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Ressources minérales et transitions

Trajectoires politiques du sous-sol français au 21ème siècle

de Sébastien Chailleux (Éditeur de volume) Sylvain Le Berre (Éditeur de volume) Yann Gunzburger (Éditeur de volume)
©2022 Collections 410 Pages
Série: EcoPolis, Volume 38

Résumé

Près d’une décennie après l’annonce par Arnaud Montebourg d’un « renouveau minier
français », visant à redonner une souveraineté minérale à la France, aucune nouvelle mine n’a encore vu le jour en France métropolitaine. Au-delà de la formule, le renouveau minier s’est matérialisé par une dizaine de projets d’exploration du sous-sol métropolitain, qui ont tous finalement été abandonnés. Comment ce projet de renouveau minier a-t-il vu le jour et quelle en est la trajectoire politique ? Quelles coalitions d’acteurs se sont mobilisées sur ce sujet ? Dans quels espaces en ont-ils débattu ? Quels effets a-t-il eu, au-delà du constat d’échec partagé par une majorité d’acteurs ? Voici quelques questions auxquelles cet ouvrage collectif se propose de répondre. La séquence politique du renouveau minier cristallise des dynamiques complexes et imbriquées, mettant aux prises des acteurs variés : l’État, tout d’abord, qui cherche des solutions pour sécuriser l’approvisionnement national en matières premières minérales, des industriels, aux alliances mouvantes, cherchant à s’adapter à la nouvelle donne de la « transition énergétique », ou encore des mobilisations sociales, en
recomposition à cette période. On ne peut décrypter la tentative de renouveau minier qu’à partir d’une lecture en termes d’interdépendance entre ces acteurs, mais aussi en étudiant attentivement leurs contextes d'inscription : contexte économique global de super-cycle des matières premières, contexte géostratégique de sécurisation des approvisionnements pour la souveraineté économique, contexte de reconfiguration des réseaux d’acteurs et des politiques publiques liées aux ressources minières, contexte de politisations nouvelles du sous-sol sur fond de crise écologique et de montée en puissance de l’enjeu environnemental.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos des directeurs de la publication
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Remerciements
  • Préface
  • Table des matières
  • Liste des contributeurs
  • Introduction générale. La trajectoire du renouveau minier français à l’épreuve des contestations : configurations d’acteurs et arènes de débat (Sébastien Chailleux, Sylvain Le Berre et Yann Gunzburger)
  • Partie 1 Relancer les mines en France : incitations stratégiques et faiblesses structurelles
  • Chapitre 1 Régulation du capitalisme extractif et gouvernement des territoires miniers (Sébastien Chailleux et Sylvain Le Berre)
  • Chapitre 2 Renouveau des mines et réforme du code minier (Louis de Fontenelle)
  • Chapitre 3 Dans quelle mesure le sous-sol français peut-il répondre à nos besoins en matières premières minérales ? (Yann Gunzburger, Michel Jébrak, Eric Marcoux et Jack-Pierre Piguet)
  • Chapitre 4 Le recyclage peut-il être une alternative à l’extraction ? (Michel Cathelineau et Alexandre Chagnes)
  • Chapitre 5 La trajectoire de la politique minière française depuis 1990 : survivance et marginalisation du régime de justification des acteurs miniers (Sébastien Chailleux)
  • Chapitre 6 L’élite minière à l’origine du renouveau minier : entre multipositionnalités, imaginaires de l’espace et impératif étatique de gestion des ressources minérales (Pauline Massé)
  • Partie 2 La relance minière française entre territorialisation et contestations
  • Chapitre 7 L’impact des exploitations minières sur les écosystèmes aquatiques (Séverine Le Faucheur, CLaude Fortin et Peter G.C. Campbell)
  • Chapitre 8 De l’acceptabilité sociale à l’ancrage territorial : entre recherche de non-opposition et opportunité de co-construction pour les industries du sous-sol (Yann Beauloye et Sylvain Le Berre)
  • Chapitre 9 De quoi Montagne d’Or est-il le nom ? De l’opportunité d’un projet industriel à un problème politique insoluble (Flavie Retourney)
  • Chapitre 10 Territoires et prospection minières, l’impossible compromis ? Comparaison des conflits autour des permis exploratoires de Loc-Envel (Côtes-d’Armor) et La Fabrié (Tarn) (Damien Schrijen)
  • Chapitre 11 Les ressources de l’indépendance ? Vers une politique de la mise en valeur en Nouvelle-Calédonie-Kanaky (Brice Laurent et Julien Merlin)
  • Chapitre 12 Le « renouveau minier » français vu des abysses ultramarins (Pierre-Yves Le Meur et Valelia Muni Toke)
  • Conclusion générale. Du renouveau minier à un régime post-extraction ? (Sébastien Chailleux, Sylvain Le Berre et Yann Gunzburger)
  • Liste des Figures
  • Liste des Tableaux
  • Liste des Encadrés
  • Titres de la collection

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Liste des contributeurs

Sébastien Chailleux

UMR TREE, CNRS, Université de Pau et des Pays de l’Adour, 64012 Pau Cedex, France

Sylvain Le Berre

UR ETTIS, INRAE, F-33612 Cestas, France

Yann Gunzburger

UMR GEORESSOURCES, Université de Lorraine – CNRS, Mines Nancy, Campus Artem, BP 14234, 54042 Nancy Cedex, France

Louis de Fontenelle

UMR TREE, CNRS, Université de Pau et des Pays de l’Adour, 64012 Pau Cedex, France

Jack-Pierre Piguet

UMR GEORESSOURCES, Université de Lorraine – CNRS, Mines Nancy, Campus Artem, BP 14234, 54042 Nancy Cedex, France

Michel Jébrak

Sciences de la Terre et de l’atmosphère, Université du Québec à Montréal (UQAM), CP8888 centre-ville, Montréal (QC), H4A1N4, Canada

Eric Marcoux

UMR OSUC/ISTO, CNRS, Université d’Orléans, 1 A rue de la Férollerie, 45071, Orléans, France

Michel Cathelineau

UMR GEORESSOURCES, CNRS – Université de Lorraine, 54000 Nancy, France & LabEx Ressources21, 54000 Nancy, France←17 | 18→

Alexandre Chagnes

UMR GEORESSOURCES, Université de Lorraine – CNRS, 54000 Nancy, France & LabEx Ressources21, 54000 Nancy, France

Pauline Massé

UMR Environnement Ville Société, CNRS, Université Lumière Lyon 2, 69007, Lyon, France

Séverine Le Faucheur

UMR IPREM, CNRS Université de Pau et des Pays de l’Adour & Chaire ECOTOX E2S-UPPA-Total-Rio Tinto, 64012 Pau Cedex, France

Peter G.C. Campbell

Centre Eau Terre Environnement, Institut Nationale de la Recherche Scientifique, Québec, Canada

Claude Fortin

Centre Eau Terre Environnement, Institut Nationale de la Recherche Scientifique, Québec, Canada

Yann Beauloye

UMR LOTERR, Centre de recherche en géographie, Université de Lorraine, 54015 Nancy Cedex, France

Flavie Retourney

UMR TREE, Université de Pau et des Pays de l’Adour, 64012 Pau Cedex, France

Damien Schrijen

UMR ARENES (6051), Université de Rennes, 35000, Rennes, France

Brice Laurent

Centre de Sociologie de l’Innovation (CSI), i3 UMR CNRS, Mines ParisTech, PSL Research University, 75006 Paris, France

Julien Merlin

UMR Pacte, Université Grenoble Alpes, Sciences Po Grenoble, 38000 Grenoble, France←18 | 19→

Pierre-Yves Le Meur

UMR GRED, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), Département Sociétés, 34086 Montpellier, France

Valelia Muni Toke

UMR SEDYL et INALCO, CNRS, Institut de Recherche pour le Développement (IRD), 94801 Villejuif Cedex, France

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Introduction générale. La trajectoire du renouveau minier français à l’épreuve des contestations : configurations d’acteurs et arènes de débat

Sébastien Chailleux, Sylvain Le Berre et Yann Gunzburger

Avons-nous été proches de revivre l’épopée industrielle de la houille caractéristique des Trente Glorieuses ? Allions-nous ouvrir sur notre territoire des méga-mines, creusant le sol national de fosses de plusieurs kilomètres de long en large, telles qu’on peut en voir en Afrique, en Amérique latine, en Asie ou encore en Australie ? La France était-elle ainsi (et est-elle) en passe de devenir un nouveau front extractif pour les industries minières ? Près d’une décennie après le lancement des premières réflexions stratégiques sur la réexploration de notre sous-sol et de la fameuse formule d’Arnaud Montebourg du « renouveau minier français », aucune mine n’a pourtant – pour le moment – vu le jour en France métropolitaine. Comment comprendre la trajectoire de ce projet politique visant à redonner une souveraineté minérale à la France ? Comment ce projet a-t-il vu le jour ? Quelles coalitions d’acteurs se sont mobilisées sur ce sujet ? Dans quels espaces en ont-ils débattu ? Quels effets a-t-il eu au-delà du constat d’échec partagé par une majorité d’acteurs ? Voici quelques questions auxquelles cet ouvrage collectif se propose de répondre.

Le « renouveau minier » est d’abord une formule politique, celle d’Arnaud Montebourg entre 2012 et 2014, empreinte d’une certaine idée de la réindustrialisation que le ministre du Redressement productif incarne au début de la présidence Hollande. Lorsqu’en octobre 2012, à l’issue d’une réunion du Comité pour les métaux stratégiques (COMES), Arnaud Montebourg annonce le lancement d’une stratégie nationale de ←21 | 22→« renouveau minier », son ambition est de donner de la France l’image d’« un pays dans lequel on peut exploiter des mines », pour « servir l’intérêt stratégique de la nation »1. La relance de l’exploitation minière sur le sol national est présentée en deux étapes : d’abord actualiser l’inventaire des ressources du sous-sol français, ensuite réformer le code minier2. Suivant des dynamiques européennes plus larges qui précèdent les déclarations de Montebourg (Buu-Sao, 2021), plus d’une dizaine de permis exclusifs de recherche (PER) minière sont octroyés entre 2010 et 2019, ce qui constitue une révolution pour le sous-sol métropolitain qui n’avait connu aucune demande de PER depuis le début des années 1990. Rapidement, ces permis sont l’objet de contestations locales, souvent avant même la demande d’autorisation de travaux3. C’est d’abord le permis de Tennie, attribué à Variscan Mines dans la Sarthe, qui est contesté dès 2013, puis celui de Villeranges dans la Creuse, octroyé à Cominor en 2014, et enfin, et surtout, les trois permis bretons de Silfiac, Merléac et Loc Envel, ainsi que celui de Couflens dans l’Ariège, également concédés à Variscan Mines en 2015. Ces permis de recherche concentrent les oppositions, conduisant, à partir de 2017, à l’abandon ou au retrait des permis octroyés. Hors métropole, c’est surtout le projet Montagne d’Or en Guyane qui génère des contestations à partir de 2014 jusqu’à son abandon « en l’état » en 2019 ; mais l’exploration minière sous-marine dans le Pacifique déclenche aussi des controverses, de même que l’exploitation, pourtant historique, du nickel en Nouvelle-Calédonie qui est mise au cœur des dynamiques indépendantistes. Si ces territoires ultramarins ne relèvent pas à proprement parler de la politique de renouveau minier, les réactions engendrées par les projets miniers rejoignent sur de nombreux points les préoccupations des acteurs ←22 | 23→métropolitains. D’autres permis métropolitains sont moins contestés mais se voient abandonnés par leurs détenteurs pour une série de raisons techniques et financières, comme ceux de Saint-Pierre dans le Maine-et-Loire, de Beaulieu en Loire-Atlantique (Variscan), celui de Kanbo dans les Pyrénées-Atlantiques (Sud Mine) ou de Vendrennes en Vendée (SGZ France). La séquence du renouveau minier métropolitain est donc brève et semble se conclure en quelques années par l’échec de l’ambition politique initiée par Montebourg.

Le renouveau minier est donc, a posteriori, une dizaine de projets d’exploration du sous-sol métropolitain, qui ont tous depuis été abandonnés, ce qui fait dire à nombre de ses commentateurs qu’il s’agit au mieux d’une politique de papier, au pire d’un échec. À première vue, le renouveau minier ressemble à une séquence assez brève, qui débute avec Montebourg et se clôt avec l’abandon des permis entre 2017 et 2019. Mais à mieux y regarder, cette séquence est bien moins linéaire qu’il n’y paraît, et se révèle cristalliser des dynamiques complexes et imbriquées : de l’État, tout d’abord, cherchant des solutions pour sécuriser l’approvisionnement en matières premières de l’économie nationale, mais aussi des industries aux stratégies et aux alliances mouvantes, cherchant à s’adapter à la nouvelle donne de la « transition énergétique », ou encore des mobilisations sociales et des controverses politiques, économiques et environnementales, en recomposition dans une période caractérisée par des injonctions à la transition (numérique, énergétique, environnementale ou encore écologique).

Une lecture simple en termes d’échec reviendrait donc à ne concevoir ce moment politique qu’à travers sa définition institutionnelle, sans en comprendre ni l’interdépendance des dimensions économiques, géostratégiques et politiques, ni l’enchevêtrement des configurations institutionnelles et territoriales. L’ambition de cet ouvrage collectif est précisément de suivre les trajectoires, complexes et multiples, suivies par cette annonce politique dans des espaces hétérogènes.

Les différentes contributions développent trois dimensions majeures que donne à voir cette séquence du renouveau minier. Cet échec politique met en lumière tout d’abord la reconfiguration des coalitions et des stratégies industrielles avec d’une part la déroute d’une coalition autrefois dominante, celle du Corps des mines, et d’autre part les difficultés à relocaliser non seulement une mine mais l’ensemble d’une filière de transformation. Autrement dit, l’échec de la relance minière souligne les difficultés d’une réindustrialisation qui n’est pas pensée ←23 | 24→dans la globalité des chaines de valeur et, à l’inverse, l’ancrage global des filières industrielles françaises qui ne considèrent plus la France comme un lieu de production. De manière similaire, cet échec questionne la justification publique d’une mine « responsable » et pointe l’incapacité de l’État à soutenir une politique industrielle et un cadre règlementaire stable permettant de matérialiser une volonté politique. L’ouvrage souligne ensuite que les projets miniers actualisent un problème ancien de « territorialisation » puisqu’une majorité de ces projets a été rejetée sur la base d’une inadéquation avec les territoires. Loin de s’expliquer par un simple problème d’acceptabilité sociale, ces oppositions sont révélatrices d’un malaise profond au sein d’une société elle aussi en transition dans laquelle aucun « grand récit » ne vient donner du sens et de la cohérence à un ensemble de décisions et de projets. L’ouvrage brosse enfin le portrait d’une France de la post-extraction qui rejette une relance minière tout en accentuant ses importations de matières premières minérales. Pour autant, la distinction entre la métropole et l’outre-mer mérite d’être soulignée puisque, si la première semble rétive aux projets miniers, la situation dans les territoires d’outre-mer diffère grandement à la fois en termes de soutien politique et de potentiels gisements.

Les contributions rassemblées dans cet ouvrage viennent compléter la littérature récente sur les projets miniers en France et prolonger un effort de mise en commun et de débat collectif sur ce thème. Soulignons d’abord, deux grands types de publications sur les enjeux miniers avec d’un côté plusieurs dossiers des Annales des Mines sur les métaux stratégiques (Christmann & Jégourel, 2020), notamment sous-marins (Jacq, 2017), dont le ton est plutôt optimiste et vise à insister sur l’opportunité économique – idée que l’on retrouve dans l’ouvrage de Pitron (2018), et d’un autre côté, une littérature militante issue de la critique anti-extractiviste, dont le ton se fait plus pessimiste voire catastrophiste (Bednik, 2016 ; Brier & Desquesnes, 2018). À rebours de ces démarches normatives, la littérature académique encore éparse sur le sujet s’attache à développer deux axes principaux autour des stratégies industrielles et des trajectoires socio-environnementales des projets. On retrouve ainsi un dossier paru dans la revue Gouvernance sur la gouvernance des projets extractifs en Europe (Le Berre & Chailleux, 2021) qui met en lumière les stratégies européennes des promoteurs de la mine responsable (Buu-Sao, 2021), la contradiction des promesses faites aux acteurs des territoires et aux marchés par les compagnies junior d’exploration (Laurent & Merlin, 2021), l’échec du discours sur le renouveau minier dans la presse ←24 | 25→écrite française (Chailleux, 2021), les instruments d’action publique mis en place par les promoteurs de la relance minière afin de répondre aux critiques adressées à cette politique, et plus largement à l’industrie minière (Massé, 2021), ainsi que la convergence des luttes en Bretagne entre l’exploration minière à terre et l’exploitation marine des sables coquillés (Schrijen, 2021).

Prenant une perspective plus internationale, le dossier spécial de la revue The Extractive Industries and Society, coordonné par Gunzburger et al. (2021), introduit la notion de trajectoire socio-environnementale des territoires miniers (Rossi et al., 2021) pour aborder, dans le cas de la France, les différents stades de la vie d’une mine, de l’exploration à l’après-mine (Camizuli et al. (2021) pour ce qui concerne les Alpes du Nord), voire jusqu’à la ré-exploration de certains sites, tels que ceux de Villeranges (Creuse), de Couflens (Ariège) et de Tennie (Sarthe) (Balan, 2021), du Nord de la Moselle pour ce qui concerne le gaz contenu dans les veines de charbon (Beauloye et al., 2021). Le cas de la Guyane y est également évoqué, à la fois par le prisme du déplacement progressif de la « frontière extractive » et par celui de l’analyse des risques à l’échelle territoriale (Jébrak et al., 2021 ; Scammacca et al., 2021), de même que celui de la Nouvelle-Calédonie (Le Meur et al., 2021 ; Richard et al., 2021).

La recherche française sur les mines est plutôt foisonnante ces dernières années et l’objectif de l’ouvrage est de mettre en forme les discussions engagées avec les contributeurs de ce projet éditorial lors de différents événements scientifiques depuis 2019. Tout comme le dossier de The Extractive Industries and Society, cet ouvrage poursuit un objectif interdisciplinaire et tente de mettre en discussion des approches de la mine qui se parlent peu comme, notamment, les géosciences, la biogéochimie et l’écotoxicologie, et les sciences humaines et sociales. À l’image du dossier de Gouvernance, cet ouvrage insiste aussi sur les formes de gouvernement des ressources minérales et des territoires. Toutefois, les contributions originales rassemblées ici se distinguent des travaux cités puisqu’il s’agit de focaliser l’analyse uniquement sur des cas miniers français et de produire un panorama, le plus large possible, des enjeux miniers en France au 21ème siècle.

Cette introduction générale se déroule en deux temps. Tout d’abord, nous brossons le paysage géostratégique, économique, politique et social qui constitue l’environnement complexe et multidimensionnel du renouveau minier et de sa contestation. Ensuite, nous présentons les ←25 | 26→enjeux d’un projet scientifique collectif pluridisciplinaire pour l’analyse d’une telle situation complexe, et discutons pour finir des questions de départ et des concepts centraux qui permettront au lecteur d’articuler les différentes contributions entre elles.

Un contexte multifactoriel

Le déploiement de cette stratégie de renouveau minier répond à un contexte multifactoriel et multidimensionnel, qu’on ne peut décrypter qu’à partir d’une lecture en termes d’interdépendance entre des contextes divers qui marquent les logiques différenciées des acteurs mobilisés pour ou contre les projets miniers. Loin de constituer une boite noire de l’analyse, ces contextes structurent des systèmes d’opportunités et de contraintes, dans lesquels le projet politique de réouverture des mines en France va évoluer. Autrement dit, ces contextes forment autant de « milieux » dans lesquels peut être suivie la trajectoire du renouveau minier à travers les configurations d’acteurs qui y évoluent, les régimes de vérité qui y dominent et le type d’épreuves qu’on y rencontre.

Une crise écologique : des contraintes environnementales plus fortes

La relance minière s’opère tout d’abord dans un contexte global de montée des préoccupations environnementales et climatiques. Les années 1980–1990 voient s’affirmer des ambitions internationales sur de nombreux enjeux environnementaux : la biodiversité (Convention sur la diversité biologique à Rio en 1992 et Accords de Nagoya en 2012 qui permettent la création de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et des services écosystémiques (IPBES)), la qualité de l’eau (Directive-cadre sur l’eau de l’Union Européenne en 2000) et de l’air (Convention de Montréal sur l’ozone en 1987 et de Genève en 1979 sur les pollutions atmosphériques) ou encore la lutte contre le réchauffement climatique (Protocole de Kyoto en 1997, puis l’Accord de Paris en 2015). L’ensemble de ces accords est transposé dans le droit communautaire et français, non sans heurts avec les activités économiques, et vient former un cadre juridique contraignant qui renforce les obligations d’évaluation d’impacts, notamment pour des activités polluantes comme celles des mines. Au-delà des régulations environnementales, c’est aussi l’information et la participation du public qui sont valorisées (Loi Barnier ←26 | 27→de 1995 introduisant la procédure du débat public, Convention d’Aarhus en 1998). Mais au-delà des contraintes règlementaires, l’« écologie » se popularise, les valeurs qui l’accompagnent se diffusent, tant dans les mobilisations sociales (Martin, 2020), les processus de médiatisation (Comby, 2009), les politiques publiques (Mathieu, 2015), qu’au sein des partis politiques (Gougou & Persico, 2019 ; Persico, 2015). Le renouveau minier émerge donc dans un contexte où les enjeux environnementaux doivent être pris en compte pour tout un ensemble de projets économiques et d’aménagement du territoire.

Résumé des informations

Pages
410
Année
2022
ISBN (PDF)
9782875745347
ISBN (ePUB)
9782875745354
ISBN (Broché)
9782875745330
DOI
10.3726/b19795
Langue
français
Date de parution
2022 (Septembre)
Published
Bruxelles, Berlin, Bern, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2022. 410 p., 13 ill. en couleurs, 4 ill. n/b, 8 tabl.

Notes biographiques

Sébastien Chailleux (Éditeur de volume) Sylvain Le Berre (Éditeur de volume) Yann Gunzburger (Éditeur de volume)

Sébastien Chailleux est maître de conférences en science politique à Sciences Po Bordeaux (Centre Emile Durkheim), spécialiste des industries du sous-sol et de la transition énergétique ; ses recherches portent en particulier sur les hydrocarbures, le stockage géologique decarbo ne et les mines en France. Sylvain Le Berre est chargé de recherche en science politique à INRAE (UR ETTIS) ; ses recherches portent sur les trajectoires socio-politiques des matières premières (de la ressource au déchet), sur les politiques publiques liées aux ressources, et les stratégies territoriales des industries du sous-sol. Yann Gunzburger est professeur en géosciences appliquées à l’Université de Lorraine (UMR GeoRessources et Mines Nancy). Ingénieur de formation, il s’intéresse aux impacts géotechniques, environnementaux et socio-économiques des activités d’aménagement et d’exploitation du sol et du sous-sol, et aux liens entre ces activités et leur territoire d’implantation.

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