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Hétérogénéité linguistique / Linguistic Heterogeneity

Questions de méthodologie, outils d’analyse, et contextualisation / Questions of Methodology, Analysis Tools and Contextualization

by Ludovic Ibarrondo (Volume editor) Jürgen Erfurt (Volume editor)
©2023 Edited Collection 246 Pages

Summary

L’objectif principal de ce volume est de rassembler les expériences d’un grand nombre de projets de doctorat et de post-doctorat en cours ou récemment achevés dans des contextes de plurilinguisme et d’hétérogénéité, en mettant l’accent en particulier sur la dimension méthodologique de ces recherches.
The volume is composed of 12 studies focusing on the key questions related to the methods in research on pluri- and multilingualism. The studies combine research on pluri- and multilingualism experiencing linguistic heterogeneity. This is the normal case today both in migration societies and in societies that have been shaped by colonial experiences till date.

Table Of Contents

  • Cover
  • Title
  • Copyright
  • About the editors
  • About the book
  • This eBook can be cited
  • Table des Matières / Table of Contents
  • Introduction
  • Part I Designing qualitative research
  • The unit of analysis in bilingual classroom research (Antoinette Camilleri Grima)
  • On role plurality and collaboration (Mona Stierwald)
  • Part II Postures des chercheur.e.s et considérations éthiques
  • Ethnographer as learner, ethnographer as teacher: The potentials and pitfalls of praxis in the field (Anastasia Badder)
  • Aléas d’une recherche sociolinguistique en contexte transcolonial. Processus rhizomatique et posture du chercheur (Pascale Prax-Dubois)
  • Le statut de chercheur (natif) comme entrave ? Les défis d’une recherche de terrain (Atobé Kouadio)
  • Dynamic encounters in sociolinguistic enquiry: Meeting participants, reflexivity and anonymity (Bernardino Tavares)
  • Dispositifs de recherche interventionnistes en Didactique des langues et des cultures (DDLC) : réflexion éthique et scientifique autour de la posture du chercheur (Julia Putsche)
  • Le paradoxe dans le discours des participants plurilingues : un défi d’analyse des données empiriques (Yan-Zhen Chen)
  • Part III Annotations, transcriptions and tools : de la cueillette des données à leur analyse
  • Les enjeux de la transcription dans l’étude du plurilinguisme des Congolais·e·s en Lorraine (Peter Reimer)
  • Recording others (Constanze Tress)
  • De la transcription à l’analyse des processus d’écriture interactive et plurilingue (Mona Stierwald)
  • Autrices et auteurs
  • Index
  • Series Index

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Ludovic Ibarrondo/Jürgen Erfurt

Introduction

1. Sous le titre « Hétérogénéité linguistique : questions de méthodologie, outils d’analyses et contextualisation / Linguistic heterogeneity : questions of methodology, analysis tools and contextualization », le présent ouvrage rassemble onze études en anglais et en français. Le dénominateur commun de ces études est, d’une part, qu’elles s’attachent à documenter différents aspects et manifestations de l’hétérogénéité linguistique, et d’autre part, qu’elles se sont fixées pour objectif de discuter des méthodes de recherche, et des choix méthodologiques qui ont été retenus pour à la fois travailler sur le sujet de l’hétérogénéité linguistique, mais également dans des conditions d’hétérogénéité linguistique.

La notion d’hétérogénéité joue depuis longtemps un rôle central dans des disciplines telles que les sciences de l’éducation, la recherche sur le genre, ou encore les sciences politiques. Pour ces disciplines, la question de la gestion de la diversité et/ou de la différence s’organisent autour de critères, tels que notamment le sexe, l’âge, la performance, l’origine, le statut économique, mais également lorsqu’il s’agit de mettre en perspective ou de comparer la construction ou la perception de différents groupes, autour de principes tels que l’homogénéité et l’hétérogénéité. La formulation de telles oppositions a pour effet de poser les problématiques qui s’y rattachent, en termes de pouvoir et d’intérêts : qui se trouve dans une position de dominance ? A qui profite le choix de formuler l’existence ou le bien-fondé de certains critères, de poser le postulat de certains principes ? Dans le champ discursif de la linguistique, les discussions soulevées autour du sujet de l’hétérogénéité sont principalement liées au phénomène du plurilinguisme, aux pratiques plurilingues, aux thématiques de l’inégalité linguistique (voir entre autres Martin-Jones et al., 2012), à l’apprentissage en plusieurs langues (voir entre autres Hélot, 2012), ou encore au rapport entre plurilinguisme et migration (voir entre autres Maas, 2008). Le terme d’hétéroglossie, qui remonte à Mikhaïl Bakhtine, est également fréquemment utilisé comme synonyme d’hétérogénéité linguistique (Blackledge & Creese, 2014 ; Busch, 2014), mettant en avant une perspective tantôt hétéroglossique, tantôt monoglossique, ou différenciant le caractère monolingue d’une part et multi- et/ou plurilingue d’autre part. C’est dans cette continuité que s’inscrivent également les contributions du présent volume.

←7 | 8→Les études présentées dans ce volume couvrent des terrains de recherche situés – par ordre alphabétique – en Allemagne, au Cap-Vert, en Côte d’Ivoire, en France et dans son département d’Outre-mer La Réunion, au Luxembourg et à Malte –, c’est-à-dire dans des pays et des espaces géopolitiques, dans lesquels le plurilinguisme et la migration sont largement répandus, encore à l’origine de conflits linguistiques, et demeurent donc des thèmes centraux de leurs politiques linguistiques et éducatives respectives. Le pluri-/multilinguisme et l’hétérogénéité linguistique dans les institutions, telles que l’école et l’université, mais aussi au sein et entre les communautés de la diaspora et les sociétés majoritaires dans ces pays, constituent donc un autre élément de liaison entre les différentes études de cas. La question centrale demeure toutefois de savoir comment concevoir la recherche linguistique sur ces terrains. Il ne s’agit donc pas moins que de la question des méthodes de recherche. Cette question se pose de manière incontournable et récurrente à tous les chercheurs et chercheuses. Elle constitue un enjeu particulièrement important dans les phases de qualification scientifique de projets de doctorat, de post-doctorat et d’habilitation, qui présentent à leur tour une dimension transgénérationnelle dans le contexte de l’encadrement de ces projets, par des personnes plus expérimentées sur le plan scientifique. Elle implique également une dimension d’imbrication et de mise en contact des acteurs concernés dans des réseaux scientifiques. Toutes les études présentées dans ce volume sont issues d’un tel réseau européen. Pendant une période de huit ans, entre 2012 et 2020, plusieurs groupes de recherche des universités de Francfort-sur-le-Main, de Strasbourg, du Luxembourg et, plus tard, de l’Université Pablo de Olavide de Séville et de l’Université de Malte ont collaboré sur des questions relatives au plurilinguisme, avec le soutien financier de l’Université franco-allemande (UFA). Ce réseau de promotion et d’encadrement des jeunes chercheurs et chercheuses a été fondé par Jürgen Erfurt (Francfort-sur-le-Main) et Christine Hélot (Strasbourg). D’autres équipes de recherche de Tours et de Rouen ont également participé à ces échanges. Les Journées d’études annuelles découlant de ces collaborations se sont concentrées sur la thématique des méthodes de recherche, dédiées spécifiquement à étudier les pratiques plurilingues, l’apprentissage plurilingue, le pluri-/multilinguisme dans la sphère familiale, à l’école maternelle, à l’école primaire et secondaire, à l’université, mais aussi le multi-/plurilinguisme dans les espaces sociaux, dans le milieu professionnel, et dans le contexte de la migration. A titre d’exemple, citons les intitulés de certaines de ces Journées d’études :←8 | 9→

  • - 27–29 mars 2015: Francfort-sur-le-Main : Multilinguisme, migration, minorisation : méthodologies en question
  • - 17–19 novembre 2016 : Strasbourg : L’éducation bi/plurilingue pour tous : enjeux politiques, sociaux et éducatifs
  • - 23–25 juin 2017 : Malte : Young Researchers Meeting in Malta, séminaire doctoral sur le multilinguisme
  • - 29–30 juin 2018 : Strasbourg : L’hétérogénéité linguistique : Questions de méthodologie, outils d’analyses et contextualisation
  • - 1–2 mars 2019 : Séville : Terrains et acteurs.

Dans le cadre du dernier projet financé par l’UFA « L’hétérogénéité linguistique à travers le prisme des représentations méthodologiques et interculturelles » (2018–2020), un colloque a eu lieu du 27 au 29 février 2020 à Francfort-sur-le-Main, la rencontre finale du réseau, qui a pris la forme d’un colloque international s’intitulant « Plurilinguisme et transculturalité dans les espaces francophones : des modèles théoriques à la négociation des pratiques / Mehrsprachigkeit und Transkulturalität in frankophonen Räumen : Modelle, Prozesse und Praktiken ».1 Dans ce réseau ont été réalisés jusqu’à présent 15 thèses de doctorat, dont un grand nombre a pris la forme de thèses de cotutelle entre les universités participantes, et a également donné lieu à de nombreuses publications d’ouvrages sous forme de monographies (Leroy 2019 ; Streb 2016 ; Weirich 2018), d’ouvrages collectifs (Budach et al., 2019; Erfurt, Leroy & Stierwald, 2022 ; Erfurt & Reimer, 2021 ; Erfurt, Weirich et Caporal-Ebersold, 2018 ; Jiménez-Salcedo, Hélot et Camilleri, 2020 ; Hélot & Erfurt, 2016 ; Horner & Saint-Georges, Weber, 2014), et de projets postdoctoraux.

2.Le présent volume met en particulier l’accent sur les aspects méthodologiques qui jalonnent le cheminement nécessaire au développement d’un travail empirique, visant à documenter des situations marquées par le plurilinguisme ou certaines formes d’hétérogénéité linguistique, et à rendre compte des pratiques langagières spécifiques aux acteurs bi-plurilingues évoluant dans ces contextes.

L’homogénéité a longtemps constitué une trame, et une notion centrale à l’interprétation de divers faits de société, et ce dans de nombreux domaines de spécialité évoqués précédemment. Une des ramifications de cette conception au niveau linguistique a été de discuter et d’expliquer les dynamiques régissant l’usage ←9 | 10→des langues, et leur dimension identitaire, en se cantonnant à une nomenclature imprégnée d’un habitus monolingue très marqué, conception dans laquelle le morcellement, et la pluralité tendent à n’apparaître que très partiellement. L’histoire des nationalismes en Europe, la constitution d’Etats-nations sont tout autant de traces que l’un des ressorts de cette conceptualisation unifiante et unifiée, dans laquelle la pluralité linguistique et la prise en compte de son existence chez les locuteurs devaient être minimisées, et étaient souvent évoquées comme un paramètre perturbateur, et un phénomène faisant figure d’exception.

Tout au long du XXème siècle, la mobilité croissante de la population, due à diverses causes (monde du travail, guerres, persécutions, fuites et exil, de nombreuses formes de migration), est fortement venue chambouler cette cartographie, dans laquelle les aires géographiques se superposaient supposément à des aires culturelles et linguistiques bien délimitées. Ce changement, mis initialement en évidence à travers l’observation des phénomènes d’urbanisation (voir entre autres Calvet, 1994), a eu pour effet de ne plus seulement rendre compte uniquement des dominations et rapports de force qui s’exerçaient entre différents groupes, et dont la gestion des langues constituait un marqueur significatif, mais de transposer l’attention des observateurs sur l’expérience faite de cette mobilité, et par extension sur l’exploitation des ressources individuelles que celle-ci mobilisait à travers les différentes trajectoires biographiques qui la composaient (Blommaert & Backus, 2013).

La notion d’hétérogénéité linguistique est donc étroitement liée à l’existence préalable d’un plurilinguisme (une constellation de langues ou de variétés linguistiques), à son développement, à son expression, et à son utilisation. Cette conception amène avec elle, en se plaçant dans la perspective du sujet plurilingue, une manière nouvelle d’appréhender le rapport aux et entre les langues. Elle vient rompre avec l’image d’Epinal du locuteur idéal monolingue, et remet en question une conception dans laquelle les langues ont longtemps été considérées et décrites comme étant des systèmes linguistiques clos, et des entités bien délimitées, isolables, stables et homogènes, et vient de ce fait interroger de façon critique les questions de norme(s), d’interprétation(s) et de pluralité des sens, plaçant l’individu au cœur de ces problématiques.

Ce nouvel éclairage sur le plurilinguisme a permis d’initier une réflexion renouvelée sur l’émergence de cette hétérogénéité linguistique, avec une prise en compte assumée de la croissance des phénomènes de diversification et de migrations au sein des sociétés mondialisées actuelles, mais aussi de la signification de leur prise en compte pour l’individu, et plus globalement pour la société. Divers concepts ont depuis émergé ou été remaniés pour rendre compte et thématiser ces dynamiques, à l’instar des notions de superdiversité (Vertovec, 2007 ; Arnaut et al., 2015 ; ←10 | 11→Budach & Saint-Georges, 2017), de répertoire (Blommaert & Backus, 2013 ; Gumperz, 1989), de translanguaging (García, 2009 ; Lewis, Jones & Baker, 2012) ou encore de transculturalité (Erfurt, Leroy & Stierwald, 2022), dont l’élaboration tente pour cette dernière d’initier un dialogue interdisciplinaire, et de faire converger la multiplicité des champs d’analyse pour légitimer cet état de fait, et dépasser les heurts et limitations posées par des cadres d’analyse, qui jusqu’à récemment n’accordaient qu’une place marginale à ces phénomènes d’hétérogénéité linguistique et culturelle.

Comme le reflètent plusieurs contributions de ce volume, le concept d’hétérogénéité linguistique a trouvé une forte résonance dans le contexte éducatif, à la fois à travers les différentes conceptions didactiques de l’enseignement et de l’apprentissage des langues à l’école (Hélot & Erfurt, 2016), mais aussi à travers les réflexions qui ont été menées afin de démystifier la gestion de l’hétérogénéité des ressources linguistiques des élèves, en en faisant à la fois un objet de réflexion devant être réfléchi (Castellotti, 2017 ; Moore & Castellotti, 2008 ; Moore & Castellotti, 2011 ; García et al., 2007), et une pratique devant être thématisée sur le plan didactique (Castellotti, Coste & Duverger, 2008 ; Alby & Launey, 2007). Dès les années 1990, le Conseil de l’Europe a œuvré à mettre en avant des recherches dans le domaine de l’enseignement et de l’apprentissage des langues, avec à la clef la construction d’une posture nouvelle en faveur de politiques linguistiques favorables à la reconnaissance du multilinguisme des sociétés, et à la prise en compte du plurilinguisme des individus. La Chartre des langues régionales et minoritaires, ou encore le Cadre européen commun de référence dans le domaine de l’enseignement (Coste, Moore & Zarate, 1997 ; Coste, 2021) sont l’exemple de travaux prenant essence dans ces recherches, revendiquant une visibilité plus assumée de cette diversité, et posant les premiers jalons significatifs d’une prise en compte de cette hétérogénéité linguistique et culturelle, et d’un questionnement des positionnements dominants.

Details

Pages
246
Year
2023
ISBN (PDF)
9783631891636
ISBN (ePUB)
9783631891643
ISBN (Hardcover)
9783631891346
DOI
10.3726/b20275
Language
English
Publication date
2023 (March)
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2023. 246 pp., 13 fig. b/w, 3 tables.

Biographical notes

Ludovic Ibarrondo (Volume editor) Jürgen Erfurt (Volume editor)

Ludovic Ibarrondo est maître de conférences à l’Institut d’études romanes de l’Université de Potsdam. Ses domaines de spécialité portent sur l’étude du plurilinguisme et la didactique des langues. Ludovic Ibarrondo is a lecturer and researcher at the Institute for Romance Studies at the University of Potsdam. His areas of specialisation and research interests include plurilingualism and language didactics. Jürgen Erfurt est professeur émérite de linguistique romane à l’Université de Francfort-sur-le Main. Ses domaines de recherche sont le plurilinguisme, la francophonie et la transculturalité. Jürgen Erfurt is Professor Emeritus of Romance Linguistics at the University of Frankfurt/Main. His research focuses on pluri-/multilingualism, francophonie and transculturality.

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