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L’amour divisé. Discours Académique.

en annexe: Guidobaldo Bonarelli, In difesa del doppio amore della sua Celia

by Daniela Dalla Valle (Editor) Charles Vion d'Alibray (Author)
©2024 Others 384 Pages
Series: Franco-Italica, Volume 11

Summary

Paru en 1653, le discours « L’Amour divisé » de Charles Vion d’Alibray est la première traduction d’un « Discorso » de Guidobaldo Bonarelli « In difesa del doppio amore della sua Celia », sorti en 1612. Celia est une nymphe de la pastorale Filli di Sciro du même Bonarelli, un texte qui eut un grand succès tout au long du XVIIe siècle, en Italie et en France. Elle tombe amoureuse de deux jeunes hommes qui l’ont sauvée d’un centaure, les aime tous les deux « également et parfaitement », et envisage même de se suicider à cause de son incertitude. Cette trouvaille relative au double amour de la nymphe suscita aussitôt une polémique, à laquelle l’auteur répondit par son « Discorso ». La traduction française, qui abrège et adapte le texte original, est la dernière publication de Vion d’Alibray, et s’inscrit parfaitement dans son idéologie théâtrale, dont ses écrits antérieurs témoignent.

Table Of Contents

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos de l’auteur
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Table des matières
  • Introduction
  • Notre édition
  • L’amour divisé. Discours academique.
  • Aux dames.
  • Lettre à trois Dames.
  • Sonnet.
  • Extraict du Privilege du Roy.
  • Annexe. Guidobaldo Bonarelli, Discorsi
  • Index des noms

Introduction

Écrivain mineur et homme de lettres né autour de 1600 et mort après 1653, Charles Vion d’Alibray a été un éminent théoricien du théâtre et occupe une place assez importante dans les querelles dramatiques qui précèdent la ‘querelle du Cid’. Possédant une bonne connaissance du théâtre italien de l’époque, Vion en traduit quelques œuvres, choisies en tant qu’‘exemples’ proposés au public français : des ‘modèles’ à imiter, loués et commentés dans de longues préfaces1. J’ai analysé, commenté et publié ses traductions des deux œuvres dramatiques du Tasse, l’Aminta et le Re Torrismondo. Je me suis occupée aussi de la pastorale Le pompe funebri de Cesare Cremonini et du dernier texte théâtral italien traduit par Vion, la tragédie Solimano de Prospero Bonarelli, qu’il a transformé en tragi-comédie2. Publié en 1637, son Soliman coïncide avec la représentation et le succès fulgurant du Cid, qui détermine un renouvellement manifeste de la dramaturgie française et pousse Vion à délaisser la recherche des modèles dramatiques italiens pour se tourner vers d’autres domaines, comme la prose italienne, la littérature espagnole et la poésie lyrique. Une quinzaine d’années plus tard, Vion fut toutefois séduit, une fois encore, par les textes dramatiques italiens qu’il avait tant aimés, portant son attention sur la pastorale de Guidobaldo Bonarelli Filli di Sciro (1605). Plutôt que d’en donner une traduction, opération dont d’autres italianisants s’étaient déjà chargés3, il se concentre cette fois sur un texte théorique en prose, écrit par Bonarelli au sujet d’un aspect particulier de sa Filli: le Discours académique In difesa del doppio amore della sua Celia. Ce Discours, lu par Bonarelli à Ferrare au sein de l’Académie des Intrépides, fut publié en 1612, après la mort de Guidobaldo, par les soins de son frère Prospero Bonarelli4. Ayant eu connaissance de ce texte, Vion en fait une traduction partielle, en y apportant quelques changements : il s’agit de sa dernière œuvre, qu’il publie à Paris en 1651, sous le titre L’amour divisé. J’en propose ici la lecture, reproduisant l’édition Guignard 16535, identique à l’édition 1651.

La Filli di Sciro et son succès en France

La Filli di Sciro est la seule pièce dramatique de Guidobaldo Bonarelli, représentée en 1605 et publiée en 1607 à Ferrare chez l’éditeur Vittorio Baldini. Elle remporta un succès considérable dans le domaine pastoral de l’époque, figurant aux côtés de l’Aminta et du Pastor Fido comme l’une des trois plus belles pastorales italiennes6. L’édition moderne à laquelle je vais faire référence est celle établie par Giovanni Gambarin, publiée chez Laterza dans les “Scrittori d’Italia” en 19417.

Aussi bien qu’en Italie, la Filli connut en France un succès prolongé. Elle fut traduite à de nombreuses reprises tout au long du XVIIe siècle et dans la première partie du XVIIIe. La première traduction anonyme, imprimée à Toulouse, remonte à 1624 et j’ai lieu de supposer qu’elle est l’œuvre d’Antoine de Giraud8; puis vint la traduction de Simon Du Cros, publiée en 16309; ensuite, celle de Pichou, sortie en 163110. Plus tard, après l’édition de notre Amour divisé, fut publiée en 1667 la traduction du premier acte de la Filli par les soins de A.B.D.S., vraisemblablement Antoine Baudeau de Somaize11. Deux années plus tard date la traduction de l’abbé de Torche12, republiée chez Jean Ribou en édition monolingue et bilingue (1669). Pour ce qui concerne le siècle suivant, je me limiterai ici à citer la traduction de Louis François Dubois de Saint-Gelais (1707), sur laquelle je reviendrai.

Il convient encore d’ajouter que dans les querelles des premières décennies du XVIIe siècle que j’ai évoquées, la Filli est souvent indiquée comme un ‘modèle’ du nouveau type de théâtre que proposaient quelques dramaturges et théoriciens français, y compris Vion d’Alibray, en opposition avec la tragédie érudite du XVIe siècle13.

La bibliographie critique concernant le succès de la Filli en France est cependant assez restreinte. Elle comprend la très ancienne étude d’Émile Roy, Les premiers cercles du XVIIe siècle. Mathurin Régnier et Guidobaldo Bonarelli della Rovere14; mon article La fortune française de la Filli di Sciro au XVIIe siècle15, repris dans mon volume Aspects de la pastorale dans l’italianisme du XVIIe siècle16; le chapitre sur Bonarelli dans le volume Voyage en Arcadie de Daniela Mauri17 et l’étude plus récente de Danielle Boillet sur Les premières traductions françaises de la Filli di Sciro de Guidobaldo Bonarelli18.

Aucune de ces études ne s’est occupée à fond du Discorso de Bonarelli sur le Doppio amore, ni de l’Amour divisé de Vion d’Alibray. Leur existence y est parfois mentionnée, mais la comparaison entre les deux textes, et donc le sens de l’opération de Vion, ont été régulièrement ignorés.

Le personnage de Celia dans la Filli di Sciro

L’un des premiers problèmes posés par le Discorso de Bonarelli, et ensuite par L’amour divisé de Vion d’Alibray, est celui de l’importance accordée dans la Filli di Sciro à un personnage secondaire de la pastorale, Celia.

Tout en étant une bergère qui vient au second rang dans l’intrigue, Celia présente une caractéristique singulière qui frappa manifestement les lecteurs et les spectateurs de l’époque, si bien que l’auteur éprouva la nécessité d’élaborer son Discorso pour défendre ce trait particulier de sa pièce. Il construisit ainsi un discours académique très cultivé et argumenté autour du doppio amore qui s’empare de Celia, au même instant et avec une égale intensité, ayant pour objet deux bergers, Niso et Aminta. Les deux bergers sont rentrés ensemble dans la vie de Celia : tous deux ont risqué leur vie pour la soustraire à l’agression d’un centaure, tous deux l’ont aimée au même instant et ne cessent de l’aimer, mais aucun des deux ne possède un mérite, une qualité, une différence qui puisse emporter la préférence de Celia. Elle les a vus ensemble, les a appréciés pour la même raison et les a aimés de la même manière. Entre les deux, elle oscille, hésite et ne peut se résoudre à en choisir un au détriment de l’autre. Face à ce dilemme, la seule solution possible qui se présente à Celia, désespérée, est celle de se suicider. À la fin de la pièce, on découvre cependant que l’un des deux bergers, Niso, est en fait le frère de Celia, qui pourra donc choisir Aminta.

Ce trait psychologique a une telle incidence dans les différents moments de l’action et dans les dialogues dolents de Celia avec les autres personnages, qu’il devient l’aspect le plus saillant de la pastorale, même s’il ne concerne pas la protagoniste. Dubois de Saint-Gelais, traducteur de la Filli en 1707, s’étonne de cette discordance manifeste:

On pourroit neanmoins reprendre le Bonarelli de n’avoir fait qu’un personnage épisodique de celui de Celie qui a tant de part à cette Pastorale, et qui semble lui avoir donné toute sa réputation […]. Peut-être aussi qu’il n’y a pas pris garde, et que plein de la nouveauté du caractère qu’il donne à Celia, il n’a pensé qu’à le remplir19.

Dubois de Saint-Gelais était en fait bien plus intéressé par le Discorso de Bonarelli que par la pastorale elle-même ; c’est le Discorso qu’il traduit en premier, élaborant ensuite une nouvelle traduction de la Filli, puisque les traductions précédentes lui apparaissaient désormais inadéquates.

Le Discorso de Guidobaldo Bonarelli eut donc deux traductions françaises à distance d’un demi-siècle l’une de l’autre: celle de Vion et ensuite celle de Dubois de Saint-Gelais20. Dans l’étude du rapport multiforme et complexe de la culture du XVIIe siècle avec le genre féminin, ce Discorso et ses traductions n’ont jamais, à ma connaissance, été mentionnés21. C’est pourquoi il m’a semblé utile de revenir aujourd’hui sur la première traduction du Discorso de Bonarelli, L’amour divisé de Vion, afin d’apporter dans ce domaine une modeste contribution.

Le Discorso de Bonarelli22

Le Discorso de Guidobaldo Bonarelli est divisé en deux Parties (Parte prima et Parte seconda). La première partie comprend trois Capi, chacun d’entre eux subdivisé en particelle (de la page 5 à la page 71); la seconde comprend cinq Capi, eux aussi subdivisés en particelle (de la page 72 à la page 221).

La première Partie se propose de traiter “des choses plus générales” (p. 5). Le premier Capo, qui est le plus court, décrit “l’amour de Celia” (p. 5); le deuxième, “les raisons de l’amour double” (p. 9); le troisième, “le sujet poétique” (p. 50). Dans l’élaboration de cette partie, Bonarelli prend appui sur une imposante série de textes philosophiques et poétiques, le plus souvent signalant en marge ses références.

Details

Pages
384
Publication Year
2024
ISBN (PDF)
9783034347556
ISBN (ePUB)
9783034347563
ISBN (Softcover)
9783034347549
DOI
10.3726/b21394
Language
French
Publication date
2024 (August)
Keywords
Baroque littéraire langue et littérature française du XVIIe siècle langue et littérature italienne du XVIIe siècle rapports entre la culture italienne et la culture française au XVIIe siècle rapports de la littérature italienne et française du XVIIe siècle avec la culture classique.
Published
Lausanne, Berlin, Bruxelles, Chennai, New York, Oxford, 2024. 384 p.
Product Safety
Peter Lang Group AG

Biographical notes

Daniela Dalla Valle (Editor) Charles Vion d'Alibray (Author)

Daniela Dalla Valle, professeur de Littérature française et de Littérature comparée, a consacré son travail scientifique à la naissance du Baroque littéraire en France et au théâtre français du XVIIe siècle ainsi qu’au rapport entre la littérature française et la littérature italienne et espagnole.

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