique. Elle a soutenu sa thèse à l’Université de Strasbourg en 2017 et poursuit sa recherche en traductologie juridique en sa qualité de membre associé de l’unité de recherche du laboratoire « Linguistique, Langue et Parole ».

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Titre: La pertinence en traduction juridique
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