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Reconstruire la ville par les mots

Berlin et la critique architecturale après 1945

de Éléonore Muhidine (Auteur)
©2021 Thèses 164 Pages

Résumé

1945, Berlin est une ville détruite. Elle se trouve à tournant de son histoire selon une génération d’historiens, journalistes, architectes et critiques de l’architecture. A travers leurs écrits et leurs engagements, ils vont œuvrer à la reconstruction matérielle et intellectuelle de l’ancienne capitale impériale. De la ville motorisée à la ville historique, du caractère habitable de la ville contemporaine à l’écriture d’une histoire de la modernité architecturale : leurs débats reflètent l’évolution des discours sur l’architecture après 1945. Cette synthèse s’appuie sur des recherches menées dans sept fonds d’archives de critiques, quatre fonds institutionnels et trois fonds de revues.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Sommaire
  • Introduction: Reconstruire Berlin par les mots : un programme intellectuel et collectif
  • I. Le critique et la ville
  • 1. Une ville formatrice
  • 2. Sociabilités, épistolarité et lieux de rencontres
  • 3. La ville en débats : de l’habitat à l’urbanité
  • 4. Les critiques d’architecture face à la Reconstruction allemande
  • II. Une profession en temps de guerre froide
  • 1. Des échanges par-delà le Mur
  • 2. Surveillance politique et Stasi
  • 3. Américanisation, médias et critique
  • 4. Le Congrès de l‘UIA à la Havane en 1963
  • 5. Voyages et mobilité des critiques berlinois
  • Conclusion
  • Biographies
  • Sources et bibliographie
  • 1. Sources
  • 2. Bibliographie

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Introduction
Reconstruire Berlin par les mots : un programme intellectuel et collectif

« Reconstruire la ville par les mots » : l’énoncé sonde le projet commun qui habite les écrits des critiques d’architecture berlinois après la Seconde Guerre mondiale, le mot d’ordre implicite et collectif qui traverse l’engagement de ces figures d’intellectuels spécialistes de la ville et s’établissant dans le Berlin d’après-guerre. « Reconstruire la ville par les mots » pourrait révéler la ligne programmatique de ces critiques pour le Berlin d’après 1945.

La destruction matérielle de l’Allemagne en 1945, fixée par les écrivains (Hans Fallada dans Seul dans Berlin, Heinrich Böll dans Le Silence de l’Ange), les journalistes étrangers (Stig Dagerman et son Automne allemand), les cinéastes allemands et étrangers (Wolfgang Staudte, Die Mörder sind unter uns ; Roberto Rossellini, Germania anno zero) mais aussi les grands reporters (Henry Ries et Robert Capa), saisit également d’effroi ces jeunes auteurs formés à l’architecture avant 1933 et qui s’engagent, après le conflit, pour la reconnaissance du passé architectural de leur ville natale ou d’adoption.

La critique architecturale et urbaine, véritable engagement intellectuel, se traduit dans ce milieu berlinois divisé par l’émission d’écrits produisant une critique collective des transformations à l’œuvre dans la ville profondément marquée par l’Histoire. Cette constellation d’auteurs parmi lesquels Julius Posener, Wolf Jobst Siedler, Ulrich Conrads, Günther Kühne, Dieter Hoffman-Axthelm pour l’Ouest, et Bruno Flierl, Hermann Henselmann, Kurt Junghanns, Kurt Liebknecht pour l’Est, s’exprime en premier lieu dans les revues d’architecture (Bauwelt, Deutsche Architektur, Archplus), mais également dans la presse généraliste et sur les ondes radiophoniques. Ensemble, ils forment une famille de journalistes, spécialistes de l’architecture berlinoise depuis la première modernisation industrielle, dont la reconnaissance professionnelle et institutionnelle se réalise dans le Berlin de la Reconstruction puis de la division allemande.

In fine, leurs écrits livrent un regard collectif et expert sur la ville en tant que territoire de l’expérimentation architecturale au cours du long XXe siècle et fournissent le témoignage, unique et encore peu exploré, d’une ville en train de se faire. Saisis dans leur ensemble, ils forment un paysage d’intellectuels spécialistes de la ville de Berlin et initiateurs d’une redéfinition de l’urbain dans la ville détruite. Intellectuels engagés dans les débats urbains à Berlin-Ouest et ←9 | 10→à Berlin-Est, ces critiques-journalistes et historiens sont actifs dans le champ institutionnel local et à certains égards, international. Passeurs d’une culture architecturale spécifiquement berlinoise, ils participent à la construction d’un journalisme architectural (Architekturjournalismus) ancré dans la ville. Grâce à leurs nombreux voyages et à la traduction de leurs écrits en anglais ou en russe, ces critiques berlinois contribuent à la circulation des idées et aux échanges architecturaux internationaux, comme par-delà les contraintes du contexte politique de cette période.

Très différente de la période d’après 1989, la période d’après 1945 voit évoluer les débats sur la reconstruction d’abord ressentie comme une urgence dans les années 1950, en un débat collectif, à l’ouest, sur l’identité architecturale de la ville et les spécificités de son mouvement moderne. C’est aussi le moment d’émergence d’une critique du fonctionnalisme planificateur et des grands ensembles. A Berlin-Est, les critiques participent à l’élaboration collective d’une nouvelle identité architecturale pour la Hauptstadt der DDR et tentent, malgré la surveillance politique, de faire reconnaitre la critique architecturale comme une pratique à part entière du champ architectural. Spécialistes éclairés, témoins directs des transformations de la ville, ces auteurs produisent sur une période de trois décennies une littérature experte sur la ville et son héritage. Véritables intellectuels de l’urbain, ils sont présents dans le champ éditorial de la presse spécialisée, du livre d’architecture mais aussi dans le champ académique à travers l’enseignement de l’histoire architecturale et sa diffusion dans les musées et galeries d’architecture.

Les résultats présentés dans cet ouvrage tirés d’une thèse en histoire de l’architecture contemporaine soutenue en 2017 s’appuient sur les données récoltées dans les fonds des revues d’architecture allemandes Die Bauwelt, Deutsche Architektur et Archplus conservés à l’université Technique de Berlin, ainsi que sur des recherches menées dans huit centres d’archives : l’Académie des Arts de Berlin (fonds institutionnel ainsi que les fonds des critiques Julius Posener, Hermann Henselmann, Kurt Junghanns et Manfred Sack), la Berlinische Galerie (fonds Günther Kühne), le Bundesarchiv (fonds de la Bauakademie der DDR), la Deutschland-Radio Kultur (fonds RIAS), le ministère de la Sécurité d’État de RDA, l’Université Technique de Cottbus, (fonds Ulrich Conrads), l’Institut d’urbanisme d’Erkner (fonds Bruno Flierl) et enfin, le Centre d’archives d’architecture du XXe siècle à Paris (fonds Pierre Vago).

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I. LE CRITIQUE ET LA VILLE

Dans cette partie, il est question d’explorer le lien du critique d’architecture à la ville, en tant que ville natale mais aussi ville vécue et ville projetée. Les représentations de la ville moderne des années 1920 jouent en effet un rôle central dans l’engagement et les discours des critiques, qui sont également les premiers historiens du mouvement moderne en Allemagne. Les sociabilités entre critiques sont mises à jour grâce aux correspondances, le medium écrit révélant ainsi les réseaux de ce milieu intellectuel composé d’architectes, de journalistes culturels et de professeurs d’université. Certains lieux institutionnels et privés (appartements) se révèlent être des espaces de rencontres et de débats entre critiques. De plus, les débats qui animent les discussions architecturales, et en particulier la question de la ville, du logement mais aussi du caractère habitable de la ville contemporaine, sont également au cœur de cette partie. Enfin, la critique berlinoise est saisie dans une perspective nationale plus large avec des exemples comparatifs de Francfort et de Halle. En ce sens, la reconstruction de la culture architecturale et de sa critique en Allemagne après 1945 sont envisagées au-delà des frontières de la ville divisée.

Mots-clés :

Résumé des informations

Pages
164
Année
2021
ISBN (PDF)
9783631859865
ISBN (ePUB)
9783631859872
ISBN (MOBI)
9783631859889
ISBN (Broché)
9783631854204
DOI
10.3726/b18849
Langue
français
Date de parution
2021 (Août)
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2021. 164 p., 54 ill. n/b.

Notes biographiques

Éléonore Muhidine (Auteur)

Historienne et journaliste culturelle, Éléonore Muhidine est titulaire d’un doctorat en histoire de l’architecture contemporaine mené en France et en Allemagne. Ses recherches portent sur l’histoire culturelle de l’Allemagne, les représentations urbaines, les transferts et la circulation des savoirs entre l’Europe, l’Orient et l’Inde.

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