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Les formes verbales surcomposées en français

de Marine Borel (Auteur)
©2024 Monographies 622 Pages
Open Access
Série: Sciences pour la communication, Volume 136

Résumé

Ce livre porte sur les formes verbales surcomposées en français. Il s’intéresse à la manière dont elles ont été évaluées par les grammairiens, qui, depuis le milieu du XVIe siècle, les ont tantôt louées pour leur contribution à la richesse et à la clarté de la langue française, tantôt condamnées pour leur redondance ou leur inélégance supposées. Il présente et discute les analyses, les hypothèses et les interprétations des linguistes qui s’y sont intéressés depuis l’étude pionnière de Lucien Foulet (1925). Mais surtout, il propose une analyse sémantique et morphologique détaillée de l’ensemble des formes attestées, des plus répandues (j’ai eu fait, j’avais eu fait, etc.) aux plus « exotiques » (j’eus eu fait, que j’eusse eu fait, etc.). Basée sur une collection de données authentiques d’une ampleur inédite (près de 7500 exemples, écrits et oraux, produits entre le XIIe siècle et le XXIe siècle), cette publication constitue la référence actuelle sur les surcomposés.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • TABLE DES MATIÈRES
  • Remerciements
  • PARTIE I : INTRODUCTION
  • 1 – Présentation de la recherche
  • 2 – Collecte des données et composition du corpus
  • 3 – Formes surcomposées et conscience linguistique
  • PARTIE II : HISTOIRE DU TRAITEMENT DES FORMES SURCOMPOSÉES
  • 4 – Comment approcher le paradigme surcomposé ?
  • 5 – Petite histoire normative des formes surcomposées
  • 6 – Principales études sur les formes surcomposées
  • PARTIE III : ANALYSE SÉMANTIQUE ET MORPHOLOGIQUE
  • 7 – Du temps et de l’aspect
  • 8 – Le passé surcomposé dit « standard » : un passé résultatif
  • 9 – Les autres surcomposés résultatifs
  • 10 – Le passé surcomposé dit « régional » : un parfait expérientiel
  • 11 – Les autres surcomposés expérientiels
  • 12 – Analyse morphologique
  • PARTIE IV : PISTES À EXPLORER ET CONCLUSION
  • 13 – Pistes de réflexion pour des études futures
  • 14 – Conclusion : une homonymie partielle
  • RÉFÉRENCES
  • Bibliographie
  • Webographie
  • Articles de presse commentant ou évoquant l’usage des surcomposés
  • Corpus consultés
  •  Corpus oraux
  •  Corpus écrits
  • Liste des tableaux de présentation des données
  • Liste des figures

Remerciements

Cet ouvrage est la version remaniée d’une thèse de doctorat réalisée en cotuelle entre l’Université de Fribourg (CH) et l’Université de Lorraine (FR) et soutenue le 7 juin 2019 à l’Université de Fribourg.1

Je souhaite remercier ici toutes celles et tous ceux qui m’ont épaulée, encadrée, conseillée et encouragée dans mon travail.

Je remercie chaleureusement mes directrice et directeur de thèse, la Prof. Françoise Revaz (Université de Fribourg) et le Prof. Denis Apothéloz (Université de Lorraine), pour leur soutien, leur confiance et leur enthousiasme, ainsi que pour tous les conseils, remarques et suggestions dont ils m’ont fait bénéficier durant toutes les années de rédaction de ma thèse.

Je remercie tout aussi chaleureusement les membres de mon jury de thèse, le Prof. Jacques Bres, le Prof. Laurent Gosselin et le Prof. Carl Vetters, pour leurs lectures attentives et critiques, pour leurs précieuses remarques, pour leur intérêt et leur bienveillance.

Je remercie le Prof. Louis De Saussure pour son expertise et les précieux conseils qu’il m’a donnés.

Je remercie la Prof. Marie-José Béguelin pour le temps qu’elle m’a consacré, pour les conseils dont elle m’a fait bénéficier, pour sa disponibilité et sa bienveillance.

J’exprime également ma reconnaissance envers mes collègues et ami·e·s des Universités de Fribourg, de Lausanne et de Neuchâtel, Virginie Conti, Gilles Corminboeuf, Frédéric Gachet, Richard Huyghe, Laure Anne Johnsen, Timothée Léchot, Alizée Lombard, Sandy Maillard, Matthieu Monney, Pascal Montchaud, Marjorie Mourey, Pauline Quarroz, Justine Roulin, Justine Salvadori, Martina Schlaepfer, Marion Uhlig, Arnaud Wydler et Géraldine Zumwald Küster, qui m’ont soutenue et encouragée. Merci pour les pages que vous avez relues, pour les exemples que vous m’avez fournis et pour tous les conseils que vous m’avez donnés.

Je remercie toutes celles et tous ceux qui m’ont aidée à traquer les coquilles et les maladresses dans mon travail. Un grand merci à Antoine Borel, Virginie Conti, Gilles Corminboeuf, Mary-Claude Faessler, Sandy Maillard, Marjorie Mourey, Justine Roulin, Nancy Vuillamoz, Arnaud Wydler et Géraldine Zumwald Küster. En particulier, un très grand merci à Catherine Borel, qui a relu l’ensemble de cet ouvrage avant sa publication.

Merci à Gwendoline Fox, qui a relu et corrigé mes traductions de l’anglais au français.

J’aimerais également remercier ici tous mes « informateurs » et toutes mes « informatrices », qui ont traqué et relevé sans relâche et avec conviction tous les surcomposés qui ont croisé leur chemin durant tout le temps qu’ont duré mes recherches. Un très grand merci à Antoine Borel, Catherine Borel, Pascal Borel, Stéphanie Borel, Annie Challandes, Camille Collaud, Timothée Léchot, Armel Matthey et Lisa Roulin pour leur aide inestimable dans ce long et minutieux travail de collecte.

Merci à tous les « surcomposeurs » et à toutes les « surcomposeuses » qui m’ont fourni à leur insu la matière de mes recherches : merci d’avoir augmenté, à chaque surcomposé que vous avez produit, non seulement mon corpus mais également, très souvent, mon taux de dopamine.

Enfin, j’aimerais adresser un merci tout particulier au Prof. Denis Apothéloz qui, une fois la soutenance passée, m’a accompagnée dans le long processus de retravail de ma thèse qui a mené à la publication de cet ouvrage. Merci, cher Denis, pour toutes les pages que vous avez lues (et très souvent relues), pour tous les précieux conseils que vous m’avez donnés, merci pour tous les échanges que nous avons eus, merci pour votre soutien, pour votre disponibilité et pour votre bienveillance : en un mot, merci d’avoir été, plus qu’un directeur de thèse, un véritable Doktorvater, comme le disent joliment les germanophones.


1 Cette recherche a été soutenue par le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) dans le cadre de la bourse de mobilité pour doctorant·e·s « Doc.Mobility » (P1FRP1–161698) ainsi que par la Conférence des Recteurs des Universités Suisses (CRUS) dans le cadre d’une contribution financière à la cotutelle de thèse (F14/05).

1 – Présentation de la recherche

1.1. Objectifs

La présente recherche vise trois objectifs principaux. Le premier est de réunir un grand nombre d’occurrences de formes surcomposées authentiques, écrites et orales, produites entre l’époque des premières attestations (fin du XIIe siècle) et l’époque actuelle. Ce travail de collecte, dont nous rendons précisément compte au Chapitre 2, nous a semblé fondamental pour permettre un regard nouveau sur les surcomposés. En effet, la difficulté de réunir des exemples authentiques explique qu’un certain nombre d’auteurs2 recourent à des exemples fabriqués, une démarche qui rend les analyses, qu’elles soient sémantiques ou morphologiques, peu fiables sur le plan scientifique. On trouve notamment, dans certaines études, des exemples forgés présentés comme « régionaux » qui semblent dissonants pour les locuteurs qui possèdent ces formes dans leur « grammaire ».

Même lorsqu’elles s’appuient sur des exemples authentiques, nombre de recherches se contentent de reprendre les exemples déjà cités dans des études précédentes. À titre d’illustration, la phrase « Quand Dieu m’a eu donné une fille, je l’ai appelée Noémi », tirée des Souvenirs d’enfance et de jeunesse de Renan (1883), est citée dans plus d’une vingtaine d’études pour illustrer le type dit « standard ».3 Et on compte presque autant de textes qui mentionnent, pour illustrer les emplois « régionaux », le fameux exemple de Foulet (1925) : « Il a eu coupé, ce couteau. »4 Ainsi, seul un corpus riche, varié et comportant des exemples inédits nous a semblé à même de renouveler le débat existant. En dix années de recherches, nous avons collecté 7413 exemples de surcomposés en français, auxquels s’ajoutent 315 exemples de formes dialectales (dialectes d’oïl, d’oc et francoprovençaux), le total s’élevant à 7728 occurrences.5

Le deuxième objectif a été de parcourir de la manière la plus systématique et la plus complète possible la littérature existant sur les surcomposés. Pour ce faire, nous avons systématiquement relevé, dans les travaux que nous avons lus, les études précédentes qui s’y trouvaient mentionnées. Nous les avons ensuite toutes consultées, en notant à chaque fois les références nouvelles. Nous avons ainsi pu dresser une « carte » des écrits scientifiques, des grammaires, des manuels scolaires ou des articles de presse qui ont traité, étudié ou simplement mentionné les surcomposés. Une fois ce réseau de références établi (plus de 500 sources différentes6), nous les avons relues dans l’ordre chronologique, de L’éclaircissement de la langue française de Palsgrave (1530) aux études les plus récentes, pour comprendre l’évolution des approches, des théories et des discussions. Cette recherche nous a permis de cerner au plus près l’histoire du traitement des surcomposés. Nous en proposons une synthèse dans la Partie II.

Enfin, notre troisième et principal objectif a été de réaliser une étude sémantique et morphologique des formes surcomposées (et hypercomposées) présentes dans notre corpus7, des plus répandues (j’ai eu fait, j’avais eu fait, etc.) aux moins courantes (j’eus eu fait, j’eusse eu fait, etc.). Cette analyse, que proposons dans la Partie III, constitue le cœur de notre recherche et de notre réflexion. Nous montrerons notamment qu’il existe deux paradigmes surcomposés distincts, qui contiennent des temps verbaux différents, lesquels possèdent, chacun, des caractéristiques sémantiques et morphologiques spécifiques.

1.2. Précisions terminologiques

Par commodité et par souci de clarté, nous avons gardé la nomenclature traditionnelle, à la fois pour nommer les temps verbaux simples et composés et pour étiqueter les différents temps surcomposés. Même si nous sommes consciente que ces étiquettes ne sont pas pleinement cohérentes, nous avons décidé, pour réduire les risques de mécompréhension, d’utiliser les appellations les plus usitées dans la littérature scientifique. De fait, nous nommons comme suit les différents temps surcomposés :

- J’ai eu fait : passé surcomposé
- J’avais eu fait : plus-que-parfait surcomposé
- J’aurai eu fait : futur antérieur surcomposé
- J’aurais eu fait : conditionnel passé surcomposé
- J’eus eu fait : passé antérieur surcomposé
- Que j’aie eu fait : subjonctif passé surcomposé
- J’eusse eu fait : subjonctif plus-que-parfait surcomposé
- Avoir eu fait : infinitif surcomposé
- Ayant eu fait : participe surcomposé
- Aie eu fait ! : impératif surcomposé

Le terme « surcomposé » désigne d’une part des formes verbales à la voix active comportant un auxiliaire (« avoir » ou « être »), le participe passé d’un de ces deux auxiliaires (« eu » ou « été ») ainsi que le participe passé du verbe conjugué. Ce terme renvoie de fait à des formes aussi diverses que j’ai eu fait, j’avais eu fait, j’ai été parti, je suis eu parti ou je me suis eu battu. Nous qualifions également de « surcomposées » des formes à la voix passive telles que j’ai eu été jugé ou j’avais eu été jugé. En revanche, nous ne considérons pas comme « surcomposées » les formes composées passives, telles que j’ai été jugé ou j’avais été jugé. Enfin, nous appelons « hypercomposées » les formes comportant deux participes passés auxiliaires à la voix active (j’ai eu eu fait, j’avais eu eu fait, j’ai eu été parti, etc.) et trois à la voix passive (j’ai eu eu été jugé, j’avais eu eu été jugé, etc.). Les termes « surcomposé » et « hypercomposé » sont des notions génériques, que nous utilisons pour désigner l’ensemble des formes correspondant à la description donnée ci-dessus. Ils ne renseignent ni sur le sens ni sur la fonction de ces formes.

Dans cet ouvrage, nous écrivons toutes les « formes de citation » (qui servent à illustrer la manière dont une forme verbale se construit) en italiques. Pour les verbes qui demandent l’auxiliaire « avoir », nous utilisons, pour la voix active, le verbe « faire ». Plus largement, nous employons ce même verbe pour illustrer la manière dont se construisent les différents temps surcomposés (ou hypercomposés). Par exemple, quand il s’agira de parler du passé surcomposé ou du plus-que-parfait surcomposé en tant que constructions verbales, nous utiliserons respectivement les formes de citation j’ai eu fait et j’avais eu fait. Pour exemplifier la manière dont les formes surcomposées se construisent avec l’auxiliaire « être », nous utiliserons le verbe « partir » : selon les cas, la forme de citation sera donc j’ai été parti ou je suis eu parti. Nous prendrons le verbe « juger » pour illustrer les surcomposés à la voix passive (j’ai eu été jugé). Enfin, nous nous servirons du verbe « se battre » pour les verbes pronominaux (je me suis eu battu). Lorsque nous nous référerons à des formes verbales ou à des séquences spécifiques, tirées d’exemples authentiques, nous les citerons en revanche entre guillemets (« quand Dieu m’a eu donné une fille », « il a eu coupé », etc.).

Nous avons également pris la décision de garder, dans les premiers chapitres de cet ouvrage, les étiquettes « standard » et « régional » pour désigner les deux emplois que connaissent le passé surcomposé et, comme nous le montrerons, les autres surcomposés. Une fois que nous aurons présenté et analysé plus en détail le sens de ces formes, nous utiliserons une terminologie plus technique et plus adaptée.


2 Par souci de lisibilité, nous employons dans tout cet ouvrage le masculin générique.

3 Notamment : Sneyders De Vogel (1919), Foulet (1925), Clédat (1926a et 1926b), Thérive (1929), Nyrop (1930), Gaiffe et alii (1936), Dauzat (1947), Delattre (1950), Février (1952), Georgin (1952), Cornu (1953), Lafitte-Houssat (1954), Humbert (1955), Souché & Lamaison (1955), Gamillscheg (1957), Le Bidois (1962), Wagner & Pinchon (1962), Le Bidois & Le Bidois (1967), Dupré (1972), Beaujot (1980a et 1980b) et Géa (1995).

4 Notamment : Clédat (1926b), De Boer (1927, 1933 et 1947), Frei (1929), Nilsson-Ehle (1953–1954), Christmann (1958), Gougenheim (1958), Wagner & Pinchon (1962), Guiraud (1965), Jolivet (1981), Ayres-Bennett & Carruthers (1992), Carruthers (1994), Géa (1995), Squartini (1998), Paesani (2001), Ammann (2007), Schaden (2009) et De Saussure & Sthioul (2012b).

5 Même si les dialectes d’oïl, d’oc et francoprovençaux sont naturellement des langues différentes du français, nous avons trouvé que, dans un certain nombre de cas, la comparaison entre les formes françaises et les formes dialectales offrait des éclairages intéressants (notamment, dans le cas des formes dites « régionales », sur la valeur expérientielle et/ou sur la manière dont cette valeur est traduite ou expliquée par les philologues).

6 Dans la bibliographie ne sont mentionnées que les études citées dans le présent ouvrage.

7 L’expression « notre corpus » (ou « le corpus ») renvoie à l’ensemble des exemples que nous avons collectés et sur lesquels est basée notre recherche.

2 – Collecte des données et composition du corpus

Le corpus sur lequel se base cette recherche contient 7413 exemples de formes surcomposées et hypercomposées en français, tous authentiques, écrits et oraux, qui ont été collectés entre janvier 2013 et mars 2023. Dans ce corpus, les différents temps surcomposés sont représentés comme suit :

Verbes à auxiliaire « avoir » Verbes à auxiliaire « être » Formes pronominales Formes passives TOTAL
Passé surcomposé 5256 360 262 145 6023
Plus-que-parfait surcomposé 310 42 7 1 360
Futur antérieur surcomposé 147 1 0 2 150
Conditionnel passé surcomposé 234 5 0 0 239
Passé antérieur surcomposé 23 6 0 0 29
Subjonctif passé surcomposé 94 6 0 2 102
Subjonctif plus-que-parfait surcomposé 32 12 0 0 44
Infinitif surcomposé 255 5 0 5 265
Participe surcomposé 171 1 0 2 174
Impératif surcomposé 0 0 0 0 0
Formes hypercomposées 18 8 1 0 27
TOTAL 6540 446 270 157 7413
Tableau 1 :Nombre d’exemples authentiques collectés pour chaque temps verbal et chaque type de verbe (données écrites et orales confondues, formes standard et régionales confondues)

2.1. Sources des données écrites

Les données écrites, produites entre la fin du XIIe siècle et le début du XXIe siècle, ont été collectées grâce :

  • Au moteur de recherche Google
  • Au corpus Frantext
  • Aux études scientifiques préalablement réalisées
  • À nos lectures personnelles
  • Au corpus sms4science

Dans le présent chapitre sera présentée la manière dont ces données ont été collectées. Puis, pour chaque source, les éventuels problèmes ou questionnements rencontrés seront discutés.

2.1.1. Google

Le moteur de recherche Google permet d’accéder à différents types d’exemples, qu’il convient de distinguer. Premièrement, Google donne accès à des textes ayant préalablement été publiés sous format papier. Lorsque nous jugeons l’information utile, nous indiquons, en plus du nom de l’auteur, du titre de l’ouvrage et de l’année de publication, le site Internet consulté :

  1. (1) Quel affront pour l’ancien, sa femme et Loïse ! Le feu du ciel serait tombé sur l’église qu’ils n’auraient pas été plus secoués ! C’est qu’il n’y a pas à dire : on a eu vu pour bien moins des gens d’âge mourir d’un coup de sang et des jeunesses prendre des « crises ». (Huguenin, Récits du Cosandier, 1890 < www.ebooks-bnr.com)8

Internet peut ensuite servir de support parallèle à une impression papier. C’est souvent le cas pour les articles de la presse contemporaine. Dans certains cas, la version en ligne et la version imprimée sont les mêmes ; dans d’autres cas, il peut s’agir de versions différentes. Pour cette raison, la référence précise si l’exemple cité provient du site Internet du journal :

  1. (2) Dans son histoire, le stade « Olympique » de la Pontaise a eu accueilli plus de 15’000 spectateurs […]. (24 heures, 8 déc. 2011 < http://archives.24heures.ch)

Enfin, Internet est parfois l’unique support de la publication. Les textes sont alors de natures extrêmement variables. Parfois, dans le cas des textes édités en ligne (revues scientifiques, thèses de doctorat, romans d’auteurs contemporains, etc.), le contenu a été travaillé, relu et corrigé. Dans d’autres cas, notamment celui des blogs, les textes semblent avoir été plus ou moins retravaillés et retouchés par leurs auteurs, mais ces textes n’ont pas été « validés » par des instances extérieures (comités scientifiques ou maisons d’édition). Enfin, dans le cas des forums de discussion, le propos se fait plus spontané encore. Quoi qu’il en soit, pour tous ces exemples, sont indiqués l’année de la mise en ligne (quand elle est connue), le site Internet, ainsi que la date (mois et année) à laquelle l’exemple a été consulté :

  1. (3) Lorsque j’ai eu achevé cette photo, il m’a semblé qu’elle ressemblait au Japon, du moins à l’idée […] que je me fais du Japon. (2011, http://bwiti.deviantart.com, consulté en avril 2013)

Des informations supplémentaires peuvent être données, à propos du type de texte (ex. 4), du profil de l’auteur ou du contexte communicationnel (ex. 5) :

  1. (4) Une fois que le Japon a eu adopté une structure similaire aux états-nations occidentaux, le développement de son capitalisme […] fut beaucoup plus rapide, puisqu’accompli en quelques dizaines d’années, là où les pays occidentaux avaient mis plus d’un siècle. (La comparaison franco-japonaise du contrôle des concentrations, thèse de doctorat en droit, Université de Paris V, 2013 < http://tel.archives-ouvertes.fr, consulté en mai 2013)
  2. (5) L1 [un internaute] : T’as déjà eu des amendes d’excès de vitesse ? L2 [le coureur automobile Sébastien Buemi] : Ҫa m’est eu arrivé mais pas beaucoup, une dizaine. (Discussion en ligne impliquant le coureur automobile Sébastien Buemi, 2009, www.20min.ch, consulté en mai 2015)

Les exemples tirés d’Internet sont cités avec les graphies d’origine. Pour ces exemples, la mention « sic » n’est pas employée – le nombre de graphies non standard étant trop élevé pour que cette indication soit pertinente. Les éventuelles images ou émoticônes présentes dans les textes ne sont pas reproduites.

Bien qu’extrêmement efficaces et fructueuses, les recherches sur Internet ont occasionné un certain nombre de difficultés et de questionnements. Une première difficulté réside dans le choix des mots-clefs à utiliser. Dans le cas des surcomposés, plusieurs démarches sont susceptibles d’être adoptées. Il est tout d’abord possible de proposer au moteur de recherche des séquences du type « eu + participe passé » (« eu chanté », « eu mangé », etc.). Cette démarche a l’avantage de prendre en compte les diverses formes du paradigme, aux différents temps et aux différentes personnes (« il aura eu chanté », « j’eusse eu mangé », etc.), d’intégrer les formes comportant des éléments insérés entre l’auxiliaire « avoir » et le « eu » (« j’ai souvent eu chanté », « il a bien eu mangé », etc.) et de recueillir des exemples dans lesquels le pronom clitique et/ou la première forme auxiliaire sont graphiés de manière non standard, tels que « g » pour « j’ai » (ex. 6) ou « ta » pour « tu as » (ex. 7) :

  1. (6) Il s’est mis à table 5 minutes après que g eu amené l’assiette. (2004, www.familles.com, consulté en juil. 2013)
  2. (7) Ouaip, ta eu fait des choses plus inteligente ma lucette. (2006, www.forumpv.tonsite.biz, consulté en oct. 2016)

Cette façon de procéder ne permet toutefois pas de prendre en compte les cas où des éléments se trouveraient insérés entre le « eu » et le participe passé du verbe conjugué (« il a eu vite fini », « il a eu bientôt terminé », etc.) ni les cas où le (éventuellement les) participe(s) passé(s) serai(en)t accordé(s), comme en (8) ou en (9) :

  1. (8) J’aime plus trop les hommes… Mais quand je les ai eu aimés, je préfèrais les tendres. (2012, http://forum.doctissimo.fr, consulté en oct. 2013)
  2. (9) Des erreurs j’en ai eues faites & j’en ferai encore, ça m’apprend pour ce sport [le bodybuilding] mais aussi dans la vie. (Non daté, www.imgrum.net, consulté en oct. 2016)

De plus, de telles recherches ne peuvent prendre en compte les formes comportant des participes passés graphiés « à l’ancienne » (ex. 10) ou de façon non standard (ex. 11) :

  1. (10) Quoy Madame, s’écria-t’il, vous pouvez m’accuser d’avoir espousé Argyrispe, apres que vous avez eu espousé Sitalce ! (Mlle de Scudéry, Artamène ou le Grand Cyrus, 1654)
  2. (11) Pour la mienne [ma chienne] j’ai eu prit la marque dog show que j’ai changer au bout du premier sac (elle arreté pas de se gratter) je suis donc passer sur du royal canin. (2010, www.chevalannonce.com, consulté en oct. 2016)

Enfin, ce procédé n’offre pas de résultats probants pour les verbes dont les participes passés sont des formes morphologiquement brèves, c’est-à-dire trop peu « spécifiques » pour le moteur de recherche. Ainsi, une requête comme « eu vu » donne 381’000 résultats sur Google (essai fait en octobre 2022), mais l’immense majorité de ces résultats ne sont pas pertinents pour l’étude des surcomposés – une des raisons étant que les lettres EU sont l’acronyme de European Union :

  1. (12) Vietnamese Ambassador to Belgium and Luxemburg, and head of the Vietnamese Delegation to the EU Vu Anh Quang highlighted the deals’ contributions to stepping up Vietnam’s economic reform and integration. (2019, https://en.vietnamplus.vn, consulté en oct. 2022)

Afin de produire des résultats probants pour les formes trop peu spécifiées, des formes complètes ont donc été proposées (« aura eu bu », « eusse eu vu », etc.).

Résumé des informations

Pages
622
Année
2024
ISBN (PDF)
9783034348102
ISBN (ePUB)
9783034348119
ISBN (Broché)
9783034347136
DOI
10.3726/b21447
Open Access
CC-BY
Langue
français
Date de parution
2024 (Août)
Mots clés
Temps verbaux Formes verbales surcomposées Sémantique et morphologie des temps verbaux
Published
Lausanne, Berlin, Bruxelles, Chennai, New York, Oxford, 2024. 622 S., 9 s/w Abb., 8 Tab.

Notes biographiques

Marine Borel (Auteur)

Marine Borel, docteure en linguistique française, est lectrice au Romanisches Seminar de l’Université de Zurich et chargée de cours aux Universités de Bâle et de Fribourg. Ses enseignements et ses recherches portent notamment sur la morphologie et la sémantique des temps verbaux, ainsi que sur les particularités du français de Suisse romande

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Titre: Les formes verbales surcomposées en français