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Agir en situation interculturelle

Quelles compétences lorsque l’international s’invite à la maison ?

de Cécilia Brassier-Rodrigues (Éditeur de volume)
©2023 Collections 234 Pages
Série: Transversales, Volume 51

Résumé

La compétence Agir en situation interculturelle (ASI) répond à un besoin initial formulé par un groupe d’enseignants de l’Université Clermont Auvergne : valoriser les apprentissages interculturels d’étudiants qui participent à des dispositifs pédagogiques s’inscrivant dans une démarche d’internationalisation à la maison. Ne trouvant pas d’instrument permettant de rendre compte de ce développement, ils ont construit un dispositif sur mesure. Il a pris la forme d’une compétence qui a vocation à être déployée comme un outil d’évaluation pédagogique. Les premiers chapitres de l’ouvrage reviennent d’abord sur la manière dont ce groupe d’enseignants, accompagné d’une conseillère pédagogique, a formé une communauté de pratique et a construit la compétence ASI, son système d’évaluation et un ensemble d’outils facilitant son déploiement. Ensuite, quatre chapitres présentent la manière dont la compétence a été utilisée dans des environnements pédagogiques diversifiés, en mobilisant des pratiques pédagogiques variées (des échanges virtuels, le parrainage d’étudiants internationaux). Cet ouvrage s’adresse ainsi aux enseignants-chercheurs et aux enseignants désireux d’accompagner le développement de la compétence interculturelle chez leurs étudiants, quelle que soit leur discipline, dans des enseignements proposés à la maison. Il s’adresse également aux conseillers pédagogiques souhaitant comprendre comment accompagner une équipe d’enseignants qui veut construire une compétence. Enfin, même s’ils ne sont pas le public-cible, cet ouvrage pourrait intéresser les étudiants désireux de développer leurs compétences interculturelles. Ils découvriront comment ils peuvent devenir acteurs de leur parcours d’internationalisation en valorisant chaque expérience et en l’intégrant dans leur capital de mobilité.

Table des matières

  • Couverture
  • Titre
  • Copyright
  • À propos du directeur de la publication
  • À propos du livre
  • Pour référencer cet eBook
  • Sommaire
  • Introduction générale (Cécilia Brassier-Rodrigues)
  • CHAPITRE 1 L’approche par compétences, définition et cadre de mise en œuvre (Pascal Brassier et Sophie Serindat)
  • CHAPITRE 2 Construire la compétence Agir en situation interculturelle dans une communauté de pratique : aspects méthodologiques (Cécilia Brassier-Rodrigues et Sophie Serindat)
  • CHAPITRE 3 La compétence Agir en situation interculturelle : présentation et guide d’utilisation (Cécilia Brassier-Rodrigues)
  • CHAPITRE 4 Intégrer la compétence Agir en situation interculturelle dans un dispositif de télécollaboration en cours de langue étrangère (Ciara R. Wigham)
  • CHAPITRE 5 L’utilisation de la compétence Agir en situation interculturelle dans le cadre de l’accueil des étudiants étrangers (Stéphanie Lamaison)
  • Chapitre 6 Préparer les étudiants à la mobilité internationale en développant leur capacité à Agir en situation interculturelle (Cécilia Brassier-Rodrigues)
  • CHAPITRE 7 Compétence Agir en situation interculturelle et International Business. L’approche par compétences pour le management international (Pascal Brassier)
  • Conclusion générale (Cécilia Brassier-Rodrigues)
  • Bibliographie générale
  • Présentation des Contributeurs.trices
  • Titres de la collection

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Cécilia BRASSIER-RODRIGUES

Introduction générale1

Il y a plusieurs années, je n’ai pas pu cacher ma surprise face à la rédactrice en chef d’un journal de la presse quotidienne régionale qui me disait que, lorsqu’elle recevait des candidatures pour un poste à pourvoir, le curriculum vitae des personnes ayant réalisé une mobilité internationale attirait d’emblée son attention. J’étais étonnée parce qu’à ce moment-là les séjours à l’étranger étaient valorisés essentiellement par les entreprises ayant besoin de candidats parlant plusieurs langues étrangères. Or, ce n’était pas le cas dans cette situation. En réalité, parce qu’elle était elle-même partie à l’étranger dans le cadre du programme Erasmus, cette manager avait conscience des bénéfices que l’on pouvait tirer de cette expérience, au-delà de l’apprentissage d’une langue étrangère. Elle a ainsi évoqué le développement du sens de l’autonomie et des responsabilités, la capacité renforcée à travailler dans des équipes pluriculturelles, etc. Ces impacts directs et indirects de la mobilité internationale ont donné lieu, ces dernières années, à de nombreux travaux. Les uns ont examiné la manière dont l’immersion en environnement interculturel développerait l’employabilité des étudiants, ainsi que leur capacité à créer du lien social (Brassier-Rodrigues, 2015 ; Crescenzi et al., 2016 ; Dokou et al., 2021 ; Mikhaylov, 2014 ; Souto-Otero et al., 2019 ; Wolff et Borzikowsky, 2018). D’autres se sont intéressés à l’identification des compétences développées à l’occasion des mobilités internationales, à leur reconnaissance, à leur validation et à leur valorisation (Blons-Pierre, 2016 ; Brassier-Rodrigues, 2016). Parmi elles, la compétence interculturelle a suscité un engouement2. Elle demeure ←7 | 8→pourtant « une notion aux contours souvent flous qui regroupe des attitudes, traits de personnalité, connaissances et aptitudes qui permettent à l’individu de faciliter sa communication ou son interaction avec des individus venant d’autres environnements culturels » (Barmeyer et Davoine, 2012, p. 64).

Dans les années 2010, l’internationalisation des étudiants dans l’enseignement supérieur a connu une accélération. En 2018, 5,6 millions d’étudiants ont réalisé une mobilité diplômante dans le monde, soit une augmentation de 31 % en cinq ans3. Les campus sont devenus internationaux, des universités européennes ont vu le jour. Dans le même temps, une réflexion globale sur la qualité et l’impact des mobilités elles-mêmes s’est engagée (Alexiadou et al., 2021 ; Ballatore, 2017 ; Calmand et al., 2018 ; Lima et al., 2019 ; de Hei et al., 2020 ; Dervin, 2016 ; Fantini, 2020 ; Hammersley et al., 2018 ; Mittelmeier et al., 2020 ; Robson et Wihlborg, 2019 ; Roy et al., 2018 ; Teichler, 2017 ; Van Mol et al., 2021), prenant appui sur des études antérieures réalisées dans les domaines de l’anthropologie des mobilités et de la didactique des langues, des cultures et de l’interculturel (Zarate et Gohard-Radenkovic, 2004 ; Kohler-Bally, 2001 ; Murphy-Lejeune, 2003 ; Papatsiba 2003; Anquetil, 2006 ; Gohard-Radenkovic, 2009). Des aspects critiques émergent, ils pointent du doigt les dérives de la « toute-mobilité » (Gohard-Radenkovic, 2017). Des voix s’élèvent contre la surenchère autour de la mobilité (Gohard-Radenkovic et Veillette 2015), autour de l’hypermobilité (Dervin et Ljalikova, 2007) ou encore de l’hypomobilité (Dervin, 2007). Des études s’intéressent aux étudiants dits « immobiles » (Finn et Darmody, 2017), elles soulèvent des questions éthiques (Buckner et Stein, 2020), elles révèlent les coûts environnementaux des mobilités internationales étudiantes (Shields, 2019) et elles invitent les établissements d’enseignement supérieur (EES) à prendre tous ces éléments en considération dans leur politique de développement durable.

Puis, en 2020, la crise sanitaire a freiné fortement les mobilités physiques et les EES ont finalement été contraints à repenser leur ←8 | 9→stratégie d’internationalisation. C’est alors qu’une transformation, engagée pourtant depuis plusieurs années, a suscité de l’intérêt : il s’agit de l’internationalisation à la maison (IALM). Elle est définie comme « un ensemble d’instruments et d’activités à la maison qui visent à développer les compétences internationales et interculturelles chez tous les élèves » (Beelen et Leask, 2011, p. 5). Depuis le début des années 2000, à côté des traditionnelles mobilités en étude ou en stage, des dispositifs pédagogiques permettent aux étudiants de s’internationaliser tout en restant dans leur université d’origine. Par exemple, il y a IALM lorsque l’on met en place un échange virtuel (de type télécollaboration ou équipe virtuelle internationale) et que des étudiants travaillent, à distance, pendant plusieurs semaines avec des étudiants d’une université à l’étranger. Il y a également IALM lorsque l’on organise localement un cours qui permet de faire interagir de manière prolongée et encadrée des étudiants locaux et des étudiants étrangers venus passer un semestre, une année ou tout un cycle de formation dans l’université. Par des mises en situation variées, les pratiques relevant de l’IALM sont susceptibles de favoriser les interactions interculturelles et d’accompagner le développement de compétences transversales d’étudiants qui n’envisagent pas forcément une mobilité à l’étranger. Alors que jusque-là, ces dispositifs étaient isolés dans les EES, ils sont désormais affichés dans la stratégie d’internationalisation des établissements (Robson, 2017). Les bénéfices tirés des interactions interculturelles peuvent dès lors profiter à un plus grand nombre, notamment s’adresser aux étudiants immobiles que des raisons financières, organisationnelles, personnelles, etc. empêchent de partir en mobilité (Finn et Darmody, 2017 ; Salisbury et al., 2011 ; Smith et Khawaja, 2011). Ils représentent plus de 90 % des étudiants. La littérature scientifique s’est également emparée du sujet de l’IALM. Des études rapportent des expériences se déroulant dans un contexte national et culturel particulier (Choi et Khamalah, 2017 ; Custer et Tuominen, 2017). Les comparaisons de dispositifs entre pays se mettent en place (Almeida et al., 2019 ; Robson et al., 2017). Des travaux réalisés ces dernières années montrent aussi que les pratiques pédagogiques associées à l’IALM favoriseraient chez les ←9 | 10→étudiants le développement d’une sensibilité interculturelle, notamment grâce aux interactions et aux mises en situation induites par les activités (Brassier-Rodrigues et Brassier, 2021). Ils révèlent que celles-ci contribueraient à enrichir la palette de compétences interculturelles des étudiants (Ramanau, 2016 ; Soria et Troisi, 2014 ; Watkins et Smith, 2018 ; Wilhem, 2010).

Et pourtant, alors que de nombreux arguments plaident aujourd’hui en faveur de l’intégration de l’IALM dans les EES, il manque des outils pour apprécier et valoriser le développement interculturel des étudiants qui vivent des immersions internationales à la maison. Une ligne sur un CV ne suffit pas pour faire comprendre à un recruteur qu’un étudiant a développé des compétences en réalisant un échange virtuel ou en ayant participé à une télécollaboration en langue étrangère pendant plusieurs mois. De même, les différents outils construits ces dernières années pour mesurer la compétence interculturelle s’appliquent difficilement dans le cas de l’IALM. Qu’il s’agisse des échelles de mesure de traits de personnalité, des assimilateurs de culture ou de méthodes d’évaluation de la performance passée (Bartel-Radic, 2009), ces outils s’appuient sur une action de l’étudiant ou de l’enseignant. Or parfois, ni l’un ni l’autre ne pensent à évaluer de telles compétences dans le cadre des activités d’IALM, car ils n’ont pas conscience de les avoir développées (pour les étudiants) ou d’en avoir accompagné le développement (pour les enseignants). Ainsi, j’ai pu constater, tout au long de mes années d’enseignante mais également en tant que responsable des relations internationales, que les apprentissages tirés des expériences interculturelles réalisées à la maison ne sont pas identifiés spontanément par l’étudiant, parce qu’il n’a pas conscience d’avoir vécu une forme d’internationalisation dont il peut parler à un employeur. Un travail doit donc être entrepris pour rendre visibles et valoriser auprès des étudiants et des enseignants, mais aussi rendre visibles et valoriser auprès des employeurs, les apprentissages acquis par les étudiants lors de pratiques relevant de l’IALM et, ce faisant, montrer qu’une compétence interculturelle est en cours de développement.

C’est le constat qui m’a incitée en janvier 2020 à constituer une équipe au sein de l’Université Clermont Auvergne (UCA) et à répondre à l’appel à projets du Learn’in Auvergne :

←10 | 11→il s’agit d’un « programme transverse du projet CAP 20–254 qui accompagne les enseignants dans la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des innovations pédagogiques et numériques. Il vise à contribuer à l’attractivité des formations de l’UCA et de ses partenaires en privilégiant des enseignements efficaces et interactifs »5.

Avec quatre collègues déjà impliqués dans des pratiques d’IALM, nous avons décidé de construire une Compétence liée à l’Internationalisation à la Maison. Le projet CIALM a ainsi pris naissance. Notre objectif était de développer une évaluation de l’apprentissage des acquis interculturels des étudiants lorsqu’ils s’engagent dans une pratique d’IALM, qui serait évolutive et pourrait les accompagner tout au long de leur parcours universitaire. Notre projet s’inscrivait également dans le contexte de définition des compétences initié en licence et en master6, afin que celle que nous construirions puisse être articulée avec les référentiels que chaque formation devrait développer à l’avenir.

Un groupe de travail s’est mis en place, composé de personnels de l’UCA : une conseillère pédagogique et quatre enseignants qui déployaient (parfois sans le savoir) des dispositifs pédagogiques mettant en œuvre des pratiques pédagogiques variées d’IALM (trois enseignants-chercheurs et la directrice du service des Relations internationales et de la Francophonie). Entre avril et juillet 2020, ce groupe a construit la compétence Agir en situation interculturelle ←11 | 12→(ASI), que l’on peut considérer comme une déclinaison de la compétence interculturelle adaptée aux pratiques d’IALM7. En 2020–2021, elle a été testée dans quatre enseignements et deux programmes. En juin 2021, elle a été revue et consolidée sur la base des tests réalisés. Dans cet ouvrage, en sept chapitres, nous expliquons le processus de construction de cette compétence et nous illustrons son utilisation dans plusieurs contextes pédagogiques.

Résumé des informations

Pages
234
Année
2023
ISBN (PDF)
9782807619845
ISBN (ePUB)
9782807619852
ISBN (Broché)
9782807619838
DOI
10.3726/b20431
Langue
français
Date de parution
2023 (Février)
Published
Berlin, Bern, Bruxelles, New York, Oxford, Warszawa, Wien, 2023. 234 p., 28 ill. n/b, 4 tabl.

Notes biographiques

Cécilia Brassier-Rodrigues (Éditeur de volume)

Cécilia BRASSIER-RODRIGUES est Maître de conférences (Université Clermont Auvergne – France). Elle travaille sur des dispositifs sociotechniques qui facilitent la communication interculturelle entre porteurs de cultures différentes.

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