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La sauve-garde de la création selon Adolphe Gesché et <i>Laudato si‘<\i> du pape François

Jalons pour une écologie théo-logique

de Augustin Kalamba Mupoyi (Auteur)
©2022 Thèses 368 Pages

Résumé

La question écologique inquiète les écologistes et les climato-septiques. Sans se confondre, avec eux, le théologien Augustin Kalamba propose à travers ce livre une « écologie théo-logique ». Fondée sur la cosmologie du salut d’Adolphe Gesché et l’écologie intégrale du pape François, elle est un projet spirituel d’ordre supérieur qui, partant d’une approche phénoménologique de la crise écologique, réaffirme la responsabilité de « l’homme-parlant-de-Dieu-dans-la-foi » dans le projet du salut du cosmos. L’homme est invité à redécouvrir l’identité éco-théologique du monde comme « création » et « maison commune » afin de le cultiver, labourer, protéger, et sauve-garder avec gratitude et dans la sérénité qui vient de la foi en un Dieu Créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Dédicace
  • Epigraphe
  • Table of Contents
  • Préface
  • Sigles et abréviations
  • Introduction
  • PREMIERE PARTIE : La cosmologie du salut d’Adolphe Gesché
  • CHAPITRE I. Adolphe Gesché : L’homme et son œuvre
  • 1. Vie
  • 1.1 L’Enfance
  • 1.1.1 Vie familiale
  • 1.1.2 L’école
  • 1.2 Vocation et Ministère sacerdotal
  • 1.3 Ministère théologique
  • 2. Œuvre (1954–2003)
  • 2.1 Le contexte d’émergence de l’œuvre théologique d’Adolphe Gesché
  • 2.1.1 Absentéisme théologique
  • 2.1.2 L’athéisme et les théologies de la mort de Dieu
  • 2.1.3 La théologie de la libération
  • 2.1.4 La postmodernité
  • 2.1.5 Le pluralisme religieux
  • a) La tradition de la théologie négative et la réserve eschatologique
  • b) La doctrine trinitaire
  • c) Les Saintes Ecritures
  • 2.2 L’identité de l’œuvre d'Adolphe Gesché
  • 2.2.1 Une théo-logie
  • 2.2.2 Une anthropologie théologale
  • 2.2.3 Une apologétique
  • 2.3 Dieu pour penser
  • 2.3.1 Dieu
  • 2.3.2 L’homme
  • 2.3.3 Le cosmos
  • 2.4 Pensées pour penser
  • Conclusion
  • CHAPITRE II : Penser la création comme don
  • 1. La phénoménologie du don
  • 2. Le don de la création et ses caractéristiques
  • 2.1 Le quant-à-soi du monde
  • 2.2 La création comme lieu de liberté
  • 2.3 La création comme parole
  • 2.4 La création comme acte d’amour et de présence
  • 3. La théo-logique de la création : Au commencement Dieu créa
  • 3.1 La création-séparation
  • 3.1.1 Créer c’est constituer quelque chose de distinct de Dieu
  • 3.1.2 Créer c’est faire « ex nihilo »
  • 3.1.3 Créer c’est poser un principe d’ordre
  • 3.2 La « logique » de la création
  • 4. Une anthropo-logique de la création
  • 4.1 Une science ré-enchantée
  • 4.2 L’homme, « créé créateur »
  • 5. Une cosmo-logique de la création
  • 5.1 L’identité théologique du cosmos
  • 5.1.1 La terre comme notre demeure (oïkoumenè)
  • 5.1.2 La terre comme demeure du Logos divin (oïkos toû Theou Logou)
  • a) Au titre d’éternité
  • b) Au titre de la création
  • c) Au titre de l’incarnation
  • d) Au titre de la Parousie
  • 5.2 La sauvegarde chrétienne du cosmos
  • 5.2.1 Sauvegarde de salut
  • 5.2.2 Sauvegarde théologale
  • 5.2.3 Une sauvegarde diaconale
  • a) Pré-server les structures de créativité
  • b) Pré-server les structures de capacité
  • c) Pré-server les structures de destinée
  • 6. La création et son secret du salut
  • 6.1 Topiques de la question du salut
  • 6.2 Le « logos » propre du cosmos
  • 6.3 Le « logos » sôtèriologikos de la création
  • 6.3.1 Logos salutaire d’espace
  • 6.3.2 Logos salutaire de pathétique
  • 6.3.3 Logos salutaire de capacités
  • 6.3.4 Logos salutaire de tiers a-thée
  • 6.3.5 Un logos de gloire
  • Conclusion
  • Conclusion de la première partie
  • DEUXIEME PARTIE. L’écologie intégrale du pape François dans Laudato si’
  • CHAPITRE III. Laudato si’, une encyclique sociale et « dogmatique »
  • 1. Laudato si’, un nouveau chapitre de l’enseignement social de l’Eglise
  • 1.1 L’Église et son traditionnel souci écologique
  • 1.2 La Doctrine sociale de l’Eglise
  • 1.2.1 Nature de la Doctrine sociale de l’Eglise
  • 1.2.2 Les principes de la Doctrine sociale de l’Eglise dans Laudato si’
  • a) Le bien commun
  • b) La destination universelle des biens
  • c) La subsidiarité
  • d) La participation
  • e) La solidarité
  • 1.3 Le Magistère écologique de l’Eglise
  • 1.3.1 Jean XXIII (1958–1963)
  • 1.3.2 Concile Vatican II (1962–1965)
  • 1.3.3 Paul VI (1963–1978)
  • 1.3.4 Jean-Paul II (1978–2005)
  • 1.3.5 Benoît XVI (2005–2013)
  • 1.3.6 Laudato si’, une nouvelle encyclique sociale
  • a) Voir
  • b) Juger
  • c) Agir
  • 2. Laudato si’, une encyclique dogmatique
  • 2.1 La dogmatique de l’acte créateur
  • 2.1.1 Les différents traités de la théologie dogmatique
  • 2.1.2 Le dogme de la création
  • a) Le concept de dogme
  • b) Le dogme de la création « ex-nihilo »
  • 2.2 La théologie de la création de Laudato si’
  • 2.3 Le dogme du salut du Cosmos dans Laudato si’
  • Conclusion
  • CHAPITRE IV. L’interdépendance des sujets et l’écologie intégrale
  • 1. La nouveauté de Laudato si’
  • 1.1 La collégialité
  • 1.2 L’interdisciplinarité
  • 1.3 L’œcuménisme et l’interreligieux
  • 1.4 L’interdépendance des sujets : « Tout est lié »
  • 2. L’écologie intégrale
  • 2.1 Pourquoi une écologie intégrale
  • 2.2 Le sens de l’écologie intégrale
  • 2.2.1 L’écologie environnementale
  • 2.2.2 L’écologie économique
  • 2.2.3 L’écologie sociale
  • 2.2.4 L’écologie culturelle
  • 2.2.5 L’écologie de la vie quotidienne
  • 3. La conversion écologique : Pour une nouvelle relation à la création
  • 3.1 Le concept de conversion écologique
  • 3.2 Changement de comportement et de style de vie
  • 3.2.1 Les attitudes à abandonner
  • a) Le consumérisme
  • b) L’indifférence
  • 3.2.2 Les attitudes à promouvoir
  • a) La sobriété
  • b) La fraternité et l’attention
  • 3.3 Les sacrements comme médiation de la vie surnaturelle
  • Conclusion
  • Conclusion deuxième partie
  • TROISIEME PARTIE. Pour une écologie théo-logique
  • CHAPITRE V. Adolphe Gesché et le pape François : Regards croisés et prolongement
  • 1. La théologie et le Magistère de l’Eglise
  • 1.1 La confiance en soi et la tendance au rejet du Magistère
  • 1.2 La responsabilité des théologiens dans l’Eglise
  • 1.3 Le rôle du Magistère
  • 1.4 Les éléments communs entre le Magistère et la théologie
  • 1.5 Promotion des relations et du dialogue entre le Magistère et les théologiens
  • 2. Regards croisés
  • 2.1 La crise cosmologique et la crise écologique
  • 2.2 Critique de l’anthropocentrisme
  • 2.3 La création comme « don » de Dieu
  • 2.4 Cosmologie d’habitation
  • 2.5 Le salut du cosmos
  • 2.6 La conversion écologique ou une nouvelle relation au cosmos
  • 3. Prolongement : L’écologie intégrale
  • Conclusion
  • CHAPITRE VI. Théologie et écologie
  • 1. Théologie de la création
  • 1.1 L’acte de la création
  • 1.1.1 Approche définitionnelle
  • a) Créer
  • b) Création
  • 1.1.2 Le monde comme création de Dieu
  • a) L’origine du monde
  • b) La dépendance du monde
  • 1.2 Le Dieu Créateur
  • 1.2.1 Le dynamisme de Dieu
  • 1.2.2 Dieu convivial
  • 1.3 L’homme dans la création
  • 1.3.1 L’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu
  • a) L’homme, un être libre
  • b) L’homme comme créateur
  • 1.3.2 L’homme comme gardien et intendant des autres créatures
  • 2. Ecologie
  • 2.1 L’écologie comme science
  • 2.1.1 L’objet de recherche de l’écologie
  • 2.1.2 Méthode de l’écologie scientifique
  • 2.2 L’homme dans la biosphère
  • 2.2.1 Rapport homme-nature au XIXe siècle
  • 2.2.2 Rapport homme-nature au XXe siècle
  • 2.3 L’écologisme comme une idéologie verte et un nouveau totalitarisme
  • 2.3.1 L’antispécisme de Peter Singer et les droits des animaux de Tom Regan
  • 2.3.2 L’écologie profonde d’Arne Næss et les droits de la nature
  • 3. La foi en la création et la crise écologique
  • 3.1 Les facteurs de la crise écologique
  • 3.1.1 La pollution
  • 3.1.2 L’extinction de la biodiversité
  • 3.1.3 L’épuisement des ressources naturelles
  • 3.2 L’apport de la foi dans le dialogue écologique
  • 3.3 Traits théologiques et spirituels de l’écologisme contemporain
  • 3.3.1 Réhabilitation de la cosmologie et retour timide de la théologie naturelle
  • 3.3.2 La redécouverte du caractère thérapeutique de la rencontre avec la nature
  • 3.3.3 L’urgence de la transformation personnelle ou la conversion écologique
  • Conclusion
  • CHAPITRE VII. Proposition d’une écologie théo-logique
  • 1. L’identité éco-théo-logique du monde
  • 1.1 Le monde comme création de Dieu
  • 1.2 Le monde comme notre maison commune
  • 2. Vers une nouvelle relation au cosmos
  • 2.1 Une nouvelle approche de la responsabilité humaine dans la crise écologique
  • 2.2 La priorité de la victime
  • 2.3 La foi chrétienne et la responsabilité humaine dans la sauve-garde de la création
  • 2.3.1 La gratitude
  • a) La création comme un pré-donné
  • b) La création comme un prêt
  • c) L’homme, intendant et hôte de la création
  • 2.3.2 La reconnaissance de la dignité unique de l’homme
  • a) L’appartenance à la communauté créationnelle : Être créature avec les autres créatures
  • b) Des différences bienfaisantes
  • c) La dignité particulière de l’homme et la valeur propre des autres créatures
  • 2.3.3 La sérénité : fondement pour une sauve-garde eschatologique
  • a) De la vision apocalyptique au salut
  • b) Dimensions cosmiques de la Mort et le Résurrection du Christ
  • c) La responsabilité humaine dans la sauve-garde de la maison commune
  • 3. La sauve-garde eucharistique de notre maison commune
  • 3.1 La liturgie de l’Eglise, jalon pour une nouvelle relation à la création
  • 3.2 L’Eucharistie et la sauve-garde de la création
  • 3.2.1 L’eucharistie, lieu de la célébration du salut du cosmos
  • 3.2.2 L’eucharistie comme mode d’être éco-théo-logique
  • a) Rendre grâce et louer
  • b) Donner du sens
  • c) Transformer
  • d) Offrir
  • e) Partager
  • Conclusion
  • Conclusion de la troisième partie
  • Conclusion Générale
  • Bibliographie
  • Index des auteurs cité
  • Index des citations bibliques
  • Ancien Testament
  • Nouveau Testament

Préface

Préfacer ce livre issu de la recherche doctorale menée par l’abbé Augustin Kalamba est pour moi un motif de joie et d’allégresse. Il s’agit de préfacer un travail scientifique digne puisqu’il a obtenu la plus haute qualification (Summa cum Laude) le jour de la Défense tant pour l’exposition que pour la profondeur de ses conclusions.

Ma joie se justifie en premier lieu, parce que ce livre représente la fin d’un cycle de recherche que l’auteur a commencé il y a près de cinq ans, depuis qu’il a quitté sa ville natale de Kananga, en République démocratique du Congo, pour venir à Séville poursuivre ses études de licence et de doctorat en théologie. Durant les années qu’il est avec nous, j’ai pu me rendre compte, en tant que pasteur de l’Eglise diocésaine de Séville, que l’abbé Augustin Kalamba est un prêtre intelligent qui a rapidement maîtrisé une nouvelle langue (l’espagnole), a su s’adapter facilement à une nouvelle culture, si différente de la congolaise, a fait preuve d’une loyauté exquise envers l’Église et a toujours été disposé à servir notre Archidiocèse où nous avions besoin de lui.

Deuxièmement, en ce qui me concerne de manière très personnelle, ma joie tient au fait que la Défense de la thèse doctorale de Monsieur l’abbé Augustin Kalamba est aussi un don de la Divine Providence, et est l’un des fruits de mon séjour au siège archiépiscopal de Séville. Avec l’aide de plusieurs de mes collaborateurs, j’ai fait beaucoup d’efforts pour que l’Archidiocèse de Séville puisse avoir sa propre Faculté de Théologie : la Faculté de Théologie San Isidoro de Séville. Ce sont des années au cours desquelles nous avons dû faire de gros efforts et déclencher de multiples batailles jusqu’à ce que nous puissions consolider une Faculté de théologie qui dispose aujourd’hui d’un magnifique bâtiment, équipé d’une bibliothèque très riche, d’un groupe de professeurs très compétents, d’un corps d’étudiants qui grandit chaque année et qui vient de vivre la Défense de la première Thèse de doctorat par l’abbé Augustin Kalamba. Cette Thèse de doctorat est pour moi l’indicateur de que le processus de création de la Faculté de Théologie de Séville a atteint sa plénitude. Ma présence à la soutenance de la Thèse était à deux jours de la prise de possession canonique de mon vénérable successeur sur le siège archiépiscopal de Séville, Monseigneur José Ángel Saiz Meneses. Donc, ce fut mon dernier acte public qui symbolisait l’aboutissement de nombreux efforts que j’ai fournis au cours des dernières années.

En effet, le travail qui est maintenant présenté au lecteur est hautement louable et a été minutieusement conçu. C’est une Thèse rigoureuse et scientifique ←19 | 20→qui possède ordre et originalité. Il s’agit d’un approfondissement du mémoire de licence que l’auteur avait présenté sur le sujet : De la création comme « don » à la responsabilité cosmologique. Une analyse critique de la pensée d’Adolphe Gesché. Cependant ce mémoire de licence n’est pas ici simplement repris dans un chapitre entier. Son inspiration et sa structure sont perceptibles, mais il est élargi, mieux élaboré et approfondi.

Certes, la structure tripartite de ce travail est l’une de ses grandes valeurs, comme l’a souligné le professeur Vicente Tur Palau, censeur de la Thèse, le jour de la soutenance. Dans une première partie consacrée à Adolphe Gesché, l’auteur parle de la vie et de l’intérêt théologique d’Adolphe Gesché et souligne la spécificité de ce théologien (penseur) de Louvain. La phénoménologie du don d’où part sa vision de la création et l’acceptation rare en théologie du défi de connaître les données actuelles de la science sur les origines du cosmos sont significatifs. De ces deux perspectives, avec l’auteur de Dieu pour penser, l’abbé professeur Augustin Kalamba présente une anthropologie de l’homme créé créateur dans la cosmo-logique de la création. Il met ainsi en évidence la création comme lieu de salut. Très intéressantes sont ses paroles sur l’identité théologique du cosmos qui fonde le discours sur le logos propre du cosmos.

Dans la seconde partie, consacré à l’encyclique du pape François sur l’écologie, reconnaissant que Laudato si’ est une encyclique sociale, l’auteur revendique son caractère dogmatique et soutient que son intuition majeure est l’écologie intégrale. Cette dernière dépasse l’horizon de l’éthique environnementale et de l’écologisme contemporain. Et le concept de conversion écologique marque la lecture de l’auteur qui relie son discours à la théologie spirituelle et sacramentelle.

La dernière partie, qui est la plus intéressante et originale, est le cœur de l’intuition de l’abbé professeur Augustin Kalamba. D’abord parce qu’il fait une comparaison inédite entre Adolphe Gesché et le pape François, ensuite une comparaison entre la théologie et l’écologie, et enfin y présente sa proposition d’une écologie théo-logique. Ici, ayant achevé son analyse minutieuse, l’auteur prend en considération les points de référence qui rendent possible une systématique théologique de l’écologie théo-logique : dans le Magistère de l’Église, dans la pensée contemporaine et dans sa propre vision phénoménologique et théologique. Il constate avec succès qu’une certaine interprétation des passages bibliques a pu se donner d’elle-même un manque de finesse écologique dans la chrétienté. Mais, et c’est un bon avertissement, on pourrait passer d’un anthropocentrisme à un biocentrisme qui pourrait être non moins brutal. En ce sens, il est très utile, avant la proposition de l’écologie théo-logique de l’abbé professeur Augustin Kalamba, la présentation et la distinction qu’il fait entre écologie et écologisme qui pointe vers une idéologie verte et un nouveau totalitarisme.←20 | 21→

Certes, l’écologie théo-logique qu’Augustin Kalamba propose à ses lecteurs est une écologie dans la logique de Dieu, le Créateur, c’est-à-dire un projet spirituel d’ordre supérieur qui aidera à surmonter la crise écologique actuelle. Ainsi, il met l’accent en premier lieu sur la découverte de l’identité éco-théologique du monde en tant que « création de Dieu » et notre « maison commune ». Cela nous permet de re-découvrir l’importance de l’art d’habiter, et de faire de la création un lieu de rencontre, d’accueil réciproque, et de solidarité. La création est ici comprise comme un don de Dieu dont nous devons prendre soin, que nous devons protéger et transformer de manière responsable, bref que nous devons sauve-garder. Cette action repose sur trois attitudes fondamentales que l’auteur qualifie de « vertus éco-théo-logiques » : la gratitude, la reconnaissance de la dignité unique de l’homme devant ses co-créatures et la sérénité.

Enfin, Je félicite l’abbé professeur Augustin Kalamba pour son travail scientifique. Je le remercie pour la confiance placée dans sa Faculté de Théologie San Isidoro de Séville, et j’espère que ses recherches se frayeront un chemin dans le panorama des études frontalières entre théologie et écologie. Je souhaite vivement que ce travail soit le début d’incursions académiques pour notre auteur et le début d’une carrière de chercheur fructueuse.

Avec mon affection et ma bénédiction !

+ Juan José Asenjo Pelegrina

Archevêque Emérite de Seville

Sigles et abréviations

Ac : Actes des Apôtres
Ap : Apocalypse
1Co : 1 Corinthiens
2Co : 2 Corinthiens
CDSE. : Compendium de la Doctrine sociale de l’Eglise
CEC. : Catéchisme de l’Eglise catholique
Cf. : conferatur
Col : Colossiens
DDB : Desclée de Brouwer
D.E.S. : Doctrine Sociale de l’Eglise
dir. : directeur
DS. : Henri Denzinger. Symboles et définitions de la foi catholique. Paris : Cerf, 1996.
DV. : Concile Œcuménique Vatican II. Constitution
dogmatique Dei Verbum (du 18 novembre 1965).
éd. : éditeur
Eph : Ephésiens
et al. : Et alii
Ex : Exode
Ga : Galates
Gn : Genèse
GS. : Concile Œcuménique Vatican II. Constitution
pastorale Gaudium et spes (du 7 décembre 1965).
He : Hebreux
Ibid. : Ibidem
Is : Isaïe
Jb : Job
Jc : Jacques
Jn : Jean
Jr : Jérémie
Lc : Luc
LG. : Concile Œcuménique Vatican II. Constitution
dogmatique Lumen Gentium (du 21 novembre 1964).
LS. : François, Lettre encyclique Laudato si’ (du 24 mai 2015).
2M : 2 Maccabées←23 | 24→
Mc : Marc
Mt : Mathieu
NRT : Nouvelle revue théologique
1P : 1 Pierre
2P : 2 Pierre
Ph : Philippiens
Pr : Proverbes
Ps : Psaume
PUF : Presses Universitaires de France
RPL : Revue philosophique de Louvain
RTL : Revue théologique de Louvain
RSR : Revue des sciences religieuses
RsR : Recherches de science religieuse
Si : Siracide
ss. : suivant
1Th : 1 Thessaloniciens
1Tm : 1 Timothée
UCL : Université Catholique de Louvain
Rm : Romains
NP : Ne Pereant1

Introduction

L’un des paradigmes dominants de notre génération épistémologique et l’une des caractéristiques majeures de notre âge herméneutique serait la question écologique. Voilà la première hypothèse sur laquelle reposera notre réflexion. Certes, la préoccupation écologique est le fruit d’une crise qui a pris des dimensions insoupçonnées et se caractérise par : la pollution des sols, de l’eau et de l’air par les déchets et gaz toxiques ; le réchauffement climatique qui entraine la destruction croissante de l’environnement naturel, l’extinction d’espèces animales et végétales, l’épuisement des ressources naturelles ; la détérioration de la qualité de la vie humaine et la dégradation sociale qui est à la base des inégalités ; le danger nucléaire, etc. Cette crise écologique est principalement due à l’essor de la technoscience. Elle oblige l’humanité à renouveler sa vision du monde et revoir le sens qu’il donne à l’existence.

Avec la crise écologique, nous assistons donc à une remise en question radicale de la modernité. Il ne s’agit pas seulement d’un passage à la postmodernité qui ne ferait qu’aller plus loin dans le nihilisme, mais le monde est contraint à un nouveau réalisme, une nouvelle étape de la pensée. Cela exige également un nouvel humanisme, qui ne sera plus seulement un humanisme parce qu’il aura renoncé à son anthropocentrisme. Cela suppose un changement de paradigme, une autre révolution copernicienne : non plus du géocentrisme à l’héliocentrisme, ni de l’anthropocentrisme au biocentrisme, mais de l’autonomie du sujet à l’interdépendance des créatures ; celles-ci ayant leur existence propre sans plus graviter autour du sujet. Bien sûr, la supériorité de l’homme comme être spirituel n’est pas contestable, mais elle est à considérer comme le motif d’une plus grande responsabilité envers la création et non d’une domination absolue. Il s’agit de « retrouver finalement une sagesse antique et médiévale que la modernité avait perdue sans même s’en rendre compte »,2 et voir dans le cosmos non plus un monde hostile à conquérir pour survivre, mais un monde fragile à protéger, pour mieux vivre.

Comment se définira la nouvelle période qui s’ouvre ? Il est difficile de le dire. Cependant, il nous semble presqu’évident que la question écologique en est sans doute l’une des clefs. Le philosophe et théologien congolais Kä Mana a eu des mots justes pour le dire : « La question écologique constitue une nouvelle grille ←25 | 26→de lecture du monde, le cadre d’ensemble à l’intérieur duquel nous devons penser, comprendre et transformer la réalité dans laquelle nous vivons. Autrement dit, l’écologie est l’œil avec lequel nous devrions désormais voir, l’oreille avec laquelle nous devrions entendre, l’esprit avec lequel nous devrions appréhender les choses, la perspective selon laquelle nous devrions situer tous les problèmes qui se posent à l’humanité ».3

Ainsi donc, nous sommes entrés dans une période passionnante où l’humanité se devra d’entrer dans une ère nouvelle de sagesse, non plus de conquête, mais de partage. C’est en tout cas une période de prise de conscience nouvelle de la globalité et du problème écologique devenu incontournable après deux siècles d’industrialisation et de consommation effrénée. Sans faire la tabula rasa du passé, il faut donc bâtir à présent sur un autre socle notre monde. Cette responsabilité n’est pas l’apanage de seuls scientifiques, le théologien a aussi un mot à dire parce que la crise écologique invite le christianisme et la théologie à requalifier le protocole de leurs discours et le contenu de leurs cahiers de charges car ils prennent conscience que les réponses classiques sont devenues fort étroites et manifestement insuffisantes.4

D’ailleurs, au regard de la situation actuelle, il semble que nous avons presque perdu toute sensibilité à la théologie de la création en oubliant que l’entièreté de ce monde est comme un livre écrit par le doigt de Dieu. Heureusement qu’après une lecture exclusivement scientifique du cosmos nous assistons de nos jours à un discours d’ordre pratique qui relève de la responsabilité éthique (précisément écologique). La requête la plus frappante est le retour en force de la nature dans la sensibilité et la pensée contemporaines. L’écologie exprime ainsi un besoin essentiel de l’homme auquel la théologie ne pourrait être indifférente. La science, la politique, la sociologie, l’anthropologie et la philosophie s’inscrivent dans la recherche d’une solution pour la sauvegarde de la planète car tous retrouvent dans la nature un paradigme perdu dont il est urgent que l’homme fasse reprise.5 De toutes parts on perçoit, plus ou moins confusément que l’homme risque de se détruire, et à tous égards, s’il ne respecte pas la nature.←26 | 27→

Quelle serait la contribution spécifiquement théologique à ce débat écologique ? Comment le discours théologique peut-il s’articuler face à ce nouveau besoin suscité par la crise écologique ? Le théologien congolais Roger Dikebelayi Maweja propose pour cela une « herméneutique théologique cosmothéandrique ».6 Dans ce contexte, le théologien du XXIe siècle ne serait-il pas sommé à renouveler la théologie de la création ? Si cette deuxième hypothèse de notre réflexion est vraie, comment s’y prendre ?

Certes, plusieurs théologiens ont réfléchi sur ce retour au thème de la création en théologie.7 Ils s’accordent sur l’urgence de changer de regard sur le cosmos pour le comprendre comme création et don. Ils invitent, à partir du mystère de l’incarnation, à entrer dans une nouvelle intelligence de l’univers qui, dans sa structure présente, a pour vocation de constituer le préalable de la manifestation eschatologique de Dieu et de la métamorphose du cosmos (les cieux nouveaux et la terre nouvelle) qui s’ensuivra. Est-ce que cette approche théologique habituelle intègre la notion de salut ? Il semble que trop peu. Voilà qui justifie notre choix en faveur d’Adolphe Gesché (avec sa cosmologie du salut) et du pape François (avec son écologie intégrale).←27 | 28→

Le premier, théologien belge dont les travaux théologiques ont exercé une grande influence à l’Université catholique de Louvain et dans tout l’Europe occidental, auteur de plusieurs ouvrages, Adolphe Gesché tenait à ce que sa théologie serve la vie ecclésiale et a eu l’audace de prononcer le nom de Dieu là où il y était quasiment exclu. Il insiste sur le fait que la théologie doit avoir Dieu pour thème central car, lorsqu’elle parle de Dieu, la théologie contribue à ouvrir aux hommes des voies de salut. Ainsi donc, son travail intellectuel était volontairement pastoral et n’avait de sens pour lui que comme ministère. Toute sa théologie est pastorale puisqu’orientée par le salut de l’homme. Il élabore ainsi une théologie à l’écoute du monde. Et dans cette écoute du monde, la question de la sauvegarde de la création ne lui a pas échappée.

En effet, dans l’effort de l’appropriation de la question écologique dans la théologie, l’apport d’Adolphe Gesché est séduisant. Partant du constat de l’effritement de la question cosmologique en théologie, il relève le défi en pensant le cosmos non seulement comme don de Dieu,8 demeure de l’homme (« oïkoumenè »9) et demeure du Logos divin (« oïkos toû Theou Logou »10), mais surtout comme lieu du salut. Il propose ainsi une « cosmologie du salut. »11 Voilà une approche originale que nous rencontrons trop peu exploitée par plusieurs autres théologiens. Aussi, vu que ces intuitions théologiques d’Adolphe Gesché courent le risque de rester l’apanage de l’école théologique belge, nous estimons qu’il est temps, avec le débat écologique d’élargir la sphère de l’influence de ce théologien de Louvain.

Le deuxième, premier pape issu du continent américain, premier pape jésuite, l’ex-archevêque de Buenos Aires est aussi le premier pape à avoir choisi le nom de François en hommage à saint François d’Assise, qui a voué sa vie à l’engament pour les pauvres. Ce choix a été révélateur du programme de son pontificat : une Eglise pauvre, pour les pauvres. Et parmi les pauvres, il place la terre qu’il qualifie, à la suite de saint François, de notre sœur et mère. Il est donc logique qu’après Lumen Fidei,12 il consacre une nouvelle encyclique à la question écologique.

Résumé des informations

Pages
368
Année
2022
ISBN (PDF)
9783631871614
ISBN (ePUB)
9783631871621
ISBN (Relié)
9783631871607
DOI
10.3726/b19340
Langue
français
Date de parution
2022 (Mars)
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2022. 368 p.

Notes biographiques

Augustin Kalamba Mupoyi (Auteur)

Augustin Kalamba Mupoyi est prêtre de l’Archidiocèse de Kananga, en République Démocratique du Congo depuis 2009. Premier Docteur en Théologie de la Faculté de Théologie San Isidoro de Séville, il y enseigne l’écologie théo-logique.

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Titre: La sauve-garde de la création selon Adolphe Gesché et <i>Laudato si‘<\i> du pape François
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