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"Avec le noble crayon"

Lettres de James Ensor à la famille Rousseau

de Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique (Éditeur de volume)
©2021 Collections 698 Pages

Résumé

À partir de 1883, le peintre et graveur James Ensor (1860-1949) entretient avec la famille Rousseau, installée à Bruxelles, une importante correspondance étalée sur plusieurs décennies, qui témoigne d’une amitié sincère. Ernest Rousseau, professeur de physique devenu recteur de l’Université libre de Bruxelles, et son épouse la mycologue Mariette Hannon exercent une heureuse influence sur le jeune artiste ostendais, en contribuant à élargir son réseau au sein du monde culturel de la capitale. Leur fils Ernest nourrit également une évidente complicité avec James.
Les Rousseau se révèlent être les confidents des angoisses, des doutes et des éclats d’enthousiasme de l’artiste, et comptent parmi ses principaux mécènes. Conservée aux Archives de l’Art contemporain en Belgique, cette correspondance non croisée, restée en grande partie inédite, rassemble près de 400 lettres, cartes-lettres, cartes postales et cartes de visite autographes de James Ensor pour l’essentiel, quelques lettres étant par ailleurs écrites par sa sœur Marie. Cet ensemble épistolaire lève le voile sur de nombreux aspects tant de la vie de l’artiste que de son œuvre peint et gravé. Sa transcription intégrale s’accompagne ici d’un commentaire critique richement documenté.
Correspondance établie et annotée par Jean-Philippe Huys, avec la collaboration de Xavier Tricot
Essais intégralement traduits en néerlandais, résumés en anglais

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • SOMMAIRE
  • Avant-propos (Michel Draguet)
  • Préface (Sabine Taevernier et Herwig Todts)
  • Les lettres de James Ensor aux Rousseau, confidents et mécènes (Jean-Philippe Huys)
  • Nouvelles données et œuvres inconnues mentionnées dans les lettres de James Ensor aux Rousseau (Xavier Tricot)
  • Corpus des lettres
  • Chronologie croisée
  • Généalogies
  • Œuvres de James Ensor acquises par Ernest et Mariette Rousseau
  • Index des noms propres
  • Index des œuvres de James Ensor mentionnées dans les lettres et leur annotation
  • Index topographique
  • Orientation bibliographique
  • De brieven van James Ensor aan de Rousseaus, vertrouwelingen en mecenassen (Jean-Philippe Huys)
  • Nieuwe data en onbekende werken in de brieven van James Ensor aan de familie Rousseau (Xavier Tricot)
  • Summaries in English
  • Crédits photographiques
  • Colophon et remerciements
  • Titres de la collection

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AVANT-PROPOS

Les lettres d’artiste rapportent souvent des faits de la vie et de l’œuvre de ces êtres d’exception. Celles de James Ensor révèlent en plus l’esprit et la mentalité du créateur. Les missives que ce dernier adresse à la famille Rousseau – au professeur Ernest, à son épouse Mariette née Hannon et à leur fils Ernst – sont les premières de l’artiste à témoigner de son originalité non seulement en tant que peintre, dessinateur et graveur mais aussi comme écrivain autodidacte au langage particulier.

Les lettres d’Ensor aux Rousseau forment une correspondance de quelque 374 documents sur une durée de près de quarante ans, de 1883 à 1924, en s’espaçant avec le temps. Elles sont essentielles pour une meilleure compréhension de l’œuvre de novateur que l’artiste ostendais accomplit dans les années 1880 et 1890. En ces deux décennies, James Ensor réalise ses chefs-d’œuvre, passant d’une peinture intimiste et narrative à l’ironie expressionniste de masques singuliers et squelettes dynamiques et créant des gravures en accord avec sa veine incisive : il remplace progressivement la représentation du monde réel par celle d’un univers mélancolique. Ainsi le corpus des lettres aux Rousseau précède-t-il en importance la correspondance adressée à Emma Lambotte, de 1904 à 1914.

Auprès de la famille Rousseau, Ensor trouve refuge et compréhension. Cette liaison amicale a un apport fondamental pour l’artiste : elle lui permet d’échapper à la médiocrité qu’il ressent à Ostende, d’y trouver une attention qui lui est indispensable pour créer avec enthousiasme. Les Rousseau deviennent ses premiers collectionneurs et introduisent le jeune artiste, en quête de liberté et de notoriété, dans un milieu bourgeois cultivé et libéral. Écrites « avec le noble crayon » [lettre 1883-11] puis à la plume, les lettres de James Ensor aux Rousseau dévoilent les crises de découragement qu’il traverse, ses doutes, ses angoisses, ses émotions ainsi que certains éléments de sa vie privée que l’artiste s’employait de garder secrets.

Acquise en 1986 par les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique pour leur section « Archives de l’Art contemporain en Belgique », cette correspondance – restée depuis en grande partie inédite – méritait une étude attentive et une édition dans son intégralité. Ce travail de recherche et de publication a été confié au Centre international pour l’Étude du xixe siècle, qui a déjà publié en 1999 les lettres de James Ensor à Emma Lambotte, également conservées aux Musées. L’édition des lettres d’Ensor aux Rousseau a été établie, commentée et introduite par Jean-Philippe Huys – attaché auprès du Centre où il est secondé par Nadia Wesel – avec la collaboration scientifique de Xavier Tricot, expert de James Ensor. Paru dans la série des Cahiers des MRBAB, le présent ouvrage n’aurait pu voir le jour sans le soutien financier de l’Ensor Advisory Committee et de celui de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Nous leur adressons nos plus vifs remerciements.

 

Michel Draguet

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PRÉFACE

La publication de la correspondance entre James Ensor et la famille Rousseau est un événement attendu de très longue date par toute la communauté de spécialistes et d’amateurs de son œuvre.

Nombreux sont les chercheurs et les passionnés de l’artiste qui se sont rendus au 20, rue Vautier à Ixelles, la maison construite par Jules Brunfaut pour Ernest et Mariette Rousseau en 1882 et où James Ensor passa un grand nombre de séjours. La maison appartient encore aujourd’hui aux descendants du couple et les environs n’ont presque pas changé. Les charmants réverbères, le musée Wiertz sont toujours là bien dans leur jus, tout comme une partie du musée des sciences naturelles. Lors des discussions au sujet de la longue et profonde relation entre Ensor et les Rousseau, il était souvent question de savoir si la famille n’avait pas gardé de la correspondance entre Ernest, Mariette, Ernest Jr et James Ensor. La réponse qui suivait était claire : il existait effectivement un nombre important de lettres mais la famille ne désirait pas encore les dévoiler1. Cette question a alimenté beaucoup de théories et d’histoires imaginées par les historiens de l’art et les amateurs de l’artiste.

Il fallait donc la publication de ces lettres pour éclairer beaucoup de choses restées dans l’ombre des suppositions. La dernière lettre connue entre Mariette et James Ensor date de 1924 ; nous sommes donc presque cent ans après et la publication des lettres voit enfin le jour. Celle-ci a le grand avantage d’avoir été réalisée de façon extrêmement fouillée et détaillée, ce qui permettra de rester à jamais une source inépuisable pour la connaissance approfondie de l’artiste et de son entourage, de ses passions, de ses faiblesses, de ses sources d’inspiration et des faits qui ont influencé et parfois déterminé son œuvre. Par conséquent, il est clair que le contenu des lettres d’Ensor à la famille Rousseau implique désormais une révision approfondie de la biographie d’Ensor et pourra contribuer à compléter la longue liste de projets qui concernent son œuvre.

Le catalogue raisonné des peintures par Xavier Tricot et celui des gravures par August Taevernier et James N. Elesh ont été réalisés d’une manière très accomplie, mais ils demandent un suivi continu dans la mesure où de nouveaux éléments apparaissent régulièrement. Pour les dessins, le livre James Ensor. Dessins et estampes de Robert Hoozee, Sabine Taevernier et J.F. Heijbroek constitue une bonne introduction, mais un inventaire manque cruellement et l’analyse de l’ensemble de la production n’en est qu’à ses débuts.

Libby Tannenbaum, Francine-Claire Legrand, Diane Lesko, Susan M. Canning, Patrick Florizoone, Joachim Heusinger von Waldegg, Ina Dinter, entre autres, ont étudié la relation entre l’iconographie d’Ensor, sa biographie et les sujets sociaux de son époque. Mais, ici aussi, il reste encore beaucoup de travail à faire. In fine, l’Ensor Research Project2 initié par Herwig Todts est une première étape prometteuse dans une approche plus scientifique de la recherche stylistique et iconographique de l’œuvre, qui permet d’analyser le processus de création à l’aide de techniques d’imagerie avancées.

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Depuis sa création en 2002, l’Ensor Advisory Committee a toujours eu pour but de réunir les spécialistes de l’œuvre de James Ensor – aujourd’hui Michel Draguet, Herwig Todts, Xavier Tricot et Sabine Taevernier – afin de profiter pleinement de leurs expériences diverses et de leurs approches différentes. La centralisation de cette connaissance de l’œuvre et de la vie de James Ensor permet au Comité d’utiliser cet acquis au profit de la recherche et de la protection de l’œuvre de l’artiste sur le marché international. Cet instrument, qui existe depuis dix-huit ans, a pu rassembler des fonds qui permettent aussi de soutenir des projets essentiels à la compréhension de l’œuvre de James Ensor.

La publication de lettres, qui couvrent principalement la période la plus créatrice d’Ensor3, et dont le contenu est extrêmement révélateur pour la connaissance de l’artiste et de son œuvre, a semblé être le projet que le Comité attendait depuis longtemps.

Ses membres ont donc unanimement et avec grand enthousiasme pris la décision de soutenir Michel Draguet, qui est venu les rejoindre en 2016, dans son projet de publication des lettres de James Ensor à la famille Rousseau, en espérant avoir contribué par ce geste à rendre public un instrument de travail qui deviendra indispensable dans l’approche de l’être et de son entourage et permettra de parfaire l’étude d’une œuvre extrêmement complexe.

 

Sabine Taevernier et Herwig Todts

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1. James Ensor, Les Quatre tempéraments : « poétique » (Marie Ensor), « épique » (James Ensor), « sardonique » (Théo Hannon), « schnic » (Willy Finch) [1881-1882], fusain sur papier, 220 152 mm ; collection privée.


1 Conversation avec Claude Wodon, petite-fille d’Ernest Rousseau Jr, durant l’automne 1986.

2 Le projet a été lancé en 2013 par le Koninklijk Museum voor Schone Kunsten d’Anvers (kmska) en collaboration avec Arcobaleno et Mu.ZEE Oostende. Les premiers résultats ont été présentés lors du symposium international James Ensor’s Creative Process. Technique, concept, image, en collaboration avec l’Université d’Anvers, le 20 novembre 2015.

3 La cadence des lettres est très soutenue de 1883 à 1897, ensuite elle diminue au fil des années pour s’arrêter en octobre 1924, quinze mois avant le décès de Mariette Rousseau.

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Les lettres de James Ensor aux Rousseau, confidents et mécènes

Jean-Philippe Huys

 

 

Disposer d’un tel corpus de lettres, cartes-lettres, cartes postales et cartes de visite autographes de James Ensor et de pouvoir le publier dans son intégralité est une opportunité. Cette correspondance, aussi importante par sa qualité que par sa quantité, a été léguée aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) en 1986 par Marguerite Wodon-Rousseau, petite-fille des principaux destinataires. De 1883, date du premier envoi, à 1924, année du dernier document, James Ensor s’adresse à Mariette Rousseau-Hannon, à son époux le professeur Ernest Rousseau et à leur fils Ernest (374 pièces). Ce riche fonds comprend également des lettres de la sœur de l’artiste, Marie Ensor dite Mitche, essentiellement adressées à Mariette Rousseau (17 pièces), et du courrier annexe (15 pièces). Pour l’année 1883, certaines lettres ont été mises en relation avec des dessins sur papier collés dans l’Album Rousseau (MRBAB, inv. 10290) qui se sont avérés être des parties découpées ou détachées desdites lettres*.

Cette somme épistolaire extraordinaire, jusqu’ici à peine effleurée1, apporte quelques corrections et de nombreux éclairages dans la vie et dans l’œuvre de James Ensor. Même si cette correspondance n’est pas croisée2, elle dévoile des affaires, des desseins, des états d’âme, voire des visions de l’artiste, et elle témoigne de la profonde amitié qui liait James Ensor à la famille d’Ernest Rousseau, une amitié sincère mais non sans nuages.

La rencontre

Les premières lettres du corpus sont de Marie Ensor, adressées à Mariette Rousseau en février 1883, tandis que ce sont des dessins-lettres que James Ensor envoie à Mariette à ce moment-là. La première lettre proprement dite que lui écrit l’artiste date de mars 18833 [1883-07]. C’est pourtant en 1882 qu’Ensor fait la connaissance de Mariette Rousseau-Hannon ainsi que de son époux Ernest et de leur fils Ernest4, vraisemblablement par l’intermédiaire du frère de Mariette, Théodore Hannon dit Théo, qui exerce alors son ascendant sur l’esprit du jeune Ensor. Anticonformiste défendant la modernité dans toutes les expressions artistiques, Théo introduit son cadet ostendais dans le monde culturel et estudiantin bruxellois qu’il fréquente assidûment : celui des cafés-théâtres et des cabarets littéraires qui animait la vie nocturne bruxelloise. D’ailleurs, Théo exerça son talent davantage comme critique, poète et revuiste que comme peintre. Ensor et Hannon se seraient rencontrés dans l’atelier du peintre Camille Van Camp à Bruxelles en 1879 [ill. 1].

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« La rencontre capitale de ma vie, à 21 ans5, une femme d’esprit, mère et mariée, pas belle, savante et frivole, alliant les fuites, les échappements de vapeur, crises d’humeur propres au sexe ventru bassine couperosé à la gravité la plus masculine, un esprit d’à-propos peu commun. Jamais je n’oublierai les bas/dessous verts de cette femme ni son besoin d’aimer ni les moustaches6 nobles de son époux à sursauts7. »

C’est en ces termes que James Ensor rédige le premier jet du brouillon de sa réponse à la question de savoir quelle fut la rencontre capitale de sa vie, posée lors d’une enquête menée par André Breton et Paul Éluard et qui devait être publiée dans le numéro de la revue Minotaure du 15 novembre 1933. Et pour expliquer à quel point cette rencontre lui a donné l’impression du nécessaire et du fortuit, Ensor écrit comme suit dans les deux jets de son brouillon :

« Amour et bonté [qui] fait leur devise me lancèrent des pôles de la raison à l’équateur de mes sens exacerbés / de ma sensibilité. Amitié des sens et les émotions les plus crues nécessaires aux peintres. […] »

« Oui rencontre fortuite, secousses/émotions nécessaires à l’épanouissement de ma [sic] art / les émotions bienfaisantes combien nécessaires à l’épanouissement de mon art. Ces rayons surchauffèrent l’équateur de mes sens/désirs/pensées, les tropiques de mes sens. […] »

Résumé des informations

Pages
698
Année
2021
ISBN (PDF)
9782807617360
ISBN (ePUB)
9782807617377
ISBN (MOBI)
9782807617384
ISBN (Relié)
9782807617353
DOI
10.3726/b18473
Langue
français
Date de parution
2022 (Février)
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2022. 698 p.

Notes biographiques

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