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L’ironie dans la presse satirique

Etude sémantico-pragmatique

de Elena Siminiciuc (Auteur)
©2015 Thèses XII, 223 Pages
Série: Sciences pour la communication, Volume 114

Résumé

L’auteure de cet ouvrage avance des hypothèses nouvelles à propos d’une figure du discours particulièrement répandue, l’ironie, étudiée à partir d’exemples authentiques issus pour l’essentiel de la presse satirique. Une riche discussion critique de l’ensemble des théories rhétoriques, sémantiques, pragmatiques développées sur la question de l’ironie permet de tisser des ponts entre les époques et les approches, de mettre en perspective les outils et les cadres théoriques qui ont été échafaudés pour cerner cet objet labile, dont la compréhension a intrigué tant les rhétoriciens de l’antiquité que les linguistes contemporains. L’hypothèse défendue par l’auteure consiste à faire de l’ironie un phénomène bidimensionnel, comportant une facette énonciative et une facette argumentative. L’analyse minutieuse de chacune de ces deux facettes, à l’aide des outils de la théorie argumentative de la polyphonie et de la théorie des blocs sémantiques, lui permet de trancher les débats qui divisent la communauté des pragmaticiens ironologues.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • Sur l’auteur/l’éditeur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Remerciements
  • Introduction
  • i. L’objet d’étude
  • ii. Choix du corpus
  • iii. L’ironie comme acte de production et d’interprétation
  • iv. Objectif et structure de l’étude
  • 1. Problématique de l’étude : l’ironie comme figure de mot et/ou figure de pensée ?
  • 1.1 L’ironie dans la rhétorique antique
  • 1.1.1 Cornificius, Rhétorique à Herrenius (86–83 av. J.-C.)
  • 1.1.2 Cicéron, De l’orateur (55 av. J.-C.)
  • 1.1.3 Quintilien, L’institution oratoire (93 ap. J.-C.)
  • 1.2 La position des rhétoriciens modernes : l’héritage de la rhétorique antique
  • 1.2.1 Dumarsais, Des tropes (1730)
  • 1.2.2 Fontanier, Les figures du discours (1821–1830)
  • 1.2.3 Bilan critique
  • 1.3 L’ironie dans la pragmatique
  • 1.3.1 Deux paradigmes pragmatiques : la pragmatique intégrée et la pragmatique cognitive
  • 1.3.2 L’ironie à l’épreuve de deux types d’approche : référentialiste et aréférentialiste. La théorie de la polyphonie vs la théorie des ironies comme mentions
  • 1.3.3 De l’ironie comme contradiction argumentative
  • 1.3.3.1 Berrendonner (1981)
  • 1.3.3.2 Ironie et polyphonie dans la conception de Berrendonner (2002 & à paraître)
  • 1.3.3.3 Bilan provisoire
  • 1.4 L’ironie et l’insincérité pragmatique
  • 1.5 De l’attitude de l’ironiste. Mise au point théorique.
  • 1.5.1 Clark et Gerrig (1984)
  • 1.5.2 Sperber & Wilson (1978, 1989)/ Wilson (2006)
  • 1.5.3 Haverkate (1990)
  • 1.5.4 Kumon-Nakamura, Glucksberg & Brown (1995)
  • 1.5.5 Colston (2007)
  • 1.5.6 Kerbrat-Orecchioni (1976, 1980)
  • 1.5.7 Perrin (1996)
  • 1.5.8 Eggs (2009)
  • 1.6 Mise au point critique sur deux approches différentes : référentialiste et aréférentialiste
  • 2. De deux types d’ironies : échoïques et argumentatives.
  • 2.1 Ironies discursives et contextes favorisant leurs interprétations
  • 2.2 La typicalité de l’ironie. Conditions nécessaires et suffisantes de l’ironie. Le contexte comme pré-requis dans la réception de l’ironie (Utsumi, 2000, Sperber & Wilson 1978, 1989)
  • 2.3 Le mutual knowledge dans la littérature anglo-américaine
  • (1) Quel est le degré de typicalité d’un énoncé ironique selon Utsumi ?
  • (2) La deuxième question que soulève la théorie d’Utsumi : en quoi consiste le caractère implicite de la monstration d’un environnement ironique ?
  • 2.4 Le savoir partagé dans la Théorie des Topoï
  • 2.5 Points de divergence entre la théorie des ironies comme mentions (Sperber & Wilson, 1978), la théorie polyphonique de l’ironie (Ducrot, 1984) et la théorie argumentative de la polyphonie (Carel & Ducrot, 2009)
  • 2.6 L’ironie selon la TAP
  • 2.7 Bilan provisoire
  • 3. Marqueurs à rendement ironique. Le cas des commentaires méta-énonciatifs, des adverbes épistémiques et des expressions performatives.
  • 3.1 Délimitation d’une problématique
  • 3.2 Questions et hypothèse générale sur le rôle de ces marqueurs
  • 3.3 Hypothèse de départ
  • 3.4 Classement des marques verbales à rendement ironique et démarche d’analyse
  • 3.5 Une question épineuse : quels modes de présentation pour quels types de contenus ?
  • 3.6 La force rhétorique d’un mode de présentation (Lescano, 2009)
  • 3.7 Niveaux d’analyse des marqueurs
  • 3.8 Le marqueur comme chacun sait et la voix du Monde
  • 3.9 Bilan sur les commentaires comme chacun sait, chacun sait que, c’est bien connu
  • 3.10 Les adverbes épistémiques sans doute, sûrement, sûr que, c’est vrai que, effectivement, peut-être et leur mode de présentation
  • 3.10.1 « Sans doute » et la voix du Locuteur
  • 3.10.2 Bilan sur « sans doute »
  • 3.10.3 « Sûrement », « sûr que », « c’est vrai que », « effectivement » et la voix du Locuteur
  • 3.10.4 Bilan sur les adverbes « sûrement », « sûr que », « c’est vrai », « effectivement »
  • 3.10.5 « Peut-être » et la voix du Témoin
  • 3.10.6 Bilan sur « Peut-Être »
  • 3.11 Franchement, promis-juré et la violation de la maxime de qualité
  • 3.11.1 « Franchement » et la voix du Témoin
  • 3.11.2 « Promis-juré »
  • 3.11.3 Bilan sur « Franchement » et « Promis-juré »
  • 3.12 Conclusions
  • 4. L’ironie comme figure bi-dimensionnelle évoluant entre le pôle énonciatif et le pôle argumentatif
  • 4.1 Difficulté d’analyse de l’ironie dans les textes authentiques
  • 4.2 Méthode d’analyse du corpus moyennant les outils de la TBS
  • 4.3 L’ironie comme violation de la maxime de qualité
  • 4.4 L’ironie selon la Théorie des Topoï, Perrin (1996)
  • 4.5 L’ironie selon la Théorie des Blocs Sémantiques, Carel (2011a)
  • 4.6 Paradoxe et ironie (Carel 2011a)
  • 4.7 Une figure à deux composantes : feintise et contradiction argumentative
  • 4.8 Objectif : recherche d’une méthode systématique d’analyse du corpus
  • 4.9 Analyse de corpus
  • 4.9.1 La dimension argumentative de l’ironie
  • 4.9.1.1 L’ironie comme décalage entre un enchaînement et un aspect
  • 4.9.1.2 Bilan
  • 4.9.1.3 L’ironie comme faible illustration de l’aspect par l’enchaînement
  • 4.9.1.4 Bilan
  • 4.9.1.5 L’ironie comme téléscopage d’éthos contradictoires
  • 4.9.1.6 Bilan
  • 4.9.1.7 L’ironie et « l’argumentum ad hominem circonstanciel »
  • 4.9.2 La dimension énonciative de l’ironie
  • 4.9.2.1 Deux modes de présentation différents pour le même contenu propositionnel
  • 4.9.2.2 Mode du trouvé pour un contenu contestable
  • 4.9.2.3 Locuteur être du monde vs locuteur être de discours
  • 4.10 Conclusions
  • Conclusions générales
  • Index des auteurs
  • Index des notions
  • Liste des tableaux
  • Références bibliographiques
  • Journaux exploités
  • Ressources documentaires

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Remerciements

J’aimerais exprimer ma gratitude à toutes les personnes qui m’ont encouragée et soutenue tout le long de cette aventure qu’a été l’élaboration et la rédaction d’un ouvrage sur l’ironie.

Ma reconnaissance profonde et mes remerciements s’adressent d’abord à Corinne Rossari et Ligia-Stela Florea. C’est avant tout grâce à leur soutien inconditionnel tant sur le plan professionnel que sur le plan humain que ce livre a pu naître.

Je remercie très sincèrement Marc Bonhomme, Alain Berrendonner, Michel Viegnes, Liana Pop, Marion Carel pour leurs remarques et critiques judicieuses.

Mes plus chaleureux remerciements vont à mes amis qui m’ont encouragée, conseillée, soutenue, écoutée, lue et qui m’ont fait découvrir les meilleurs aspects de la vie de chercheur. Je remercie tout particulièrement Irina Olariu, Nayla Sokhn, Andreea Hopârtean, Ioana et Alexandru Pelin, Anamaria Curea, Anamaria Moţei, Georgiana Giurgiu, Camelia Hrab, Adriana Copaciu, Carmen de Maesschalck, qui m’ont soutenue par leur amitié.

Je remercie mes collègues, tout particulièrement Franziska Heyna, Alexandrina Iremciuc et Claudia Ricci pour leurs conseils et suggestions lors de la relecture du manuscrit.

Un grand merci du fond du cœur à Michel et Elisabeth Quenot ainsi qu’à Liana Hăitaş d’avoir su me révéler le sens de l’amitié.

J’exprime mon immense gratitude et mon amour infini à mes parents, Lucia et Petru, qui se sont toujours impliqués avec beaucoup de patience, de dévouement et de délicatesse dans mon devenir.

Ce livre est le fruit d’une recherche doctorale menée entre 2008 et 2013 à l’Université Babeş-Bolyai de Cluj-Napoca, à l’Université de Fribourg et à la Haute Ecole d’Etudes en Sciences Sociales de Paris. Mes séjours dans chacun de ces établissements ont été possibles grâce aux subsides d’études que j’ai reçus de la part de la part de plusieurs organismes : l’Agence Universitaire de la Francophonie, le Rectorat de l’Université de Fribourg, la Confédération Helvétique et le Fonds national suisse de la recherche scientifique (subside no PBFRP1-137183).

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Introduction

Il faut être bien attentif aux circonstances et à tout pour éviter de supposer l’ironie là où elle n’est point, et de prendre, là où elle est, les mots en leur sens propre. Pour preuve, le fait que l’on voit se tromper même des hommes éminents. Ainsi, parmi d’autres, Servius qui prend au sens propre les propos suivants de Junon au livre I de l’Enéide : « Assurément les destins me le défendent. » Personne ne dira qu’il ne s’est trompé ici, pour peu qu’on connaisse la nature de Junon et le passage de Virgile. En revanche, le même pense que ce passage de l’Ecclésiaste (II) : « O beau garçon, ne te fie pas trop à la beauté », est ironique. Là, assurément, il n’y a aucune ironie.

Vossius (1978 : 501)

i. L’objet d’étude

S’il y a une communication « à haut risque », selon l’expression de Vossius, il s’agit bien de l’ironie. Les explications sur l’étymologie du mot grec « eironeia » renvoient à « l’art par lequel Socrate interrogeait un disciple sur des points apparemment éloignés du sujet, et l’amenait, par un jeu de questions successives, à retourner au sujet initial en le mettant en face d’une contradiction majeure dans laquelle le disciple s’enferrait » (Encyclopédie Larousse1). « Eiron », le pratiquant de cet art, devient celui qui, à travers ses questions, feint l’ignorance.

Nombreux sont les rapprochements que font les chercheurs issus de domaines divers entre l’ironie et cet art, dont Socrate est désormais reconnu comme maître. Même si l’ironie ne naît pas avec Socrate, il y a de nos jours parmi les théoriciens un consensus qui veut que l’ironie socratique soit un type bien distinct de l’ironie verbale, romantique ou encore dramatique (Schoentjes, 2001). Au-delà des critères qui sous-tendent ce classement, il m’a semblé opportun de souligner cette constante référence à Socrate lorsqu’il s’agit de parler d’ironie. Si le dialogue oral se voit attribuer le privilège d’abriter l’ironie, il n’en reste pas moins que le monologue peut le faire également. Certes, la façon d’interpréter et de décoder l’ironie est différente dans les deux ← 1 | 2 → cas, d’où l’intérêt à analyser le fonctionnement de l’ironie aussi bien dans des enchaînements dialogiques que dans des enchaînements monologiques.

L’ironie est un objet d’étude qui a passionné et passionne encore des chercheurs issus de domaines de recherche aussi divers que la philosophie (Freud, 1988, Kierkegaard, 1975, Jankelevitch, 2005), la littérature (Hamon, 1996, Booth, 1974), la psychologie expérimentale et la psycholinguistique (Colston, 2007, Kumon-Nakamura, Glucksberg & Brown, 2007, Clark & Gerrig, 2007), la rhétorique antique et moderne (Quintilien, 1978, Aristote, 1991 & 1989, Cornificius, 1989, Beauzée, 1765, Dumarsais2, 1988, Fontanier, 1977), la pragmatique (Berrendonner, 1981, Ducrot, 1984, Haverkate, 1990, Kerbrat-Orecchioni, 1976, Perrin, 1996, Sperber, & Wilson, 1978)3. Malgré, le foisonnement d’études portant sur ce sujet, on constate que de nombreux aspects relatifs au fonctionnement de l’ironie, notamment à son décodage par le destinataire, ont été peu approfondis et font encore l’objet de vifs débats.

Dans les ouvrages de rhétorique antique qui proposent un inventaire des figures, la perspective adoptée est plutôt descriptive et prescriptive, le but déclaré des auteurs étant de fournir aux orateurs des manuels de bon usage des figures de discours.

Enfin nous savons quelle méthode suivre puisque nous n’avons omis dans ces livres aucun des préceptes de la rhétorique. […] Si nous suivons ces préceptes, notre invention sera pénétrante et rapide ; notre plan clair et ordonné ; notre action oratoire, digne et agréable ; notre mémoire, solide et fidèle ; notre style orné et séduisant. Il n’y a rien de plus dans l’art rhétorique. Nous parviendrons à acquérir toutes ces qualités si nous maîtrisons grâce à un entraînement soutenu les règles enseignées. (Cornificius, 1989 : 227. La mise en évidence est de mon fait)

Les études récentes en pragmatique et en psychologie expérimentale tentent d’apporter des réponses tant au mécanisme de fonctionnement de l’ironie qu’aux processus interprétatifs qu’elle déclenche chez le destinataire. Parmi les chercheurs qui se proposent d’identifier les critères facilitant la compréhension de l’ironie, je mentionne Burgers & al. (2011 & 2012), Gibbs & O’Brien (1991), Gibbs (2007), Gibbs & Colston (2012), Haverkate (1990), Kreutz & Glucksberg (1989), Kumon-Nakamura & al. (2007). A travers l’analyse d’un corpus qui ne se limite pas aux assertions, mais recouvre toute la panoplie des actes de langage (assertifs, directifs, promissifs, expressifs), ces chercheurs visent à faire ressortir les critères de compréhension de l’ironie (cf. l’ouvrage ← 2 | 3 → collectif « Irony in Language and Thought », 2007, qui rassemble une bonne partie des recherches anglo-américaines effectuées conjointement en psychologie et en pragmatique). Grâce à l’étude d’autres actes de langage, les pragmaticiens anglophones ont pu mettre en évidence des généralisations du fonctionnement de l’ironie. En dépit d’un appareil théorique et terminologique extrêmement hétéroclite (l’ironie comme mention échoïque, allusion, rappel ou feintise), ces études rejettent, pour la plupart explicitement, la tradition rhétorique selon laquelle l’ironie est une figure antiphrastique qui consiste à exprimer le contraire de ce que l’on pense. Un des acquis de la pragmatique contemporaine est d’avoir remis en question cette définition de la rhétorique antique qui, sans être totalement fausse, n’arrive pas à rendre compte de tous les cas d’ironie. L’objectif que les chercheurs anglophones se sont donné a été de trouver un nombre de conditions nécessaires et suffisantes à l’identification de l’ironie. Une telle démarche peut comporter le danger d’aboutir à une définition englobante qui met l’accent sur le genre proxime de l’ironie, en laissant de côté sa différence spécifique. En voulant mettre à son service les notions d’écho et d’attribution de pensée, Wilson (2006) a vite été amenée à abolir les frontières entre les mentions échoïques et les mentions ironiques, optant en faveur d’une gradualité du phénomène échoïque, ce qui a considérablement diminué l’efficacité heuristique de ses outils conceptuels.

Le talon d’Achille de cette tentative définitionnelle englobante se révèle comme une impasse qui ne manque pas de soulever des questionnements méthodologiques. Quel doit être le but ultime d’un chercheur lorsqu’il s’attelle à la tâche de décrire les mécanismes de fonctionnement et de compréhension d’un phénomène aussi complexe que l’ironie ? Viser une théorie englobante qui, dans l’idéal, arriverait à rendre compte de l’ensemble des cas de figure, ou observer l’ironie dans ses manifestations les plus authentiques et, à partir de là, esquisser une typologie des mécanismes de son fonctionnement ?

Dans cet ouvrage, je me propose d’explorer la deuxième piste, basée sur une observation rigoureuse des mécanismes de fonctionnement de l’ironie moyennant les instruments heuristiques déjà mis en place par de nombreuses théories pragmatiques. Mon corpus est constitué exclusivement d’exemples authentiques, pour la plupart issus de la presse écrite satirique.

En prenant comme point de départ l’observation de Schoentjes (2001) sur la nature protéiforme de l’ironie, je montrerai qu’il est difficile et illusoire de l’enfermer dans le moule d’une définition. La multitude des formes que peut prendre l’ironie constitue donc le principal argument en faveur d’une approche empirique : partir d’occurrences authentiques pour faire ressortir le fonctionnement de l’ironie à travers certains critères descriptifs bien précis.

A l’issue de ce travail d’analyse, je proposerai une typologie des mécanismes argumentatifs et énonciatifs à rendement ironique dans la presse francophone (presse d’information et presse satirique). On pourrait me reprocher ← 3 | 4 → de déconstruire l’ironie pour l’enfermer dans des catégories qui, au bout du compte, s’avèrent toujours trop réductrices et de m’exposer ainsi au danger d’analyser une ironie préformatée. Mais comme le fait remarquer Charaudeau, c’est en adaptant systématiquement la nature des catégories aux faits observés qu’une typologie peut voir le jour4 :

La question des catégories est toujours l’objet de controverses quant il s’agit d’analyser des textes ou des types de discours. Les uns assurent qu’analyser, c’est déstructurer pour classer, les autres que, en déstructurant, on ne reconnaît plus rien de l’objet et donc qu’il faut en faire un commentaire suivi. Les deux positions se défendent, mais la nôtre consiste à penser que la force des sciences humaines et sociales, face à ce qu’est le commentaire littéraire et philosophique, est de définir des catégories qui permettent de procéder à des analyses et de juger des résultats selon un principe de cohérence. Mais, en même temps, il ne faut pas se laisser emprisonner par les catégories car elles sont par définition réductrices. Il s’agit donc de définir des catégories opératoires et non essentialisantes. C’est dans cet esprit qu’il faut considérer les catégories ci-dessous proposées, comme permettant d’analyser des faits humoristiques au cas par cas, car c’est dans la combinaison de ces catégories qu’apparaissent, à la fois, la possible classification d’un acte humoristique et sa particularité. (Charaudeau, 2006 : 26–27. La mise en évidence est de mon fait)

ii. Choix du corpus

En tant que communication « à haut risque », l’ironie impose une autre justification méthodologique concernant le choix du corpus : à la lecture de la littérature, on est frappé par l’abondance des exemples fabriqués qui, dans le cas de l’ironie, est des plus surprenantes (cf. infra 1.5.).

Les dangers auxquels donne lieu ce genre de corpus ? Tout d’abord, on a l’impression que les chercheurs travaillent avec une notion dont les contours sont prédéterminés par le corpus choisi ; cela explique les limites des définitions « englobantes » lorsqu’elles sont confrontées à des exemples authentiques. Autre écueil : l’ironie reçoit sous la plume des chercheurs une acception méta-linguistique qui n’a pas grand-chose à voir avec la conception de l’ironie de tout un chacun. Si l’acception méta-linguistique du terme l’emporte sur le caractère spontané de cette espèce, le risque est de parler d’autant d’ironies que de chercheurs. Quelle alternative ? ← 4 | 5 →

Résumé des informations

Pages
XII, 223
Année de publication
2015
ISBN (MOBI)
9783035193886
ISBN (ePUB)
9783035193893
ISBN (PDF)
9783035203097
ISBN (Broché)
9783034316415
DOI
10.3726/978-3-0352-0309-7
Langue
français
Date de parution
2015 (Mars)
Mots clés
Discussion critique Facette énonciative Facette argumentative
Page::Commons::BibliographicRemarkPublished
Bern, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, 2015. 236 p.

Notes biographiques

Elena Siminiciuc (Auteur)

Elena Siminiciuc, docteure ès lettres de l’Université de Fribourg, travaille en tant qu’assistante postdoctorante et chargée de cours à l’Université de Neuchâtel. Ses recherches, qui portent sur les marqueurs de modalité dans deux langues romanes, le français et le roumain, associent les analyses qualitatives et quantitatives à la recherche basée sur corpus.

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Titre: L’ironie dans la presse satirique